(Décision commentée)
La divulgation d’informations confidentielles peut contribuer au débat public, s’agissant en l’espèce de données sur les pratiques fiscales des sociétés multinationales portant sur d’importants enjeux économiques et sociaux.
Une infirmière employée en gériatrie (maison de repos) entame une action pénale contre son employeur pour abus de confiance (annonces mensongères quant à la qualité des soins) vu les graves carences de l’institution. Pour la Cour, il s’agit d’une alerte (c’est-à-dire divulgation par un salarié de carences dans l’entreprise ou l’institution où il travaille), qui relève de l’article 10 C.E.D.H. ; la Cour relève que l’action pénale en cause a certes causé préjudice à son employeur et à ses intérêts commerciaux. Cependant, l’intérêt public à être informé de carences dans les soins institutionnels apportés à des personnes âgées par une société appartenant à l’Etat revêt une telle importance dans une société démocratique qu’il l’emporte sur la nécessité de protéger la réputation et les intérêts de cette société. Le licenciement sans préavis intervenu est une sanction exagérément sévère. En ne ménageant pas un juste équilibre entre la nécessité de protéger la réputation de l’employeur et celle de protéger celui de l’intéressée à la liberté d’expression, il y a eu violation de l’article 10.
L’article 10, point 1, de la Directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16, § 1er, de la directive 89/391/CEE), doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale permettant le licenciement d’une travailleuse enceinte en raison d’un licenciement collectif, au sens de l’article 1er, point 1, sous a), de la Directive 98/59/CE du Conseil, du 20 juillet 1998, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs.
L’article 10, point 2, de la Directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale permettant à l’employeur de licencier une travailleuse enceinte dans le cadre d’un licenciement collectif, sans lui fournir d’autres motifs que ceux qui justifient ce licenciement collectif, pour autant que sont indiqués les critères objectifs qui ont été retenus pour désigner les travailleurs à licencier.
L’article 10, point 1, de la Directive 92/85 doit être interprété en ce sens que cette disposition s’oppose à une réglementation nationale qui n’interdit pas, en principe, le licenciement d’une travailleuse enceinte, accouchée ou allaitante à titre préventif, et qui prévoit uniquement la nullité de ce licenciement lorsque celui-ci est illégal, à titre de réparation.
L’article 10, point 1, de la Directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui, dans le cadre d’un licenciement collectif, au sens de la Directive 98/59, ne prévoit ni une priorité de maintien des postes ni une priorité de reclassement applicables préalablement à ce licenciement, pour les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes, sans que soit exclue, cependant, la faculté pour les États membres de garantir une protection plus élevée aux travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes (dispositif).
Rémunération de base de l’indemnité d’un travailleur bénéficiant d’un congé parental à temps partiel - rémunération complète
L’article 45 T.F.U.E. doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation d’une entité fédérée d’un État membre qui impose à tout employeur ayant son siège d’exploitation sur le territoire de cette entité de rédiger les contrats de travail à caractère transfrontalier exclusivement dans la langue officielle de cette entité fédérée sous peine de nullité de ces contrats, relevée d’office par le juge - Lié à C. trav. Bruxelles, 4 juin 2013, R.G. 2012/AB/765 ci-dessus.
Congé parental à temps partiel - droits acquis ou en cours d’acquisition - principe de droit social communautaire
Interdiction de licenciement depuis le début de la grossesse jusqu’au terme du congé de maternité - décision prise au cours de la période et mise en oeuvre après l’expiration de celle-ci
L’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 « relative aux contrats de travail », en ce qu’il ne garantit pas à l’employé du secteur privé à qui l’employeur envisage de notifier un congé pour motif grave en application de cette disposition le droit d’être entendu par son employeur avant de recevoir ce congé, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution. (Dispositif)
La Cour constitutionnelle souligne que le principe audi alteram partem ne crée d’obligations que pour les autorités publiques et ne vaut pas dans les rapports entre personnes de droit privé. Ce principe s’impose aux autorités publiques en raison de leur nature particulière et des devoirs qui leur incombent de s’informer complètement avant d’agir et de protéger contre le risque d’arbitraire des actes administratifs de portée individuelle. La différence de traitement entre les deux catégories de travailleurs repose dès lors sur une justification raisonnable. Il ne peut en outre être déduit du fait que le principe audi alteram partem ne vaut pas pour un employeur du secteur privé qu’un tel employeur ne peut en aucune circonstance être tenu d’entendre préalablement l’employé à qui il envisage de donner congé.
L’article 19bis de l’arrêté royal du 25 octobre 1971 « fixant le statut des maîtres de religion, des professeurs de religion et des inspecteurs de religion des religions catholique, protestante, israélite, orthodoxe et islamique des établissements d’enseignement de la Communauté française », tel qu’il a été inséré par le décret de la Communauté française du 10 mars 2006 « relatif aux statuts des maîtres de religion et professeurs de religion » et tel qu’il était rédigé avant sa modification par le décret de la Communauté française du 11 juillet 2018 « portant diverses mesures en matière de statut des membres du personnel de l’enseignement », viole les articles 10, 11 et 24 de la Constitution, en ce qu’il ne permet pas aux maîtres et professeurs de religion stagiaires de l’enseignement organisé par la Communauté française de saisir la chambre de recours pour contester la décision de licenciement pour faute grave dont ils font l’objet. (Dispositif)
(Décision commentée)
Interrogée sur le droit pour le travailleur en service avant le 1er janvier 2014 à l’indemnité en compensation du licenciement si une convention de rupture du contrat de travail d’un commun accord intervient pendant la durée du préavis, la Cour constitutionnelle retient deux interprétations possibles du mécanisme légal.
L’article 38/1 de la loi du 12 avril 2011 modifiant la loi du 1er février 2011 portant la prolongation de mesures de crise et l’exécution de l’accord interprofessionnel et exécutant le compromis du Gouvernement relatif au projet d’accord interprofessionnel viole les articles 10 et 11 de la Constitution dans l’interprétation selon laquelle il ne peut être tenu compte de l’occupation directement antérieure en qualité de travailleur intérimaire dans la même entreprise lorsqu’il s’agit de déterminer ‘la date de début de son contrat de travail ininterrompu’. La même disposition ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution dans l’interprétation selon laquelle il peut être tenu compte de l’occupation directement antérieure en qualité de travailleur intérimaire dans la même entreprise lorsqu’il s’agit de déterminer cette date. Compte tenu de l’objectif du législateur de prendre en compte la période d’occupation en qualité de travailleur intérimaire pour calculer l’ancienneté, on peut raisonnablement considérer qu’il entendait également tenir compte de la période d’occupation en qualité de travailleur intérimaire pour déterminer la date de début de l’occupation. (Calcul de l’ancienneté pour la détermination de l’allocation de licenciement).
L’article 39, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, lu en combinaison avec l’article 105, § 3, de la loi de redressement du 22 janvier 1985 contenant des dispositions sociales, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, dans l’interprétation selon laquelle, en cas de licenciement d’un travailleur qui a réduit ses prestations de travail, il convient de se baser sur la rémunération en cours correspondant aux activités réduites pour fixer le montant de l’indemnité de congé. (L’affaire vise le travailleur qui a réduit ses prestations de travail pour prendre soin de son enfant jusqu’à l’âge de 8 ans, dans le cadre de l’article 4, § 1er, 1°, a°, de la C.C.T. n° 103 du 27 juin 2012 instaurant un système de crédit-temps, de diminution de carrière et d’emplois de fin de carrière).
L’article 68, alinéa 3, de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu’à l’égard des employés supérieurs, il ne permet pas, pour le calcul de la première partie du délai de préavis liée à l’ancienneté acquise au 31 décembre 2013, l’application d’une clause de préavis valable à cette date. (Dispositif)
L’article 68, alinéa 3, de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que, pour les employés supérieurs, il ne permet pas, pour le calcul de la première partie du délai de préavis liée à l’ancienneté acquise au 31 décembre 2013, l’application d’une clause de préavis qui était valable à cette date. (Dispositif).
L’article 68, alinéa 3, de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que, pour les employés supérieurs, il ne permet pas, pour le calcul de la première partie du délai de préavis liée à l’ancienneté acquise au 31 décembre 2013, l’application d’une clause de préavis qui était valable à cette date. (Dispositif).
Dans l’interprétation selon laquelle elle ne s’applique pas au licenciement des contractuels de la fonction publique, la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Par son arrêt n° 101/2016 du 30 juin 2016, la Cour a dit pour droit que l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, combiné avec l’article 38, 2°, de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’il s’applique aux ouvriers du secteur public licenciés après le 31 mars 2014. Dans cet arrêt, elle a également jugé que « dans l’attente de l’intervention du législateur, il appartient aux juridictions, en application du droit commun des obligations, de garantir sans discrimination les droits de tous les travailleurs du secteur public en cas de licenciement manifestement déraisonnable, en s’inspirant, le cas échéant, de la convention collective de travail n° 109 ».
Saisie par la Cour de cassation par son arrêt du 29 mai 2017 (ci-dessous), la Cour constitutionnelle conclut que l’article 4, 3°, de la loi du 20 décembre 2002 portant protection des conseillers en prévention ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
L’article 7, § 1ersexies, alinéa 2, 2°, de l’arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, tel qu’il a été inséré par la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, avant sa modification par la loi du 23 avril 2015 concernant la promotion de l’emploi, il exclut du droit à une indemnité compensatoire de licenciement les travailleurs qui, au 31 décembre 2013, étaient occupés sous le statut d’ouvrier, mais qui, après cette date, furent occupés sous le statut d’employé (dispositif).
L’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, interprété comme faisant obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs graves liés à sa personne ou à son comportement, viole les articles 10 et 11 de la Constitution.
La même disposition, interprétée comme ne faisant pas obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs graves liés à sa personne ou à son comportement, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution (Dispositif).
Les articles 32, 3°, et 37, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, interprétés comme faisant obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs liés à sa personne ou à son comportement, violent les articles 10 et 11 de la Constitution.
Les mêmes dispositions, interprétées comme ne faisant pas obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs liés à sa personne ou à son comportement, ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution. (dispositif)
Les effets juridiques de l’article 82, § 3, de la loi relative aux contrats de travail, avant son abrogation par l’article 50 de la loi du 26 décembre 2013, doivent être maintenus jusqu’au 31 décembre 2013 (la Cour renvoyant notamment à son arrêt n° 86/2016 du 2 juin 2016).
L’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, combiné avec l’article 38, 2° de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement, viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’il s’applique aux ouvriers du secteur public licenciés après le 31 mars 2014 (secteur public).
Les effets des articles 59 et 82 LCT tels qu’ils s‘appliquaient avant leur abrogation respective par les articles 34 et 50 de la loi du 26 décembre 2013 doivent être maintenus jusqu’au 31 décembre 2013.
Avant les modifications introduites par la loi du 26 décembre 2013, bien que des conventions relatives aux délais de préavis pour les employés ‘supérieurs’ ne pouvaient être conclues avant la notification du congé, la faculté d’invoquer la nullité de telles conventions appartenait exclusivement à l’employé, celle-ci n’étant pas autorisée à l’employeur (renvoi à Cass., 7 avril 2008, S. 07.0098.F). Cette règle doit être considérée comme s’appliquant également à l’ouvrier, l’article 59 de la loi du 3 juillet 1978 étant seulement impératif en faveur de celui-ci. Ceci valait tant pour les conventions collectives de travail que pour les conventions individuelles dérogeant aux préavis prévus par ou en vertu de la loi et cette faculté n’était pas donnée aux employeurs. Il en découle que l’article 82, § 3 de la loi ne violait pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Les effets de l’article 59 de la loi du 3 juillet 1978, dont l’inconstitutionnalité a été décrétée par l’arrêt 125/2011 de la Cour constitutionnelle, ont été maintenus jusqu’au 8 juillet 2013 au plus tard. L’article 86/2, § 1er (introduit par la loi du 12 avril 2011) concernant les employés engagés à partir du 1er janvier 2012 et dont la rémunération annuelle dépassait 16.100 € a été abrogé avec effet au 1er janvier 2014 par la loi du 26 décembre 2013. Une discrimination a ainsi persisté pendant une courte durée en cas de licenciement d’un tel employé entre le 9 juillet 2013 et le 31 décembre 2013 par rapport aux ouvriers jouissant de la même ancienneté (12 ans en l’espèce). Il faut cependant mettre en balance l’avantage tiré de l’effet du constat d’inconstitutionnalité non modulé et la perturbation qu’il impliquerait pour l’ordre juridique. Aussi, les effets des articles 59 et 86/2, § 1er de la loi doivent-ils être maintenus jusqu’au 31 décembre 2013.
En vertu du régime actuel de l’article 70, § 1er, de la loi sur le statut unique, une différence substantielle entre les ouvriers et les employés persiste encore en ce qui concerne les délais de préavis, mais cette différence cesse à tout le moins d’exister le 1er janvier 2018.
S’il est (...) raisonnablement justifié que, dans les secteurs où les partenaires sociaux et le législateur ont réalisé dans l’intervalle des efforts pour réduire les différences entre les ouvriers et les employés en matière de délais de préavis par le biais de la C.C.T. n° 75 précitée et de la loi du 12 avril 2011 qui a modifié celle du 1er février 2011, ledit article aménage un régime transitoire qui achève l’harmonisation entre ouvriers et employés en matière de délais de préavis au 1er janvier 2018, il ne peut toutefois être admis de maintenir, en ce qui concerne la catégorie des ouvriers visée par l’article 70, § 4, de la même loi, une discrimination illimitée dans le temps de ces travailleurs en matière de délais de préavis, sans qu’il existe pour ce faire une justification raisonnable.
Son annulation non modulée entraînerait néanmoins une insécurité juridique considérable et pourrait engendrer des difficultés financières graves pour un grand nombre d’employeurs qui, du fait de cette annulation, seraient immédiatement confrontés à l’obligation de respecter des délais de préavis bien plus importants que ceux qui sont fixés par la disposition attaquée, dont les effets sont dès lors maintenus jusqu’au 31 décembre 2017.
Le reclassement professionnel continue de relever de la compétence de l’autorité fédérale. Les travaux préparatoires de la loi spéciale du 6 janvier 2014 sur la Sixième Réforme de l’Etat font eux aussi apparaître que le législateur spécial n’a attribué aux régions que certains aspects du placement des travailleurs. Les aspects du reclassement professionnel touchant au droit du travail continuent de ressortir à la compétence de l’autorité fédérale.
Dans l’article 6, § 1er, IX, 1° de la loi spéciale du 8 août 1980, le législateur spéciale entend par « placement des travailleurs », outre certaines interventions financières, le placement de travailleurs au sens strict du terme, en particulier le régime des activités des bureaux de placement de travailleurs et, en ce qui concerne le placement de travailleurs au sens large, seulement l’agrément des entreprises de travail intérimaire.
Pour le surplus, le législateur spécial n’a pas voulu confier aux régions les aspects du reclassement professionnel qui touchent au droit du travail et, plus particulièrement, le droit au reclassement professionnel, étant donné que cette matière doit être considérée comme un régime de protection du travail qui est réservé à l’autorité fédérale en tant qu’élément du droit du travail au sens de l’article 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12° de la loi spéciale du 8 août 1980.
Vu l’harmonisation progressive des statuts d’employé et d’ouvrier (réf. à l’arrêt n° 125/2011), il ne se justifie plus que ce critère de distinction soit maintenu à l’heure actuelle notamment en ce qui concerne la limitation des motifs admissibles de licenciement, le renversement de la charge de la preuve et la fixation forfaitaire de l’indemnité - il y a violation mais les effets de cette disposition sont maintenus jusqu’au 1er avril 2014 (secteur privé).
Délai pour citer selon les formes du référé - délégué du personnel - délai de l’art. 6 - délai prescrit à peine de déchéance - droit d’accès pour l’employeur à un juge - point de départ du délai de 3 jours ouvrables (jour qui suit celui de la décision visée à l’art. 5, § 3) - délai distinct de celui prévu pour le candidat non élu (jour qui suit celui où la décision notifiée par le greffe) - violation
Base : prestations non réduites - motif extrinsèque au travailleur - raisons d’humanité et de dignité humaine
Non applicable
(Art. 103 /105 de la loi du 22 janvier 1985 et accord cadre sur le congé parental du 14 décembre 1995) - travailleur en crédit-temps à temps partiel comparé au congé parental - rémunération en cours correspondant aux activités réduites - pas d’assimilation au congé parental
L’article 39 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, dans l’interprétation selon laquelle, en cas de licenciement d’un travailleur qui a réduit ses prestations de travail en vertu de l’article 3, alinéa 1er, de l’arrêté royal du 10 août 1998 instaurant un droit à l’interruption de carrière pour l’assistance ou l’octroi de soins à un membre du ménage ou de la famille gravement malade, il faut, pour fixer le montant de l’indemnité de congé, se fonder sur la rémunération en cours qui correspond aux activités réduites.
(Art. 39 LCT) Réduction de travail dans le cadre du crédit-temps (C.C.T. n° 77bis) - comparé au congé parental rémunération réduite
(Art. 39 LCT - 103/105, §3 de la loi du 22 janvier 1985) - travailleur de 50 ans ou plus avec réduction de prestations dans le cadre de l’art. 9 de la CCT 77bis, c-à-d. sans durée maximum - comparé au congé parental d’une période limitée - rémunération en cours correspondant aux activités réduites - appréciation du législateur non manifestement déraisonnable
(Art. 39 LCT) - réduction des prestations en dehors du cadre du congé parental - base de l’indemnité de congé en cas de réduction de prestations (art. 103 de la loi sur le redressement du 22 janvier 1985) : rémunération réduite
La Cour est interrogée sur la différence de traitement entre deux catégories de travailleurs délégués du personnel, en ce qui concerne la protection des délégués du personnel prévue par l’article 2 de la loi du 19 mars 1991, selon qu’ils ont ou non atteint l’âge de 65 ans. Contrairement au travailleur délégué du personnel qui n’a pas encore atteint l’âge de 65 ans, le travailleur délégué du personnel qui a atteint cet âge ne peut bénéficier de cette protection.
Elle juge que la différence de traitement en cause est fondée sur un critère objectif, à savoir le fait que le travailleur délégué du personnel qui est congédié atteint ou non l’âge de 65 ans. La mesure en cause n’est pas incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution et que la lecture combinée de ces dispositions constitutionnelles avec la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ne conduit pas à une autre conclusion, relevant qu’aux termes de l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive, les Etats membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires (avec renvoi à CJCE, grande chambre, 16 octobre 2007, C-411/05, Palacios de la Villa, et CJCE, 5 mars 2009, C-388/07, Age Concern England).
Protection contre le licenciement déterminée - licenciement manifestement déraisonnable
Inconstitutionnalité de la distinction - délai donné au législateur jusqu’au 8 juillet 2013 (la cour ayant été saisie de questions relatives aux délais de préavis et au jour de carence)
La différence de traitement qui résulte de l’article 83, § 1er, de la loi relative aux contrats de travail est fondée sur un critère objectif, à savoir le fait que l’employé congédié atteint ou non l’âge de 65 ans.
Le régime des délais de préavis réduits à partir de l’âge de 65 ans est étroitement lié au fait que l’âge normal de la retraite est atteint, à savoir l’âge auquel le travailleur peut en principe prétendre à une pension de retraite complète dans le régime de la sécurité sociale.
Cette différence de traitement est fondée sur des objectifs légitimes de nature sociale. Le législateur entendait, en instaurant la nullité de la clause de résiliation mettant fin au contrat de travail lorsque l’employé atteint l’âge de 65 ans, mieux protéger l’employé qui allait atteindre sous peu l’âge de la retraite. Du fait de l’introduction de la nullité de la clause de résiliation précitée, le congé ne pourrait être donné à un travailleur qui atteint l’âge de la retraite et qui travaille depuis longtemps dans la même entreprise qu’en observant l’article 82 de la loi relative aux contrats de travail. Ceci aurait pour conséquence qu’un employeur, en cas d’application des délais de préavis normaux, devrait parfois décider plusieurs années auparavant du maintien au travail ou non d’un employé qui atteint l’âge de la retraite.
Cette disposition en cause est aussi raisonnablement justifiée. L’application de délais de préavis réduits n’est possible que lorsque le travailleur approche de l’âge de la retraite de 65 ans. Le choix de l’âge de 65 ans n’est pas arbitraire, mais correspond à l’âge de la retraite, à savoir l’âge auquel le travailleur a droit à une pension de retraite complète.
En outre, l’employeur n’est pas obligé d’appliquer l’article 83, § 1er, de la loi relative aux contrats de travail. Compte tenu de l’article 1134 du Code civil, les délais de préavis réduits peuvent être remplacés par des délais de préavis plus favorables au travailleur. Ces délais de préavis plus avantageux peuvent découler soit d’une convention collective de travail, soit d’une convention individuelle.
Par ailleurs, la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail n’exclut pas un régime tel que celui contenu dans la disposition en cause. Il suffit de relever à cet égard qu’aux termes de l’article 6, § 1er, premier alinéa, de cette directive, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires (CJUE, grande chambre, 16 octobre 2007, C-411/05, Palacios de la Villa, et CJUE, 5 mars 2009, C-388/07, Age Concern England).
Période de service effectuée dans le cadre d’un statut - réponse à C. trav. Brux., 17 juillet 2009
Intérêts dus sur le brut au travailleur et intérêts dus aux institutions publiques - intérêts de retard payés en une seule fois à un créancier pour une période déterminée - intérêts de retard se succédant dans le temps
Démission du mandat - perte de la protection liée à celui-ci mais maintien de la protection des candidats
Absence de violation si l’article 3, § 1er de la loi du 19 mars 1991 est interprété comme n’obligeant pas le curateur d’une faillite qui licencie collectivement le personnel par suite du jugement déclaratif de faillite à saisir la commission paritaire afin que celle-ci reconnaisse l’existence des motifs économiques
Le fait de cesser d’appartenir à l’organisation syndicale qui a présenté la candidature ne fait par perdre la protection légale du candidat mais uniquement celle attachée au mandat
Début de la protection : début de la mission légale
Obligation pour le travailleur qui conteste le licenciement d’en établir le caractère discriminatoire
Fondement de la protection - suspicion légitime quant au motif de licenciement des représentants du personnel
La protection instaurée par les articles 26 et 28 de la convention collective de travail du 21 septembre 2015 fixant le statut des délégations syndicales, conclue au sein de la commission paritaire n° 311 des grandes entreprises de détail et rendue obligatoire par l’arrêté royal du 8 novembre 2016 ne s’étend au délégué suppléant que s’il remplace un délégué effectif.
(Cassation de C. trav. Liège (div. Liège), 21 avril 2022, R.G. 2021/AL/108)
L’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 n’exige pas que l’employeur ait subi un préjudice en conséquence de la faute grave du travailleur. Toutefois, rien n’empêche le juge, dans l’appréciation du manquement allégué, de vérifier également si celui-ci a causé un préjudice à l’employeur ou si ce dernier a subi un dommage.
Il ressort de la genèse de l’article 17, 3°, a) et b), de la loi du 3 juillet 1978 que l’action introduite contre un ex-travailleur du fait de concurrence déloyale ou de participation à de tels actes après la fin du contrat de travail, alors qu’aucune clause de non-concurrence valable ne figurait dans le contrat, ne peut être considérée comme une action découlant du contrat de travail au sens de l’article 15 de la loi, mais comme une demande extracontractuelle au sens de l’article 2262bis, § 1er, de l’ancien Code civil.
La C.C.T. n° 109 ne contient pas en elle-même d’interdiction de licenciement manifestement déraisonnable et l’employeur n’est susceptible d’enfreindre l’obligation de paiement (total ou partiel) de l’indemnité visée que si le juge, statuant sur la demande du travailleur licencié, décide que le licenciement est manifestement déraisonnable et qu’il alloue au travailleur sur cette base l’indemnité qu’il fixe et qui variera entre 3 et 17 semaines de rémunération. Le travailleur qui soutient avoir été victime d’un licenciement manifestement déraisonnable et qui sur cette base postule la condamnation d’une indemnité dans le cadre de l’article 9, § 2, de la C.C.T. n° 109, n’introduit pas une action suite à une infraction à cette C.C.T. mais demande uniquement l’application de cette convention collective de sorte que son action n’est pas fondée sur l’article 189 C.P.S.
Dès lors que l’employeur qui envisage de licencier pour motif grave un travailleur bénéficiant de la protection de la loi du 19 mars 1991 dépose avant l’expiration du délai prévu à l’article 4, § 1er, de la loi la requête prévue à l’article 4, § 2, et que cette requête est nulle pour contravention à l’article 40, alinéa 1er, de la loi sur l’emploi des langues en matière judiciaire, ce dépôt a un effet interruptif, de telle sorte que l’employeur dispose d’un nouveau délai, égal à celui dont il bénéficiait originairement pour saisir le président du tribunal dans le respect de la législation sur l’emploi des langues.
La notion de fermeture est définie à l’article 1er, § 2, 6°, de la loi du 19 mars 1991 comme visant toute cessation définitive de l’activité principale de l’entreprise ou d’une division de celle-ci. Ne constitue pas une fermeture au sens de cette disposition le fait qu’une division de l’entreprise (à laquelle appartenait la travailleuse concernée) n’existe plus, que tous les travailleurs qui étaient occupés dans celle-ci ont été licenciés et que l’activité antérieure a été absorbée et intégrée dans le fonctionnement général de la société. Dès lors que l’activité principale de cette division n’a pas été stoppée mais a été poursuivie par d’autres travailleurs de l’entreprise, l’on ne peut conclure que la liquidation de cette division constitue une fermeture d’une division de l’entreprise au sens des articles 1er, § 2, 6° et 3, § 1er, 3e et 4e alinéas, de la loi. (Cassation de C. trav. Bruxelles, 14 janvier 2020, R.G. 2018/AB/953).
La Cour de cassation donne, dans un arrêt du 12 avril 2021 (S.20.0022.N), la portée de la dérogation autorisée en vertu de l’article 60 de la loi relative aux contrats de travail aux règles fixées en son article 59.
Il découle des articles 3, 4 et 10 de la loi du 20 décembre 2002 portant protection des conseillers en prévention qu’en cas de licenciement pour motif grave non admis par le tribunal ou la cour du travail, l’indemnité de protection visée à l’article 10 de la loi est due si le juge constate soit que les motifs invoqués par l’employeur pour licencier ne sont pas étrangers à l’indépendance du conseiller en prévention, soit, lorsqu’a été avancée comme motif du licenciement l’incompétence du conseiller en prévention à exercer ses missions, que l’employeur n’établit pas ce manque de compétence.
La sanction de l’abus de droit réside non dans la perte du droit mais dans sa réduction à son exercice normal ou dans l’obligation de réparer le dommage causé par celui-ci. La réduction du droit à son exercice normal peut comprendre l’interdiction faite par le juge au titulaire du droit de faire usage de celui-ci dans de telles circonstances. Ainsi, si le juge d’appel a valablement constaté (ce point n’étant pas contesté) que le demandeur a commis un abus de droit en faisant valoir juste à l’expiration du délai de prescription d’un an prévu à l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 que l’organisation syndicale dont il est le président-secrétaire est dépourvue de la personnalité juridique, il a valablement pu décider que la sanction de cet abus pouvait consister en la privation pour le demandeur du droit de se prévaloir in casu de la prescription de la demande. Ce faisant, le juge du fond ne méconnaît pas le principe général de droit d’interdiction de l’abus de droit.
Conclusions de M. l’Avocat général GENICOT (avec renvoi à Cass., 11 mai 2020, n° S.19.0012.N rendu en matière de rémunération de base en accidents du travail).
En considérant que la règle de calcul des indemnités de préavis et de protection ne constitue pas une discrimination indirecte sur la base du sexe, au motif que les dispositions légales en cause et, de manière générale, les règles relatives à la réduction des prestations de travail dans le cadre d’un crédit temps pour prendre soin d’un enfant de moins de huit ans valent tout autant pour les femmes que pour les hommes, que la décision de solliciter un crédit-temps pour ce motif « relève d’un choix personnel du travailleur » et que « [juger] discriminatoire la prise de crédit-temps majoritairement par les femmes [crée] une possible discrimination à l’égard des hommes », sans vérifier si, comme l’affirmaient les demandeurs, un nombre considérablement plus élevé de femmes que d’hommes choisissent de bénéficier de la réduction des prestations de travail pour ce motif et si la différence de traitement entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins qui serait ainsi engendrée est susceptible d’être justifiée par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, l’arrêt attaqué viole l’article 157 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. (cassation de C. trav. Mons, 23 novembre 2018, R.G. 2017/AM/364)
L’indemnité compensatoire de préavis prévue à l’article 39, § 1 de la loi relative aux contrats de travail n’est due qu’en cas de rupture irrégulière du contrat de travail. Elle n’est pas due en cas de congé régulier. En conséquence, en cas de licenciement avec préavis assorti d’une dispense de prestation et paiement aux échéances mensuelles, l’on ne peut en cas de paiement incomplet (commissions en l’espèce), solliciter un complément d’indemnité compensatoire, le délai de préavis n’étant pas insuffisant.
La Cour casse dès lors un arrêt de la cour du travail d’Anvers, qui a alloué un tel complément, pour violation de l’article 39, § 1 de la loi.
L’article 32tredecies de la loi Bien-être, qui interdit en ses § 1er, al. 1er, al. 2, § 1er/1, 1° et § 2, al. 2, à l’employeur de mettre un terme à la relation de travail ou de prendre une mesure préjudiciable à l’égard du travailleur qui a déposé une plainte formelle du fait de harcèlement, n’exclut pas que le licenciement ou la mesure préjudiciable puisse être justifié par des motifs déduits de faits qui dans la demande d’intervention sont repris en tant que harcèlement.
L’article 2244, § 2, du Code civil n’accorde d’effet interruptif de prescription à une mise en demeure extrajudiciaire que s’il est satisfait à l’ensemble des conditions strictes prévues à la disposition légale. En conséquence, une mise en demeure adressée par voie recommandée mais sans accusé de réception, même à supposer qu’elle a atteint son destinataire, ne satisfait pas à ces conditions et n’a dès lors pas d’effet interruptif.
(Décision commentée)
La Cour de Cassation confirme l’interprétation à donner à l’article 32tredecies, § 1er de la loi du 4 août 1996 : si l’employeur ne peut mettre fin à la relation de travail en raison du dépôt de la plainte, le licenciement peut être justifié par des motifs déduits de faits invoqués dans celle-ci.
Lorsque le fait susceptible d’entraîner la rupture du contrat de travail pour motif grave consiste en un manquement continu, l’employeur détermine le moment à partir duquel le manquement rend impossible de manière immédiate et définitive la poursuite de la collaboration professionnelle. Lorsqu’il examine la régularité du délai dans lequel est intervenu le licenciement pour motif grave, le juge vérifie si le fait reproché a persisté, et ce jusqu’à trois jours avant le licenciement. Lorsque le juge considère que les manquements continus du travailleur constituent un motif grave, le licenciement sur le champ, notifié dans les trois jours ouvrables après la constatation des manquements pris en considération, est régulier même si l’employeur avait, à l’estime du juge, la possibilité de dénoncer ces manquements auparavant au titre de motif grave.
Si le juge doit tenir compte de l’ensemble des faits et circonstances visés à l’article 4, § 1er, de la loi du 19 mars 1991, ainsi que de faits antérieurs repris dans cette lettre comme éclairant les faits ou constituant des circonstances aggravantes, ni l’article 4 ni l’article 7 de la loi ne lui permettent de prendre en compte, dans l’appréciation du fait susceptible d’entraîner le licenciement sans préavis, des faits et circonstances qui n’ont pas été mentionnés dans la lettre visée à l’article 4, § 1er, au titre de faits antérieurs susceptibles d’éclairer les faits en cause ou de constituer des circonstances aggravantes.
En cas de résolution judiciaire du contrat de travail à la demande du membre du personnel de l’enseignement libre subsidié, vu un manquement contractuel sérieux dans le chef du pouvoir organisateur, le licenciement est irrégulier dans le chef de l’employeur, de telle sorte qu’il y a lieu d’appliquer l’article 28, § 2, du Pacte scolaire (paiement de la rémunération pour la totalité ou la partie dont il se trouve ainsi privé du fait de la cessation d’activité).
Le droit à l’indemnité prévue à l’article 10 de la loi sur la protection des conseillers en prévention existe dès que l’employeur procède à la rupture du contrat sans respecter les procédures prévues par la loi. Il existe dès le licenciement du conseiller en prévention, et ce indépendamment du fait qu’il sera mis fin ultérieurement au contrat par le travailleur, conformément à l’article 84, L.C.T. (contre-préavis).
L’article 63, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978 dispose qu’en cas de contestation, la charge de la preuve des motifs du licenciement invoqués incombe à l’employeur. La Cour de cassation contrôle si son appréciation ne méconnaît pas la notion légale de licenciement abusif. L’appréciation du caractère manifestement déraisonnable du motif du licenciement ne peut être liée à l’exigence que la conduite de l’ouvrier susceptible de constituer ce motif soit fautive. Il y a violation de l’article 63, alinéas 1er et 2, dès lors que l’appréciation du caractère manifestement déraisonnable du motif du licenciement est liée à l’exigence que la conduite de l’ouvrier susceptible de constituer ce motif soit fautive et qu’il est imposé à l’employeur d’apporter la preuve que le motif du licenciement est imputable à celui-ci.
Dans le cadre de son contrôle du respect de l’article 63, alinéa 1er, de la loi du 3 juillet 1978, le juge est tenu d’apprécier si le motif du licenciement n’est pas manifestement déraisonnable. La Cour de cassation contrôle si son appréciation ne méconnaît pas la notion légale de licenciement abusif. En liant l’appréciation du caractère manifestement déraisonnable du motif du licenciement à l’exigence que la conduite de l’ouvrier susceptible de constituer ce motif soit fautive, le juge du fond viole l’article 63.
Dans le cadre de l’examen des nécessités de fonctionnement de l’entreprise, la preuve du motif économique invoqué peut passer par la vérification des mouvements de personnel survenus au sein de l’entreprise. Il ne s’agit pas d’un contrôle de l’opportunité des mesures prises mais de la vérification par le juge que l’employeur établit, comme il en a la charge, que le licenciement est en lien avec celles-ci.
L’obligation d’apurer les réserves acquises manquantes ainsi que le déficit par rapport aux garanties visées à l’article 24 de la loi du 28 avril 2003 (relative aux pensions complémentaires et au régime fiscal de celles-ci et de certains avantages complémentaires en matière de sécurité sociale), imposée à l’employeur par l’article 30 de la même loi, ne prend pas fin au moment de la sortie du travailleur mais subsiste jusqu’au transfert des réserves en application de l’article 32, § 3, alinéa 3, de la loi ou, en l’absence d’un tel transfert, jusqu’à la mise à la retraite ou l’abrogation de l’engagement de pension.
En vertu de l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, combiné à l’article 2257 du Code civil, les demandes tendant au respect d’une obligation qui naît d’un contrat de travail mais s’éteint après la fin de ce contrat sont prescrites un an après l’extinction de ladite obligation.
La loi du 19 mars 1991 exclut la résolution judiciaire à la demande de l’employeur en tant que mode de cessation du contrat de travail d’un délégué du personnel ou d’un candidat délégué du personnel, mais elle n’empêche pas la résolution judiciaire d’un tel contrat de travail à la demande du délégué du personnel (ou du candidat délégué du personnel) lui-même.
L’article 2, § 1er, alinéa 2, 2°, de la loi du 19 mars 1991, selon lequel toute rupture du contrat de travail par le travailleur en raison de faits qui constituent un motif imputable à l’employeur est considérée comme un licenciement pour l’application dudit article, n’a pas exclusivement trait à la démission remise par le travailleur en application de l’article 35 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail en raison de faits qui constituent un motif grave dans le chef de l’employeur. Cette disposition concerne également la résolution judiciaire du contrat à la demande d’un délégué du personnel, prononcée en raison d’un manquement contractuel grave de la part de l’employeur, d’une nature telle que le délégué du personnel aurait pu constater légalement, sur la base de ces faits, la rupture irrégulière du contrat de travail par l’employeur visée à l’article 2, § 1er, alinéa 1er , 1°, de la loi du 19 mars 1991.
La notion de « même employeur » au sens de l’article 82, § 2, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, encore applicable aux faits, vise l’unité économique d’exploitation que constitue l’entreprise, sans égard aux changements de direction ou à la modification de sa nature juridique.
Les samedis durant lesquels le travailleur occupé dans un régime de travail à temps plein ne doit pas travailler en fonction du régime ou de l’horaire de travail qui lui est applicable constituent des jours durant lesquels il n’est pas habituellement travaillé au sens de l’article 14, alinéa 2, de l’arrêté royal du 18 avril 1974 déterminant les modalités générales d’exécution de la loi du 4 janvier 1974 relative aux jours fériés et ne sont donc pas des interruptions de travail attribuables au travailleur au sens de l’article 14, alinéa 1er, 1°, du même texte, même si le régime de travail de 6 jours par semaine est en principe d’application dans l’entreprise et si d’autres travailleurs travaillent le samedi. Il y a dès lors lieu de vérifier s’il était habituellement travaillé le samedi dans le régime ou l’horaire de travail applicable au travailleur afin de déterminer si, pour l’application de l’article 14, alinéas 1er, 1°, et 2, les samedis durant lesquels celui-ci n’a pas travaillé ont interrompu la période pendant laquelle il est resté au service de l’employeur.
Le fait qui justifie le congé sans préavis est le manquement accompagné de toutes les circonstances de nature à lui conférer le caractère de motif grave. Le juge doit tenir compte des circonstances invoquées dans la lettre de congé pour éclairer le motif grave indiqué. Des faits antérieurs peuvent préciser le grief invoqué à ce titre. Pour tenir compte des circonstances invoquées, il n’est pas requis que les faits invoqués en tant que motifs graves constituent en soi un manquement grave rendant impossible toute collaboration professionnelle ultérieure, lorsqu’il est précisément allégué que ces faits ne constituent un motif grave de licenciement immédiat que s’ils sont considérés à la lumière des faits antérieurs invoqués comme circonstance aggravante.
(Décision commentée)
Aux termes de l’article 105 de la loi du 3 juillet 1978, la clause de non-concurrence crée en faveur du représentant de commerce une présomption d’avoir apporté une clientèle. La circonstance qu’une telle clause ne satisfait pas aux conditions légales de validité relatives à la durée d’application et aux activités prohibées ne porte pas atteinte à cette présomption.
Il découle de l’arrêt n° 57/93 du 8 juillet 1993 de la Cour constitutionnelle que le travailleur ou l’employeur doivent pouvoir soumettre la décision de l’organe paritaire au juge. Lorsque, dans le cadre d’une demande formée par le travailleur d’obtenir une indemnité de protection eu égard à l’irrégularité du licenciement pour des motifs économiques ou techniques, la juridiction du travail doit examiner la décision de l’organe paritaire qui a admis ceux-ci, elle exerce un contrôle de pleine juridiction sur l’existence de ces motifs. Ce contrôle n’implique pas d’apprécier l’opportunité des mesures prises par l’employeur pour les rencontrer. Les mesures à prendre dans de telles situations ne doivent par ailleurs pas être limitées aux hypothèses de fermeture de l’entreprise ou d’une division de celle-ci ou de licenciement d’une catégorie déterminée de personnel.
L’article 8 du Décret de la Communauté française du 1er février 1993 (qui contient la règle de prescription annale de l’action en justice) s’applique aux actions tendant à l’exécution d’obligations qui prennent leur source dans le contrat de travail telles que l’action du membre du personnel en paiement des sommes dues en raison de l’irrégularité du licenciement.
Elle s’applique à l’action fondée sur l’article 36, § 3, du même Décret, en vertu duquel lorsque le P.O. a mis fin à la charge d’un membre du personnel engagé à titre définitif et que cette décision est déclarée contraire à celui-ci par un jugement ou un arrêt définitif d’une juridiction du travail, le membre reçoit directement la subvention traitement à laquelle il aurait eu droit et ce jusqu’à son rétablissement dans ses fonctions (ou la réalisation d’une autre condition).
Dès lors qu’il est dûment constaté par le juge du fond qu’une société n’a pas totalement mis fin à son activité mais qu’elle a poursuivi celle-ci dans le cadre d’une procédure d’administration provisoire et que quelqu’un a été désigné à cet effet en vue de l’administrer et de gérer ses biens (compagnie d’aviation ayant signé un accord avec une autre société en vue non seulement de la cession de son activité mais également d’un redémarrage de celle-ci dans le cadre de la seconde, avec transfert d’actifs et d’une partie du passif), la procédure de reconnaissance de raisons d’ordre économique et technique aurait dû être respectée.
La Cour de cassation pose deux questions à la Cour constitutionnelle :
• L’article 4, 3°, de la loi du 20 décembre 2002 portant protection des conseillers en prévention viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en excluant à l’égard du conseiller en prévention licencié dans le cas d’un licenciement collectif, auquel s’appliquent les procédures fixées en vertu du chapitre VII de la loi du 13 février 1998 portant des dispositions en faveur de l’emploi, l’application des procédures prévues par la loi du 20 décembre 2002 pour le conseiller en prévention dont le licenciement individuel est envisagé ?
• L’article 4, 3°, de la loi du 20 décembre 2002 portant protection des conseillers en prévention viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en excluant l’application de ces procédures de protection à l’égard de tout conseiller en prévention dans le cas précité de licenciement collectif, sans distinguer selon que l’employeur reste ou non tenu de disposer d’un conseiller en prévention au sein du personnel après le licenciement collectif, suivant qu’il occupe à ce moment au moins vingt ou, au contraire, moins de vingt travailleurs ?
(Décision commentée)
L’article 38, § 2, 2e alinéa, de la loi du 3 juillet 1978, disposition impérative, instaure en faveur du travailleur une protection à laquelle ce dernier ne peut renoncer aussi longtemps que subsiste sa raison d’être. Il s’ensuit que le travailleur ne peut renoncer à la suspension du préavis qu’une fois qu’elle s’est produite et uniquement pour le temps déjà couru de cette suspension.
La relation de travail entre un membre du personnel subsidié de l’enseignement libre subventionné et le pouvoir organisateur résulte d’un contrat de travail. L’article 8 du décret du 1er février 1993 fixant le statut des membres du personnel subsidié de l’enseignement libre subventionné dispose que les actions naissant du contrat sont prescrites un an après la cessation de celui-ci ou cinq ans après le fait qui a donné naissance à l’action sans que ce dernier délai puisse excéder un an après la cessation du contrat. Ceci vise l’action en dommages et intérêts formée par un membre du personnel contre le P.O. pour défaut d’exécution d’une des obligations imposées en matière d’engagement définitif (articles 40, 42, 43 et 46 du décret), qui est une action naissant du contrat de travail.
L’action fondée sur les articles 1235, 1236 et 1376 à 1381 C.C. tendant au remboursement par le travailleur de montants payés indûment par l’employeur n’est pas une action née du contrat de travail et est soumise à la prescription ordinaire.
Dans l’appréciation du respect du délai pour licencier pour motif grave, le fait invoqué peut être un manquement continu ou un manquement instantané. Le juge apprécie en fait s’il s’agit de l’un ou de l’autre. Dès lors qu’il est constaté que le manquement consiste dans le fait d’avoir entrepris une activité concurrente alors que le contrat de travail était toujours en cours et d’être actif en tant que gérant dans cette entreprise concurrente que le travailleur avait mise sur pied, l’on ne peut conclure qu’il ne s’agit pas d’un manquement continu.
(Décision commentée)
Sous peine de violer l’article 35, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978, l’appréciation de la possibilité de poursuivre les relations professionnelles malgré la faute grave commise, qui constitue le critère légal de la notion de motif grave, ne peut être liée au critère, qui lui est étranger, de la disproportion entre cette faute et la perte de son emploi.
(Décision commentée)
S’il revient à l’employeur d’apprécier si le motif de licenciement n’est pas manifestement déraisonnable, le juge ne peut déduire le caractère abusif de celui-ci de la circonstance que l’inaptitude du travailleur n’a pas affecté le fonctionnement de l’entreprise de l’établissement ou du service. Ce faisant, l’arrêt attaqué n’a pas justifié légalement sa décision que le licenciement ne peut être mis en relation avec l’absentéisme de la travailleuse et qu’il est dès lors abusif. Le motif de licenciement tiré de l’aptitude du travailleur ne peut donc s’apprécier au regard des perturbations de l’organisation du service auquel il était affecté (art. 63 LCT).
Si le travailleur poursuit l’exécution du contrat de travail après avoir constaté la rupture sur le champ de celui-ci du fait d’une modification unilatérale d’une condition essentielle, ceci peut signifier que ce faisant il a renoncé à se prévaloir de la rupture irrégulière à charge de l’employeur et qu’il y a accord tacite sur les nouvelles conditions de travail. La renonciation tacite ne peut se présumer et ne peut être déduite que de faits qui ne peuvent faire l’objet d’une autre interprétation.
Si une autorité administrative décide de mettre un terme au contrat de travail d’un agent contractuel, elle n’est pas tenue de motiver formellement le licenciement. La réglementation relative à la rupture des contrats de travail à durée indéterminée n’impose par ailleurs pas à l’employeur d’entendre le travailleur avant de procéder à son licenciement. Les travailleurs contractuels (donc hors situation statutaire) au service des communes sont soumis à l’article 1er, 2e alinéa de la loi sur les contrats de travail et il ne peut y être fait exception sur la base du principe général de droit de bonne administration.
(Décision commentée)
Un arrêt décisif de la Cour de cassation sur le licenciement d’un contractuel par un employeur public : si une autorité administrative décide de mettre un terme au contrat de travail d’un agent contractuel, elle n’est pas tenue de motiver formellement le licenciement. La réglementation relative à la rupture des contrats de travail à durée indéterminée n’impose par ailleurs pas à l’employeur d’entendre le travailleur avant de procéder à son licenciement. Les travailleurs contractuels (donc hors situation statutaire) au service des communes sont soumis à l’article 1er, 2e alinéa de la loi sur les contrats de travail et il ne peut y être fait exception sur la base du principe général de droit de bonne administration.
Le délai de trois jours fixé à l’article 35, 3e alinéa de la loi du 3 juillet 1978 commence à courir lorsque le fait est connu de la partie qui se prévaut du motif grave et non lorsqu’il aurait pu ou aurait dû l’être. N’est dès lors pas tardif le licenciement notifié plus de trois jours après l’audition du travailleur (un mardi) mais dans le respect du délai après l’audition d’un autre membre du personnel sur les circonstances des faits invoqués (le vendredi). Il ne peut être décidé que la connaissance certaine des faits devait être acquise le lendemain de l’audition du travailleur licencié au motif que l’employeur aurait dû auditionner les témoins immédiatement.
(Décision commentée)
Demande de réintégration adressée à une autre entreprise faisant partie de l’UTE
(Décision commentée)
Etendue du contrôle judiciaire : le juge ne peut substituer ses propres critères d’organisation du fonctionnement de l’entreprise à ceux de l’employeur
(Décision commentée)
Attitude du travailleur et date de cessation du contrat de travail
La notification du motif grave peut se faire au domicile élu par celui à qui elle est destinée (art. 35, al 5 de la LCT)
(Décision commentée)
Art. 63 de la loi du 3 juillet 1978 et art. 2 de la loi du 29 juillet 1991
Décision liée à C. trav. Bruxelles, 22 septembre 2015, R.G. n° 2013/AB/888 (arrêt commenté)
(Décision commentée)
Incendie de l’entreprise – moment où le constat de force majeure doit être posé
(Décision commentée)
Début de la protection avant la loi du 10 janvier 2007
Faits devant être à peine de nullité mentionnés dans la lettre elle-même, mais non dans la requête
(Décision commentée)
Preuve de l’effet négatif d’absences sur l’organisation de l’entreprise
Rupture avant prise de cours de l’essai - durée du préavis normal - pas d’application du préavis écourté
Rejet du pourvoi contre C. trav. Brux., 8 déc. 2010 - entretien préalable avant la décision de licencier et non avant le congé - notion de « salaire courant »
Si, avant de traiter avec un mandataire, le tiers a le droit d’exiger de celui-ci la production d’une procuration, il ne peut, s’il s’en abstient, nier ultérieurement l’existence du mandat que ne contestent ni le mandant ni le mandataire.
La convention collective de travail du 30 juin 1980 conclue au sein de la C.P. de la construction, concernant le statut des délégations syndicales, prévoit qu’un délégué ne peut être licencié pour quelque motif que ce soit, sauf pour motif grave, que si la procédure qu’elle institue a été observée. Si, en cas de licenciement collectif en raison de la fermeture de l’entreprise, tout risque de discrimination par l’employeur entre les travailleurs licenciés se trouve écarté, l’article 17 de la convention collective doit néanmoins être respecté. En cas de non-respect, les indemnités de protection sont dues, le pourvoi introduit par les curateurs à la faillite de la société devant être rejeté.
Possibilité pour l’employé de trouver rapidement un emploi approprié et équivalent eu égard à son ancienneté, son âge, sa fonction et sa rémunération ainsi qu’aux éléments propres à la cause – prise en compte des circonstances existant au moment de la notification du congé, dans la mesure où ces circonstances influencent la possibilité pour l’employé de trouver un emploi équivalent
Notion d’organisation qui a présenté la candidature - organisation interprofessionnelle
Une division d’entreprise est une partie de l’entreprise qui présente une certaine cohésion et se distingue du reste de l’entreprise par une autonomie technique, une activité distincte et durable et un personnel propre (avec renvoi à Cass., 4 février 2002, n° S.00.0179.N).
(Décision commentée)
Plan social – C.C.T. d’entreprise
La partie à un contrat de travail qui se prétend libérée de son obligation d’exécuter ce contrat par la circonstance que l’autre partie a, en manquant à ses obligations contractuelles, révélé sa volonté de modifier le contrat et, partant, d’y mettre fin, a, conformément au second alinéa de l’article 1315 du Code civil, l’obligation de prouver cette volonté de l’autre partie
(Décision commentée)
Reprise de société – prise en compte du comportement auprès de l’employeur précédent
Décision liée à C. trav. Bruxelles, 22 septembre 2015, R.G. n° 2013/AB/888 (arrêt commenté)
Licenciement fondé sur le comportement (non fautif) - obligation de respecter les procédures et mesures prévues à l’article 4 de la CCT du 9 novembre 1987 - cumul de l’indemnité avec celle prévue à la loi du 19 mars 1991
(Décision commentée)
Cumul autorisé avec l’indemnité de sécurité d’emploi dans le secteur des assurances – indemnités ne réparant pas le même dommage
Jugement déclaratif de faillite - raison économique - preuve du caractère discriminatoire du licenciement à charge du travailleur
Caractère d’ordre public - droits non susceptibles d’une renonciation - dès lors cependant que la protection n’a pas atteint son but (non-respect de la procédure et/ou absence de réintégration), seuls les intérêts particuliers du travailleur restent protégés
Vu le caractère d’ordre public de la protection, les droits découlant de celle-ci ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’une renonciation par le travailleur
Arrêt de la procédure électorale - pas de protection de l’élu - modification par la loi du 28 juillet 2011
(Décision commentée)
Licenciement par un employeur public – Code wallon de la Démocratie locale – absence de mention des voies de recours – point de départ de la prescription – lié à C. trav. Bruxelles 24 juin 2013, R.G. 2011/AB/781 ci-dessus
Vol - élément intentionnel non établi
(Décision commentée)
Contrôle judiciaire – licenciement manifestement déraisonnable – conduite légitime – motif valable
(Décision commentée)
Comportement légitime non constitutif de motif lié à la conduite – Cass. 27 septembre 2010
Voir C. trav. Bruxelles, 9 novembre 2012, R.G. 2011/AB/648 - ci-dessus
La circonstance que l’employeur pouvait raisonnablement présumer que l’ouvrier avait commis le fait invoqué à titre de motif grave et disposait de motifs précis pour procéder au licenciement est sans incidence sur le caractère abusif du licenciement au sens de l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978. Si le vol invoqué à l’égard du demandeur à titre de motif grave justifiant le licenciement n’est pas établi, l’on ne peut admettre que l’employeur pouvait raisonnablement présumer que le travailleur était impliqué dans le vol et qu’il disposait de motifs précis pour procéder au licenciement.
Caractère forfaitaire de l’indemnité - non prise en compte de circonstances ultérieures au congé
Rémunération dont le droit au paiement naît à partir du 1er juillet 2005 - confirmation de l’arrêté royal du 3 juillet 2005 par la loi du 8 juin 2008
Assiette des intérêts dus sur la rémunération - application de la loi en vigueur au moment où est né le droit au paiement de celle-ci
Licenciement pendant la période de protection - obligation pour l’employeur de prouver le motif : motif grave ou motif étranger (nature et origine)
Point de départ du délai d’un an : jour où la période d’application de la clause arrive à expiration et où l’obligation prend fin
Conséquences du caractère rémunératoire : intérêts légaux (depuis le licenciement)
Loi du 22 janvier 1985 - prestations réduites
Décision liée à C. trav. Bruxelles, 22 septembre 2015, R.G. n° 2013/AB/888 (arrêt commenté)
Obligation du contrat de travail dont l’échéance est postérieure à la cessation du contrat - délai d’un an - article 2257 CC : la prescription ne court point à l’égard d’une créance à jour fixe jusqu’à ce que ce jour soit arrivé - capital de pension complémentaire
Défaut de contestation immédiatement après le licenciement - congé régulier - secrétariat social
Exercice du droit d’une manière qui dépasse manifestement les limites de l’exercice normal par un employeur prudent et diligent - accusations très graves sans rapport avec les faits - pouvoir souverain d’appréciation des circonstances de la cause par le juge du fond
Faillite - liquidation de la faillite impliquant le maintien en service de certains travailleurs - absence d’obligation de saisir la commission paritaire pour obtenir la reconnaissance de motifs d’ordre économique ou technique
Entreprise de moins de 50 travailleurs - membres de la délégation syndicale chargés de plein droit des missions du CPPT à partir de leur désignation en tant que délégué syndical - article 52 de la loi du 4 août 1996
Délégué syndical suppléant - non visé s’il n’exerce pas les missions du délégué syndical
C.P. des services de santé - statut de la délégation syndicale prévu par convention collective d’entreprise - conditions d’institution fixée en dehors de celles prévues par la C.C.T. sectorielle - appréciation en fait par le juge du fond du caractère inconciliable des termes de celle-ci avec l’article 1er, alinéa 2 de la C.C.T. n° 5 du 24 mai 1971 (autorisant la conclusion d’une C.C.T. d’entreprise pourvu qu’elle ne soit pas contraire aux conventions sectorielles ayant le même objet
Protection d’ordre public - conclusion d’une transaction par laquelle le travailleur retire sa candidature - transaction pouvant avoir des effets juridiques (candidat ne figurant pas sur la liste définitive, vu le retrait de sa candidature)
Seuls bénéficient de la protection les candidats délégués du personnel mentionnés sur la liste définitive des candidats pour les élections
But de la protection : d’une part permettre aux délégués d’exercer leur mission dans l’entreprise et, d’autre part, assurer l’entière liberté des travailleurs de se porter candidat à l’exercice de ces fonctions - protection instituée dans l’intérêt général
Vu le caractère d’ordre public de la protection légale, le bénéficiaire ne peut valablement y renoncer
La protection spéciale des délégués et des candidats non élus est instituée dans l’intérêt général et est d’ordre public
Le candidat aux élections pour les conseils d’entreprise et comités de sécurité et d’hygiène bénéficie de la protection spéciale contre le licenciement, non pas à partir de l’introduction des listes des candidats, mais à partir du trentième jour précédant l’affichage de l’avis fixant la date des élections.
Lors de la candidature valable d’un travailleur licencié auparavant pour motif grave au cours de la période protégée, l’employeur, pour ne pas violer les dispositions organisant la protection, doit, immédiatement après la candidature et la demande de réintégration dans l’entreprise du travailleur licencié, procéder à cette réintégration, sous réserve de l’introduction dans les trois jours ouvrables et de la poursuite d’une procédure tendant à faire reconnaître le motif grave. Dans ces circonstances, la réintégration du travailleur licencié dans l’entreprise n’implique aucune renonciation au droit d’invoquer le motif grave pour justifier un licenciement sur-le-champ.
Décision liée à C. trav. Bruxelles, 22 septembre 2015, R.G. n° 2013/AB/888 (arrêt commenté)
(Décision commentée)
Dans son arrêt du 12 octobre 2015, la Cour de cassation a jugé que ni la loi du 29 juillet 1991 ni les principes généraux de bonne administration, et plus particulièrement celui de l’audition préalable, ne s’appliquent au licenciement de l’agent contractuel au service d’un employeur public. Elle a également précisé qu’un principe général de bonne administration ne saurait faire obstacle à l’application des dispositions de la loi du 3 juillet 1978 LCT. Le principe « audi alteram partem » n’impose dès lors pas à l’employeur d’entendre avant de le licencier un agent contractuel d’une intercommunale.
(Décision commentée)
Dans son arrêt du 12 octobre 2015, la Cour de cassation a jugé que ni la loi du 29 juillet 1991 ni les principes généraux de bonne administration, et plus particulièrement celui de l’audition préalable, ne s’appliquent au licenciement de l’agent contractuel au service d’un employeur public. Elle a également précisé qu’un principe général de bonne administration ne saurait faire obstacle à l’application des dispositions de la loi du 3 juillet 1978 LCT. Le principe « audi alteram partem » n’impose dès lors pas à l’employeur d’entendre avant de le licencier un agent contractuel d’une intercommunale.
Une indemnité modérée de 9 semaines peut être retenue lorsque les motifs invoqués, quoique non prouvés, ne paraissent, pour autant, pas complètement fantaisistes et qu’il est possible de retenir une simple mauvaise appréciation de la situation.
Statue dans le même sens que C. trav. Bruxelles, 10 janvier 2023, R.G. 2021/AB/693 ci-dessous quant à la manière dont un employeur normal et raisonnable eût dû appréhender l’impact potentiel sur son chiffre d’affaires de la crise économique liée à la pandémie de Covid-19.
Même s’il n’a eu connaissance du congé que par la suite, le fait que le travailleur ait pu entamer et poursuivre ses prestations après que son employeur lui eut envoyé sa lettre de licenciement est en contradiction avec l’essence même du licenciement pour motif grave, lequel doit sortir immédiatement ses effets et rendre la collaboration professionnelle immédiatement et définitivement impossible en raison de la faute commise. Il en va de même du fait pour l’employeur d’avoir, après l’envoi de ladite lettre, laissé l’intéressé poursuivre ses prestations durant plus de 5 heures, ce qui prouve également que la collaboration était encore possible. On doit, dans ces circonstances, conclure que les conditions de gravité du motif avancé font défaut.
N’est pas fautif le fait qu’un travailleur, tenu par les heures d’ouverture du service juridique de son syndicat, passe cette communication privée, au demeurant très brève, pendant les heures de bureau, ce que ne contredit du reste pas le règlement de travail de l’entreprise, lequel ne considère comme faute grave que l’abus de communications téléphoniques privées pendant les heures de travail.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Huy), 9 mars 2022, R.G. 19/275/A commenté ci-dessus.
(Décision commentée)
Pour l’application de la C.C.T. sectorielle dans le secteur bancaire relative à la stabilité d’emploi, la question est de déterminer si l’employée relève du champ d’application de la C.C.T. du 2 juillet 2007 (dont la cour rappelle qu’elle a été modifiée par une autre du 9 octobre 2009), dans la mesure où le texte prévoit que ses dispositions (§§ 2 et 3 de l’article 2) ne sont pas d’application (outre le cas du motif grave) aux membres du personnel qui n’entrent pas dans le champ d’application d’une autre convention collective du secteur, étant celle du 3 juillet 2008 relative au système de rémunération. En l’espèce, l’intéressée percevait une rémunération correspondant à une catégorie déterminée au sein de l’entreprise (catégorie 8), étant qu’elle était non barémisée. Elle se trouvait, ainsi, exclue du champ d’application de la C.C.T. du 3 juillet 2008 et, par voie de conséquence, de celle du 2 juillet 2007.
Si la question devait être envisagée sous l’angle de la discrimination, la cour appelle à la prudence, d’autant qu’il s’agirait d’une discrimination dont le motif n’est pas protégé par une base spécifique. Elle rappelle qu’une convention collective est le fruit d’un accord négocié, qui vise à obtenir un équilibre entre les droits et obligations des travailleurs et employeurs et qui transcende dès lors les intérêts individuels des travailleurs.
N’a pas communiqué d’offre valable, c’est-à-dire conforme aux conditions et modalités prescrites par la loi du 5 septembre 2001, l’entreprise qui, en dehors du délai de quinze jours, se limite, alors que la formalité du recommandé s’impose, à adresser au travailleur un courriel qui ne détaille pas l’offre de reclassement mais se limite à l’inviter à prendre contact avec le CEFORA « afin de discuter les modalités pratiques des services ».
Il incombait toutefois à ce dernier de mettre son employeur en demeure, par écrit et dans les quatre semaines qui suivent l’expiration du terme (article 11/8, § 1er, alinéa 2, de la loi du 5 septembre 2001), obligeant ainsi celui-ci à faire une offre dans un nouveau délai de quatre semaines après la mise en demeure (article 11/8, § 1er, alinéa 3).
A défaut d’avoir envoyé une telle mise en demeure, il ne peut plus faire valoir qu’il n’aurait pas reçu d’offre valable de reclassement. Son employeur était dès lors autorisé par la loi à opérer la déduction de quatre semaines de rémunération prévue par l’article 11/5 de la loi, qu’il a en l’espèce limitée à la déduction du montant de 5.500 euros (inférieur au montant de quatre semaines de rémunération).
Dans un contexte de chômage économique récurrent d’un personnel ouvrier pouvant difficilement se permettre une perte de revenus, le fait d’inciter ses collègues à exercer une activité concurrente ne constitue pas une faute grave, cette pratique étant du reste admise au sein de l’entreprise.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 24 juin 2021, R.G. 20/145/A en ce qu’il a dit non fondée, pour les motifs qu’il développe, la demande du travailleur d’être indemnisé pour licenciement manifestement déraisonnable et abus du droit de licencier.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 17 février 2022, R.G. 21/837/A (commenté ci-dessous) en toutes ses dispositions.
Est justifié le licenciement pour motif grave d’un travailleur qui, malgré qu’il se savait cas-contact (COVID-19), choisit de ne pas se mettre en quarantaine et expose ainsi collègues et résidents de la maison de repos dans laquelle il preste au risque de les contaminer.
(Confirme Trib. trav. Liège, div. Liège, 3 mars 2022, R.G. 20/3.212/A – ci-dessous)
L’ancienneté peut être un des critères à prendre en considération pour apprécier le caractère déraisonnable du licenciement et le dommage causé au travailleur. En l’espèce, le fait que, d’une part, le travailleur avait une faible ancienneté et était passé d’ouvrier à conducteur de chantier après quatre mois mais que, d’autre part, on lui reproche, sans l’établir, de ne pas respecter des règles de sécurité, a pu raisonnablement justifier la fixation d’une indemnité relativement réduite de quatre semaines, sans se limiter toutefois au minimum.
Obéissant à un régime probatoire spécifique, la reconnaissance de l’existence d’une discrimination n’est pas déterminante pour poser le constat d’un licenciement manifestement déraisonnable au sens de la C.C.T. n° 109.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Liège), 3 juin 2022, R.G. 20/712/A ci-dessous.
S’il y a incontestablement faute dans le chef d’un travailleur qui, pratiquant lui-même ce contournement, donne à un collègue les lui ayant demandées des informations techniques pour contourner le système de sécurité, celle-ci n’atteint toutefois pas la gravité requise pour constituer un motif grave, dès lors que l’intéressé n’est pas responsable de la décision prise par son collègue de les mettre en œuvre, ce d’autant que, en ce qui le concerne, la société s’est limitée à un avertissement oral.
Le régime temporaire instauré par la loi du 15 juin 2020 ne s’applique qu’à une forme déterminée de suspension de l’exécution du contrat de travail pour cause de force majeure : celle résultant des mesures gouvernementales prises pour limiter la propagation du COVID-19. Dès lors qu’il repose sur un critère objectif, il n’entraîne pas de différence de traitement injustifiée entre les travailleurs sous préavis bénéficiant d’allocations de chômage temporaire liées au COVID-19 dont le délai de préavis a commencé à courir après le 1er mars 2020 et ceux placés dans la même situation, mais dont le délai de préavis a commencé à courir avant cette date. Il en va de même de celle qui résulte de l’absence d’effet rétroactif finalement donné à ses dispositions, laquelle ne viole pas davantage les principes constitutionnels d’égalité et de non-discrimination mais, au contraire, fait suite à l’avis du Conseil d’Etat attirant l’attention sur l’atteinte que la rétroactivité initialement envisagée pourrait potentiellement porter à des situations ou droits acquis.
En cas de licenciement pour insuffisance professionnelle, la C.C.T. relative à la sécurité d’emploi conclue au sein de la commission paritaire n° 312 prévoit (i) que le travailleur fait d’abord l’objet d’un avertissement écrit et (ii) que, si cet avertissement ne produit aucun effet, l’entreprise s’efforcera, dans toute la mesure du possible, d’améliorer le niveau et les compétences professionnelles de l’intéressé en vue d’essayer de le maintenir dans sa fonction ou de le muter vers une fonction susceptible de mieux rencontrer ses capacités. Le non-respect de ces dispositions, non autrement sanctionné par la C.C.T., fonde le travailleur à postuler, en vertu du droit commun de la responsabilité civile, la condamnation de son employeur à lui payer des dommages et intérêts, fût-ce au titre de la perte d’une chance de conserver son emploi.
Il tombe en effet sous le sens que, si l’employeur avait respecté en tous points la procédure prévue, le travailleur aurait, à tout le moins, bénéficié non seulement d’un délai raisonnable pour tenter de remédier d’initiative aux insuffisances professionnelles qui lui étaient imputées, mais également d’une période au cours de laquelle son employeur aurait dû s’efforcer d’améliorer son niveau et ses compétences professionnelles en vue de son maintien à l’emploi. En le licenciant sans lui offrir cette double possibilité, il a manifestement privé l’intéressé de la chance de conserver son emploi, à tout le moins durant le temps nécessaire à cet effet, avant d’être (éventuellement) licencié (à défaut pour l’avertissement notifié d’avoir produit un effet et pour les efforts à déployer d’avoir abouti).
Il appartient au chef d’entreprise de déterminer les objectifs et les méthodes à appliquer en fonction des nécessités de celle-ci, avec pour possible conséquence que, à terme, un travailleur ne soit plus en phase avec cette évolution. Il ne peut cependant pas être exigé de figer une fonction telle que celle que le travailleur exerçait ; le juge n’exerce sur les décisions de cet ordre qu’un contrôle marginal.
(Décision commentée)
Le fait pour une employée d’accéder, sans la moindre autorisation, au contenu de la boîte mails d’un de ses collègues et de prendre copie de courriels qui ne lui étaient aucunement destinés en vue d’en faire un usage à son profit dans le cadre d’un différend avec son employeur constitue une faute d’une gravité telle qu’elle justifie un congé pour motif grave, un tel manquement étant de nature à rompre de manière immédiate et définitive la confiance de son employeur envers elle. La gravité de la faute ne peut être diminuée ni par la circonstance que l’intéressée aurait entendu se constituer un dossier pour se « défendre », ni par les tensions entre son employeur et elle, ni encore par l’absence d’intention frauduleuse.
Le comportement reproché au travailleur, consistant à avoir suivi une formation de traiteur comportant des cours de cuisine et des cours de gestion/fiscalité durant son incapacité de travail, sans en avoir informé son employeur, n’est pas un fait de conduite ayant pu motiver son licenciement au regard de la C.C.T. n° 109, puisqu’il s’agissait pour l’intéressé de se consacrer à une activité préconisée par son médecin-traitant (et admise par le médecin-conseil de la mutuelle) afin de favoriser sa guérison. Ce fait ne remettait dès lors nullement en cause son incapacité de travail ni ne compromettait en rien sa reprise du travail. Un employeur normal et raisonnable aurait d’abord veillé à s’informer du contexte et de la finalité exacte d’une telle formation, le cas échéant en entendant l’intéressé en ses explications, et n’aurait jamais licencié un de ses travailleurs pour de tels prétendus motifs.
Sauf à l’employeur de démontrer que la rupture est due à des motifs étrangers au fait de consigner des remarques, une protection contre le licenciement est accordée au travailleur qui a consigné, dans le registre ad hoc, des observations qui concernent (i) les nouveaux horaires résultant de l’application des dérogations à la durée hebdomadaire moyenne de travail ainsi qu’au nombre d’heures à prester sur la période de référence et (ii) la prolongation, à maximum un an, de la période de référence d’un trimestre durant laquelle il ne doit pas être travaillé en moyenne plus de quarante heures par semaine.
Tel est le cas lorsque l’employeur établit que c’est sur recommandation de la police qu’il a, dans un premier temps, pris une mesure d’écartement à l’encontre d’un éducateur contre qui les parents d’une adolescente hébergée avaient déposé plainte pour des faits très sérieux d’abus sexuels, mesure commuée en licenciement lorsqu’il est apparu, au vu de la durée de l’enquête pénale, que cette suspension avec maintien de la rémunération était une solution intenable en termes organisationnels et qu’il ne pouvait, budgétairement, y être répondu par l’engagement d’un remplaçant.
Dès lors que l’employeur n’offre pas au travailleur licencié un outplacement malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, le travailleur recouvre son droit à bénéficier d’une indemnité compensatoire de préavis sans déduction des quatre semaines de rémunération.
Si celui-ci réclame des dommages et intérêts, il doit démontrer que la faute de l’employeur lui a causé un dommage. Le travailleur qui ne bénéficie pas des services auxquels il a droit et qui sont destinés à lui permettre de retrouver le plus rapidement possible un emploi perd effectivement une chance de retrouver un emploi auprès d’un nouvel employeur. L’évaluation du degré de probabilité est un exercice qualifié de « difficile, voire impossible à réaliser ». La cour procède dès lors à une évaluation ex aequo et bono.
En l’absence de toute clause conventionnelle relative à la prise en compte d’une ancienneté fictive (ou basée sur de réels antécédents auprès d’un ou de plusieurs autres employeurs), la seule mention portée sur les fiches de paie relativement à l’ancienneté convenue pour la fixation de la rémunération ne traduit pas l’existence d’un accord sur celle qu’il conviendrait de retenir pour calculer le délai de préavis ou l’indemnité qui y correspond.
Lorsque les nécessités de fonctionnement de l’entreprise sont invoquées, le juge n’exerce qu’un contrôle marginal sur le caractère nécessaire du licenciement. Il doit cependant vérifier (i) si les faits invoqués sont établis, (ii) s’il existe un lien entre ces faits et le fonctionnement de l’entreprise et (iii) s’il existe un lien causal entre ces faits et le licenciement.
L’interprétation à donner à l’article 8 de la C.C.T. n° 109 est que le licenciement manifestement déraisonnable est soit celui qui a lieu pour des motifs qui n’ont aucun lien avec l’aptitude ou la conduite du travailleur ou qui ne sont pas fondés sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise, soit celui qui a lieu pour des motifs qui ont un lien avec la conduite ou l’aptitude du travailleur ou qui sont fondés sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise mais dans pareil cas qui n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable. Cette interprétation revient à considérer que le « et » apparaissant dans la définition doit se comprendre comme un « ou ».
Le fait que l’éventualité du licenciement du travailleur ait déjà été évoquée avant sa demande de congé parental ne dispense pas l’employeur d’établir, la décision une fois prise, que celle-ci l’a été pour un motif suffisant.
(Décision commentée)
Dès lors que le motif « suffisant » invoqué pour justifier la rupture consiste dans des questions de comportement, d’attitude hostile et agressive vis-à-vis de collègues (et ce en présence de clients) ou d’autres manquements, il y a lieu d’établir les faits invoqués. En l’espèce, aucune pièce du dossier ne met objectivement en évidence les étapes chronologiques d’un processus décisionnel en rapport avec les faits imputés à la travailleuse. Le lien causal n’est pas retenu, l’employeur échouant dans la démonstration que la décision de licencier repose sur les motifs invoqués. En outre, selon la cour, même si la société avait apporté cette preuve, il ne pourrait être raisonnablement exclu que les motifs avancés se soient mêlés au moins pour partie à un motif lié au congé parental.
Un licenciement pour motif grave peut revêtir un caractère abusif en raison de sa motivation réelle (en l’espèce, représailles en l’absence manifeste de toute faute) et des circonstances qui l’ont accompagné (accusations infondées, mensonge et demande abusive de dommages et intérêts par l’employeur).
L’examen du caractère manifestement déraisonnable du licenciement suppose le contrôle de quatre critères, étant (i) le contrôle de légalité (lien entre les motifs invoqués et ceux autorisés), (ii) le contrôle de réalité (existence de ces motifs), (iii) le contrôle de causalité (cause réelle du licenciement) et (iv) le contrôle de proportionnalité (exercice du droit par un employeur normal et raisonnable).
Les refus ou réticences d’une travailleuse à exécuter différentes tâches non contractuellement prévues ne peuvent être qualifiés de « motifs étrangers » au sens de l’article 40 de la loi du 16 mars 1971, vu que leur simple invocation contrevient au principe d’exécution de bonne foi des conventions inscrit à l’article 1134 de l’ancien Code civil et est en même temps contraire à l’objectif de protection que poursuit l’article 10 de la Directive n° 92/85/CEE. Autoriser l’employeur à fonder la décision de licencier la travailleuse enceinte sur pareil motif injustifié reviendrait à priver l’article 40 de son effet utile et pourrait engendrer un risque de contournement de l’interdiction au détriment des droits consacrés par la directive précitée.
Le fait qu’un conseiller en prévention, éprouvant des craintes quant au respect de son indépendance dans le cadre de son rôle, émette des observations critiques par rapport à la (nouvelle) organisation mise en place par son employeur n’est pas constitutif de motif grave lorsque celles-ci n’apparaissent pas avoir été émises avec disproportion, ne témoignent pas davantage d’une volonté de nuire et ne reflètent aucunement une attitude méprisante envers l’employeur, ni des démarches totalement déloyales.
Peut prétendre à une indemnité de protection en application de la loi du 20 décembre 2002 le conseiller en prévention dont le licenciement est notamment en lien avec les remarques critiques qu’il a formulées par rapport à son indépendance (qu’il estimait en péril) d’une manière n’excédant pas les limites du raisonnable (absence de caractère méprisant ou insultant de ses remarques et absence de volonté manifeste de nuire).
L’indemnité due pour licenciement manifestement déraisonnable doit être calculée en tenant compte non seulement de la rémunération déclarée, mais aussi de la rémunération perçue sans avoir fait l’objet des déclarations sociales et fiscales requises.
La C.C.T. n° 109 ne s’appliquant pas aux employeurs du secteur public, le juge est tenu d’appliquer le droit commun en s’en inspirant, le cas échéant, lorsque c’est possible. Il peut dès lors être recouru à la théorie de l’abus de droit en se référant aux critères de cette C.C.T. Si les motifs qui y sont visés peuvent constituer une source d’inspiration, il ne peut notamment être question d’appliquer par analogie le renversement de la charge de la preuve en faveur du travailleur. Le droit commun de la preuve ne prévoit en effet pas un tel renversement automatique. Appliquant en l’espèce les critères de l’abus de droit de licencier (la charge de la preuve reposant sur le travailleur), la cour recherche une faute distincte du seul non-respect des règles relatives à la rupture du contrat, un dommage distinct de celui causé par le licenciement et un lien causal entre la faute et le dommage.
Dès lors que le motif grave de licenciement reproché à un conseiller en prévention n’a pas été retenu, celui-ci est également en droit de prétendre à l’indemnité spéciale de protection, dans la mesure où le licenciement n’est pas étranger à son indépendance. En l’espèce, il est avéré que l’intéressée a notamment été perçue par l’employeur comme faisant preuve d’une attitude négative et peu constructive parce qu’elle s’interrogeait sur la possibilité de conserver son indépendance en qualité de conseiller en prévention. Cette attitude reprochée découle essentiellement du questionnement exprimé par celle-ci par rapport au fait de perdre l’indépendance requise pour l’exercice de sa fonction. Est également pointée une demande de l’intéressée, relayée en C.P.P.T., tendant à la désignation d’un C.P.A.P. en vue de la gestion des risques psychosociaux dans l’entreprise, demande considérée comme relevant du même souci exprimé de garantie d’indépendance. Si l’intéressée s’est montrée critique vis-à-vis de l’employeur, elle ne s’est pas comportée d’une manière excédant les limites du raisonnable et peut dès lors prétendre à l’indemnité spéciale.
L’indemnité pour licenciement abusif due sur la base de l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 n’a pas la nature de dommages et intérêts octroyés en application du droit de la responsabilité civile. Elle est, en effet, due parce que l’employeur ne prouve pas avoir licencié l’ouvrier pour l’un des motifs de licenciement admis par la loi. Son montant, forfaitaire, qui ne dépend donc ni dans son principe ni dans son étendue de l’existence d’un dommage dans le chef de l’ouvrier, contribue à réparer la perte de l’emploi, perte qui ne constitue pas en soi un préjudice de nature exclusivement ni même principalement morale. Le précompte professionnel doit dès lors être retenu.
(Décision commentée)
La cour pose la question du caractère potentiellement discriminatoire de l’article 39 de la loi du 3 juillet 1978 avant sa modification par la loi du 7 octobre 2022 transposant partiellement la Directive (UE) n° 2019/1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 et interroge la Cour constitutionnelle.
En allant reprendre sa boîte à outils sur le chantier, au vu et au su de ses collègues, à un moment où il ignorait qu’il serait licencié quelques heures plus tard, le travailleur n’a pas agi comme le ferait l’auteur d’un vol. En effet, un vol implique une part de dissimulation et un dol spécial. Pour établir l’élément moral de l’infraction, l’employeur aurait à tout le moins dû adresser une mise en demeure à l’intéressé, lui enjoignant de rapporter les outils. Ce n’est qu’à défaut de les restituer, malgré une invitation expresse à le faire, que l’existence d’un vol aurait raisonnablement pu être établie dans son chef.
La confiance que l’employeur doit avoir dans le travailleur est immédiatement et définitivement rompue par la connaissance du fait que, malgré un premier avertissement et des affichages explicites rappelant l’interdiction de cette pratique, ce dernier a continué à prendre et publier sur Snapchat des photographies de pièces fabriquées au sein de l’entreprise, d’autant que la connaissance de ce comportement par un client peut avoir des conséquences graves en termes de publicité (les spécificités desdites pièces ne se retrouvant pas sur internet) et de responsabilité, ce dont il était tout à fait conscient.
En période de crise, il faut accepter, dans l’intérêt de chacun, que l’entreprise puisse prendre des mesures de rationalisation pour assurer sa survie et l’emploi, même lorsque ces mesures entraînent des modifications ou sont, comme en l’espèce où ces modifications n’étaient encore que projetées, susceptibles d’en entraîner. Dans ces conditions, il n’est pas possible de retenir que la société aurait commis un manquement contractuel d’une gravité telle qu’elle justifierait la sanction la plus radicale de la résolution du contrat à ses torts, alors qu’elle ne faisait qu’indiquer ses souhaits, pour des motifs exposés en toute transparence.
(Réforme Trib. trav. Liège, div. Liège, 8 octobre 2021, R.G. 19/3.879/A - décision commentée, ci-dessous).
Viole une clause contractuelle entre parties le travailleur qui, pendant son absence pour incapacité, a participé, à l’insu de son employeur et de concert avec sa compagne, également absente pour incapacité de travail, à la mise en place et à l’exercice d’une activité professionnelle, fût-elle non concurrente, alors que l’article 45 du règlement de travail dispose qu’il est défendu au travailleur d’exécuter un autre travail que celui qui lui a été confié. En outre, en se consacrant, à l’insu de son employeur, à des affaires commerciales continues tout en étant en incapacité de travail, il a trompé la légitime confiance de l’employeur.
Un employeur est libre de l’organisation du travail qu’il veut voir appliquée. Tant qu’il ne modifie pas de façon importante un élément essentiel du contrat d’un travailleur, il peut décider de modifier la manière dont le travail est organisé et la manière dont il est contrôlé. Il peut également décider de promouvoir un travailleur et le placer hiérarchiquement au-dessus d’un autre sans que cet autre travailleur puisse s’en plaindre pour autant que ses propres fonctions ne soient pas modifiées unilatéralement de façon importante et que cette décision ne soit pas abusive. Et ce n’est pas parce qu’il s’avère in fine que ce choix managérial n’était peut-être pas le meilleur (puisque, en l’espèce, le travailleur placé ‘au-dessus’ de lui a en finalement été licencié) qu’il était fautif dans le chef de l’employeur et encore moins qu’il constituait un acte équipollent à rupture.
La jurisprudence Antigone ne permet pas de justifier n’importe quel comportement à l’égard de l’employeur. Il existe, en effet, d’autres moyens d’obtenir des preuves qu’en procédant à l’enregistrement de ses collègues à leur insu pour, ensuite, partager le contenu des enregistrements avec d’autres collègues. Ce comportement est d’autant plus grave que la travailleuse avait déjà reçu un avertissement précisant qu’elle avait été, directement ou indirectement, à l’origine de différents conflits, lesquels se manifestaient surtout par des disputes verbales plus ou moins violentes accompagnées ou non d’insultes, de grossièretés et d’allusions tendancieuses relatives à la vie privée de ses collègues ou supérieurs.
(Décision commentée)
Dès lors que l’incapacité de travail a été évaluée en relation avec le travail convenu, il est possible que le travailleur, tout en étant reconnu incapable d’effectuer son travail, puisse en exécuter un autre (lucratif ou non). Une activité réalisée pendant une période d’incapacité ne démontre dès lors pas forcément l’aptitude du travailleur à exercer le travail convenu. Pour être constitutive de faute grave, l’activité exercée pendant une période d’incapacité doit violer une clause contractuelle, être de nature à retarder l’échéance de la guérison ou être par essence même révélatrice de l’absence de réalité de l’incapacité. Ainsi, si le travailleur exerce un travail identique à celui faisant l’objet du contrat. Un dernier critère est retenu, étant qu’il faut avoir égard à l’ampleur et à la similarité des activités.
N’a pas dépassé les bornes du droit de critique qui participe à sa liberté d’expression le travailleur qui, n’étant plus dans les liens d’un contrat de travail avec l’entreprise et dont le droit à la liberté d’expression n’était, de ce fait, plus limité par une quelconque obligation contractuelle, publie, sur un groupe public Facebook, un commentaire certes négatif pour elle, mais qui reste néanmoins vague, modéré, dépourvu du moindre caractère calomnieux ou diffamatoire, voire simplement offensant, et qui s’enracine au demeurant dans une expérience objectivée par la reconnaissance du caractère manifestement déraisonnable de son licenciement.
Lorsque plusieurs faits sont invoqués comme motif grave et que le juge considère qu’un de ces faits suffit à justifier le congé pour motif grave, il ne doit plus examiner les autres faits (avec renvoi à Cass., 7 mars 1983, n° 6.546).
Par « employeur », il faut entendre la personne qui, dans l’entreprise, est investie d’une part de l’autorité patronale et dont a travailleuse peut, en raison des usages en vigueur au sein de celle-ci ou d’une apparence suffisante, raisonnablement supposer qu’elle est la personne à prévenir de son état de grossesse. Que cette personne ne soit, en vertu des statuts ou d’un règlement interne à l’entreprise, pas celle qui a compétence pour engager et licencier le personnel est, à cet égard, sans aucune incidence.
La circonstance que l’existence d’un motif grave n’ait pas été reconnue, faute pour l’employeur d’avoir rapporté la preuve des faits qu’il invoque, n’a pas pour effet de rendre le licenciement intervenu sur leur base manifestement déraisonnable dès lors que ceux-ci font suite à divers avertissements adressés au travailleur faisant état, dans son chef, de retards injustifiés, de manque de sérieux et d’insubordination, soit autant de faits relatifs à sa conduite et à son attitude qui n’ont, à l’époque fait l’objet d’aucune contestation de sa part et, pour deux d’entre eux, ont été reconnus par écrit, avec signature de sa main et mention « lu et approuvé ».
Accuser un travailleur de vol de manière infondée constitue une atteinte à son honorabilité et implique réparation, dont le montant, normalement élevé eu égard à la gravité des accusations, doit néanmoins être compensé en tenant compte des éléments dont disposait l’employeur, mais également de la façon dont le travailleur a exercé ses fonctions, à tout le moins la dernière année.
(Réforme Trib. trav. Liège, div. Neufchâteau, 25 octobre 2021, R.G. 20/75/A – ci-dessous).
Le fait pour un travailleur de manquer à ses obligations en matière d’information et de justification de ses absences, déjà fautif en soi, acquiert un caractère de gravité tel que son employeur peut légitimement considérer qu’il rend la poursuite des relations contractuelles immédiatement et définitivement impossible dès lors que ces manquements se répètent nonobstant l’insistance conciliante, didactique, patiente et progressivement plus ferme de ce dernier.
Lorsque les juridictions du travail refusent d’admettre un licenciement pour motif grave, l’indemnité visée à l’article 10 de la loi du 20 décembre 2002 est due si le juge constate soit que les motifs invoqués par l’employeur ne sont pas étrangers à l’indépendance du conseiller en prévention, soit, si le motif invoqué pour le licenciement de l’intéressé est son incompétence à exercer ses missions, que l’employeur ne prouve pas celle-ci (avec renvoi à Cass., 12 avril 2021, n° S.20.0050.N).
Dès lors qu’elle est compatible avec la fonction exercée et qu’elle n’est pas déraisonnable, la circonstance qu’une exigence n’était pas inscrite dans le contrat dès l’origine ne la rend pas abusive. Les nécessités de fonctionnement de l’entreprise pouvant évoluer en cours d’exécution du contrat, il n’est en effet pas abusif de mettre fin à celui-ci lorsque le fait de ne pas remplir cette exigence ne permet plus de rencontrer lesdites nécessités.
Il appartient aux juridictions sociales de vérifier si les motifs invoqués par l’employeur à l’appui d’un licenciement (i) entrent dans une des trois catégories de motifs légitimes définis par la C.C.T., (ii) sont exacts, (iii) constituent la cause réelle du licenciement et (iv) sont suffisamment pertinents pour justifier celui-ci. Le juge doit commencer par déterminer – en tenant compte des mécanismes de la charge de la preuve – si le motif correspond à la réalité. Le contrôle de la réalité du licenciement est un contrôle strict, non marginal. Une simple affirmation d’une des parties ne peut tenir lieu de preuve quant à l’existence d’un fait qu’elle est tenue de démontrer.
Des explications fournies oralement au travailleur quant aux faits qui lui sont reprochés ne peuvent entrer en ligne de compte pour apprécier la précision des motifs notifiés, cette exigence étant également destinée à permettre au juge, par définition absent des entretiens ayant pu avoir lieu entre parties, de statuer en connaissance de cause sur le caractère de gravité desdits motifs.
(Décision commentée)
On ne peut automatiquement postuler qu’en poursuivant l’exécution de son contrat pendant toute la période couverte par un préavis nul, le travailleur, qui n’était pas conscient de cette nullité ou ignorait les conséquences de la notification d’un préavis nul, aurait renoncé à se prévaloir du congé qui lui avait été notifié.
Dès lors que les relations de travail se sont dégradées pendant la période de préavis, on ne peut tirer aucune conclusion du fait que la travailleuse ait été déclarée définitivement inapte au travail par la médecine du travail plus d’un an après avoir été licenciée. En l’absence de mesures d’instruction complémentaires qui auraient pu démontrer que le motif de licenciement n’était pas celui invoqué par l’employeur, il est également indifférent que l’auditorat ait classé sa plainte pour donner priorité à la voie civile.
Lorsqu’il n’est pas établi que l’entretien s’est déroulé dans un contexte de violence verbale ou physique et qu’il n’est pas davantage rapporté que le travailleur a sollicité la présence d’un délégué syndical qui lui aurait été refusée, a demandé la suspension de l’entretien ou encore a requis de pouvoir contacter une tierce personne, on ne peut prétendre qu’il y a eu violation des droits de la défense, que le choix qui lui fut laissé entre la signature de la convention ou le licenciement pour faute grave soit révélateur d’une pression illicite ou injuste exercée à son égard, ni même que le fait de ne pas l’avoir prévenu des motifs de l’entretien soit constitutif d’un abus de droit alors que ce flou s’imposait pour éviter toute concertation entre auteurs du même comportement auxquels l’employeur voulait appliquer le même traitement après s’être assuré d’avoir entendu leur version des faits. Dans ce contexte, l’invitation qui lui fut faite de quitter la société sans avoir la possibilité de leur parler reste également cohérente.
Il importe peu que l’appropriation et le détournement de timbres remis aux clients lors d’actions promotionnelles soient ou non constitutifs d’une infraction de vol au sens de l’article 461 du Code pénal, dès lors que tout fait qui peut être considéré comme une faute est susceptible de constituer le motif grave permettant de résilier le contrat sans préavis ou avant l’expiration de son terme et que l’honnêteté dans les relations de travail constitue une obligation essentielle dont le non-respect est de nature à miner le sentiment de confiance qui doit présider dans les rapports entre parties.
Depuis l’entrée en vigueur de la CCT n° 109, la faute requise pour qu’il puisse être question d’abus de droit ne peut plus être constituée par le motif du licenciement, lequel ne peut plus faire l’objet que du contrôle prévu par ladite CCT (sous réserve du contrôle des motifs qui s’impose par ailleurs en cas de discrimination ou de protection contre le licenciement) mais uniquement par les seules circonstances du licenciement. Le dommage requis doit également se distinguer de celui qui résulte du motif du licenciement.
L’apparition du foyer de contamination au COVID-19 au sein d’une résidence pour personnes âgées ne saurait constituer une circonstance de nature à conférer soudainement aux manquements d’une auxiliaire de soins le caractère d’un motif grave, ce alors même que ces manquements ne rendirent manifestement pas, comme tels et à eux seuls, immédiatement et définitivement impossible la poursuite de ses prestations lorsqu’ils furent constatés à non moins de deux reprises par sa supérieure hiérarchique avant l’apparition de ce foyer de contamination. Le fait que le respect des règles sanitaires en vigueur s’imposait de manière absolue n’y change rien, puisqu’il apparaît que les mesures de contrôle et les sanctions dont ces règles faisaient l’objet sur le terrain n’étaient elles-mêmes pas aussi absolues, à tout le moins jusqu’à l’apparition de ce foyer de contamination, comme en atteste notamment le fait que nonobstant les manquements précédemment constatés dans son chef, l’intéressée ne se vit jamais adresser aucun avertissement écrit ni aucune sanction.
La sanction radicale qui lui fut alors infligée sous la forme d’un licenciement pour motif grave paraît ainsi manifestement disproportionnée, compte tenu de l’indulgence dont elle avait jusqu’alors bénéficié de la part de sa supérieure hiérarchique, comme de l’absence de tout (nouveau) manquement constaté dans son chef, qui aurait effectivement contribué à l’apparition de ce foyer de contamination alors que les règles sanitaires venaient de lui être rappelées à la suite des premiers symptômes qu’elle commença à présenter elle-même, sans pour autant être écartée immédiatement (confirme Trib. trav. Liège, div. Liège, 14 février 2022, R.G. 21/326/A ci-dessous).
Il n’apparaît pas que l’intention du législateur aurait été de garantir au travailleur protégé dont le contrat est suspendu (article 9 de la loi du 19 mars 1991) un revenu fiscal net annuel identique correspondant à la rémunération brute diminuée non seulement des cotisations de sécurité sociale et du précompte professionnel, mais également des impôts proprement dits, ce revenu étant variable en fonction de facteurs étrangers à l’emploi. En outre, la notion de « rémunération nette » vise celle qui subsiste après la déduction des cotisations de sécurité sociale et du précompte professionnel et non après celle de ces cotisations de sécurité sociale et des impôts proprement dits. Le travailleur doit dès lors percevoir un montant net égal à la rémunération mensuelle nette (soit après les retenues de sécurité sociale et du précompte professionnel) et en tenant compte de l’ensemble des avantages nets, conformément à l’arrêté royal du 21 mai 1991, le calcul devant s’opérer en soustrayant de la rémunération nette de référence le montant net de l’allocation de chômage.
En liant l’appréciation de la possibilité de poursuivre les relations professionnelles malgré la faute grave commise par le travailleur, qui constitue le critère légal de la notion de motif grave, au critère, qui lui est étranger, de la disproportion entre cette faute et la perte de son emploi, le juge violerait l’article 35, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978 (avec renvoi à Cass., 6 juin 2016, n° S.15.0067.F)
(Décision commentée)
L’employeur, au sens de l’article 40 de la loi du 16 mars 1971, est la personne qui, dans l’entreprise, est investie d’un pouvoir d’autorité patronale et dont la travailleuse peut raisonnablement comprendre qu’elle est la personne à informer de sa grossesse, et ce sur la base des usages valant en interne ou de l’apparence donnée. Ce n’est pas parce que le gérant de la société est le représentant fixe de celle-ci et qu’il signe les contrats de travail ou les lettres de licenciement qu’il doit être considéré comme étant la seule personne ayant la qualité d’employeur. En l’espèce, la gérante du magasin peut être considérée comme telle, dans la mesure où elle était investie d’un pouvoir d’autorité dans l’entreprise.
La seule invocation de dispositions légales à l’appui d’une demande de dommages et intérêts pour la perte d’une chance de conserver son emploi ne permet pas d’en déduire qu’une demande d’indemnité pour abus de droit de licencier, à supposer qu’elle repose sur les mêmes dispositions, serait virtuellement comprise dans la première, le(s) fondement(s) juridique(s) invoqué(s) ne se confondant pas avec l’objet d’une demande. Il s’agit ainsi d’une demande nouvelle qui, même fondée sur un fait ou un acte invoqué dans la citation conformément à l’article 807 du Code judiciaire, ne bénéficie pas de l’effet interruptif de la prescription.
(Décision commentée)
Il appartient à un employeur estimant que son travailleur n’a pas à apposer sur son lieu de travail des affiches à caractère humoristique dont le contenu lui paraît offensant ou de nature à décrédibiliser son autorité, dans un premier temps, de faire une mise au point avec lui. Ce n’est que si celle-ci - d’autant plus nécessaire en l’absence de règle précise sur ce plan au sein de l’entreprise - est restée lettre morte qu’une autre mesure aurait, dans un second temps, pu être envisagée.
Une personne peut être engagée sur le fondement d’un mandat apparent si l’apparence lui est imputable, c’est-à-dire si elle a, librement, par son comportement, même non fautif, contribué à créer ou à laisser subsister cette apparence. Le travailleur peut se contenter de démontrer que l’employeur a laissé croire, même sans malice, que l’auteur du congé avait le pouvoir de le licencier. Il en est ainsi notamment lorsque le congé est donné par le responsable du personnel alors qu’il n’a pas reçu mandat pour le faire. La légitimité de la croyance du tiers est une question de fait, la doctrine distinguant la situation du travailleur subalterne et celle de l’administrateur-délégué d’une société (le premier, s’il est licencié par une personne dont l’employeur conteste ultérieurement les pouvoirs, pouvant invoquer à l’appui de sa croyance légitime notamment le fait que cette personne s’est présentée comme « chef du personnel », et le second, eu égard à l’importance de ses fonctions, ne pouvant ignorer le contenu de dispositions statutaires – lorsque celles-ci prévoient que la décision de licencier ne peut être prise que par deux administrateurs ou par l’ensemble du conseil d’administration).
La résiliation d’un contrat par volonté unilatérale d’une partie est un acte juridique unilatéral réceptice qui produit ses effets de plein droit et d’une manière irrévocable dès l’instant où il a été adressé à l’autre partie et que celle-ci l’a reçu ou pouvait en prendre connaissance. La validité du congé n’est pas subordonnée à l’acceptation de son destinataire et ce dernier peut se prévaloir de ses effets dès sa manifestation à son égard. Dans le même ordre d’idée, le congé ne pourra être opposé par son auteur à l’autre partie qu’au moment où celle-ci aura été mise à même d’en prendre connaissance.
(Décision commentée)
En règle, une société anonyme agit par ses organes. Ceux-ci peuvent déléguer des pouvoirs spéciaux, déterminés par leurs soins, à des mandataires spéciaux. Dans une société anonyme, il n’est pas exigé que l’organe de gestion soit expressément autorisé, par les statuts, à conférer un mandat spécial ; cette faculté de donner mandat fait partie de ses pouvoirs ordinaires. Ces délégations de pouvoirs spéciaux sont soumises aux règles ordinaires du mandat.
Le mandataire spécial investi par un organe de la société peut, éventuellement, se voir conférer le pouvoir de désigner lui-même un mandataire pour exécuter le mandat.
Le fait qu’une réceptionniste dont la fonction exige qu’elle manipule quotidiennement de l’argent pour le compte de son employeur se soit approprié, en connaissance de cause, de l’argent que lui avait remis un client en paiement de sa place de parking constitue une faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible la poursuite de la relation de confiance qui doit exister entre employeur et travailleur.
Un employeur ne peut plus accorder aucune confiance à un ouvrier qui, non content de refuser d’exécuter le travail qui lui est légitimement assigné par son responsable, profère insultes et menaces et, malgré un rappel à l’ordre dans le cadre d’un avertissement formel, persiste à adopter un comportement sexiste et peu respectueux à l’égard de ses collègues.
Dès lors que le licenciement pour faute grave a été validé, il ne peut être question de considérer qu’il est manifestement déraisonnable. Ce licenciement est, évidemment, fondé sur la conduite du travailleur et aurait été décidé par un employeur normal et raisonnable.
Ni les incertitudes auxquelles la société a été confrontée du fait de la crise économique due à la pandémie de Covid-19, ni l’obligation dans laquelle son management s’est trouvé de devoir maîtriser ses coûts ne peuvent, en tant que tels, suffire à justifier un licenciement. Encore faut-il démontrer un rapport de cause à effet entre cette situation et ce licenciement, ce sous peine que la décision de rupture apparaisse comme ayant été prise de manière inconsidérée et prématurée faute d’avoir attendu de pouvoir mesurer quelles pourraient être les conséquences exactes de cette crise sanitaire dans les mois à venir.
C’est à bon droit qu’un employeur estime ne plus pouvoir collaborer, de manière immédiate et définitive, avec un contrôleur de gestion, membre du comité de direction, enfreignant sciemment les règles qu’il est censé faire appliquer et abusant de son pouvoir pour obtenir un avantage indu.
(Décision commentée)
Les dommages et intérêts dus en réparation du préjudice causé par l’employeur suite à un abus de droit de licencier sont une indemnité « due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail » et réparent le préjudice causé par la faute commise par l’employeur à l’occasion de la rupture et donc de la fin du contrat. Que cette indemnité pour abus de droit sanctionne un comportement différent de l’employeur et qu’elle vise également un dommage distinct de celui couvert par l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable n’est pas de nature à justifier, pour la cour, une autre lecture de la disposition. Le texte de l’article 9, § 3, est clair et ne prête pas à une autre interprétation.
Elle devrait dès lors s’effacer devant l’indemnité que le travailleur obtiendrait en raison d’un abus de droit de licencier, approche que la cour considère se concilier parfaitement avec la hiérarchie des sources des obligations dans les relations de travail telle que fixée à l’article 51 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires.
Elle en conclut que c’est au travailleur d’articuler ses demandes au mieux de ses intérêts en tenant compte de cette règle. Il faut traiter d’abord la demande d’indemnité pour licenciement abusif et, ensuite, s’il échet, celle pour licenciement manifestement déraisonnable.
(Décision commentée)
L’indemnité de stabilité d’emploi due dans le secteur bancaire en application de la convention collective de travail du 2 juillet 2007 constitue bel et bien une indemnité « due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail » au sens de l’article 9, § 3, de la CCT n° 109 et ne peut être assimilée à aucune des quatre indemnités pour lesquelles le cumul serait permis en application de celui-ci. Que l’indemnité de stabilité d’emploi puisse sanctionner un comportement différent de l’employeur et qu’elle vise aussi un dommage distinct de celui couvert par l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable n’est pas de nature à justifier une autre lecture dudit article, dont le texte clair ne prête pas à une autre interprétation.
L’impact négatif sur la relation de confiance d’actes posés sciemment et en cascade en infraction à une procédure interne (secteur bancaire), précisément mise en place dans un cadre légal contraignant pour prévenir tout dommage, non seulement ne peut être relativisé en considération de l’absence de préjudice, mais apparaît dirimant. La cour conclut en l’espèce que, même prises isolément, les fautes successives constatées dans la gestion d’un dossier ont pu rendre immédiatement et définitivement impossible la poursuite de toute collaboration professionnelle entre les parties.
(Décision commentée)
En soi, il pourrait sans doute être défendu que l’indemnité de stabilité d’emploi propre au secteur bancaire ne constitue pas, à strictement parler, une indemnité prévue « dans le cadre d’une procédure de protection particulière contre le licenciement » au sens de l’article 30, § 4, de la loi du 3 juillet 1978. En effet, elle trouve sa cause, non pas dans le licenciement lui-même, mais plus sûrement, en amont de la décision de licencier, dans le non-respect par l’employeur de la procédure qu’il était tenu de suivre dès lors qu’il envisageait de procéder au licenciement du travailleur. En revanche, l’indemnité de protection liée au congé de paternité constitue bien une (autre) « indemnité de protection » légale avec laquelle l’indemnité de stabilité d’emploi ne peut être cumulée en application de l’article 2, § 3, alinéa 2, de la C.C.T. sectorielle du 2 juillet 2007. Quand bien même les deux indemnités ne poursuivraient pas le même objectif et ne répareraient pas le même dommage, cela ne serait pas de nature à justifier une autre lecture dudit article dont le texte clair ne prête pas à une autre interprétation.
Au demeurant et en tout état de cause, l’indemnité de protection liée au congé de paternité et l’indemnité de stabilité d’emploi du secteur bancaire partagent un objectif commun, celui de protéger l’emploi en incitant à sa conservation. L’existence éventuelle d’un objectif dérivé additionnel propre à l’indemnité de protection liée au congé de paternité ne contredit pas le fait que les deux indemnités poursuivent un même objectif.
Le sentiment d’injustice ressenti par le travailleur licencié, qui est probablement commun à la plupart des ruptures décidées unilatéralement par l’employeur, ne constitue pas en soi un dommage moral distinct de celui déjà couvert par l’indemnité compensatoire de préavis.
Il ne peut être soutenu que les articles 4, 5 et 16 et 17 de la loi du 19 mars 1991 sont contraires aux articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’ils traitent de manière similaire des catégories d’entreprises différentes par leur taille, en prévoyant le même montant en ce qui concerne l’indemnité de protection à verser, sans tenir compte de leur taille ainsi que de leur capacité financière, faisant peser sur les petites et micro-entreprises un risque disproportionné par rapport au but et à l’esprit de la loi .
Dès lors que le législateur vise un effet dissuasif déterminé par la hauteur des indemnités pour éviter des licenciements injustifiés tant des candidats élus que des candidats non élus, il ne saurait être question d’un risque disproportionné que le législateur ferait courir aux employeurs de plus petite taille par rapport au but et à l’esprit de la loi. Il suffit aux entreprises, quelle que soit leur taille, de respecter la procédure de licenciement prévue par la loi du 19 mars 1991 pour éviter que le risque financier se réalise.
On n’aperçoit pas en quoi l’équivalence de protection dont dispose les candidats non élus et les candidats élus contrevient au droit de travailler et à la liberté d’exercer une profession librement choisie ou acceptée ou à la liberté d’entreprise consacrée par les articles 15 et 16 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Comme l’a jugé la Cour Constitutionnelle (arrêt n° 115/12 du 10 octobre 2012 ), le législateur belge a dans le cadre de son pouvoir d’appréciation en matière socio-économique, élaboré une solution équilibrée quant à la protection à reconnaître aux travailleurs qui, en raison de leurs tâches de représentants du personnel au sein du comité pour la prévention et la protection au travail, risquent d’être l’objet de mesures de représailles de la part des employeurs et a étendu cette protection au bénéfice des candidats non élus, lesquels pourraient également faire l’objet de pareilles mesures. La procédure de licenciement à respecter n’entrave d’aucune manière la liberté d’établissement des entreprises.
(Décision commentée)
Pourvu que le licenciement soit fondé sur des motifs étrangers à la prise du congé de paternité rien n’oblige un employeur à faire précéder sa décision de rompre d’un quelconque avertissement, ni même d’attendre l’écoulement du délai de protection visé à l’article 30, § 4, alinéa 4, de la loi du 3 juillet. Sous cet angle, s’il n’est pas établi que le licenciement est lié à la prise du congé de paternité, il n’y a pas, dans le chef de l’employeur, d’abus de son droit de licencier, même si le travailleur a été licencié avec effet immédiat à son retour de congé de paternité sans avoir jamais reçu le moindre avertissement et que, d’une certaine manière, l’annonce du licenciement a pu lui paraître brutale.
L’indemnité de stabilité d’emploi due dans le secteur bancaire en application de la convention collective de travail du 2 juillet 2007 constitue bel et bien une indemnité « due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail » au sens de l’article 9, § 3, de la C.C.T. n° 109 et ne peut être assimilée à aucune des quatre indemnités pour lesquelles le cumul serait permis en application de celui-ci. Que l’indemnité de stabilité d’emploi puisse sanctionner un comportement différent de l’employeur et qu’elle vise aussi un dommage distinct de celui couvert par l’indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable n’est pas de nature à justifier une autre lecture dudit article, dont le texte clair ne prête pas à une autre interprétation.
Le fait qu’un travailleur n’ait pas été retenu, au terme de processus de reclassement interne, pour les diverses fonctions pour lesquelles il avait postulé n’est pas fautif en soi, le découragement qu’il a pu connaître à l’issue de ceux-ci ne se confondant pas avec une faute de son employeur qui engagerait la responsabilité de ce dernier.
Compte tenu de leur ancienneté et à défaut d’éléments indiquant que ces griefs auraient encore été d’actualité au moment de son licenciement ou, à tout le moins, qu’il a été motivé par ceux-ci, deux lettres d’avertissement adressées au travailleur ne peuvent suffire à prouver que la cause de la rupture intervenue plusieurs années après leur envoi est étrangère au crédit-temps pris par l’intéressé.
La mise en place par un employeur d’outils servant à évaluer les connaissances de ses travailleurs participe d’une saine gestion des ressources humaines et, plus globalement, de l’entreprise. Ce que fera l’employeur in fine des informations recueillies à travers l’usage de ces outils relève de sa liberté d’entreprendre et ne regarde pas le travailleur, à tout le moins au niveau décisionnel. Dans cette optique, le fait, pour un travailleur, de refuser de se soumettre à un test d’évaluation des connaissances parce qu’il le jugeait inutile au vu de la finalité qu’il percevait, revient à s’immiscer de manière inacceptable dans la direction de l’entreprise et à manquer à son devoir de loyauté. En outre, dès lors que la participation à ce test lui avait été imposée par son responsable, son attitude traduit aussi une contestation ouverte de l’autorité de l’employeur au mépris de l’obligation d’agir conformément aux ordres donnés en vue de l’exécution du contrat. Son licenciement n’apparaît donc pas manifestement déraisonnable.
À la supposer applicable, la loi belge ne contreviendrait pour autant pas à la Convention (OIT) n° 158 puisque cette dernière précise que le droit du travailleur de pouvoir se défendre contre les allégations formulées par son employeur n’existe pas lorsque l’on ne peut raisonnablement attendre de ce dernier qu’il lui offre cette possibilité. Tel est assurément le cas lorsqu’un licenciement est justifié par des motifs économiques s’inscrivant dans le cadre d’un plan d’action sociale conclu avec les organisations syndicales après que le statut d’entreprise en difficulté fut reconnu à la société.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 21 octobre 2022, R.G. 22/820/A ci-dessous en toutes ses dispositions.
En application de l’article 101, alinéa 1er, in fine, de la loi du 3 juillet 1978, l’employeur ne peut échapper au paiement de l’indemnité d’éviction que s’il établit qu’il ne résulte de la rupture aucun préjudice pour le représentant de commerce. Il doit en apporter la preuve. L’absence de préjudice ne peut être admise que s’il est établi que le représentant a conservé, après son licenciement, la clientèle apportée ou s’il a abandonné la valorisation de celle-ci. La seule circonstance qu’il n’ait plus exercé une activité de représentation commerciale ne démontre pas l’absence de préjudice. Le statut du travailleur après la rupture du contrat (chômage, prépension ou mutuelle) n’est pas le fait de son choix mais est en lien avec la rupture du contrat qui a été imposée. L’absence de préjudice en termes de perte de clientèle n’est pas établie de ce fait.
La protection débute au moment du dépôt de la plainte et non de l’information du dépôt donnée à l’employeur, que ce soit par le conseiller en prévention en cas de plainte motivée au sein de l’entreprise ou par les autres personnes ayant reçu la plainte. Elle existe dès le dépôt parce que le législateur imagine à juste titre que l’employeur peut être informé de l’existence d’une telle plainte avant l’annonce officielle par le conseiller en prévention ou les autres acteurs l’ayant reçue. Le législateur a entendu protéger le travailleur contre un licenciement en représailles à ce dépôt.
Si la volonté du législateur avait été de sanctionner un employeur licenciant un travailleur pour des motifs en lien avec les faits invoqués dans la plainte, il n’aurait pu faire débuter la protection qu’à la date à laquelle cet employeur aurait effectivement eu connaissance du contenu de la plainte. Il n’y a dès lors pas lieu de vérifier si les motifs invoqués à l’appui d’un licenciement après le dépôt d’une plainte sont étrangers aux faits invoqués dans celle-ci.
(Décision commentée)
Est abusive sur pied de l’article 63 de la loi relative aux contrats de travail (en vigueur à la date du licenciement) la décision de licencier une travailleuse occupée dans une E.T.A. sans prendre en considération la limitation de ses capacités professionnelles liée à sa situation de handicap. Sous l’angle des nécessités de l’entreprise, une E.T.A. ne peut se contenter de mettre en avant des exigences de productivité. La cour rappelle le subventionnement des institutions publiques aux fins d’assurer l’occupation de personnes en situation de handicap en dépit des limitations de leur capacité professionnelle. Les nécessités de ce type d’entreprise ne sont dès lors pas prioritairement économiques mais d’abord sociales, la cour relevant que l’E.T.A. n’établit pas le bien-fondé de sa décision à cet égard non plus.
Constitue un abus de droit le fait d’appliquer la procédure d’écartement de sa fonction d’un conseiller en prévention dans le but d’éviter la procédure, plus lourde, visant à son licenciement, laquelle peut déboucher sur une interdiction de licencier. Il y a, de ce fait, perte pour l’intéressé de la chance qu’il avait de conserver son emploi.
Si le cumul d’une indemnité de protection contre le licenciement d’un conseiller en prévention avec celle due pour licenciement manifestement déraisonnable est prohibé, il n’en va pas de même du cumul de celle-ci avec l’indemnité de protection contre l’écartement due sur la base de l’article 10 de la loi du 20 décembre 2002.
Un conseiller en prévention dans l’enseignement libre subventionné n’est ni un membre subsidié, ni un membre tout court du personnel administratif. Il n’est de ce fait pas exclu de l’application de la C.C.T. n° 109. Si celle-ci ne lui est pas applicable en cas de licenciement, elle l’est bien en cas de mesure d’écartement prise à son endroit (art 2, § 3 de la C.C.T. n° 109) .
Le fait de ne pas avoir averti son employeur de son incapacité ou de ne l’en avoir averti que tardivement ne constitue, en tout état de cause, pas un acte équipollent à rupture mais un simple manquement contractuel, susceptible au demeurant de donner lieu à un refus du bénéfice du salaire garanti.
Il apparaît évident que, en vertu du principe d’exécution de bonne foi des conventions, commet une faute l’employeur qui signe un avenant au contrat d’un travailleur réduisant ses prestations de travail à un mi-temps, ce alors qu’il savait qu’il allait licencier l’intéressé le lendemain.
La rémunération brute visée à l’article 65, § 2, alinéas 6 et 7, de la loi du 3 juillet 1978 comprend non seulement la rémunération de base, mais également tous les autres éléments de nature rémunératoire et avantages accordés en vertu du contrat. L’indemnité correspondante doit dès lors inclure non seulement la rémunération qui constitue la contrepartie du travail fourni, c’est-à-dire la rémunération en espèces et les avantages en nature, mais également les avantages octroyés en vertu du contrat qui ne constituent pas cette contrepartie, ainsi le double pécule de vacances.
Il ressort de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 10 février 2003 que, parce que n’exerçant pas de mandat, un délégué suppléant ne fait pas partie de la délégation syndicale et, sous réserve de dispositions plus favorables prévues par C.C.T. sectorielle ou d’entreprise, ne bénéficie donc de la protection assurée à ses membres que s’il remplace le délégué effectif, pour la durée de ce remplacement. La matière étant d’ordre public et imposant des contraintes à l’employeur, pareilles C.C.T. ne peuvent toutefois faire l’objet d’une interprétation extensive. Ainsi doit-on considérer que si, en adoptant la C.C.T. du 26 mars 2014 régissant les principes relatifs à la délégation syndicale au sein de la commission paritaire des entreprises de travail adapté, les partenaires sociaux avaient voulu étendre la protection aux membres suppléants, ils l’auraient clairement mentionné, ce d’autant que l’article 3 de ladite C.C.T. prévoit que, lorsqu’elles ne peuvent désigner un membre de la délégation syndicale qui n’a pas été candidat aux dernières élections sociales ou si aucun candidat ne manifeste son intérêt pour le mandat, les organisations syndicales s’engagent à ne pas augmenter le nombre de protégés dans l’entreprise, ce qui démontre leur volonté de limiter leur nombre et non de l’étendre, comme, par exemple, aux suppléants.
Un employeur peut, lorsqu’il viole ses obligations en termes de paiement de la rémunération convenue, engager sa responsabilité civile pour inexécution fautive et se voir ainsi opposer par le travailleur, selon le cas, une exception d’inexécution, une action en exécution forcée, un acte équipollent à rupture, une action en résolution judiciaire ou encore une démission pour motif grave, le juge disposant du pouvoir de requalifier, dans le respect des conceptions factuelles de la cause et de l’objet, le mode de dissolution initialement invoqué par l’intéressé.
S’il ne peut être déduit, du simple fait que l’employeur a manqué à son obligation de payer ponctuellement la rémunération, qu’il avait l’intention de rompre le contrat, même malgré une mise en demeure, le paiement systématiquement tardif de celle-ci peut, en revanche, être considéré comme une modification unilatérale d’un élément essentiel du contrat, pour laquelle l’intention de rompre n’est pas requise.
Un changement de statut, d’ouvrier à employé, ne constitue pas un obstacle à l’application de l’article 67 de la loi du 26 décembre 2013, quand bien-même il aurait eu lieu après le 1er janvier 2014. Il convient donc d’additionner, d’une part, le délai de préavis auquel le travailleur aurait eu droit au 31 décembre 2013 selon les règles applicables à cette date et sur la base de l’ancienneté alors acquise, en tenant compte du statut qui était alors celui de l’intéressé, et, d’autre part, le délai de préavis lié à l’ancienneté de service acquise à partir du 1er janvier 2014 selon les règles applicables dans le régime introduit à cette date, en partant du principe qu’une nouvelle ancienneté a, alors, commencé sans que la qualité d’employé ou d’ouvrier soit encore d’aucune utilité puisque les délais de préavis prévus à l’article 37/2 de la loi du 3 juillet 1978 sont les mêmes pour l’une et l’autre catégories.
Commet une faute la société qui ne prend pas suffisamment en compte l’appel à l’aide d’une travailleuse qu’elle licencie dans la foulée d’un incident, sans en rediscuter préalablement avec elle. Elle n’était certes pas formellement tenue d’entendre l’intéressée avant de la licencier, d’autant que des entretiens de mise au point avaient déjà eu lieu dans les semaines précédentes. Dans la mesure où ces entretiens n’ont pas été menés en présence d’un délégué syndical et où l’éventualité d’un licenciement n’y fut pas abordée, il incombait toutefois à l’employeur, compte tenu de la tournure négative des événements, de donner suite à la demande expresse de la travailleuse d’être entendue en présence de son représentant syndical avant de lui notifier son licenciement, ce qui aurait, à défaut de lui permettre de préserver son emploi, certainement servi à atténuer le choc de la rupture.
S’il apparaît un peu cavalier d’informer le travailleur de son licenciement par SMS, ce procédé ne constitue toutefois pas une faute en soi dès lors que, une lettre de licenciement lui ayant aussi été adressée par courrier recommandé et par pli simple, ce texto constituait simplement un moyen sûr de l’aviser qu’il ne devait plus se présenter sur son lieu de travail.
Avant de constater la rupture du contrat d’un travailleur absent à ses torts, un employeur se doit de s’informer auprès de l’intéressé du motif de son absence et/ou le mettre en demeure de la justifier ou, à défaut, de se représenter au travail. Son constat ne sera validé que si le travailleur a laissé sans suite cette ou ces demande(s) de justification et/ou mise(s) en demeure, dans un contexte permettant de présumer qu’il n’entendait plus respecter ses obligations contractuelles et/ou poursuivre l’exécution de son contrat. Telle présomption joue dans le chef de qui n’a réservé aucune suite aux différents courriers électroniques, ou recommandés, qui lui furent adressés en un mois et, ce faisant, a persisté dans ses manquements, fondant ainsi son employeur a considérer que cette persistance était révélatrice de sa volonté de ne plus exécuter son contrat ou, à tout le moins, de ne pas en poursuivre l’exécution selon les modalités qui leur étaient applicables, ce, a fortiori, lorsque, dans ses recommandés, ce dernier avait clairement précisé que telle serait sa conclusion à défaut de suite utile.
Le fait d’avoir quitté son travail sans avoir averti son supérieur hiérarchique, s’il a déjà fait l’objet d’un avertissement, peut d’autant moins justifier un licenciement immédiat que le travailleur avait informé le responsable des ressources humaines de son départ.
Dès lors qu’il était en mesure de se déplacer, commet une faute le travailleur, absent pour cause d’épuisement moral et physique en raison, notamment, de la pression subie au sein de la société, qui, sommé par son employeur de rapporter son ordinateur portable professionnel sur son lieu de travail, mandate, pour ce faire, un tiers inconnu de l’entreprise. En soi, cette faute n’est toutefois pas suffisamment grave pour justifier son licenciement immédiat à partir du moment où (i) il a pris cette décision sans intention de nuire mais uniquement dans le but de préserver sa santé en évitant de nouvelles pressions et (ii) l’ordinateur était protégé par des mots de passe empêchant le tiers mandaté d’y avoir accès, de sorte qu’il n’y a pas eu violation possible de la clause de confidentialité par laquelle il était tenu.
Un employeur peut, en cours de procédure, invoquer d’autres motifs que ceux qu’il avait spontanément communiqués au travailleur. Il supporte, en ce cas, intégralement la charge de la preuve.
En matière de contrats de travail, la preuve est libre. C’est ainsi, et notamment, qu’elle peut être rapportée par la production du C4 que l’employeur a remis au travailleur, à charge pour l’intéressé, s’il conteste être l’auteur de la rupture, d’établir qu’il y va d’un document de complaisance, établi sur demande du travailleur, dont les mentions ne correspondraient pas à la réalité et/ou ne seraient pas sincères, ce qui serait, du reste, inexcusable dans la mesure où il aurait, ce faisant, clairement établi un faux en écriture et prêté son concours à une fraude sociale, ce qui ne correspondrait assurément pas au comportement d’un employeur raisonnable.
Si le fait de désactiver le badge d’accès du travailleur aux locaux de l’entreprise sans l’en informer au préalable est évidemment regrettable, il ne suffit pas à conférer au licenciement de l’intéressé un caractère abusif en ce que ce comportement témoignerait d’un manquement aux égards élémentaires que se doivent les parties au contrat ou serait contraire au principe de l’exécution de bonne foi de celui-ci.
Une indemnité correspondant à dix-sept semaines de rémunération est proportionnée et adéquate dès lors que, le motif invoqué n’étant ni établi, ni même documenté, la décision paraît être marquée par la mauvaise foi de l’employeur, qui s’est employé à fabriquer une motivation acceptable du licenciement intervenu, mais, ce faisant, porte inutilement et gratuitement atteinte à l’image du travailleur licencié.
Si les juridictions du travail ne sont pas compétentes pour déterminer le caractère imposable ou non de l’indemnité due pour licenciement manifestement déraisonnable, ni, a fortiori, les modalités (assiette, taux, etc.) de l’imposition, elles le sont incontestablement pour ce qui est de la nature du dommage couvert par cette indemnité. Le montant de celle-ci n’étant pas fixé forfaitairement, mais déterminé par le juge dans la fourchette fixée par la C.C.T. n° 109, il y a lieu de considérer qu’elle répare un dommage moral individualisé, à charge pour l’administration fiscale d’en tirer les conséquences en termes d’imposition, un recours administratif, puis judiciaire étant ouvert sur ce point au contribuable.
Il appartient aux cours et tribunaux de déterminer la nature d’une clause de stabilité d’emploi convenue par C.C.T. en fonction de son incidence sur les relations de travail entre parties : si cette clause est susceptible d’affecter, positivement ou négativement, leurs droits respectifs, il s’agira d’une clause normative individuelle. Ainsi en va-t-il lorsque, en cas de licenciement pour motif grave, ladite clause impose à l’employeur une obligation spécifique d’information de la délégation syndicale, modalisant de la sorte l’exercice de son droit de rupture ; elle affecte, dans cette mesure, les droits respectifs de l’employeur et du travailleur et a ainsi trait aux relations individuelles entre parties au sens de l’article 26, alinéa 1er, de la loi du 5 décembre 1968.
Des irrégularités, déjà fautives en elles-mêmes, présentent un caractère particulièrement grave dès lors que, loin de procéder d’erreurs involontaires et/ou d’imprudences accidentelles de la part du travailleur, elles ont un caractère manifestement conscient et délibéré dans son chef et que, loin de ne concerner que quelques faits isolés, elles sont manifestement habituelles et récurrentes.
Le refus de l’employeur de communiquer l’ensemble des preuves en sa possession au conseil de son travailleur, en lui indiquant que celles-ci seraient à la disposition du tribunal si son client décidait de le saisir bien que sachant parfaitement que de telles preuves pourraient être produites n’est nullement légitime et viole l’article 35, dernier alinéa, de la loi du 3 juillet 1978, qui met à charge de l’auteur du licenciement d’en apporter la preuve. Il n’affecte toutefois pas la validité du congé, s’agissant plutôt d’une attitude déloyale de l’employeur postérieure au licenciement – et réparable en cours de procédure – qui n’aurait de conséquences sur le droit à réparation du travailleur que si ce dernier venait, après introduction du litige, à renoncer à sa demande, connaissance une fois prise du dossier de pièces ou, au contraire, avait renoncé à introduire un recours dans l’ignorance où il se trouvait des éléments de preuve à disposition de son employeur.
Un licenciement fondé sur une discrimination prohibée, l’état de santé du travailleur, n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable. Un tel licenciement est manifestement déraisonnable.
(Décision commentée)
En vertu du principe général de bonne administration audi alteram partem, l’autorité publique doit entendre la personne lorsqu’une mesure grave est envisagée pour des motifs liés à elle-même ou à son comportement. Dès lors que l’employeur a agi avec légèreté et précipitation, ne permettant pas au travailleur de se défendre, il y a faute. Pour ce qui est du dommage, il doit s’agir d’un dommage distinct du préjudice matériel et moral causé par le licenciement lui-même. Il doit être certain et non seulement hypothétique, conjectural ou éventuel. Si est invoquée la théorie de la perte d’une chance, la chance doit être réelle. Le demandeur a la charge de la preuve. La perte de chance doit être appréciée en fonction des circonstances particulières propres à la cause, devant être certaine et pas seulement probable ou éventuelle.
Le caractère abusif d’un licenciement n’est pas lié à des éléments ultérieurs au congé, lequel, en tout état de cause, affecte nécessairement la capacité financière du travailleur. Il n’y a, dans cette mesure, pas lieu de tenir compte des difficultés auxquelles il a été confronté après son licenciement en raison de la perception tardive de son indemnité compensatoire de préavis.
Un employeur ne peut invoquer comme nécessité de fonctionnement un événement qu’il a lui-même créé (à savoir procéder au remplacement d’une travailleuse en incapacité de travail pour, précisément, répondre auxdites nécessités) et tirer argument de cette situation pour s’opposer au retour de l’intéressée une fois sa santé recouvrée en préférant conserver sa remplaçante à son service, ce alors même qu’aucun manquement professionnel n’a jamais été reproché à la victime de l’incapacité.
Une psychologue communiquant les données d’un chamane à une patiente commet une faute déontologique par défaut de respecter, dans l’exercice de sa profession, une attitude responsable, de qualité et empreinte de conscience professionnelle. Conformément aux règles de déontologie propres à la profession, il lui appartenait, en effet, de dissuader cette dernière de recourir à des alternatives thérapeutiques qui ne s’inscrivent pas dans le cadre « des théories et des méthodes reconnues par la communauté scientifique en tenant compte des critiques et de l’évolution de celle-ci » (article 32, § 4, de l’arrêté royal du 2 avril 2014) et, quand bien même la patiente aurait fait montre d’une réceptivité certaine à l’égard des sciences occultes, de l’orienter vers un service spécialisé de santé mentale aux fins de soulager sa souffrance psychologique.
Il appartient à l’employeur de prouver que les motifs du licenciement sont étrangers à la plainte et non que les motifs sont étrangers aux motifs relatifs au contenu de la plainte. La protection du travailleur débute au dépôt de celle-ci de sorte qu’il arrive régulièrement qu’un employeur licencie un travailleur sans être au courant qu’il a déposé plainte et par conséquent qu’il est protégé.
Dès lors que les faits reprochés à un travailleur sont pratiquement identiques à ceux qui le sont à son collègue, rien ne justifie une différence d’appréciation de leur gravité. Partant, si l’un d’entre eux ne fait l’objet que d’un simple avertissement, il y a lieu de conclure que la poursuite de la collaboration professionnelle n’était pas davantage impossible dans le chef de l’autre.
Commet assurément un acte équipollent à rupture l’employeur qui, non seulement, ne constate pas par écrit, en temps utile la diminution de l’horaire de travail qu’il entend imposer mais encore n’accepte pas que l’intéressé conteste cette diminution comme il en avait le droit à défaut de cette constatation que requiert l’article 11bis L.C.T. et, ce faisant, tente de la lui imposer de manière unilatérale.
Le fait pour une travailleuse d’avoir entretenu une relation sentimentale avec l’ancien compagnon de son employeur(e) ne présente, comme tel, aucun caractère fautif, ni a fortiori gravement fautif, fût-ce au regard de l’article 16 L.C.T. selon lequel les parties à un contrat de travail se doivent respect et égards mutuels et sont tenues d’assurer et d’observer le respect des convenances et des bonnes mœurs pendant l’exécution de celui-ci. C’est d’autant moins le cas que, si les intéressés avaient déjà noué des liens amicaux préalables, leur relation sentimentale ne fut pas entamée alors que l’employeur(e) était toujours en couple avec son ancien compagnon, qu’il ne ressort d’aucun élément objectif que la travailleuse se serait immiscée dans leur séparation – ou y aurait joué un rôle quelconque au détriment de son employeur(e) –, que cette relation aurait été entretenue en tout ou en partie pendant le temps de travail de la travailleuse, qu’elle aurait détourné celle-ci de ses obligations professionnelles ou aurait eu la moindre incidence concrète sur sa collaboration quotidienne avec son employeur(e). Pour le surplus, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir informé cette dernière de la situation, ni d’avoir menti sur la nature de cette relation lors d’une audition à laquelle elle fut convoquée au pied levé et qu’un huissier fut chargé d’enregistrer, étant alors prise au dépourvu.
Le procédé auquel le législateur a eu recours en décidant de conditionner l’effectivité de la suppression de l’article 63 LCT à la conclusion, au sein du CNT, d’une CCT relative à la motivation du licenciement ne constitue pas une délégation, au Conseil, d’un quelconque pouvoir réglementaire ou exécutif qui relèverait de la compétence constitutionnelle exclusive du Roi. Ce faisant, le législateur lui a simplement « passé la main » afin de lui permettre d’exercer son pouvoir de conclure des CCT en vue de déterminer les relations individuelles et collectives entre employeurs et travailleurs, pouvoir dont il dispose en vertu de la loi du 5 décembre 1968 et qui fait, comme tel, l’objet d’un ancrage constitutionnel dans la mesure où l’article 23, alinéa 3, 1°, de la Constitution coordonnée le 17 février 1994 garantit dorénavant expressément à chacun le droit de négociation collective. Il a donc légitimement opté pour la concertation sociale en une matière relevant de la compétence des partenaires sociaux au sein de l’organe paritaire institué au plus haut niveau et ce, dans le strict respect de la Constitution.
L’employeur qui a reçu une demande de communication des motifs concrets de licenciement est tenu d’y répondre par lettre recommandée. À le faire par courriel, il s’exposerait à l’application de la sanction civile forfaitaire fixée par l’article 7 de la CCT n° 109. Le formalisme ainsi imposé à l’employeur par l’article 5 de ladite CCT correspond exactement à celui qui est imposé au travailleur par son article 4, en manière telle qu’il s’agit d’un système parfaitement équilibré, qui n’implique, de surcroît aucune contrainte excessive, ni, a fortiori, disproportionnée dans le chef de l’employeur.
Est manifestement déraisonnable le licenciement qui, étant intervenu moins de dix jours après le dernier d’entre eux, apparaît comme étant lié, à tout le moins pour partie, aux courriers adressés à l’employeur par le conseil du travailleur pour lui faire part des revendications légitimes de celui-ci.
Le fait pour un travailleur qui avait reçu consigne d’évacuer des déchets dans le container à l’extérieur du magasin de, plutôt, laisser ceux-ci à même la route afin qu’ils soient à disposition de toute personne désireuse de les récupérer n’est pas exempt de tout reproche dès lors que, ce faisant, il n’a pas respecté les instructions de son supérieur hiérarchique. Cette faute n’est cependant pas grave au point de rendre la poursuite des relations contractuelles immédiatement et définitivement impossible.
Le procédé auquel le législateur a eu recours en décidant de conditionner l’effectivité de la suppression de l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 aux conditions qu’il détermine (soit l’entrée en vigueur d’une convention collective de travail conclue au sein du C.N.T., rendue obligatoire par le Roi, relative à la motivation du licenciement) ne constitue pas une délégation de pouvoir normatif, le C.N.T. étant compétent pour conclure en son sein des conventions collectives de travail dont le champ d’application s’étend à diverses branches d’activité et à l’ensemble du pays en vertu de l’article 7 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives.
Pour le surplus, la C.C.T. n° 109 constitue bien, conformément à l’article 5 de la loi du 5 décembre 1968, un accord entre les partenaires sociaux ayant trait aux relations individuelles et collectives entre employeurs et travailleurs et a été élaborée et adoptée par les organes compétents.
La cour rappelle en outre que, disposant d’une délégation de pouvoir par la loi du 5 décembre 1968 pour adopter quelque convention collective que ce soit, les partenaires sociaux n’ont pas, en principe, à justifier d’une base juridique autre et que l’autonomie des partenaires sociaux et le droit de négociation collective sont garantis par l’article 23 de la Constitution et par divers instruments internationaux.
Par conséquent, l’article 38, 1°, de la loi du 26 décembre 2013 ne viole pas la Constitution et la C.C.T. n° 109 n’est ni inconstitutionnelle ni illégale.
La circonstance que le travailleur aurait choisi ou accepté que la procédure se déroule en néerlandais devant un tribunal néerlandophone ne permet pas de déroger à l’article 38 de la loi du 15 juin 1935. Il s’ensuit, indépendamment du fait que le décret flamand concernant l’emploi des langues était par ailleurs applicable, que si, compte tenu de la situation du domicile de l’intéressé, la notification de ce jugement doit être faite en région de langue française, une traduction française de celui-ci doit être jointe à cette notification, ce sous peine de nullité absolue et avec pour conséquence (i) que le délai d’appel prévu par l’article 11 de la loi du 19 mars 1991 n’a jamais commencé à courir et (ii) que, malgré l’admission du motif grave par le tribunal, le licenciement subséquent est irrégulier. C’est donc à bon droit que, dans ces circonstances, l’intéressé poursuit la condamnation de son employeur à lui payer l’indemnité prévue par l’article 17 de cette même loi.
Le seul fait que les documents signés par le travailleur aient été préalablement préparés par l’employeur n’est, ni en soi ni en combinaison avec d’autres éléments, constitutif de violence morale ou de dol. Il ne s’agit pas d’une circonstance de nature à faire impression sur une personne raisonnable ou qui peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent.
En règle soumettre le salarié au choix entre une démission et une rupture d’un commun accord d’une part et un licenciement pour motif grave d’autre part ne revient pas à exercer une menace injuste mais constitue l’exercice légitime du droit de l’employeur. Les juridictions de fond ne font exception à ce principe que lorsque les faits allégués à l’appui de la menace de licenciement pour motif grave sont anodins, manifestement sans fondement ou factices. Dans ce cas, la violence est établie. Une menace n’est pas injuste lorsque l’employeur peut raisonnablement considérer que les faits sur lesquels repose la menace constituent véritablement un motif grave de licenciement, indépendamment de la justesse de cette appréciation. C’est pour cette raison que, sous réserve du caractère anodin, non fondé ou factice des faits, le juge du vice de consentement n’est pas saisi du contrôle du motif grave invoqué à titre de menace par l’employeur. Il n’exerce en effet sur le motif grave concerné qu’un contrôle ‘marginal’ dans le cadre de l’appréciation du caractère éventuellement injuste ou illicite de la violence alléguée.
Constitue un indice très fort de ce que le licenciement n’est pas entièrement étranger à l’état de la travailleuse le fait qu’il intervienne de façon extrêmement soudaine, voire même précipitée, immédiatement après l’annonce de sa grossesse par l’intéressée et en l’absence de tout acte préparatoire ou annonciateur de la rupture qui aurait été posé par l’employeur avant la communication de cette information.
Le doute devant bénéficier au travailleur licencié, une MRS ne peut se borner à qualifier de motif grave le fait pour une infirmière de nuit de ne pas avoir consigné l’appel et la plainte d’un résident dans son dossier individuel de soins. Encore faut-il qu’elle produise les instructions données à son personnel quant à la tenue de ce dossier et au degré de complétude qu’il doit présenter.
Même à défaut d’instructions quant à sa tenue et au degré de complétude qu’il doit présenter, il peut être raisonnablement attendu d’une infirmière de nuit qu’elle consigne, dans le dossier individuel de soins d’un patient, une plainte relative à sa santé et les vérifications qu’elle a effectuées à ce sujet et être admis que son licenciement pour ne l’avoir pas complété de la sorte n’est pas manifestement déraisonnable.
Le fait, pour un Senior Private Banker ayant développé en parallèle une activité entrepreneuriale propre, de donner, à un magazine spécialisé en matières économique et financière, une interview à propos de sa double activité, est un procédé tout à fait contraire non seulement à la culture d’entreprise d’une banque privée dans laquelle la discrétion et la réserve sont de rigueur, mais encore au souhait de celle-ci de maîtriser sa communication, comme en attestent les instructions explicites données au sujet de relations éventuelles avec la presse. Il y va d’un obstacle immédiat et définitif à la poursuite des relations de travail.
L’absence de tout élément de preuve de nature à le justifier confère au licenciement un caractère à ce point déraisonnable qu’elle justifie l’octroi de l’indemnité maximale de licenciement.
Dès lors que le motif potentiellement grave a trait aux dégâts causés au véhicule d’un client de l’entreprise lors d’un usage non autorisé de celui-ci en dehors des heures de service, il est parfaitement légitime de la part de l’auteur du congé de prendre la précaution d’attendre la communication d’un devis de réparation détaillé avant de rompre le contrat sans préavis ni indemnité pour le motif en cause, cette démarche ne pouvant, si un tel devis est de nature à objectiver les premiers constats, être assimilée à une manœuvre dilatoire, destinée à postposer la prise de cours du délai de 3 jours prévu par l’article 35, alinéa 3.
Subit un dommage moral (évalué à un montant net de 15.000 euros) en relation directe avec la faute commise par son employeur, le travailleur licencié pour un motif apparent se révélant totalement étranger à la véritable raison qui a déterminé la décision de ce dernier de rompre les relations de travail, laquelle constitue un motif illégitime dès lors que ce licenciement a été opéré à des fins de pures représailles à la suite de son témoignage dans le cadre d’une plainte pour harcèlement déposée par une collègue à l’encontre de son supérieur direct, après que celui-ci eut pris connaissance du rapport dressé par la conseillère en prévention aspects psychosociaux.
En avançant, sans les établir, des motifs d’inaptitude et de mauvaise conduite dans le chef du travailleur et en mettant en cause la perte progressive de sa motivation et de son engagement professionnel sans prouver le moindre avertissement, un employeur porte subitement et illégitimement atteinte au parcours professionnel de l’intéressé. Une indemnité de 12 semaines s’impose eu égard au caractère généralement vexatoire de la décision.
Le simple constat d’anomalies de pointage opéré après une période de vérification ne justifie pas un licenciement immédiat, mais aurait pu et dû faire l’objet d’une mise au point par la communication d’instructions claires et d’un sérieux avertissement. Fût-elle particulièrement légitime au regard de la fonction du travailleur, la rupture de confiance ne peut, en effet, être considérée comme étant immédiatement et définitivement acquise avant que soient prises, et imposées, toutes les mesures utiles préalables.
Un employeur peut légitimement estimer impossible de poursuivre une relation contractuelle avec une travailleuse, en contact avec ses clients et fournisseurs, qui propose des services de prostitution, qui plus est durant une période d’incapacité de travail, et dont des photos de nature pornographique sont disponibles en libre accès sur internet.
En cas de dispense conventionnelle de prestations en cours de préavis, le contrat et les autres obligations qui en découlent subsistent comme tels jusqu’à l’échéance de celui-ci. Dans cette mesure, le fait que, dans leur accord, les parties soient demeurées muettes quant à la rémunération afférente à cette période non prestée ne peut avoir pour effet de priver le travailleur de la rémunération contractuellement convenue.
S’il est normal et légitime de faire valoir son point de vue, l’existence d’un différend professionnel ne peut justifier que son expression conduise à des comportements dénigrants, insultants, violents ou à des attitudes visant à user de pressions pour parvenir à s’imposer.
Fait preuve d’un comportement laissant à désirer et justifiant que n’importe quel employeur normal et raisonnable décide de le licencier, le travailleur qui, recevant une visite privée pendant les heures de travail, non seulement rend inopérante, en la braquant vers le plafond, une caméra de surveillance destinée à prévenir les vols dans le magasin et à permettre à l’employeur de savoir quand il doit venir en renfort, mais encore, lorsque ce dernier lui en fait la remarque, retire ou arrache le câble d’alimentation de ladite caméra.
Le simple fait pour l’employeur de laisser le choix entre une démission ou un licenciement pour faute grave à un travailleur ayant commis des faits qui ne sont ni anodins ni factices ne constitue pas un acte de violence illicite, susceptible de vicier le consentement de ce dernier. Il n’y a là aucune contrainte illégitime, mais simple menace par l’employeur d’un exercice légitime de ses droits, non susceptible d’influencer un travailleur expérimenté, âgé de plus de quarante ans et rompu tant aux techniques de gestion d’équipe qu’aux processus de négociation, ce qui le rendait tout à fait à même d’évaluer les avantages et inconvénients de la proposition formulée par son employeur.
La clause de stabilité d’emploi contenue à l’article 2, § 2, de la C.C.T. conclue le 2 juillet 2007 au sein de la commission paritaire n° 310 et consolidée par la C.C.T. du 29 septembre 2017 consacre, d’une part, un droit au bénéfice du travailleur (ce droit s’identifiant dans la prétention au respect des exigences procédurales auxquelles est subordonné le licenciement) et, d’autre part, limite dans une mesure équivalente l’exercice du droit de licenciement de l’employeur. Il s’agit, par conséquent, d’une disposition normative individuelle qui s’intègre dans le contrat.
Il ressort de ses termes que l’objectif de la procédure est de convoquer le travailleur à un entretien au cours duquel l’employeur l’informe, sans devoir les justifier, des motifs pour lesquels il envisage son licenciement et au cours duquel des actions peuvent être entreprises en vue d’éviter la rupture contractuelle. En adressant cette convocation au travailleur pendant une période de suspension de son contrat et en fixant la date de l’entretien dans le cours de cette même période, son employeur ne lui permet ni d’entendre les griefs qui lui sont imputés, ni, éventuellement, de négocier des mesures en vue d’éviter son licenciement et ne respecte donc pas le prescrit de cette clause, ce d’autant qu’elle fait partie intégrante du contrat et que les mesures qui en découlent sont, elles aussi, suspendues.
En prenant une décision de mise à pied après avoir entendu le travailleur, l’employeur démontre, par définition, que la faute commise ne rend pas immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle mais ne justifie, à son estime, qu’une mesure d’éloignement temporaire. Cette décision est incompatible avec celle de rompre le contrat pour motif grave prise dans les trois jours suivant cet entretien.
Il y a lieu de retenir la sanction maximale dès lors que les motifs, non étayés, ne peuvent justifier le licenciement et portent, en outre, atteinte à la probité du travailleur accusé, à tort, d’avoir délibérément menti et monté de toutes pièces un déplacement inutile à des fins privées, et donc d’avoir fait primer ses intérêts personnels sur ceux de l’entreprise.
Même si la convention de mise à disposition d’une voiture de société ne précise pas que l’usage de la carte d’essence dont également question dans celle-ci est réservé à l’alimentation en carburant de ce seul véhicule, cet usage exclusif de tout autre va néanmoins de soi, la carte d’essence constituant, évidemment, un accessoire du véhicule qui constitue l’objet principal de la convention. Il en résulte que fait un usage fautif et abusif de ladite carte le travailleur qui l’utilise, à raison de plus de 80%, pour alimenter en carburant un ou plusieurs autre(s) véhicule(s) que celui mis à sa disposition. Le fait que le véhicule mis à sa disposition puisse aussi être utilisé à des fins privées et par son conjoint ne change rien à ce constat, non plus, du reste, que celui que, en dépit de cet usage, il soit resté dans les limites du budget convenu verbalement et/ou que sa consommation de carburant soit restée constante durant toute son occupation et similaire à celle de ses collègues.
Si la contestation du mandat ne doit pas nécessairement être immédiate, encore faut-il qu’elle intervienne dans un délai raisonnable, lequel peut, par exemple, correspondre au délai nécessaire au travailleur pour vérifier si l’auteur du congé était habilité à le donner en prenant, le cas échéant, conseil auprès d’un syndicat ou d’un avocat. Excède largement les limites du raisonnable la contestation qui n’intervient qu’aux termes de la requête introductive d’instance déposée près de neuf mois après le licenciement et, de surcroît, près de quatre mois après consultation d’un avocat dont la mise en demeure, par ailleurs particulièrement circonstanciée en fait comme en droit, ne formulait aucune contestation, ni même aucune réserve, à ce propos.
Réforme Trib. trav. Liège (div. Namur), 13 octobre 2020, 16/2.079/A ci-dessous en ce qu’il a estimé que l’employeur avait apporté la preuve des faits d’exhibitionnisme imputés à faute grave et déclaré non fondée la demande du travailleur en paiement d’une indemnité de rupture.
Si l’on peut admettre qu’un travailleur émette un avis sur la stratégie commerciale que son employeur lui impose, il ne lui appartient pas de la remettre en cause si ce dernier décide de la maintenir et, encore moins, s’il persiste à la désapprouver malgré les explications données, de ne pas s’y conformer, ce qui constitue, dans son chef, un acte d’insubordination rompant immédiatement et définitivement la confiance de celui-ci.
Les principes généraux de droit, tels ceux de bonne administration, ne peuvent contrevenir à une règle de droit, de surcroît doublement impérative, comme celle de l’article 35, alinéas 3 et 4, de la loi du 3 juillet 1978, qui impose le respect d’un double délai de 3 jours en cas de notification d’un congé pour motif grave. Dès lors qu’il s’impose de faire prévaloir cette règle par rapport aux principes de droit administratif d’un rang hiérarchiquement inférieur, l’audition d’un contractuel engagé par une autorité publique sur qui pèsent des soupçons de manquements constitutifs de motif grave ne saurait avoir pour effet de dénaturer ladite règle : elle ne postpose ainsi le point de départ du délai de 3 jours que lorsqu’elle s’avère nécessaire à l’acquisition d’une certitude suffisante dans le chef de l’employeur et, lorsqu’il est acquis qu’il avait une connaissance certaine et suffisante des faits avant l’audition du travailleur, ne peut, en tout état de cause, être utilisée pour recréer fictivement un nouveau délai.
Faire référence à des « attestations écrites remises par les travailleurs » non autrement identifiés non seulement empêche la juridiction saisie de vérifier si le délai de 3 jours a été respecté, mais encore ne permet ni au travailleur de déterminer avec précision les griefs qui lui sont reprochés dans celles-ci, ni au juge d’être certain qu’il s’agit bien des faits dénoncés.
Se rend coupable d’abus de droit le travailleur qui, suspectant l’imminence de son licenciement, se fait désigner par son organisation syndicale pour exercer le mandat de délégué syndical qu’elle avait déclaré vacant. Ce faisant, il use d’un droit reconnu en vue d’assurer la représentation des travailleurs en le détournant de sa finalité économique et sociale à son seul profit, dans le but de faire échec à son licenciement ou pour piéger son employeur aux fins de rendre celui-ci plus onéreux en spéculant clairement sur l’irrespect par ce dernier de la procédure applicable en cas de licenciement d’un délégué du personnel. Il s’impose, dès lors, de considérer que sa désignation doit être tenue pour nulle et non avenue.
Conformémentà l’article 461 du Code pénal, le vol requiert que la chose soit soustraite, que cette appropriation soit frauduleuse et que la chose détournée n’appartienne pas à celui qui l’a soustraite. C’est à l’employeur qui se prévaut d’un fait qualifié de vol au titre de motif grave qu’il incombe d’en établir les éléments constitutifs, à savoir non seulement l’élément matériel consistant en la soustraction d’une chose appartenant à autrui contre le gré du propriétaire, mais également l’intention frauduleuse, laquelle doit exister au moment de l’infraction, même si la preuve de cette intention peut résulter de faits postérieurs à la soustraction. Le juge qui, au vu de l’absence d‘intention frauduleuse, exclut qu’un vol ait été commis par le travailleur justifie légalement sa décision de ne pas admettre le motif grave de licenciement.
Il ne peut être question, en cas d’invalidation d’un licenciement pour motif grave, de déduire de l’indemnité de rupture à laquelle l’employeur est finalement condamné une quelconque somme au titre d’un reclassement professionnel auquel le travailleur n’avait pas droit en raison de sa prétendue faute et dont il n’a pas bénéficié.
Le fait pour un délégué syndical d’avoir, à certaines occasions, exprimé envers deux collègues (mais non à son employeur) son souhait d’obtenir son licenciement pour force majeure médicale, ne peut être interprété comme procédant de sa volonté de provoquer son licenciement avec une double indemnité.
(Cassé par Cass., 15 mai 2023, n° S.22.0038.F)
S’il peut se justifier que, pour acquérir une connaissance suffisante des faits, l’employeur procède à une enquête, il est, en revanche, parfaitement illégitime, celui-ci n’ayant pas à s’immiscer dans la relation entre un patient et son médecin, que cette enquête l’amène à interroger le praticien traitant le travailleur pour obtenir confirmation de l’authenticité des certificats médicaux remis par ce dernier, ce d’autant que, pour le surplus, cette démarche ne vise, en soi, pas à acquérir la connaissance d’un fait, mais bien à se procurer une preuve et que s’il doutait de la réalité de l’incapacité de travail, il lui était loisible de faire procéder à un contrôle médical, ce qu’il n’a pas fait.
Le fait, pour une infirmière prestant au sein d’une équipe et présentant une ancienneté qui devrait lui permettre d’être une personne de confiance pour ses jeunes collègues, de profiter de l’ascendant que lui confère cette ancienneté pour asseoir, sur les intéressés, un pouvoir hiérarchique autoritaire infondé de nature à engendrer une charge psycho-sociale dans leur chef n’est pas conforme à ce qui peut être attendu d’une personne normalement prudente et diligente placée dans les mêmes circonstances. Confronté à cette erreur de conduite à forte composante relationnelle interpersonnelle, la réaction de l’employeur ne peut toutefois être de procéder à son licenciement immédiat, sans avoir respecté la procédure de prévention qu’impose cette problématique spécifique, dont les interventions destinées à remédier au problème.
N’apparaît pas distinct de celui que couvre déjà l’indemnité compensatoire de préavis le dommage limité au choc causé par la perte de son emploi et aux difficultés éprouvées depuis lors pour se réorienter et se former, compte tenu de son âge et de sa qualification spécifique.
Rend le licenciement manifestement déraisonnable la circonstance qu’il ait été décidé subitement, en faisant un trait pur et simple sur un accord conclu à peine quatre mois plus tôt et non encore complétement exécuté.
Dès lors que, dans le cadre du contrat avenu avec une société de consultance, une délégation de pouvoirs a valablement été donnée au directeur général de celle-ci, comportant notamment une responsabilité directe dans le recrutement et la gestion du personnel de l’entreprise, en ce compris les licenciements pouvant intervenir à raison de manquements commis par ses salariés, est parfaitement valable la lettre de licenciement émanant de ladite société, sans qu’il soit nécessaire d’y mentionner que le signataire agit en tant que gérant de celle-ci.
Il n’est pas concevable que, dans une petite entreprise où tout le monde se connaît, un employeur de bonne foi, ignorant pour quel motif le travailleur n’a pas repris le travail à la date annoncée, ne prenne pas spontanément contact avec lui pour lui demander une explication et laisse s’écouler un délai de trois semaines sans la moindre initiative avant de lui envoyer une mise en demeure le sommant de s’expliquer sur son absence que, autrement, il considérera comme constituant un abandon de travail.
Ne commet aucun manquement en termes d’actes infirmiers ou de surveillance du résident, l’infirmière qui, à la suite du comportement agressif et déplacé de ce dernier à son encontre, décide de se mettre en retrait et de laisser un aide-soignant s’occuper de l’intéressé, en restant toutefois dans sa chambre à des fins de surveillance.
Il est de règle élémentaire, en matière de remboursement de frais professionnels, que la note présentée à cette fin à l’employeur émane de celui qui a effectivement fait l’avance de ceux-ci. Est donc contraire à cette règle, le procédé consistant, pour un travailleur qui a exposé des frais professionnels ou prétendus tels, à se les faire rembourser par un subordonné qui en a, lui-même, préalablement obtenu le paiement par l’employeur sur présentation d’un état de dépenses. Pareil comportement, malsain en soi en ce qu’il favorise toutes les fraudes possibles en la matière et rend fort malaisé le contrôle du bien-fondé des dépenses, constitue un motif grave rendant impossible la poursuite de toute collaboration entre parties, et ce indépendamment de son importance concrète.
On ne peut déduire du fait qu’une travailleuse, consciente de ce que l’entretien qu’elle venait d’avoir avec la nouvelle gérance de l’entreprise qui l’occupait s’était mal passé et pouvait déboucher sur son licenciement, a contacté l’ancienne gérante de celle-ci pour lui faire part de ce ressenti que l’intéressée a eu un comportement fautif dans le cours de cet entretien.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 10 novembre 2020, R.G. 19/204/A, ci-dessous en ce qu’il a condamné l’employeur à payer une indemnité compensatoire de préavis à un travailleur ayant tenté d’étrangler son épouse, ce qui rendait la poursuite de la relation de travail plus difficile mais n’avait néanmoins pas pour effet de rompre la confiance devant présider à celle-ci dès lors que, le travailleur n’étant, eu égard à sa fonction, pas amené à représenter l’employeur ou à être en contact constant avec sa clientèle, il ne pouvait certainement pas lui être fait grief d’avoir, par son comportement, terni l’image de celui-ci.
Le cadre dirigeant qui exerce une activité secondaire concurrente sans autorisation préalable adopte un comportement hautement déloyal à l’égard de son employeur et, en agissant en contradiction avec les règles explicitement fixées par ce dernier relativement à la déclaration de conflits d’intérêts, commet une faute grave justifiant son licenciement immédiat.
Confirme Trib. trav. Liège (div. Namur), 10 novembre 2020, R.G. 19/204/A, ci-dessous en ce qu’il a condamné l’employeur à payer une indemnité compensatoire de préavis à un travailleur ayant tenté d’étrangler son épouse, ce qui rendait la poursuite de la relation de travail plus difficile mais n’avait néanmoins pas pour effet de rompre la confiance devant présider à celle-ci dès lors que, le travailleur n’étant, eu égard à sa fonction, pas amené à représenter l’employeur ou à être en contact constant avec sa clientèle, il ne pouvait certainement pas lui être fait grief d’avoir, par son comportement, terni l’image de celui-ci.
Il est sage pour une autorité administrative de ne pas se fier à la presse pour conclure à la matérialité de l’infraction commise par un de ses travailleurs. En l’absence de certitude quant à l’imputabilité de celle-ci dans le chef de l’intéressé et, son procès n’ayant pas encore eu lieu, à sa qualification, il est de même légitime pour celle-ci, nonobstant les règles relatives à l’audition préalable dans le secteur public, de souhaiter entendre ce dernier avant de prendre sa décision.
Au sein d’une société anonyme, c’est, en principe, le conseil d’administration qui seul a le pouvoir de licencier un cadre tel qu’un directeur, mais il peut donner un mandat spécial, p. ex. à son président ou son directeur général, pour ce faire.
La circonstance qu’une décision soit arrêtée par le conseil d’administration d’une société anonyme alors qu’il n’est pas régulièrement composé n’a pas pour effet que cette décision, fût-elle de nature à être irrégulière, n’engagerait pas la société que représente ce collège. Celle que le congé fut donné par une personne non titulaire d’un mandat rend, quant à elle, le licenciement irrégulier.
Le travailleur qui entend se prévaloir de l‘irrégularité de la notification du congé lui donné par un mandataire au nom et pour compte de son employeur doit en contester immédiatement la validité et, pour s’assurer de l’existence du pouvoir délégué à l’intéressé, est en droit d’exiger la remise de la procuration qui lui a été donnée. Il n’est toutefois pas tenu de le faire.
S’il ne le fait pas et ne vient plus travailler, la conséquence en est que, lorsque ni le mandataire ni le mandant n’ont élevé de contestation à ce sujet, il ne peut plus contester l’existence du mandat, sauf dans un bref délai.
La circonstance que le fait allégué ait eu pour cadre une discussion privée entre deux ex-conjoints n’exclut pas que ce fait puisse justifier un licenciement pour motif grave au sens de l’article 35 L.C.T. Ainsi en va-t-il lorsqu’une travailleuse gifle le gérant de la société, son ex-mari, alors qu’ils s’étaient retirés tous deux dans le bureau de ce dernier pour y discuter d’un sujet privé, ce même si la victime était rompue aux arts martiaux et n’était pas de ceux qui se laissent intimider par une agression physique.
S’il est admis que les parties à un contrat de travail puissent convenir de tenir compte d’une ancienneté fictive pour le calcul du délai de préavis, encore faut-il que cette ancienneté conventionnelle, qui se distingue de l’ancienneté réelle remontant au jour de l’entrée en service chez le même employeur, résulte de manière certaine de la volonté commune des parties. En soi, la simple mention de celle-ci sur des fiches de paie, voire sur des comptes individuels, ne suffit pas à l’établir si elle n’est pas corroborée par d’autres éléments précis et concordants.
Le caractère définitif et irrévocable du congé s’oppose à ce qu’un employeur décide d’annuler a posteriori le licenciement pour motif grave notifié par son conseil, muni d’un mandat exprès, sauf pour le travailleur à avoir consenti à celui-ci.
(Décision commentée)
S’agissant en l’espèce d’un licenciement intervenu le 3 mars 2016, l’Etat belge, qui n’a pas auditionné le travailleur contractuel avant de le licencier, ne s’est pas comporté comme tout employeur public raisonnable et prudent placé dans les mêmes circonstances. Vu les débats en doctrine et les décisions de jurisprudence, l’erreur invincible ou toute autre cause de justification ne peut être retenue. Il y a une faute et celle-ci a causé un dommage en lien causal. Il s’agit de la perte d’une chance de conserver l’emploi. La cour applique le mode d’évaluation habituel, étant l’évaluation ex aequo et bono. Elle alloue de ce chef une indemnité de 2.500 euros, s’alignant sur diverses décisions en ce sens.
Justifie l’octroi de l’indemnité maximale le licenciement constituant, en réalité, le point d’orgue d’un processus initié par l’employeur, visant à déposséder un travailleur de l’essentiel de sa fonction pour lui faire grief ensuite de ne pas adhérer à une modification à la finalité réelle particulièrement obscure, et alors qu’aucun motif admissible de licenciement n’est démontré.
Il ne peut être exigé, sans ajouter à la C.C.T. n° 109 des conditions qu’elle ne contient pas, qu’un travailleur, au courant de ce que son employeur n’a pas retiré le pli recommandé contenant sa demande d’être informé des motifs concrets de son licenciement, l’en avertisse par un autre biais.
Aucune disposition légale n’exige que le préavis ne puisse être donné que lorsque l’exécution du contrat a commencé. La sanction qui s’appliquera en cas de licenciement irrégulier sera conforme à celle prévue par le droit du travail et non à celle prévue par le droit commun.
Le risque de la rupture et ses conséquences ne se présentent pas différemment avant ou après la prise de cours effective du contrat. En cas de rupture par le travailleur, cela n’exclut pas de considérer le droit commun pour apprécier les circonstances de la rupture et réparer un dommage distinct de celui couvert par le préavis ou son indemnité compensatoire.
Il ne peut être considéré que, dans le cadre de la notification des motifs du licenciement par voie recommandée, l’article 35 L.C.T. ferait peser sur l’employeur une obligation de résultat quant à la remise effective du courrier au travailleur. Est ainsi sans incidence sur la régularité de la notification desdits motifs le fait que la remise effective du recommandé ait été tenue en échec par une erreur des services postaux – ce dont l’employeur ne peut être tenu pour responsable – et que ce courrier n’ait, finalement, été transmis à son destinataire, par l’entremise de son organisation syndicale, qu’avec un dépassement certain du délai prescrit – ce qui n’a, de facto, pas entraîné de préjudice à son égard.
(Décision commentée)
Dès lors que le travailleur dépose la preuve que l’offre qui a été suivie de son engagement concernait une fonction précise ainsi que le descriptif qui lui en a été remis, la circonstance que le contrat conclu se contente de reprendre son engagement en qualité d’employé ne saurait suffire à contredire que la fonction pour laquelle il fut engagé constituait un élément essentiel du contrat de travail.
(Décision commentée)
En raison des opérations demandées pour y arriver, le fait pour un travailleur de mettre sur son profil Facebook un lien vers un reportage intrinsèquement critique à l’égard de son employeur ne peut, manifestement, résulter que d’un acte volontaire rendant ce partage fautif et non d’une simple erreur de manipulation. Il est indifférent que ce partage, en soi susceptible de nuire à l’image de celui-ci, n’ait pas été accompagné de commentaires négatifs. Il est, en revanche, interpellant que l’intéressé n’ait pas cru bon d’attirer l’attention sur le fait que l’incident dénoncé dans ce reportage était intervenu il y a un certain temps déjà et que, depuis, l’entreprise n’avait plus connu ce genre de problème. L’omission est, ici, aussi reprochable qu’un commentaire critique en ce qu’elle pouvait laisser supposer que la situation ancienne restait d’actualité : faire planer le doute et l’incertitude peut se révéler bien plus destructeur que la plus acerbe des critiques.
Il est indifférent qu’un travailleur ait, précédemment, donné pleine satisfaction dans son travail lorsque la gravité des faits fautifs qui lui sont, aujourd’hui, reprochés est telle qu’elle ne peut être minimisée au seul vu de ses états de service passés.
S’il paraît évident que de simples négligences ne peuvent justifier un licenciement pour motif grave, il en va bien évidemment autrement si le travailleur refuse de faire preuve de responsabilité professionnelle en faisant amende honorable et reproduit quelque temps plus tard le même comportement que celui qui fut dénoncé aux termes d’un avertissement sévère, de telle sorte que les manquements dont il s’est rendu coupable traduisent en réalité une désinvolture délibérée dans son chef constitutive d’un motif grave. Ainsi, pour un employé d’une société spécialisée dans la vente de produits alimentaires dans la grande distribution, si des manquements sont constatés par rapport au respect de règles d’hygiène et une désinvolture ainsi qu’un refus caractérisé d’effectuer le travail confié.
En faisant effectuer du travail en noir au fils d’une bénéficiaire du centre, le travailleur au service d’un C.P.A.S. commet une infraction au Code de déontologie applicable aux travailleurs sociaux, lequel prévoit que ceux-ci sont tenus à une attitude générale propre à inspirer la confiance des utilisateurs ainsi qu’au respect des lois et règlements s’appliquant à tout citoyen. Même née dans la sphère privée et même s’il n’y eut pas de dommage direct dans le chef du C.P.A.S., il y va d’une faute intrinsèquement grave et de nature à rendre définitivement impossible toute collaboration professionnelle, le recours au travail non déclaré étant constitutif d’une infraction pénale, portant atteinte à la sécurité sociale au détriment de la collectivité et permettant de retirer des avantages pécuniaires d’une main d’œuvre à bon marché et sous statut précaire (réforme Trib. trav. Liège, div. Liège, 23 novembre 2020, R.G. 19/3.458/A).
Est abusif le licenciement d’un chauffeur décidé davantage par les conséquences de l’accident qu’il a provoqué que par son attitude, dont il n’est pas démontré qu’elle n’était pas conforme aux instructions reçues ou aurait fait l’objet d’une négligence fautive.
(Décision commentée)
Dès que le congé moyennant un préavis nul est notifié, il y a en principe rupture immédiate du contrat de travail, les parties ayant cependant la possibilité de renoncer à se prévaloir du congé immédiat, le contrat subsistant alors jusqu’à ce qu’il y soit mis fin autrement. La renonciation à invoquer le congé immédiat n’implique cependant pas qu’il soit renoncé à la nullité absolue du préavis ou au droit d’invoquer celle-ci. En l’espèce, la cour considère qu’ayant soulevé la nullité du préavis par lettre recommandée 12 jours après le licenciement, l’ouvrier a réagi dans un délai rapide et raisonnable et que le fait qu’il ait continué à travailler jusqu’à cette date ne permet pas de considérer qu’il ait couvert la nullité.
(Décision commentée)
Une association de C.P.A.S., constituée conformément à l’article 118 de la loi organique des C.P.A.S., est une autorité publique à qui le principe audi alteram partem s’applique. Il s’agit en effet d’une A.S.B.L. de droit public, dont les membres sont des C.P.A.S. identifiés ainsi que, en l’occurrence, une université. L’Association ainsi constituée est soumise à une influence déterminante des C.P.A.S., pouvoirs publics. En l’espèce, en tant que hôpital créé dans le cadre de l’article 118, celle-ci poursuit une mission d’intérêt général et dispose d’un pouvoir de décision contraignant à l’égard des tiers. La cour conclut dès lors à l’obligation d’audition préalable au licenciement d’une travailleuse contractuelle, ce licenciement étant une mesure grave liée, en partie en l’espèce, à son comportement.
Lorsqu’il n’est pas établi que l’intéressé a agi intentionnellement et de manière déloyale, le fait d’avoir proposé à un client une solution à fournir par une société concurrente constitue, d’évidence, une erreur professionnelle qui, tout en étant d’une certaine gravité, n’est pas de nature à rendre impossible la poursuite de la relation professionnelle entre parties.
La divergence d’appréciation entre l’employeur et la juridiction saisie sur la question de savoir si les faits reprochés sont de nature à justifier un licenciement immédiat ne permet pas de conclure au comportement abusif de son auteur. S’il est, par ailleurs, certain qu’un licenciement pour motif grave peut représenter un choc douloureux pour qui en est victime, ce ressenti ne permet pas plus d’y voir une forme de brutalité, rendant cette mesure manifestement déraisonnable.
Le fait d’avoir à formuler certaines réserves à propos des prestations du travailleur peut être considéré comme motif suffisant, pour peu, naturellement, qu’elles soient étrangères à la prise du congé parental. Ainsi en va-t-il lorsqu’il appert de rapports d’évaluation que l’appréciation, globalement positive de celles-ci, est néanmoins tempérée par la mention de points d’amélioration tenant au manque de résistance au stress de l’intéressé ainsi qu’à ses problèmes de communication avec les membres de son équipe.
Dans la mesure où le congé est un acte juridique unilatéral impliquant, dans le chef de son auteur, une décision irrévocable et définitive, ce dernier ne peut, après avoir licencié le travailleur moyennant un préavis – et déjà commué celui-ci en une dispense de prestations assortie de l’engagement de verser une indemnité compensatoire de préavis –, rompre ce contrat une seconde fois en l’assortissant d’une nouvelle modalité, à savoir un motif grave.
Doit être tenue pour nulle et non avenue la désignation en qualité de délégué syndical qu’un travailleur, remplissant par ailleurs les conditions prescrites par la C.C.T. applicable, obtient en détournant l’usage d’un droit reconnu en vue d’assurer la représentation des travailleurs, à l’effet de faire échec à son propre licenciement ou de le rendre plus onéreux en spéculant clairement sur l’irrespect par son employeur de la procédure applicable en cas de licenciement d’un délégué syndical.
Agit avec une légèreté telle qu’il y a dépassement manifeste des limites de l’exercice normal du droit de rupture l’employeur qui licencie un travailleur, sans avertissement écrit ni audition préalable, au motif de la prise, le midi, d’une pause plus importante que la norme, sans tenir compte du fait que le supérieur hiérarchique de l’intéressé avait, lui-même, adressé un mail au personnel sous ses ordres pour autoriser des dépassements jusqu’à une certaine limite, ni vérifier si celle-ci n’avait pas été dépassée.
La loi du 15 juin 2020, en vigueur le 22 juin 2020, vise à suspendre les délais de préavis des congés notifiés avant ou durant la période de suspension temporaire de l’exécution des contrats pour cause de force majeure en raison de la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19. En cas de congé donné par l’employeur, les délais de préavis :
Autrement dit, à partir du 22 juin 2020, les délais de préavis notifiés par l’employeur avant ou pendant une période de chômage temporaire pour cause de force majeure Covid-19 cessent de courir pendant cette période de suspension du contrat. Les jours de chômage temporaire pour cause de force majeure Covid-19 précédant le 22 juin 2020 ne suspendent, eux, pas le délai de préavis.
Des explications mêmes brèves peuvent être suffisamment concrètes pour se rendre compte de la réalité du motif avancé pour justifier le licenciement.
La prolongation d’une incapacité de travail ne constitue, en soi, pas un motif valable de licenciement. Une décision de licenciement fondée sur ce motif n’aurait manifestement pas été prise par un employeur normalement prudent sans faire examiner la victime par la médecine du travail ou sans connaître la suite réservée au terme du certificat médical, à moins d’établir la désorganisation de l’entreprise due à l’absence du travailleur concerné.
La question de la charge de la preuve peut être synthétisée selon (i) que le travailleur a adressé à son employeur une demande afin de connaître les motifs qui ont conduit à son licenciement et que soit l’employeur a répondu adéquatement à la demande, soit qu’il a déjà communiqué d’initiative les motifs au travailleur (partage de la charge de la preuve, chacun devant prouver les faits qu’il allègue), (ii) que le travailleur a adressé à son employeur une demande régulière afin de connaître les motifs qui ont conduit à son licenciement et que l’employeur n’y a pas répondu ou n’a pas répondu de manière adéquate (renversement de la charge de la preuve au détriment de l’employeur et risque de la preuve pour lui en application de l’article 8.4, alinéa 4, du Code civil), ou (iii) que le travailleur n’a formulé aucune demande régulière et que l’employeur a ou non communiqué les motifs d’initiative (retour au droit commun de la preuve énoncé à l’article 8.4, alinéas 1er et 2, C. civ.).
L’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 est sujet à une interprétation large, dès lors que, même lorsque l’action porte sur des engagements souscrits par l’employeur pendant l’exécution du contrat et qui n’ont pas directement leur cause juridique dans les dispositions de celui-ci, il pourrait malgré tout être considéré que l’action trouve sa source dans le contrat de travail au sens de cette disposition. Pour que l’article 15 s’applique, il suffit que, sans le contrat de travail, l’action n’aurait pas pu naître.
Les faits qui fondent le sentiment de rupture de confiance sont des données objectives qui peuvent guider le juge dans son appréciation souveraine de la situation. Il examine la faute à la lumière de toutes les circonstances qui l’accompagnent et qui sont de nature à lui conférer le caractère de motif grave. Il peut avoir égard à des éléments qui concernent tant le travailleur que l’employeur et à des circonstances diverses (ancienneté, type de fonction, temps, lieu, degré de responsabilité, passé professionnel, état physique et mental, nature de l’entreprise et importance du préjudice subi). Ces éléments sont susceptibles d’exercer une influence tantôt sur le degré de gravité de la faute, tantôt sur l’évaluation globale et objective de l’impact de celle-ci sur la possibilité de poursuite de la relation professionnelle. Le juge ne peut cependant lier l’appréciation de la possibilité de poursuivre les relations professionnelles au critère de la disproportion entre cette faute et la perte de l’emploi, celui-ci lui étant étranger.
En convoquant un travailleur à un entretien avant de procéder à son licenciement pour motif grave, l’intercommunale qui l’occupe reconnaît l’existence d’une obligation d’audition préalable dans son chef et, corrélativement, le droit, dans celui de l’intéressé, de faire valoir ses moyens de défense à l’encontre des accusations lancées à son égard, ce qui implique qu’elle respecte les garanties liées à l’exercice effectif de celui-ci. Dès lors que les droits de défense de l’intéressé auraient été violés lors de cette audition, l’aveu extra-judiciaire obtenu dans son cours ne peut, en aucune façon, être retenu comme élément de preuve à sa charge, ni permettre d’établir la matérialité de la faute grave qui lui est reprochée.
(Décision commentée)
Une faute grave ne constitue pas nécessairement un motif grave. Il faut qu’elle ait une répercussion telle sur les relations contractuelles que celles-ci ne peuvent plus être poursuivies. Il est ainsi fait une distinction entre les fautes graves, certaines d’entre elles allant entraîner la rupture du contrat, alors que d’autres permettent au lien contractuel de subsister.
Certains faits reprochés en l’espèce dénotent une attitude « peu docile » de l’intéressé vis-à-vis des ordres reçus et un manque de collégialité vis-à-vis d’un autre travailleur. En outre, vu leur caractère multiple et eu égard à deux mises en garde, ces faits sont considérés comme gravement fautifs. La cour considère cependant que ces fautes, examinées isolément ou dans leur ensemble, n’atteignent pas le degré de gravité suffisant pour être constitutives d’un motif grave. Il s’agit d’un comportement inapproprié vis-à-vis des interlocuteurs du travailleur. Si la société a pu légitimement les désapprouver, ceux-ci s’expliquent partiellement par une incapacité dans le chef de l’intéressé à gérer sa nervosité dans un contexte professionnel exigeant le strict respect de délais.
Se rend coupable d’une rétention caractérisée d’informations nécessaires à son employeur, qu’il est seul à détenir, le travailleur qui choisit d’ignorer les demandes légitimes et répétées de sa hiérarchie de fournir les informations demandées. Il y va, dans son chef, d’un acte d’insurbodination commis en connaissance de cause.
Le principe suivant lequel la faute doit être imputable personnellement au travailleur connaît un double tempérament étant, d’une part, que, par application des dispositions relatives au mandat, la faute d’un tiers mandataire peut être imputée à son mandant si ce tiers a agi dans les limites de son mandat – auquel cas la faute commise par le mandataire dans ce cadre est imputée au mandant et peut entraîner son licenciement pour motif grave – et, d’autre part, qu’il est possible que le fait fautif ne soit pas posé directement par le travailleur, mais qu’il le soit à son instigation. Peut, ainsi, être convaincue de motif grave compte tenu de son implication directe et personnelle dans la démarche entreprise par son mari, la gérante adjointe d’un magasin qui, en violation du règlement de travail et de la loi du 8 décembre 1992, a communiqué à celui-ci les coordonnées personnelles d’un client, auteur d’une plainte à son égard, et l’a incité à prendre contact avec lui, ce qui a débouché, au cours d’un entretien téléphonique auquel l’intéressée a assisté, sur la tenue de propos menaçants et intimidants à l’adresse de ce client.
L’article 3, § 2, de la loi du 19 mars 1991 implique une interdiction, dans le chef de l’employeur, de discriminer le travailleur protégé, négativement ou positivement, en considération de sa qualité de délégué ou candidat délégué du personnel. Il en sera ainsi, notamment, lorsque, à l’occasion d’une fermeture d’entreprise, l’employeur démontre que tous les travailleurs protégés disposaient de la même information et des mêmes chances d’accès au reclassement que leurs collègues licenciés, sans que celles-ci leur soient réservées par priorité, ce qui constituerait un traitement plus favorable lié à leur mandat.
La rupture de la confiance sur laquelle repose le contrat peut rendre impossible la poursuite des relations de travail. Celle-ci est, certes, ressentie subjectivement, mais les faits qui fondent ce sentiment sont des données objectives pouvant guider le juge dans son appréciation souveraine de la situation, appréciation au cours de laquelle il examinera la faute à la lumière de toutes les circonstances qui l’accompagnent et qui sont de nature à lui conférer le caractère d’un motif grave.
Dans cette approche, il pourra avoir égard à des éléments qui concernent tant le travailleur que l’employeur et des circonstances variées (ancienneté, type de fonctions, importance du préjudice subi, etc.) apparaissant, in fine, comme étant autant d’éléments susceptibles d’exercer une influence, tantôt sur le degré de gravité de la faute, tantôt sur l’évaluation globale et objective de son impact sur la possibilité de poursuivre la collaboration professionnelle.
Le comportement agressif adopté à l’égard d’un collègue dans un contexte d’antécédents de même nature constitue une faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible la poursuite de toute collaboration professionnelle.
Le fait que le licenciement a eu lieu alors que le travailleur était en congé de maladie et avait déposé une plainte informelle pour un prétendu harcèlement ne permet pas de conclure au caractère manifestement déraisonnable de celui-ci dès lors que la preuve est rapportée de motifs liés à sa conduite et qu’il n’existe, en outre, aucun commencement de preuve que ce licenciement était motivé par une volonté de vengeance ou constituerait un acte de représailles.
Confirmation de Trib. trav. Liège (div. Huy), 12 octobre 2020, R.G. 19/191/A - ci-dessous.
L’article 189 du Code pénal social ne punit que d’une peine de niveau 1 (soit une amende administrative et non une amende pénale) la violation de la C.C.T. n° 10. Il ne s’agit donc pas d’un délit qui se prescrirait par 5 ans. Il s’agit toutefois bel et bien d’une infraction ayant causé dommage au travailleur qui en postule l’indemnisation. La prescription quinquennale est dès lors applicable en vertu de l’article 2262bis du Code civil, qui a vocation à régir toutes les actions en responsabilité extracontractuelle.
Il est légitime pour un employé d’une société de courtage en assurances d’aviser les clients dont il gérait les portefeuilles de son prochain départ de l’entreprise, situation qui a pu, à juste titre, inciter certains d’entre eux, membres de sa famille, amis et connaissances, à quitter celle-ci, avec son aide éventuelle dans l’accomplissement des démarches utiles à cette fin, dès lors qu’ils ont pu estimer que leurs intérêts ne seraient plus défendus avec la même énergie que si l’intéressé veillait à en assurer la protection. Une telle intervention n’est pas constitutive de détournement de clientèle et ne saurait davantage être qualifiée d’illégale au prétexte qu’elle aurait trouvé place à un moment où il était bénéficiaire de prestations de sécurité sociale.
Un employeur normal et raisonnable n’aurait jamais licencié un de ses travailleurs pour de prétendus motifs découlant d’informations dont il n’a vérifié la réalité qu’après avoir procédé au licenciement, se rendant compte, seulement à ce moment, que ces informations étaient inexactes et incomplètes.
Un employeur peut, sans excéder les normes du raisonnable, décider de mettre un terme à l’occupation d’un travailleur ayant commis une faute professionnelle qui, sans constituer un motif grave, est toutefois intrinsèquement sérieuse et susceptible de conséquences qui le sont tout autant.
En ne consultant pas la messagerie du courrier indésirable pendant une période en l’espèce de 4 semaines, une secrétaire d’un cabinet d’avocats manque aux obligations professionnelles qui sont les siennes et n’agit pas comme une secrétaire normalement prudente et diligente placée dans les mêmes circonstances. Il s’agit d’une faute « professionnelle » commise toutefois sans intention délibérée, malveillante ou de nuire et qui ne témoigne pas non plus d’une forme de malhonnêteté à l’égard de l’employeur. Ces éléments sont de nature à minorer l’impact de cette faute sur le maintien de la confiance indispensable dans les relations professionnelles. A l’inverse, doivent être pris en considération le fait qu’elle s’était vu adresser un avertissement écrit quelques semaines auparavant en raison de manquements professionnels, tout comme la circonstance que la faute en cause était de nature à avoir des conséquences sérieuses en termes de responsabilité pour son employeur.
Le juge peut légalement déduire de la constatation que la partie ayant donné congé a fait durer inutilement l’examen du caractère sérieux des faits pris en considération comme motif grave, que ceux-ci ne sont pas de nature à rendre immédiatement et définitivement impossible toute collaboration entre parties et ne constituent, dès lors, pas un motif grave justifiant le congé (avec renvoi à Cass. 8 avril 1991, Pas., I, 1991, p. 718).
Un employeur normal et raisonnable n’aurait jamais pris une décision de licenciement fondée sur la non-remise d’un certificat médical d’incapacité de travail pour une période de quelques jours.
Représentent de simples erreurs d’appréciation, certes importantes, mais qui n’atteignent pas le caractère de gravité requis pour justifier un licenciement immédiat, des manquements consistant, d’une part, à avoir, alors qu’il ne disposait d’aucune instruction pour ce faire, entamé, pour répondre à la demande d’une inspectrice sociale, une réunion sans attendre l’arrivée d’un supérieur dont la présence était normalement prévue et sans s’inquiéter, ne fût-ce que par un simple appel téléphonique, de savoir si (et quand) ce dernier allait arriver et, d’autre part, à avoir accueilli à cette réunion un délégué syndical, sans avoir, au préalable, demandé à son employeur si la présence de celui-ci était admise.
Le licenciement d’un travailleur peut, dans certaines conditions (grand nombre de travailleurs occupés, position hiérarchique de l’intéressé ne relevant pas de la direction ou d’un niveau apparenté, etc.), être délégué à un mandataire de l’association par son comité de gestion et, ainsi, relever de la gestion journalière de celle-ci.
Un employeur ne peut plus accorder aucune confiance à un chef boucher qui, au mépris des dispositions réglementaires, commet, de manière répétée et malgré des avertissements circonstanciés, des manquements importants relatifs à la tenue du rayon boucherie et au respect des règles d’hygiène alimentaire, mettant ainsi en danger la santé des clients.
Constitue un manquement au devoir de loyauté qui entraîne une perte de confiance rendant toute collaboration professionnelle définitivement et immédiatement impossible le fait pour un responsable de succursale, ayant connaissance de faits de vol commis par son adjoint, de n’envisager qu’une mesure de rétrogradation à son égard et, ensuite, de s’abstenir d’évoquer ces faits graves lors d’une réunion ayant précisément pour objet de préparer le bilan de compétences de cet adjoint.
En convoquant un agent contractuel à un entretien, un commune reconnaît l’existence d’une obligation d’audition préalable à une éventuelle mesure de licenciement et, corrélativement, le droit pour l’intéressé de faire valoir ses moyens de défense à l’encontre des accusations lancées envers lui. Il n’y a, dès lors, pas lieu de lui retirer ensuite ce droit au prétexte qu’il se serait rendu coupable d’insubordination en refusant d’assister à l’entrevue à laquelle il avait été convoqué, alors même que ce prétendu refus, assorti d’une demande de report de date par son conseil, traduisait simplement sa volonté de préparer la défense de ses intérêts, rendue impossible par l’absence de communication de son dossier administratif et, partant, de faire usage de son droit, ce qui impliquait le respect des garanties liées à son exercice effectif.
Reste en défaut de faire preuve de respect et d’égards à l’adresse d’un de ses agents contractuels mais, au contraire, adopte une attitude humiliante et vexatoire envers lui la commune qui, tout en offrant à l’intéressé la possibilité de se faire assister par un conseil à l’occasion d’une entrevue destinée à débattre des problèmes de collaboration professionnelle préalablement à un éventuel licenciement, empêche, dans les faits, volontairement qu’il puisse présenter ses moyens de défense en lui imposant une confrontation sans lui permettre de disposer de son dossier administratif et de l’assistance de son conseil.
(Décision commentée)
L’indemnité de protection du conseiller en prévention est due lorsque le motif grave n’est pas admis et que le juge a reconnu que celui-ci porte atteinte à l’indépendance de celui-ci ou que les motifs d’incompétence invoqués ne sont pas établis. Dès lors, lorsque le licenciement pour motif grave n’est pas fondé, le paiement de l’indemnité de protection n’est pas automatique. En l’espèce, la cour considère qu’il n’y a pas lieu d’allouer cette indemnité, les motifs de rupture (incidents entre parties) étant étrangers à l’indépendance du conseiller et n’étant pas relatifs à sa compétence à exercer ses missions légales.
En participant activement à l’humiliation d’un stagiaire placé sous son autorité, le travailleur se rend coupable d’une violation de la norme comportementale posée par les articles 16 et 17, 1°, L.C.T., laquelle doit être qualifiée de faute grave constitutive de motif grave.
Si c’est une autorité collégiale qui dispose du pouvoir de licencier un travailleur pour motif grave, le délai ne commence à courir que lorsque celle-ci est valablement constituée. La circonstance que les faits auraient été connus, individuellement, par certains membres de la hiérarchie, voire certains administrateurs, ne constitue évidemment pas la connaissance requise.
On ne peut reprocher à un travailleur de ne pas avoir respecté une procédure dont il n’a, même si elle est qualifiée de « normale », jamais eu connaissance et qui lui fut détaillée, pour la première fois, dans le courrier de notification des fautes constitutives de motif grave. Cette manière de procéder est clairement inacceptable, de telle sorte qu’aucune faute en relation avec un prétendu refus de se conformer à cette procédure ne peut lui être imputée.
Présente indéniablement un caractère abusif en raison des circonstances qui l’ont précédé le licenciement pour motif grave consistant à reprocher à un travailleur de mettre en péril l’introduction d’une demande de subvention pour l’échéance prévue, ce après avoir modifié à son insu ses codes d’accès à l’interface informatique de l’entreprise et, ce faisant, porté atteinte au crédit et à la compétence de l’intéressé en alimentant faussement les reproches invoqués puisque, de par cette modification, il avait, de facto, rendu cette introduction impossible.
Dès lors qu’un différend sérieux a surgi entre parties sur les modalités de leur collaboration professionnelle – ce qui a conduit le travailleur à prétendre, tout en ne déduisant aucune conséquence juridique du constat posé par ses soins, que son employeur avait rompu unilatéralement le contrat les liant –, tout employeur normalement prudent et raisonnable aurait immanquablement conclu à l’impossibilité de poursuivre toute collaboration avec l’intéressé, la confiance indispensable au maintien des relations de travail étant sérieusement entamée suite au positionnement difficilement compréhensible qu’il a adopté.
Manque gravement à ses obligations le conducteur de bus qui laisse un voyageur monter dans son véhicule sans vérifier son titre de transport et omet de mettre les données de son ordinateur à jour au moment du passage d’un zone à une autre, permettant ainsi à celui-ci de frauder le client-donneur d’ordre de son employeur et impactant, de ce fait, les relations existant entre eux.
Commet une faute en lien de causalité avec un dommage à tout le moins moral l’employeur qui délivre un C4 comportant des mentions contradictoires (en renseignant tout à la fois que le travailleur a été licencié pour motif grave et qu’une indemnité de congé lui a été payée), ce qui a empêché l’intéressé d’obtenir des allocations de chômage provisoires à la date de sa demande et l’a obligé à formuler une demande d’aide au C.P.A.S.
Ce n’est pas parce que les griefs retenus dans la lettre de congé pourraient s’analyser comme des manquements continus que l’employeur pourrait artificiellement reporter la date à laquelle il estime que ceux-ci, à les supposer exister, rendent immédiatement et définitivement impossible toute poursuite de la collaboration professionnelle, même en l’absence d’un élément nouveau alimentant la continuité de ceux dont il aurait eu connaissance dans les trois jours précédant le congé.
Dans un contexte de surcharge de travail, ne constitue pas un motif grave le fait pour un travailleur de ne pas obtempérer immédiatement à une demande de son employeur qui l’eût obligé à interrompre l’exécution des tâches, tout autant prioritaires, auxquelles il était occupé.
Un comportement contraire aux règles internes à l’entreprise, pour fautif qu’il soit, ne revêt pas le caractère de gravité requis pour fonder un motif grave dans le chef d’un travailleur justifiant d’une ancienneté conséquente et sans autre incident de parcours établi qu’un avertissement écrit pour des faits d’une autre nature, ce d’autant plus que le règlement de travail prévoit expressément une échelle de sanctions en cas de non-respect des règles d’organisation.
Un employeur normalement prudent et diligent ne licencierait pas un membre de son personnel, sans aucun reproche propre à sa personne, au seul motif de son lien de parenté avec un autre travailleur à qui la gestion de la société a été retirée en raison de griefs invoqués par elle à son encontre.
En présence d’une clause d’essai, il convient de calculer la première partie du délai de préavis visé à l’article 68 de la loi du 26 décembre 2013 sur la base de l’ancienneté acquise en date du 31 décembre 2013, sans tenir compte, pour ce faire, de ce qu’une période d’essai était, à celle-ci, encore en cours. Le travailleur a, de ce fait, droit à une délai de préavis de 3 mois.
Par « ancienneté scientifique » au sens du décret du 19 juillet 1991 relatif à la carrière des chercheurs scientifiques, on entend le total de l’expérience acquise depuis l’obtention du diplôme avec, pour objet, la détermination de la rémunération à laquelle les intéressés peuvent prétendre sur cette base. Elle vise donc, et uniquement, une ancienneté barémique et est, partant, sans incidence, sur la détermination du délai de préavis.
Constitue un manquement à l’obligation de respect et d’égards mutuels qui s’impose dans la relation de travail (LCT, art. 16) le fait de s’en prendre, en présence de tiers, à un supérieur hiérarchique avec cris, injures et gestes perçus comme menaçants par les personnes présentes.
La faute doit être appréciée non de manière abstraite, mais concrètement en prenant en considération l’ensemble des éléments de fait relatifs à l’acte lui-même et au contexte dans lequel il a été posé. Ces éléments concernent tant le travailleur que l’employeur. Le juge doit ainsi tenir compte, notamment, de l’ancienneté, des fonctions, des responsabilités, du passé professionnel, des éventuels antécédents, de l’état de santé physique et mental du travailleur tel que connu de l’employeur. Il doit aussi apprécier la faute subjectivement dans le chef de l’employeur, sa gravité pouvant dépendre des règles internes et éthiques de l’entreprise ou encore de ce que l’on appelle communément la « culture de l’entreprise ».
Même si son intention n’était pas frauduleuse et si les informations reprises sur le document litigieux étaient identiques à celles figurant sur celui qu’il avait fait valider par sa hiérarchie, se rend coupable de faux et d’usage de faux le travailleur qui découpe les signatures apparaissant sur un formulaire erronément utilisé pour les coller sur le document adéquat dont il effectue une copie-couleur, qu’il envoie ensuite à la personne devant traiter l’opération.
Le seul fait que le règlement de travail mentionne que constitue un motif grave le fait de travailler pendant une période d’incapacité de travail est insuffisant pour établir celui-ci. Le motif grave peut cependant exister en cas de comportement frauduleux.
Il importe peu que l’activité en question ait été exercée pendant les horaires de travail, puisque le contrat de travail est par hypothèse suspendu. Peu importe également que l’activité soit exercée à titre privé ou à titre professionnel ou qu’elle ait été préalablement autorisée ou non par l’employeur, la cour relevant encore que l’incapacité de travail est due en l’espèce non à une atteinte d’ordre physique qui aurait empêché le travailleur d’accomplir des tâches similaires à celles exercées dans ses fonctions contractuelles mais essentiellement à une atteinte d’ordre psychique liée aux conditions de travail.
Rien ne permet de supposer, lorsque la lettre de notification du congé pour motif grave a été envoyée au travailleur à une adresse inexacte, que l’intéressé a pris connaissance de son contenu avant que ce courrier lui soit communiqué dans le cadre de la procédure judiciaire qu’il a intentée pour contester son licenciement. Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que l’employeur n’a pas valablement communiqué d’initiative les motifs concrets de celui-ci. Il lui appartient alors de fournir la preuve des motifs invoqués qu’il n’a pas communiqués à l’intéressé dans le respect de l’article 5 de la C.C.T. n° 109.
Le fait de s’endormir sur son lieu de travail au vu de tous constitue indiscutablement un manquement fautif du travailleur à l’obligation qui lui est faite « d’exécuter son travail avec soin, probité et conscience, au temps, au lieu et dans les conditions convenus » (L.C.T., art. 17), présentant un caractère de gravité d’autant plus certain lorsque, en sa qualité d’agent de gardiennage, il est investi d’un poste de confiance, requérant une attention toute particulière de sa part.
C’est à tort et en vain que le travailleur entend se prévaloir, pour couvrir son comportement, d’une prétendue pratique lorsque celle-ci va directement à l’encontre des instructions claires données par l’employeur aux agents de gardiennage en charge d’un site spécifique – lesquelles ne prévoient aucun assouplissement quelconque quant au lieu de travail pour ce qui concerne les shifts de nuit, la seule tolérance admise concernant l’usage d’un petit appareil multimédia par le garde de nuit – et qu’il ne ressort d’aucun élément objectif du dossier que cette pratique manifestement contraire aux instructions en vigueur était connue et a fortiori tolérée par la société.
Outre que le fait de ne pas être présent à son poste de travail pendant plusieurs heures constitue indiscutablement un manquement fautif du travailleur à ses obligations tant contractuelles que légales, il s’agit, comme tel, d’un manquement déjà particulièrement grave dans son chef en ce qu’il était, en sa qualité d’agent de gardiennage, investi d’un poste de confiance requérant une attention toute particulière et qu’il était de surcroît en charge d’un site particulièrement sensible.
Un travailleur a le droit d’exprimer, sans pour autant que l’on puisse conclure à la menace, qu’il entend exercer un recours en justice pour se défendre de la diffamation dont il se prétend victime et qu’il estime de nature à nuire à son avenir professionnel.
(Décision commentée)
L’article 35 LCT n’exige pas que la lettre de congé contienne expressément la mention « motif grave ». Son absence n’est donc pas de nature à invalider le licenciement intervenu sur cette base. Il en va de même lorsque, à la suite d’une simple erreur matérielle, on y évoque un « avertissement », ce fait ne modifiant pas la portée de la lettre de congé.
La précision requise n’est pas atteinte lorsque la lettre qui contient les motifs fait état d’une « conviction acquise », mais ne permet pas de déterminer avec certitude à quel moment celle-ci le fut, et, pour le reste, se réfère, à titre de faute très grave, à des menaces et intimidations à l’encontre de la société et de sa gérante, sans préciser le moins du monde en quoi consistaient lesdites menaces.
Aucun employeur normal et raisonnable ne peut accepter que la société et sa gérante fassent l’objet de menaces téléphoniques de la part d’un travailleur, en particulier dans une petite structure où il n’est pas possible de déplacer l’intéressé dans une autre division lointaine parce que les frictions avec la hiérarchie locale deviennent insupportables.
Lorsque l’employeur a communiqué les motifs du congé, la charge de la preuve sera partagée de façon égale. L’avantage dont bénéficierait l’employeur consisterait dans le fait qu’il bénéficie quelque-part d’une présomption (simple) de l’absence du caractère manifestement déraisonnable du licenciement lorsqu’il a été en mesure de démontrer la réalité des motifs invoqués à l’appui de sa décision et leur lien de causalité avec le licenciement.
Une notification écrite des motifs du licenciement sur le formulaire C4 peut être considérée comme une notification spontanée et valable des motifs au sens de l’article 6 de la C.C.T. n° 109, pour autant qu’elle permette au travailleur d’être informé des motifs qui ont conduit à son licenciement.
Une lecture à la lettre de l’article 8 de la C.C.T. n° 109 impliquerait d’écarter l’existence d’un licenciement manifestement déraisonnable si l’une des propositions énoncées fait défaut, ce qui serait en contradiction avec les enseignements évolutifs de la Cour de cassation relatifs à l’ancien article 63 de la loi du 3 juillet 1978.
Il convient de considérer que l’utilisation de la conjonction de coordination « et » dans l’article 8 est malheureuse et de privilégier une autre lecture, sous la forme positive, de cette disposition : le licenciement sera régulier s’il se base sur un motif en lien avec l’aptitude, la conduite du travailleur ou les nécessités de fonctionnement de l’entreprise et si la décision de licencier aurait été prise par un employeur normal et prudent.
(Décision commentée)
En cas de licenciement pour carences professionnelles, la procédure préalable au licenciement (C.P. 325) vise quatre étapes étant (i) la notification des manquements professionnels au travailleur, (ii) sa convocation écrite à un entretien dans un délai déterminé (avec remise du dossier de licenciement), (iii) la notification de la décision définitive et (iv) l’information de la délégation syndicale avec notification au travailleur.
Le choix fait par l’intéressé de ne pas être assisté par un délégué syndical ne dispense pas l’employeur du respect de l’ensemble de ces étapes. Ces obligations ne sont pas purement formelles. Il appartient à l’employeur d’agir de façon à permettre que l’effet utile de la procédure soit atteint. A défaut, l’indemnité spéciale est due.
Même dans le secteur du bâtiment, il n’est pas particulièrement adéquat d’appeler les membres de son équipe en les sifflant. À partir du moment où la direction estime que ce n’est pas vraiment « la fin du monde », ce fait n’est cependant pas suffisamment grave pour justifier un licenciement immédiat.
Ne correspond pas à l’attitude que l’on peut attendre d’un employeur normalement prudent et diligent qui met fin à un contrat de travail, même pour faute grave, le fait de décider de ce licenciement sur la seule base du rapport que le conseiller en prévention a dû réaliser dans l’urgence et en faisant l’objet de manipulations orchestrées à l’effet de lui présenter des témoins dont les déclarations convergeaient artificiellement. Il y va de méthodes d’autant plus inacceptables et inutilement vexatoires que les faits reprochés étaient particulièrement odieux et, partant, attentatoires à la réputation du travailleur.
Dès lors qu’il ne peut être exigé que l’organisation de l’entreprise soit telle que la personne investie du pouvoir de licencier soit informée en temps utile du fait considéré comme grave, le fait qu’elle ait eu la possibilité de connaître le fait reproché plus de trois jours avant le licenciement est non pertinent.
(Décision commentée)
La convention collective relative à la stabilité d’emploi dans le secteur des assurances contient une disposition particulière en cas de licenciement pour motif grave, étant que l’employeur est tenu d’informer la délégation syndicale dès la notification légale à l’intéressé. Cette formalité est distincte de la présence du délégué syndical lors de l’audition du travailleur, qui ne peut réparer l’omission de l’information à la délégation syndicale. Il s’agit d’une procédure prévue par la convention collective au même titre que les autres obligations de l’employeur dans d’autres hypothèses de licenciement. Le travailleur n’a pas à exercer un droit à cet égard. En conséquence vu l’omission de la formalité, la société est tenue au payement de l’indemnité de sécurité d’emploi.
Dès lors qu’aucun fait fautif dont l’employeur eut connaissance dans le délai légal n’est établi, il n’y a pas lieu d’avoir égard aux faits connus depuis plus de trois jours ouvrables, ceux-ci n’étant pas susceptibles d’avoir une incidence sur la gravité de comportements dont le caractère fautif n’est pas établi.
Toute modification (importante ou non) d’un élément convenu (essentiel ou accessoire), temporaire ou définitive est fautive au regard des dispositions du Code civil (article 1134) et des dispositions spécifiques du contrat de travail (articles 17, 20 et 25 de la loi sur les contrats de travail). Toute modification apportée unilatéralement à un élément convenu constitue donc un manquement mais ne justifie pas nécessairement une rupture du contrat. Le Président du tribunal, saisi en référés, peut en conséquence ordonner la suspension de la décision prise unilatéralement par l’employeur dans l’attente d’un accord ou de l’issue de la procédure menée au fond, et cela dans un contexte d’urgence dès lors que la modification est mise en œuvre.
On ne peut attendre d’ouvriers de production qu’ils utilisent toujours un langage correct ou fassent preuve d’une politesse de tous les instants et que, dans le cadre de conversations sur Messenger qui n’ont pas vocation à être rendues publiques, ils s’abstiennent de tenir, fût-ce sur un ton qui se veut celui de la plaisanterie, des propos à tout le moins indélicats ou inappropriés, voire triviaux.
(Décision commentée)
En subordonnant dans le cadre d’un transfert d’entreprise la poursuite de la relation de travail à la signature d’un nouveau contrat, la société cessionnaire a posé un acte équipollent à rupture, étant qu’elle a manifesté sa volonté de ne plus respecter les éléments essentiels sur lesquels a porté le consentement du travailleur lors de la conclusion du contrat. Le travailleur doit réagir dans un délai raisonnable, la rupture étant acquise à la date de la notification du constat.
En règle, un manquement n’est pas en soi révélateur de la volonté de rompre et une mise en demeure doit être adressée à la partie défaillante avant de pouvoir constater l’acte équipollent à rupture. Dans une telle situation, la persistance ou la répétition du manquement, nonobstant les réclamations formulées, peuvent révéler cette volonté.
Si la mise en demeure est marquée par un certain formalisme, force est de constater que l’article 2244 du Code civil ne prévoit pas la nullité comme sanction en cas d’irrégularité. Celle-ci peut donc être couverte.
Tel est le cas lorsque la lettre de mise en demeure, envoyée à l’adresse correcte du destinataire sans précision relative à sa raison sociale ou à sa forme juridique, comme normalement prescrit, a bien été réceptionnée, ce dont atteste l’accusé de réception signé par un de ses préposés.
La loi du 22 décembre 2002 est d’ordre public en ce qui concerne la protection du conseiller en prévention, qui ne peut donc y renoncer. Dès lors qu’elles concernent des intérêts particuliers et non ceux de l’État ou de la collectivité, ses dispositions en matière de paiement des indemnités sont, elles, simplement impératives, avec pour conséquence que le bénéficiaire peut, après son écartement ou avoir reçu son congé, y renoncer, pour le tout ou pour partie, de manière claire, certaine et non équivoque.
En présence d’une succession de manquements ayant conduit à un accident du travail grave, il est manifestement déraisonnable d’en faire porter la responsabilité sur le seul exécutant en bout de chaîne, à qui il est finalement imposé de dédouaner sa hiérarchie de toute responsabilité dans la survenance de celui-ci, ce alors même qu’elle ne s’est pas entièrement conformée à ses obligations de prévention et de protection de la santé de son personnel et a ainsi concouru à causer l’accident.
Pour relever de sa vie privée, une relation amoureuse entre un membre du personnel d’une structure d’accueil et une personne hébergée par celle-ci peut, néanmoins, constituer une faute grave justifiant la rupture du contrat de l’intéressée sans préavis ni indemnité lorsque, allant à l’encontre de la position de l’employeur à cet égard, elle a un impact réel et dirimant sur la relation de travail.
(Décision commentée)
L’employeur public qui n’a pas auditionné le travailleur contractuel avant de le licencier a commis une faute au sens de l’article 1382 du Code civil. Si la causalité certaine entre la faute et le dommage tel qu’il s’est réalisé in concreto n’est pas avérée, il peut néanmoins apparaître que la faute a entraîné de façon certaine au moins la perte d’une chance. C’est cette perte d’une chance qui est le préjudice spécifique qu’il convient de réparer. Il faut vérifier s’il existe un lien de « conditio sine qua non » entre la faute et cette perte de chance, c’est-à-dire si la chance perdue était réelle ou sérieuse. Il ne peut s’agir d’un dommage incertain.
Lorsqu’un employeur mène une enquête pour avoir une connaissance suffisante des faits, celle-ci suspend la prise de cours du délai de 3 jours, sans qu’il puisse ultérieurement être conclu au non-respect dudit délai du simple fait que tout ou partie de l’enquête n’a pas apporté d’éléments nouveaux.
Les différents critères qui permettent de tracer la frontière entre d’une part le droit du travailleur de s’exprimer librement dans le cadre professionnel, fût-ce pour critiquer son employeur, et d’autre part l’insubordination dont le travailleur se rend coupable lorsqu’il tient des propos qui heurtent le pouvoir d’autorité de l’employeur sont, notamment, les suivants : (i) les responsabilités du travailleur (si la subordination ne le prive pas d’un droit de critique, il en est a fortiori ainsi lorsque cette critique entre dans ses responsabilités et que la manière de l’exprimer n’est pas disproportionnée), (ii) le contexte privé de l’exercice du droit de critique (n’est pas fautif le fait, pour un employé, d’avoir tenu à un collègue de travail, au cours d’une conversation privée au domicile du premier, des propos critiques sur la gestion de l’entreprise) et (iii) la façon de formuler les critiques (les termes utilisés, le caractère spontané des déclarations, etc.).
La qualité générale des prestations d’un travailleur n’est pas exclusive d’écarts de comportement et n’impose pas non plus une grande clémence à son égard, a fortiori lorsque ces écarts restent dissimulés avant d’être mis à jour au terme d’une enquête approfondie.
Si, en présence de faits manifestement fondés, un employeur qui s’estime victime de malversations peut légitimement annoncer son intention d’exercer son droit au licenciement pour motif grave, encore faut-il que cette annonce ne soit pas de nature à donner au travailleur une impression telle qu’elle détermine son consentement à rompre d’un commun accord. Ainsi en est-il lorsque le risque d’être licencié pour motif grave reposant sur une consommation d’alcool volé sur les lieux de travail inspire, à une personne psychologiquement diminuée et alcoolisée, la crainte d’un mal considérable.
En cas de constat d’un licenciement manifestement déraisonnable, il est cohérent d’envisager l’octroi d’une indemnité égale à dix semaines de rémunération, soit la ligne médiane de « l’échelle », de trois à dix-sept semaines de rémunération, à moins que la prise en considération de facteurs aggravants (motif fallacieux, légèreté de l’employeur, atteinte à l‘image du travailleur, etc.) et/ou atténuants (comportement critiquable du travailleur, relation tendue, etc.) ne justifient le déplacement du curseur vers l’un des extrêmes.
Le fait pour un travailleur, invité en dernière minute à la défense publique du TFE d’un ancien stagiaire de l’entreprise dont il découvre alors seulement le contenu, d’y assister sans autorisation de sa hiérarchie et de ne pas dénoncer d’initiative à celle-ci la nature dénigrante de ce travail ne révèle pas une volonté de nuire à l’entreprise, ni une souscription sans réserve aux écrits de l’étudiant stagiaire. Il y va, tout au plus d’une erreur d’appréciation qui n’est, toutefois, pas assimilable à une faute grave constitutive de motif grave.
Des faits invoqués pour la première fois en appel ne peuvent être considérés, par eux-mêmes, comme des faits constitutifs de motif grave : tout au plus peuvent-ils être pris en considération s’ils constituent une preuve complémentaire de certains des motifs invoqués dans la lettre d’énonciation des fautes graves constitutives de motif grave.
Insulter et dénigrer des collègues ou d’autres personnes sur les lieux de travail en tenant à leur égard des propos sexistes et misogynes ou des remarques xénophobes est inadmissible. Il importe peu que le motif de cette violence relève des relations privées entre leur auteur et leur victime, dès lors que les faits se sont produits pendant le travail.
La communication des motifs ne doit pas impérativement être faite par l’employeur. Elle peut aussi bien intervenir en son nom.
Lorsque la décision de l’employeur est définitive, le travailleur est tenu de réagir immédiatement ou après un bref temps de réflexion, de mettre un terme au contrat pour motif grave ou encore d’arrêter les prestations de travail. S’il continue à prester pendant quelques mois encore, ceci peut être considéré comme une acceptation tacite de la modification des conditions de travail. Lorsque l’employeur modifie unilatéralement les conditions essentielles du contrat, la poursuite des prestations par le travailleur pendant une période plus longue que ce qui est nécessaire pour prendre attitude peut en effet impliquer qu’il renonce à se prévaloir de la modification unilatérale intervenue, et ce même si la poursuite des prestations de travail s’accompagne de la formulation de réserves.
Dans le contexte particulier de la reprise d’une société par de nouveaux associés et administrateurs ayant décidé de marquer la poursuite des activités de celle-ci de leur empreinte en se montrant plus rigoureux dans l’organisation et la gestion du travail du personnel par la mise en place de procédures manifestement plus strictes que par le passé, des avertissements adressés en cascade à un travailleur n’ayant, avant la reprise de la société et les différents changements qui s’en suivirent, jamais commis aucun manquement dans l’exercice de ses fonctions, ne sont pas de nature à établir que d’éventuels manquements aux nouvelles règles ─ du reste implémentées sans le moindre accompagnement ou soutien au personnel pour faire face à ces nouveautés qui ne lui ont jamais été communiquées clairement ─ seraient constitutifs et/ou révélateurs, sinon d’une insubordination caractérisée de sa part, à tout le moins d’une désinvolture délibérée dans son chef et/ou de son intention de nuire aux intérêts de son (nouvel) employeur.
La manière dont des étudiants qualifient l’attitude d’un de leurs enseignants à leur égard et le ressenti qu’ils expriment à son propos relèvent de l’appréciation et ne peuvent, en tant que tels, être retenus comme motif grave s’il ne peut être vérifié qu’il est justifié par des faits et proportionné à ceux-ci.
Un mensonge quant à la prétendue remise d’un certificat médical à un collègue, alors que ce n’est pas le cas, constitue une faute dont l’importance n’est, dès lors qu’il ne vise ni à couvrir un manquement professionnel grave, ni à obtenir un avantage quelconque, pas telle qu’elle crée une impossibilité immédiate et définitive de poursuivre toute collaboration professionnelle.
Le fait pour un travailleur d’effectuer au nom de son employeur et avec les fonds de celui-ci des achats pour son propre compte sans y avoir été autorisé est, comme tel, fautif en ce qu’il constitue un manquement à l’obligation légale qui incombe à tout travailleur d’exécuter son travail avec probité et conscience (LCT, art. 17, 1°). Ce comportement est d’autant plus grave dans le chef de qui dispose d’une grande latitude dans les achats à effectuer pour l’entreprise et est, en outre, chargé de l’encodage de ceux-ci dans la comptabilité, ce qui lui permit manifestement de masquer les achats litigieux.
La qualité générale des prestations d’un travailleur n’est pas exclusive d’écarts de comportement, même graves, et n’impose pas non plus une plus grande clémence à son égard, a fortiori lorsque ces écarts restent, comme en l’espèce, dans l’ombre avant d’être mis à jour.
L’employeur qui envisage de mettre fin à un contrat de travail pour motif grave peut (faire) procéder à une enquête ou à l’audition du travailleur en vue de parfaire sa connaissance des faits et des circonstances de nature à leur conférer la nature d’un motif grave.
Il importe peu que ces mesures apportent ou non des éléments nouveaux à la connaissance de l’employeur, du moment qu’elles lui permettent de parfaire la connaissance qu’il avait déjà des faits, et ce a fortiori lorsque le travailleur les conteste.
L’employeur n’est pas tenu de démontrer que les motifs du licenciement sont étrangers aux faits évoqués dans la plainte, ce qui serait ajouter au texte de loi une exigence qui n’y figure pas.
La protection assurée par la loi du 19 mars 1991 a pour but de prémunir les représentants des travailleurs de toute discrimination due à leur activité syndicale. L’octroi d’une indemnité spéciale implique donc la présomption que le représentant des travailleurs a été licencié à cause de son activité syndicale, soit pour la même faute que celle qui justifierait l’octroi d’une indemnité pour abus de droit.
Ce comportement, à savoir licencier un travailleur à cause de son activité syndicale, constitue une faute déjà sanctionnée en application de la loi susdite. Il n’est pas générateur d’une faute distincte de celle liée au non-respect des dispositions de celle-ci.
(Décision commentée)
L’article 35, alinéa 7, L.C.T. disposant que la signature apposée sur le double de l’écrit de notification du motif grave ne vaut que comme accusé de réception de celle-ci, il s’en déduit que, par les termes « remise d’un écrit », le législateur a voulu viser la remise d’un écrit en mains propres contre accusé de réception, et non son envoi par courrier simple, façon de procéder qui a pour effet que la notification est nulle pour n’être pas intervenue dans les formes prescrites et que les motifs ainsi irrégulièrement notifiés ne peuvent être invoqués, que la notification irrégulière ait, on non, date certaine. Ce fait n’emporte, en effet, pas que les exigences de la loi puissent être ignorées.
Un comportement agressif et inapproprié à l’égard de ses collègues, voire irrespectueux à l’égard de la hiérarchie de l’entreprise, dont le caractère persistant malgré de précédents rappels à l’ordre impactait le climat de travail, justifie la mesure de licenciement prise à l’égard du travailleur, lequel ne peut légitimer son attitude en invoquant le harcèlement moral dont il faisait l’objet et pour lequel il avait déposé plainte.
Pour exister, un acte juridique invoqué sous la forme d’un écrit doit être signé par son auteur, ce qui permet de l’identifier et de vérifier qu’il adhère à son contenu. Le défaut de signature d’un courrier de licenciement ne le rend pas nul ─ ce qui suppose l’existence préalable de l’acte ─, mais inexistant pour atteindre la substance de la volonté de rompre, avec pour conséquence qu’il ne sortit aucun des effets attachés au congé et n’est, tout au plus, qu’un projet qui ne peut traduire la volonté certaine de rompre le contrat à la date de son envoi.
C’est au jour où les faits litigieux ont été portés à la connaissance du conseil d’administration par l’inscription en urgence de ce point à l’ordre du jour à la demande du président, qu’a été acquise, par l’organe compétent pour licencier, la connaissance suffisante des faits justifiant le congé. La circonstance que certains de ses membres aient, à titre individuel, eu connaissance des faits à une date antérieure est sans pertinence à cet égard.
Dès lors qu’il a été jugé que le licenciement pour motifs graves du travailleur en raison de son comportement était régulier et justifié, sa demande de le voir reconnaître constitutif d’un abus de droit sur pied de l’article 1382 C. civ. en raison de ces motifs ne peut être accueillie : il s’agit d’un licenciement pour des motifs avérés, tenant à sa conduite et qui n’est pas tel qu’il n’aurait pas été décidé par un employeur normalement prudent et raisonnable.
(Décision commentée)
Le seul motif de licenciement invoqué étant une réorganisation, sans autre précision tant soit peu plus factuelle, communiquée en temps utile de nature à permettre à l’intéressé de connaître les raisons précises du licenciement et d’apprécier en pleine connaissance de cause le caractère raisonnable de celui-ci, ainsi qu’à la cour d’en vérifier la légitimité, il s’agit d’un motif vague et abstrait, qui ne correspond nullement aux exigences requises par la C.C.T. Le fait que, par la suite, le motif du licenciement a été précisé (étant que les travaux étaient confiés à une entreprise extérieure) n’y change rien, cette précision étant intervenue après l’expiration du délai de deux mois. L’amende civile est dès lors due.
Par ailleurs, la charge de la preuve incombe à la société, puisqu’elle n’a pas communiqué en temps utile les motifs concrets ayant conduit au licenciement. Cette preuve porte à la fois sur les motifs dont elle se prévaut ainsi que sur le caractère non manifestement déraisonnable du licenciement.
Le fait pour un travailleur de simuler une crise d’épilepsie ou d’hystérie en plein service est indiscutablement fautif en ce qu’il est contraire non seulement à l’obligation générale de bonne foi et loyauté qui s’impose à toute partie au contrat (C.civ., art. 1134), mais encore à celle, plus spécifique, qui incombe à tout travailleur d’exécuter son travail avec soin, probité et conscience (L.C.T., art. 17, 1°).
Ce fait, d’autant plus grave qu’il perdura malgré l’intervention d’un médecin, présent sur les lieux, puis d’ambulanciers et leur constat commun qu’il n’avait rien, est de nature à ruiner la confiance indispensable à la poursuite des relations de travail.
Il appartient à la partie qui conteste le motif grave qui lui est imputé et dont la preuve est rapportée avec un degré suffisant de certitude (ou de vraisemblance en cas de fait négatif) d’apporter elle-même la preuve du fondement et de la pertinence de sa contestation, le cas échéant par la preuve du fait positif contrariant le fait négatif.
L’existence d’une réorganisation ne suffit pas, en elle-même, à établir le motif pour lequel un travailleur en congé parental a été licencié. Encore faut-il que l’employeur établisse l’existence d’un motif suffisant de le licencier dans le cadre de la réorganisation invoquée, dont la nature et l’origine sont étrangères au congé parental dont il bénéficiait.
Il n’est pas contradictoire de décider que les tâches de nature intellectuelle confiées à un travailleur présentaient un caractère accessoire à sa fonction principale, à caractère manuel, et que ces tâches revêtaient néanmoins une importance certaine aux yeux des deux parties, de telle sorte que cette double fonction constituait un élément essentiel du contrat de travail.
Le seul fait pour un travailleur d’exprimer sa colère, sans s’adresser à personne en particulier, pour s’être vu confier une tâche supplémentaire dans un contexte de surcharge de travail ne constitue pas un acte d’insubordination tel qu’il justifie un licenciement sur-le-champ. Dans ce contexte, l’invitation qui lui avait, bien avant, été faite lors d’un entretien de fonctionnement de surveiller son comportement est insuffisante à justifier l’existence d’un motif grave.
La circonstance qu’une aide-soignante ait été engagée comme « personnel volant » dénote la commune intention des parties de ne pas convenir d’un service d’affectation déterminé et de considérer qu’une modification de celui-ci était possible en fonction des besoins du centre hospitalier.
Celle que l’intéressée n’ait, dans les faits, presté qu’au sein d’une unité de soins unique ne permet, quant à elle, pas de considérer que, dérogeant aux termes exprès du contrat, les parties auraient entendu s’accorder sur le fait qu’elle ne pouvait être affectée qu’à ce service, faisant ainsi de cet élément accessoire un élément convenu entre elles.
Partant, c’est de manière légitime que, compte tenu de l’affection développée par cette dernière, le CHU pourrait, compte tenu du risque présenté, lui indiquer que, au retour de son incapacité de travail, elle serait affectée dans un service autre que celui au sein duquel elle avait presté jusqu’alors.
La sanction que prévoit la CCT n° 109 pour licenciement manifestement déraisonnable régit la motivation du licenciement dont elle répare le défaut (motifs étrangers à la conduite ou à l’aptitude du travailleur) alors que l’article 1382 C.civ. est beaucoup plus large puisqu’il vise toute faute qu’aurait commise l’employeur dans l’usage de son droit de rompre unilatéralement le contrat de travail.
Un cumul est donc parfaitement possible à condition que le travailleur soit en mesure de démontrer l’existence d’une faute distincte de celle liée à la motivation du licenciement (atteinte à l’honneur et à la réputation, p.ex.) ainsi qu’un préjudice distinct, non réparé ni par l’indemnisation accordée en vertu de la CCT n° 109, ni par l’octroi d’une indemnité compensatoire de préavis.
(Décision commentée)
La poursuite des prestations de travail, même pendant une très courte période après l’envoi de la lettre recommandée de licenciement pour motif grave, permet de conclure à l’absence d’impossibilité absolue et immédiate de poursuite de la relation de travail.
(Décision commentée)
Rémunération de base de l’indemnité de protection en cas de crédit-temps C.C.T. n° 103.
Ne commet aucune faute grave de nature à justifier son licenciement pour motif grave, le travailleur qui, en état de grand stress diagnostiqué comme étant un burnout ayant entraîné une dépression suivie par un psychiatre, manifeste, à l’égard du médecin-contrôleur, une agressivité certaine débouchant sur un refus de se soumettre au contrôle pour lequel celui-ci a été dépêché. Dans pareille situation, l’intéressé aurait, du reste, dû s’interroger sur les raisons du grand stress manifesté et prendre contact avec le médecin traitant afin d’obtenir tous renseignements utiles concernant l’état de santé du travailleur (L.C.T., art. 31).
Pour qu’il y ait responsabilité, il faut ce minimum d’imputabilité morale que constitue la conscience de l’acte que son auteur accomplit. Il s’ensuit que si le travailleur commet un acte alors qu’il n’a pas ou plus la pleine possession de ses facultés mentales, que son libre arbitre est complétement annihilé, qu’il n’est pas sain d’esprit ou conscient de ce qu’il fait, il est privé de volonté et ne peut être responsable de cet acte. Un travailleur dépourvu de volonté ou inconscient des actes qu’il commet ne peut ainsi se voir imputer une faute de telle sorte que, en l’absence de faute, l’article 35 L.C.T. ne peut trouver à s’appliquer.
(Décision commentée)
Dans le secteur des banques, la convention collective contenant la procédure préalable au licenciement vise actuellement l’hypothèse du « manquement disciplinaire ou professionnel » et non plus celle de la « carence disciplinaire ou faute professionnelle ». Le terme « manquement » est plus large que celui de « faute », le manquement signifiant « ne satisfait pas à ce qui est exigé ». Un manquement peut être fautif ou non fautif, étant visées une incompétence, une inaptitude, etc. Le fait de ne pas convenir pour la nouvelle fonction exercée est un manquement professionnel et la procédure doit ainsi trouver à s’appliquer.
La notification à une adresse inexacte, voire imprécise, emporte que l’exigence légale de notification des motifs n’est pas rencontrée. Dans la mesure où le résultat éventuel de l’envoi ne peut être invoqué pour pallier l’erreur commise, il est alors sans intérêt de se poser la question de savoir si (et à quelle date) le destinataire en a néanmoins eu connaissance.
Méconnaît l’obligation de respect du secret professionnel qui lui incombait par application de l’article 458 du Code pénal le brancardier ayant évoqué devant certains collègues la présence au sein de l’institution hospitalière qui l’occupe de patients atteints ou suspectés d’être atteints de la Covid-19. En révélant ainsi des informations ayant vocation à rester confidentielles et qui lui avaient été confiées ou dont il avait pris connaissance du fait de sa profession, il a commis une faute de nature à semer une forme d’émoi au sein de la clinique et à faire naître des doutes sur sa communication officielle, ce qui est assurément dommageable mais, pour autant, n’est pas de nature à rendre toute collaboration professionnelle définitivement impossible.
Ainsi, aucune information à caractère personnel n’a été communiquée et n’a lésé de patients dont la protection est la raison d’être du secret médical. Par ailleurs, il n’est pas démontré que les conséquences potentielles évoquées par son employeur en termes de panique au sein du personnel ou de perte de crédibilité se seraient concrètement réalisées. Rien ne montre non plus que l’intéressé ait été animé d’une intention de nuire. Tout au plus a-t-il agi de manière légère et imprudente, ce qui est évidemment regrettable dans une situation sanitaire critique mais, pour partie, explicable dans ce contexte anxiogène.
Manque de manière flagrante à la plus élémentaire des obligations imposées par l’article 16 LCT, à savoir l’obligation de respect et d’égards mutuels, l’employeur qui notifie son licenciement à un travailleur en l’accompagnant d’une bordée d’insultes. Cette manière de licencier est, à l’évidence, abusive et dépasse largement les limites de l’exercice normal qu’un employeur prudent et diligent ferait de son droit.
Un courriel reprenant de sempiternels reproches accompagnés d’une énième menace de licenciement ne constitue pas une communication par écrit par l’employeur, de sa propre initiative, des motifs concrets qui ont conduit au licenciement, au sens de l’article 6 de la C.C.T. n° 109.
Une personne participant à une manifestation dénonçant la politique des ressources humaines de l’entreprise n’a, évidemment, aucune obligation de quitter celle-ci pour, par hypothèse, ne pas être associée aux propos ou aux messages véhiculés par d’autres manifestants, ce quand bien même les slogans clamés par certains d’entre eux seraient particulièrement violents. Il peut d’autant moins lui être reproché d’avoir, par sa présence, cautionné les propos insultants tenus à l’encontre d’un membre de la direction à l’occasion de celle-ci, qu’il ne résulte d’aucun élément qu’elle fut l’auteure des injures proférées et encore moins l’instigatrice de ce mouvement, voire de la diffusion des faits litigieux sur Facebook et sur YouTube.
Il résulte de l’arrêt de la Cour de cassation du 20 janvier 2020 que le licenciement d’un travailleur peut se justifier par les motifs déduits de faits invoqués dans sa plainte. Son employeur peut donc faire valoir que ce licenciement est justifié par l’attitude de l’intéressé en lien avec le harcèlement moral invoqué dans celle-ci. En effet, dans ce cas, le licenciement n’est pas en lien direct avec le fait d’avoir déposé plainte : il est éventuellement en lien avec les faits de harcèlement eux-mêmes.
On peut tout à fait être incapable d’exercer une activité lourde et stressante à raison de journées de travail de 11 heures, outre 3 heures de déplacement, tout en restant capable d’exercer quelques autres activités, ponctuelles et limitées, dont la charge est incommensurablement plus légère et n’implique qu’un trajet d’une quinzaine de minutes. Il en va d’autant plus ainsi lorsque l’incapacité de travail alléguée trouve sa cause dans une décompensation anxio-dépressive dont le traitement suppose le maintien d’une certaine activité ne présentant aucun danger ou risque spécifique de nature à compromettre la guérison du travailleur ou à retarder la reprise de son travail.
La nature et l’origine des éléments invoqués à l’appui du licenciement sont manifestement étrangers à l’exercice par le travailleur de son droit au congé parental lorsque, d’une part, le constat de la qualité insuffisante de ses prestations fut effectivement déjà posé avant même qu’il introduise sa demande et que, d’autre part, le refus qu’il a, à plusieurs reprises, exprimé quant à la nouvelle fonction qui lui a été proposée n’a, lui-même, jamais été motivé par des éléments en lien avec son congé parental, mais exclusivement par le fait qu’elle était d’une classe inférieure à celle qu’il occupait.
La démarche spontanée d’un travailleur qui, mu par le remords, explique avoir sollicité ce qu’il appelle un « certificat de complaisance » alors qu’il présentait pourtant un réel problème de santé, constitue une circonstance particulière pouvant conduire à estimer que son comportement n’est pas de nature à rendre immédiatement et définitivement impossible la poursuite des relations de travail. Le non-paiement de la rémunération et un avertissement auraient suffi à la sanctionner.
En refusant un plan de réintégration sans établir l’existence de faits matériels objectivables ou de motifs légitimes attestant de l’impossibilité de proposer un poste adapté ou un autre poste au travailleur, l’employeur se rend coupable d’un manquement d’une gravité telle que la demande de résolution judiciaire du contrat à ses torts est fondée. Outre celle-ci, le travailleur peut également solliciter une indemnisation sous forme de dommages et intérêts, en vue de réparer le dommage réel subi en lien avec le manquement grave ou sérieux de son employeur.
Saisi d’une telle demande, le juge peut, sans y être obligé, y faire droit en constatant l’existence du préjudice allégué et en fixant en équité un montant de dommages et intérêts évalué, le cas échéant, suivant les règles impératives relatives au calcul de l’indemnité compensatoire de préavis.
Il est contradictoire de rompre un contrat moyennant le paiement d’une indemnité compensatoire de préavis fixée unilatéralement à une semaine mais de refuser le paiement d’une indemnité supplémentaire en invoquant qu’elle aurait pu choisir une autre modalité de rupture qui n’a pas été mise en oeuvre, à savoir la rupture sans indemnité en raison d’un motif grave.
Pour éviter que l’obligation inscrite à l’article 1er de la C.C.T. n° 103 ne reste lettre morte et donner un sens à l’incorporation du § 1er dans l’article 21, dont le § 2 assure au travailleur en crédit-temps une protection contre le licenciement, l’employeur qui invoque une décision prise pendant la période de crédit-temps pour justifier une réorganisation qui l’aurait conduit à devoir licencier le travailleur en crédit-temps ne doit pas seulement prouver que la décision prise est à l’origine d’une réorganisation et est le motif réel du licenciement (ce qui suppose de vérifier le lien de cause à effet entre la mesure décidée et le licenciement) mais il doit également prouver qu’il n’existait pas d’emploi équivalent ou similaire dans l’entreprise.
Toute autre interprétation méconnaîtrait la volonté du législateur et rendrait inopérante la protection qu’il a voulu assurer aux travailleurs en crédit-temps puisqu’elle reviendrait à considérer que l’employeur sous prétexte de son pouvoir de gestion a le droit de supprimer le poste de travail de celui-ci et de le licencier à son retour sous couvert d’une réorganisation touchant cet unique poste de travail.
Dans le contexte d’une fermeture programmée, le silence de l’employeur constitue une manœuvre passive en ce qu’elle est destinée à tromper le travailleur sur la situation de l’entreprise. Son caractère dolosif est encore accentué, en l’espèce, par son empressement certain à conclure une rupture d’un commun accord, présentée à la travailleuse comme rencontrant son souhait de prendre une retraite anticipée. L’employeur avait l’obligation légale d’informer celle-ci – qui n’avait pas l’intention de prendre sa retraite à ce moment – en application du principe général d’exécution de bonne foi des conventions prévu par l’article 1134 du Code civil. La convention doit être annulée et l’indemnité compensatoire est due.
Le fait pour un travailleur d’insulter et de menacer un collègue constitue comme tel un manquement grave à son obligation de s’abstenir de tout ce qui pourrait nuire à la sécurité et au bien-être au travail de ses collègues. Il en va évidemment de même lorsque les insultes et les menaces s’adressent à un supérieur hiérarchique, le travailleur manquant alors en plus à son devoir de respect et d’égards envers son employeur et faisant ainsi preuve d’une insubordination caractérisée.
Ce n’est pas parce que le grief retenu dans la lettre de congé peut s’analyser comme un manquement continu que l’employeur peut artificiellement reporter la date à laquelle il estime que ce manquement rend immédiatement et définitivement impossible toute poursuite de la collaboration professionnelle, même en l’absence d’un élément nouveau alimentant la continuité du manquement.
Dès lors qu’aucune précision n’est apportée quant à une éventuelle réduction des tâches qui justifiaient jusque-là une occupation à temps plein, le seul fait que celles-ci aient été confiées à un autre membre du personnel est insuffisant pour établir la nécessité qu’il y avait à procéder à cette réorganisation.
Le caractère répétitif des absences injustifiées nonobstant divers avertissements adressés au fil du temps a pour effet que ce manquement est effectivement constitutif de motif grave au sens de l’article 35 LCT.
La décision de licencier un conseiller en prévention pour motif grave en lui faisant, notamment, grief d’avoir diligenté de manière téméraire une procédure fondée sur l’écartement de ses fonctions porte incontestablement atteinte à l’exercice même de celles-ci et à l’indépendance de l’intéressé. Elle entraîne la débition de l’indemnité prévue par l’article 10 de la loi du 20 décembre 2002 et, s’il échet, de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice matériel ou moral trouvant son origine dans une raison autre que celle ayant donné lieu au paiement de l’indemnité de protection.
Un des sous-critères de la théorie de l’abus de droit n’est autre que l’intention de nuire, présente lorsque le congé est notifié à titre de représailles à l’action judiciaire diligentée par le travailleur pour contester l’écartement de ses fonctions de conseiller en prévention.
Ce comportement, incontestablement fautif que n’aurait pas adopté un employeur normalement prudent et diligent placé dans les mêmes circonstances, est de nature à engendrer un préjudice moral dans le chef de la victime, qui a légitimement pu se sentir injustement condamnée pour n’avoir jamais fait qu’exercer un droit reconnu à tout travailleur, celui de confier aux autorités judiciaires le soin de trancher un différend l’opposant à son employeur.
L’inter-contrat n’est pas une situation anormale, mais plutôt fréquente dans les sociétés de consultance, puisque cela permet d’avoir des ressources disponibles à tout moment en fonction des besoins des clients. Toute entreprise relevant de ces secteurs d’activité connaît un taux usuel d’inter-contrats et l’absence de mission ne constitue donc pas en soi dans ces sociétés de consultance un motif de licenciement.
Même si la situation d’inter-contrat d’un employé perdure, et que l’employeur subit une perte financière pendant celui-ci, le licenciement d’un employé dans ce secteur et dans cette situation, et dont les qualités ne sont pas en cause, ne peut être qualifié de licenciement pour motif économique, sauf à démontrer que la situation économique globale de l’employeur demande une réorganisation et qu’une réduction du personnel s’impose.
Il suit de l’article 8 de la CCT n° 109 que, en règle, lorsque le juge a constaté que le licenciement n’était pas fondé sur des motifs légitimes (en lien avec la conduite ou l’aptitude du travailleur ou fondés sur les nécessités de fonctionnement de l’entreprise), par exemple parce que ces motifs ne sont pas démontrés, il peut arrêter son analyse. Le licenciement est, dans ce cas, manifestement déraisonnable ; il n’est, dès lors, pas nécessaire d’examiner, en plus, si un employeur prudent et diligent aurait procédé à celui-ci.
A partir du moment où l’article 189 CPS incrimine une infraction à une convention collective de travail rendue obligatoire, l’absence d’indemnisation d’un licenciement manifestement abusif est constitutive d’une infraction au Code pénal social. L’infraction réside dans l’absence d’indemnisation du licenciement manifestement déraisonnable, et non dans le licenciement en tant que tel. L’article 189 CPS ne punit cependant que d’une peine de niveau 1 (soit une amende administrative et non une amende pénale) la violation de la C.C.T. n° 109. Il ne s’agit donc pas d’un délit qui se prescrirait par 5 ans, une sanction de niveau 1 ne pouvant donner lieu à l’application de l’article 26 du Titre préliminaire du Code d’instruction criminelle. Il s’agit toutefois bel et bien d’une infraction qui a causé un dommage au travailleur qui en postule l’indemnisation. La prescription quinquennale est dès lors applicable en vertu de l’article 2262bis C.C., qui a vocation à régir toutes les actions en responsabilité extracontractuelle. Encore faut-il vérifier s’il y a matière à responsabilité et donc infraction (existence d’un élément matériel et d’un élément moral).
Le difficile métier d’aide-soignante, confrontée au quotidien à la souffrance des patients et à l’angoisse des familles, ce, qui plus est, dans une situation notoirement connue de sous-effectif dans les institutions hospitalières du pays, est de nature à engendrer un stress énorme qui peut expliquer, sans les justifier, des débordements telle la mise en scène de patients au moment des soins, constatée sur les photos prises par l’intéressée. Il y va d’une circonstance d’autant plus atténuante que la qualité de la relation entretenue avec eux telle que mise en lumière par leurs témoignages et ceux de leurs familles contredit que cette mise en scène puisse exprimer une réelle volonté de se moquer de leur détresse et de contrevenir à l’essence de sa fonction et aux valeurs prônées par l’institution l’occupant.
(Décision commentée)
Dès lors que sont visés des manquements professionnels concrétisés par des fautes apparemment régulières dans l’exercice de la tâche habituelle de la travailleuse et que ce motif, tiré de l’exécution du travail, est établi, il y a motif étranger au crédit-temps, et ce tant par sa nature que par son origine.
Même si la preuve d’un fait négatif peut être difficile à rapporter, il n’existe pas de principe selon lequel celle-ci ne peut jamais l’être. Ainsi le travailleur à qui un formulaire C4-prime de crise n’a pas été délivré peut-il toujours se tourner vers l’ONEm pour attester qu’aucune prime de crise ne lui fut payée suite à son licenciement et obtenir ce paiement (cette administration disposant d’un service d’inspection permettant de régulariser la situation si la délivrance dudit formulaire devait constituer une condition sine qua non pour le paiement de la prime de crise, ce qui n’est du reste pas établi). Faute de toute démarche en ce sens, ce qui eût permis à l’intéressé de prouver une faute en lien de causalité avec son dommage, il ne peut être fait droit à sa demande de dommages et intérêts pour non-délivrance du formulaire ad hoc.
Le seul fait que le travailleur n’ait pas invoqué le caractère abusif de son licenciement avant l’introduction de la requête introductive d’instance ne peut, lorsque l’employeur ne démontre pas à suffisance qu’il a licencié celui-ci pour un motif lié à sa conduite, ni davantage pour des motifs liés à son aptitude ou aux nécessités de l’entreprise, suffire à contredire la débition d’une l’indemnité pour licenciement abusif.
Adopte un comportement fautif, de nature à rompre de manière immédiate et définitive la confiance inhérente à la poursuite d’une quelconque relation de travail, le travailleur qui s’abstient de réagir à deux mises en demeure de son employeur l’invitant à justifier son absence ou à reprendre le travail.
Le fait que le travailleur ait presté, durant six ans sans recevoir d’avertissement et ait été décrit comme un bon élément par son précédent responsable n’est pas de nature à contredire les motifs de conduite, suffisamment établis, ayant justifié son licenciement. Un travailleur peut, en effet, évoluer pour diverses raisons et adopter, à certain moment, des comportements dont la répétition et l’absence d’évolution positive contraignent, in fine, son employeur à le licencier.
En ce qu’il aurait pu entraîner des sanctions civiles et pénales dans le chef de son employeur, le fait pour une employée d’avoir profité de ses responsabilités en matière de gestion du personnel et de réception du courrier concernant ce dernier pour détourner toutes les pièces relatives à une saisie sur salaire la visant constitue bien une faute grave rendant immédiatement et définitivement impossible la poursuite des relations de travail.
Envoyer encore un travailleur en clientèle le jour même de son licenciement pour motif grave laisse à penser que la faute épinglée à l’appui de celui-ci n’était, en fin de compte, pas d’une nature telle qu’elle put justifier un licenciement sur-le-champ.
L’article 9, § 2, de la C.C.T. n° 109 ne prévoit aucun critère auquel le juge pourrait se référer pour fixer la hauteur de l’indemnité à appliquer à qui ne s’est pas comporté en employeur normal et raisonnable, ce qui pose difficulté pour fixer le quantum de celle-ci. La méthode d’évaluation suivante pourrait pallier cette carence tout en évitant tout arbitraire : dans l’hypothèse où le licenciement est jugé manifestement déraisonnable, le montant de l’indemnité est fixé, provisoirement et par défaut, à 10 semaines, pour, ensuite, évoluer en plus ou en moins dans la fourchette prévue de 3 à 17 semaines, selon que les parties démontrent, ou pas, l’existence de facteurs « atténuants » ou « aggravants ». Faute pour elles de le faire, cette indemnité « par défaut » serait retenue.
N’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable, le licenciement dont le motif réel se trouve être dans sa volonté de se protéger d’une quelconque revendication en matière de harcèlement moral.
Ne peut être qualifié de déraisonnable le licenciement intervenu à la suite du choix opéré par une ASBL d’affecter ses fonds à d’autres activités que la médiation de dettes en raison du peu d’efficacité de son action en la matière et de la présence d’autres acteurs offrant le même service.
Le motif du chômage que l’employeur mentionne dans le formulaire C4, destiné à l’ONEm, ne peut être assimilé à une motivation spontanée du licenciement au sens de l’article 6 de la CCT n° 109.
Des reproches émis par le passé quant à des absences injustifiées, des arrivées tardives ou des irrégularités au niveau du pointage n’ont rien à voir avec un non-respect des consignes à suivre par un gardien de musée lors de la fermeture des salles et ne peuvent conduire à considérer que cet irrespect, dont il n’est au demeurant pas établi qu’il fut volontaire, a rendu immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre l’employeur et le travailleur.
La nécessité de réduire le nombre d’heures de travail sur un site ou un chantier ne peut constituer un motif légitime de licenciement au sens de l’article 63 LCT lorsque le travailleur, engagé par une entreprise de grande taille disposant nécessairement d’un nombre important de postes de travail, ne l’a pas été pour un lieu d’affectation fixé.
En ce qu’ils révèlent l’esprit et la façon de réagir de leur auteur, des appels téléphoniques contenant des menaces, notamment des menaces de mort, constituent des faits graves, de nature à rompre la confiance de l’employeur, ce même s’ils ont été donnés à une personne étrangère à la société.
La protection accordée aux candidats non élus, dont on sait qu’elle n’est pas contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution (C.c., arrêt n° 115/12 du 10 octobre 2012), ne contrevient par ailleurs pas aux articles 15 (liberté professionnelle et droit de travailler), 16 (liberté d’entreprise) et 21 (discriminations) de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il en est de même en ce qui concerne les articles 49 et 50 (droit d’établissement et restrictions à la liberté d’établissement) du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.
En vertu de l’article 37, §1er, al. 4 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, la notification du congé donné par l’employeur ne peut, à peine de nullité, être faite que par lettre recommandée à la poste ou par exploit d’huissier de justice. Il s’agit d’une nullité absolue, laquelle ne peut donc être couverte par le travailleur. Ainsi, lorsque le travailleur reçoit, de la main à la main, une lettre de licenciement prévoyant un préavis, il peut valablement invoquer la nullité de ce préavis et a droit à une indemnité compensatoire de préavis correspondant au préavis qui aurait dû lui être notifié.
Si ce préavis est néanmoins presté, le travailleur peut réclamer une indemnité compensatoire au terme du contrat, le fait de la prestation ne pouvant être une renonciation à se prévaloir de cette nullité (ordre public).
En licenciant un employé d’une de ses agences pour motif grave sur la seule base du témoignage de son supérieur hiérarchique, impliqué lui-même dans l’incident qualifié de faute professionnelle grave, et ce alors même que la négligence commise l’a été dans un contexte tendu et a été réparée dans les minutes qui ont suivi le départ du client, l’employeur choisit la voie la plus dommageable pour l’intéressé, qui n’a pas été entendu sur cet incident, par ailleurs source de rumeurs quant à son honnêteté auprès de la clientèle.
L’article 32tredecies de la loi du 4 août 1996, modifié par l’article 13, a), de la loi du 10 janvier 2007, tel qu’applicable pour la période concernée en l’espèce (le licenciement étant intervenu fin 2013), doit être interprété en ce sens que l’employeur doit démontrer que le licenciement est motivé par d’autres faits que le dépôt même de la plainte. Il n’est nullement tenu de démontrer que les motifs du licenciement sont étrangers aux faits évoqués dans la plainte.
Ainsi, le fait que la travailleuse ait déposé deux plaintes formelles du chef de violence et de harcèlement moral au travail ne constitue pas le motif du licenciement, puisque l’employeur avait déjà mis en œuvre le processus de licenciement de la travailleuse avant le dépôt de celles-ci. En effet, un courrier avait été adressé à la travailleuse quelques semaines avant le dépôt de ces plaintes, la prévenant qu’il était envisagé de mettre fin au contrat de travail pour cause d’incapacité de travail de plus de 6 mois. Par conséquent, l’indemnité de protection n’est pas due.
Il y a fermeture d’une division d’entreprise lorsque le département technique visé n’existe plus, que tous les travailleurs de celui-ci sont licenciés et que les activités exercées dans la division fermée ne sont pas poursuivies par un sous-traitant mais par diverses autres sociétés spécialisées (avec renvoi à C. trav. Bruxelles, 23 mai 2011, J.T.T., 2012, p. 26 – confirmé par Cass., 3 décembre 2012, n° S.11.0114.F et S.11.0115.F).
Si des grossièretés sont inacceptables dans le cadre des relations de travail et constituent assurément une faute grave pouvant justifier un licenciement, leur gravité n’est - à partir du moment où la supérieure hiérarchique de la travailleuse qui les a proférées à l’encontre d’une collègue lors d’une réunion d’équipe n’a pas joué le rôle que l’on aurait été en droit d’attendre de sa part en appelant l’intéressée au calme - toutefois pas de nature à entraîner l’impossibilité immédiate et définitive de poursuivre toute collaboration professionnelle.
La mesure d’écartement prise en l’espèce par l’employeur et son maintien pendant de nombreux mois à l’égard d’une travailleuse, la privant ainsi de tout contact social lié à l’exercice d’un travail, sans que celui-ci ne démontre avoir tenté concrètement de mettre en place d’autres mesures, telle qu’une affectation temporaire de celle-ci en-dehors du service auquel elle est habituellement affectée, n’est pas une mesure présentant un caractère proportionné et raisonnable et doit dès lors être considérée comme une mesure préjudiciable liée à une demande d’intervention psychosociale formelle pour harcèlement moral au travail au sens de l’article 32tredecies de la loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l’exécution de leur travail. Dès lors, la travailleuse a droit à l’indemnité de protection de 6 mois de rémunération brute prévue par le §4 de l’article précité.
Le fait pour un cuisinier d’emporter des restes de nourriture non consommée par les résidents de la maison de repos où il preste contrevient, certes, à l’interdiction formelle de ce type de comportement prévue par le règlement de travail et constitue sans doute une faute d’une certaine gravité. Le juge, qui n’est pas tenu par la qualification de faute grave que lui attribue ledit règlement, reste néanmoins libre d’apprécier les faits in concreto.
Contrevient gravement à l’article 21quater de l’arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 et à l’arrêté royal du 18 juin 1990 l’employeur qui, dans le cadre d’interventions chirurgicales, confie, en connaissance de cause, l’accomplissement d’actes réservés aux praticiens de l’art infirmier à une collaboratrice qui ne possédait pas les qualifications requises par et en vertu de la loi. Il est, dès lors, fort mal venu de s’indigner de ce qu’elle n’ait pas exercé ses fonctions dans le respect des règles et de la licencier pour faute grave, au motif qu’elle aurait mis la santé et la vie de patients en danger.
Il est contradictoire de fixer le moment de la rupture pour motif grave à une date ultérieure à celle de sa notification. Le licenciement n’est, dans cette mesure, pas légalement justifié, la date de la rupture contredisant la notion de motif grave.
Dès lors que le contrat de travail a pris fin moyennant une convention de rupture d’un commun accord, le travailleur ne peut prétendre à une indemnité de rupture ou à une indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable que pour autant que la convention soit annulée pour vices de consentement. En l’espèce, le travailleur ne démontre pas que la contrainte avait une cause injuste ou illicite ni que l’employeur a abusé de son droit eu égard aux circonstances dans lesquelles la convention a été signée. Par conséquent, le vice de consentement (violence) ne peut être reconnu et la demande du travailleur tendant à la condamnation de l’employeur à lui verser des indemnités de rupture.
Il ne peut être reproché à un travailleur d’avoir enfreint une règle interne qui, dans les faits n’existe pas ou ne lui a pas été communiquée. Au demeurant, à supposer même établi que les rendez-vous des commerciaux ne puissent être pris que par le call center de l’entreprise, il ne peut être considéré comme déraisonnable que l’intéressé s’assure que le prospect n’a pas omis le rendez-vous prévu en prenant préalablement contact avec lui, ce d’autant qu’il a toujours joui d’une grande liberté dans l’organisation de son travail, comme en atteste l’absence d’obligation lui impartie de transmettre des rapports de visite à sa hiérarchie et/ou de justifier son emploi du temps.
L’indemnité de protection prévue par l’article 32tredecies est due lorsque les motifs invoqués dans le courrier de notification des fautes constitutives de motif grave sont superposables, et donc clairement liés aux faits qui ont donné lieu au dépôt d’une plainte pour harcèlement.
Un employeur normal et raisonnable n’invoquerait pas comme motif grave de rupture un abandon de travail suite à l’annulation de rendez-vous avec des clients potentiels alors même (i) que ces annulations ont pour seule origine la modification d’approche des intéressés par la diffusion d’informations erronées (non-respect de la promesse d’un cadeau en cas de suite favorable à une demande d’enquête) ou par l’absence de prise en compte de leurs attentes précises au regard des produits proposés et (ii) que l’idée sous-jacente à ces reproches s’inscrivait dans la liquidation programmée du département au sein duquel le travailleur était affecté en qualité de commercial, ce que confirme la disparition de celui-ci et le licenciement de son collègue après son départ. Tout porte ainsi à croire que le recours au motif grave a été utilisé aux fins de se séparer de ses services sans devoir lui verser une indemnité compensatoire de préavis.
Pour que le licenciement ne soit pas manifestement déraisonnable, il faut, en vertu de l’article 8 de la convention collective de travail n° 109 du 12 février 2014, non seulement que le motif soit en lien avec l’aptitude, la conduite du travailleur ou les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service, mais également qu’il ne s’agisse pas d’une décision qui n’aurait jamais été prise par un employeur normal et raisonnable.
En l’espèce, il s’agit d’un licenciement opéré dans l’intérêt de l’entreprise, la travailleuse licenciée ayant une personnalité « peu encline au consensus » et ayant manifesté sa volonté de quitter celle-ci (étude notariale). Est en outre démontré dans son chef un manque de motivation pour suivre une formation permanente – indispensable aux yeux de l’employeur vu la fonction exercée. Aussi, la cour considère-t-elle que l’employeur n’a pas exercé son droit de manière imprudente et disproportionnée (contrôle marginal).
Lorsque leur caractère intentionnel n’est pas démontré, absences de pointage et non-respect des horaires de travail doivent être considérés comme des négligences fautives dont la commission, connue et précédemment tolérée, ne justifie pas un licenciement sur-le-champ alors qu’un avertissement et la privation de rémunération pour les heures non prestées permettraient adéquatement la répétition de fautes commises.
Rien n’interdit, pour exercer la fonction qui était la sienne, à savoir disperser les protagonistes d’une bagarre sur le site dont il assurait la surveillance, un agent de sécurité de les prévenir de l’arrivée imminente de la police, argument d’intimidation pouvant s’avérer suffisamment dissuasif pour calmer les esprits. Dès lors qu’il ne pouvait savoir que, au nombre de ceux-ci, se trouvait un dealer que la police voulait surprendre en flagrant délit, ni deviner que des policiers en civil étaient sur place à cet effet, il ne peut lui être reproché d’avoir, volontairement, fait échouer cette opération.
Avant de prendre une sanction aussi lourde que celle que constitue un licenciement pour motif grave en accusant expressément un de ses travailleurs d’un comportement pénalement punissable sur la seule base du rapport d’un inspecteur de proximité, l’employeur eût dû raisonnablement s’étonner de ce que l’intéressé n’avait pas été inquiété pour corréité ou complicité et, partant, investiguer davantage sur les circonstances des faits qui lui étaient rapportés.
Ne peut raisonnablement soutenir avoir rapporté de façon rigoureuse la preuve du motif grave allégué, l’employeur qui en décide sur la base de sources doublement indirectes provenant de personnes non identifiées et dont aucune déclaration directement actée n’a été produite, prenant pour argent comptant leur version des faits, et ce sans même estimer devoir inviter le travailleur à donner sa version pour avoir une connaissance complète des circonstances rapportées.
Est manifestement déraisonnable le licenciement d’un travailleur décidé sur des bases aussi incertaines que fragiles, cette légèreté étant d’autant plus blâmable qu’il n’a pas été permis à l’intéressé de donner sa version des faits.
On ne peut qualifier d’insubordination le fait pour un travailleur de ne pas participer à une réunion à laquelle il est invité non par mauvais vouloir, mais pour cause d’engagement professionnel antérieur avéré, dont il a, du reste, averti l’organisateur de ladite réunion.
Ne se comprte pas en employeur normal et raisonnable l’organisation syndicale qui, alors même qu’elle reconnaît à l’intéressé un passé professionnel sans reproche, licencie un travailleur pour motif grave infondé. Ce licenciement est d’autant plus manifestement déraisonnable qu’elle devrait, plus que tout autre, avoir conscience qu’en agissant ainsi elle jette le discrédit sur l’intégrité de l’intéressé et compromet tant ses moyens d’existence que ses possibilités de carrière ultérieures.
En vertu de l’article 14, alinéa 1er, 2°, de l’arrêté royal d’exécution de la loi sur les jours fériés, l’employeur doit payer les jours fériés qui tombent dans les trente jours de la date de la rupture, à certaines conditions. Dès lors que, en l’espèce, le licenciement pour motif grave a été déclaré irrégulier, le travailleur a droit aux jours fériés en cause. C’est à l’employeur qu’il appartient d’établir qu’il n’est pas tenu d’effectuer le paiement de cette obligation légale, ainsi notamment si le travailleur n’a pas été réengagé, et non au travailleur à apporter cette preuve.
Une faute ayant déjà fait l’objet d’une sanction disciplinaire ne peut plus servir de fondement à un licenciement pour motif grave, mais peut toujours être prise en considération pour apprécier la gravité de manquements postérieurs.
(Décision commentée)
La nature de la fonction exercée par le travailleur constitue en principe un élément essentiel du contrat de travail, à moins que le contraire puisse être déduit de la convention ou de l’exécution que les parties lui ont donnée.
La fonction convenue n’impose en effet pas nécessairement une liste intangible de tâches qui devraient être réalisées selon un modus operandi figé. L’employeur est responsable de l’organisation de son entreprise et a le droit, dans le respect de la fonction du travailleur, de déterminer les tâches à effectuer et leurs modalités d’exécution. La nature de la fonction et le niveau de responsabilité doivent cependant être maintenus.
Lorsque le travailleur n’a pas introduit de demande visant à connaître les motifs de son licenciement dans le délai requis par l’article 4 de la CCT n°109, il lui appartient de fournir la preuve d’éléments qui indiquent le caractère manifestement déraisonnable de celui-ci. En l’espèce, le travailleur, dont le dernier rapport d’évaluation fait état d’un score global « insuffisant » et de difficultés relationnelles, n’établit pas que son licenciement n’eût aucun lien avec son aptitude ou sa conduite, ni avec les nécessités de fonctionnement de l’entreprise et qu’un employeur normal et raisonnable ne l’eût pas licencié. Dès lors, la demande de paiement d’une indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable est non fondée.
Dès lors que la note de service diffusée auprès du personnel informe simplement les membres de celui-ci que des paniers contenant des petits sachets d’œufs de Pâques seraient mis à leur disposition en divers endroits afin qu’ils se servent, sans préciser qu’un nombre ou une quantité de ces sachets était prévue par travailleur, il peut difficilement être reproché à un travailleur de s’être servi dans des proportions importantes, le présupposé que ce fut pour son usage personnel et/ou celui de ses proches étant en outre sérieusement battu en brèche par les déclarations contenues dans des e-mails émanant de plusieurs collègues, suivant lesquels ils avaient trouvé, sur leurs bureaux, des sachets d’œufs en chocolat, déposés à leur attention par l’intéressé.
Aucun fait fautif n’étant établi qui eût été connu dans les trois jours ouvrables précédant le congé, il n’y a pas lieu d’examiner les autres faits invoqués, dont la connaissance est largement antérieure, ces faits n’étant pas susceptibles d’avoir une incidence sur la gravité d’un comportement dont le caractère fautif n’est pas démontré.
Ni l’article 12, §8 de la CCT n°103 ni aucune autre disposition de celle-ci, ne prévoient de sanction qui priverait le travailleur de la protection prévue lorsque ce dernier n’avertit pas son employeur de la date de prise de cours ainsi que de la durée du crédit-temps souhaitée dans les formes requises. À défaut d’une telle sanction, le début de la protection contre le licenciement peut être fixé au jour de l’accord entre le travailleur et l’employeur. En l’espèce, le licenciement a été notifié alors même que la période de crédit-temps avait déjà débuté depuis un mois. Dès lors, la travailleuse bénéficiant d’une protection contre le licenciement, l’employeuse lui est redevable d’une indemnité équivalente à six mois de rémunération, sauf si elle justifie que le licenciement est intervenu pour un motif étranger à la réduction du temps de travail du fait de l’exercice du droit au crédit-temps, ce qu’elle ne prouve pas en l’espèce.
Seul le caractère manifestement déraisonnable du licenciement peut être contrôlé par le juge et non l’opportunité de la gestion de l’employeur. En l’espèce, les difficultés économiques et financières rencontrées par la société justifient que celle-ci repense sa stratégie commerciale et l’adapte aux besoins résultant de l’évolution de l’ensemble même du secteur HORECA à Bruxelles. Dès lors, le licenciement du travailleur, occupé en qualité de commis de bar, n’est ni manifestement déraisonnable, ni abusif.
C’est l’information de l’employeur sur l’état de grossesse qui met en œuvre la protection contre le licenciement. En l’espèce, il est établi à suffisance que la travailleuse a averti son employeur de sa grossesse avant que ce dernier décide de la licencier. En effet, la conversation téléphonique entre la travailleuse et son employeur (d’une durée de 4 minutes environ), qui a pris place à peine une heure après que la travailleuse eut une consultation médicale avec son gynécologue l’informant de sa grossesse permet de douter suffisamment de la thèse de l’employeur selon laquelle la travailleuse l’a simplement informé d’une incapacité de travail sans invoquer sa grossesse, et ce d’autant plus que les versions de la SPRL (employeur) et de sa gérante sont contradictoires.
Un employeur peut, certes, auditionner un travailleur avant de lui notifier son congé pour motif grave. Rien ne justifie toutefois, même s’il souhaite lui laisser le temps de préparer sa défense, qu’il tarde près d’un mois après avoir pris connaissance des faits pour le convoquer. Cette inaction, et le fait d’avoir laissé l’intéressé continuer à travailler pendant ce temps, est incompatible avec l’existence d’une faute rendant immédiatement impossible la poursuite de toute collaboration professionnelle. Ces circonstances démontrent, au contraire, qu’il ne considérait pas les faits portés à sa connaissance comme suffisamment graves, même s’ils furent confirmés à l’issue de l’audition.
Les parties étant liées par un contrat à durée déterminée, la travailleuse est informée quelques jours avant l’échéance du terme qu’à partir de ce jour, elle est dispensée de prester le solde de son contrat et que les journées non prestées seront rémunérées jusqu’au terme. Un tel courrier ne peut être interprété comme la notification d’un congé moyennant paiement d’une indemnité compensatoire de préavis, puisqu’il stipule clairement que le contrat prend fin à son terme. Dès lors, c’est à tort que la travailleuse soutient que l’employeur a commis une faute qui consiste en l’absence d’audition préalable à une prétendue décision de la licencier anticipativement.
Le fait de tenir des propos pouvant être perçus comme intimidants au cours d’une discussion à forte charge émotionnelle avec sa supérieure hiérarchique est sans doute inapproprié, mais non de nature à rendre la poursuite des relations de travail immédiatement et définitivement impossible.
Le fait pour un travailleur de critiquer la manière dont l’employeur entend modifier le règlement de travail et d’attirer l’attention de ses collègues sur celles des modifications envisagées qu’il estime n’être pas correctes n’est pas de nature à rendre la poursuite des relations de travail immédiatement et définitivement impossible.
(Décision commentée)
Lorsque l’employeur invoque un des trois motifs visés par l’article 8 de la CCT n°109 pour justifier un licenciement, la cour doit exercer un contrôle strict de la réalité de ce motif (au contraire du contrôle de proportionnalité, qui est marginal). En l’espèce, l’employeur invoque les nécessités de fonctionnement de l’entreprise en se basant sur une étude unilatérale qui n’est en réalité que le soutien méthodologique de son choix mais ne justifie pas de la nécessité de le poser. Son argumentation est très générale et théorique, elle ne se rattache aucunement à des données concrètes de l’entreprise, ni à aucune comparaison référenciée, alors que la travailleuse souligne et démontre sur base des pièces qu’elle produit que le contexte économique de l’entreprise est particulièrement positif au regard des chiffres et des rapports de gestion. La cour constate encore que la décision de licencier résulte de l’implémentation pure et simple d’un plan salarial qui prévoit deux possibilités : soit le travailleur accepte la nouvelle politique salariale, soit il est licencié avec préavis. Dès lors, la sanction postulée par la travailleuse, à savoir la sanction maximale de 17 semaines, se justifie.
La cour rappelle la jurisprudence de la C.J.U.E. selon laquelle l’article 45 T.F.U.E. s’oppose à une réglementation d’une entité fédérée d’un Etat membre (en l’occurrence le décret du Conseil flamand du 19 juillet 1973), qui impose à tout employeur ayant son siège d’exploitation sur le territoire de cette entité de rédiger les contrats de travail à caractère transfrontalier exclusivement dans la langue officielle de cette entité fédérée, sous peine de nullité de ces contrats, relevée d’office par le juge (C.J.U.E., 16 avril 2013, Aff. n° C-202/11, LAS c/ PSA).
En l’espèce, le caractère transfrontalier du contrat est retenu, et ce du fait que la société est certes une entreprise établie en Belgique (à Zaventem) mais qu’elle fait partie d’un groupe international. Dès lors, le demandeur ne peut s’opposer à l’examen de documents établis en anglais. Ceux-ci ne peuvent être frappés de nullité.
Lorsqu’un contrat est conclu entre un CPAS et une allocataire sociale sur base de l’article 60, §7, de la loi du 8 juillet 1976 organique des CPAS, il convient de vérifier si, au terme de celui-ci, le CPAS n’a pas procédé à un licenciement abusif (au moment des faits au sens de l’ancien article 63 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail). En l’espèce, le contrat contenait une condition résolutoire stipulant que « le présent contrat prend fin de plein droit lorsque la travailleuse remplit les conditions requises pour obtenir le bénéfice des allocations de chômage ». Toutefois, le contrat a pris fin alors que l’allocataire ne remplissait pas les conditions requises pour obtenir le bénéfice des allocations de chômage puisque, selon l’ONEM, elle ne prouvait pas un nombre suffisant de journées de travail, faute de permis de travail valable pendant une partie de l’occupation. Le CPAS faisant valoir, à titre subsidiaire, que le licenciement a été motivé par les nécessités de l’entreprise en ce qu’il était convaincu que l’allocataire répondait aux conditions requises pour bénéficier des allocations de chômage, la Cour a confirmé que la croyance erronée de l’employeur ne pouvait pas être considérée comme une nécessité réelle du service.
Un congé n’est pas irrégulier par le simple fait que celui qui le notifie aurait déjà pu prendre connaissance des faits plus tôt. Quel que soit le résultat de l’audition, celle-ci peut constituer une mesure permettant à l’employeur d’acquérir la certitude requise. De la circonstance que le licenciement a été décidé après un entretien sur la base de faits qui étaient connus avant celui-ci, il ne peut être déduit que l’employeur disposait déjà à ce moment de tous les éléments d’appréciation nécessaires pour prendre sa décision en connaissance de cause.
En l’espèce, l’employeur ne peut se voir reprocher, lorsqu’il soupçonne un travailleur disposant d’une longue ancienneté et d’une protection contre le licenciement de ne pas se contenter d’une simple déclaration vague d’un collègue de travail quant aux faits susceptibles de constituer un motif grave, mais qu’il poursuit son enquête en vue de vérifier la véracité de ceux-ci.
Un travailleur s’étant déjà vu reprocher plusieurs retards, commet une faute grave justifiant son licenciement immédiat lorsque, pour cacher une arrivée tardive, il communique à un collègue, pour qu’il pointe à sa place, le code permettant d’enregistrer sa présence sur les lieux de travail, ce alors même qu’il avait signé un document par lequel il était informé que ce code lui était personnel et ne pouvait être communiqué sous peine de sanctions.
Le licenciement pour motif grave doit être notifié dans les trois jours ouvrables suivant le jour où l’employeur a connaissance du fait qui le justifie. Ce délai ne commence à courir qu’à partir du moment où la personne ayant le pouvoir de décider du licenciement du travailleur a, pour prendre une décision en connaissance de cause quant à l’existence du fait et aux circonstances de nature à lui attribuer le caractère d’un motif grave, une certitude suffisant à sa propre conviction et aussi à l’égard de l’autre partie et de la justice. Ainsi, il ne peut être reproché à un employeur qui soupçonne un travailleur, disposant d’une longue ancienneté et d’une protection contre le licenciement en sa qualité de délégué syndical, de ne pas se contenter d’une simple déclaration vague d’un collègue sur l’heure d’arrivée de ce travailleur sur son lieu de travail et de poursuivre son enquête avant de décider de licencier ce travailleur pour fraude au système de contrôle de présence sur le lieu de travail en raison de la discordance entre l’heure de pointage via ce système et l’heure d’arrivée effective.
La partie qui constate à tort un acte équipollent à rupture devient l’auteur de la rupture sans qu’il soit nécessaire de constater qu’elle ait eu la volonté de rompre le contrat et est dès lors redevable d’une indemnité de rupture à l’autre partie au contrat. En l’espèce, l’employeur avait estimé, à tort, que le travailleur avait exprimé sa volonté de ne plus poursuivre l’exécution du contrat. Or, dans le contexte d’un travailleur victime d’un hold-up au travail ayant entrainé des séquelles psychologiques qui ont justifié des incapacités de travail répétées, l’employeur n’a pas pu déduire de l’absence au travail de celui-ci non couverte par un certificat médical et de l’absence de réponse aux lettres adressées en période habituelle de vacances sur une période d’à peine 8 jours que le travailleur a exprimé sa volonté de ne plus poursuivre l’exécution du contrat de travail.
Le fait de répondre à la demande d’un client, ayant exprimé sa volonté de résilier deux polices d’assurance, en lui procurant un formulaire type, du reste disponible sur le site de la compagnie, et en préparant l’enveloppe à destination de celle-ci, n’est pas de nature à provoquer une impossibilité de poursuivre la collaboration professionnelle. Il n’a, malgré la perte des commissions pour les polices en cause, pas une incidence à ce point décisive sur les rapports entre parties qu’il ne peut déboucher que sur la rupture instantanée et irréversible des relations de travail.
Le point de départ du délai de trois jours fixé par l’article 35, al. 3 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail est la connaissance suffisante dans le chef de celui qui donne congé des faits reprochés à l’autre partie. Il n’est nullement requis que les faits perdurent encore trois jours ouvrables au plus avant le congé, même s’il s’agit de faits continus.
En l’espèce, des constats accomplis avaient déjà permis de mettre en évidence avec certitude l’usage abusif de la carte-bonus de la travailleuse, sans qu’aucune audition ou aucune autre mesure d’instruction ne soit nécessaire à cet égard. Dès lors, le licenciement pour motif grave notifié 7 jours plus tard est irrégulier et elle a droit à une indemnité compensatoire de préavis.
Des dysfonctionnements maintes fois dénoncés, s’ils peuvent conduire au licenciement du travailleur dans le chef de qui ils sont constatés, ne revêtent toutefois pas un caractère de gravité tel qu’ils justifient une rupture sur-le-champ lorsque leur origine est à trouver dans l’organisation interne et une ambiance de travail dont le caractère délétère ne peut être imputé au seul travailleur.
L’employeur qui veille au remplacement d’un travailleur en crédit-temps peut, légitimement, être amené à un moment donné soit à conclure un contrat à durée indéterminée avec le remplaçant, soit à restructurer l’entreprise ou le département dans lequel était occupé le travailleur en crédit-temps avec pour conséquence que le travail qui était le sien a été définitivement repris par son remplaçant, réparti entre plusieurs travailleurs, voire même purement et simplement supprimé.
En pareilles hypothèses, le travailleur en crédit-temps doit être reclassé dans une autre fonction équivalente ou similaire à sa fonction antérieure, avec risque, s’il refuse celle-ci de manière répétée, que, sur pied de ce refus de se soumettre à une instruction légitime, son employeur constate à juste titre l’impossibilité de poursuivre toute collaboration professionnelle avec lui.
Le motif grave, tel qu’il est défini par l’article 35 de la loi du 3 juillet 1978, comporte trois éléments : l’existence d’une faute, la gravité de cette faute et l’impossibilité immédiate et définitive de poursuivre toute collaboration professionnelle, en raison de cette faute. Ce dernier élément implique que la faute doit être appréciée concrètement, en prenant en considération l’ensemble des éléments de fait et implique également un contrôle de proportionnalité entre la gravité de la faute et la sanction que constitue le licenciement sans indemnité ni préavis. Ainsi, le fait pour une responsable d’un magasin de vêtements d’arriver en retard et d’emporter chez elle un vêtement du magasin sans en demander l’autorisation constitue un motif grave justifiant son licenciement sans préavis ni indemnité.
Le manquement contractuel accompagné de la volonté, dans le chef de l’auteur du manquement, de rompre le contrat de travail, met fin à celui-ci. Ainsi, le refus d’accorder des jours de vacances annuels au motif que la travailleuse a déjà bénéficié d’un congé parental constitue un manquement grave aux obligations de l’employeur. En outre, en prétendant traiter la travailleuse, en matière de vacances annuelles, comme une ouvrière alors qu’elle a le statut d’employée, l’employeur a manifesté sa volonté de modifier unilatéralement une condition essentielle de son contrat de travail de sorte qu’il a commis un acte équipollent à rupture. Dès lors, l’employeur est redevable à la travailleuse d’une indemnité compensatoire de préavis et de la prime de fin d’année pro rata temporis.
Commet sans doute une imprudence en effectuant la démarche litigieuse sans prendre les précautions nécessaires le brancardier qui, alors que ce genre de mission ne relève pas de ses attributions, accepte de retirer, pour compte d’une patiente hospitalisée, une somme d’argent, qui a finalement disparu. Cette imprudence ne constitue toutefois pas un motif grave de licenciement rendant les relations de travail immédiatement et définitivement impossibles.
L’appréciation par le juge de la gravité d’un fait allégué comme motif de rupture sans préavis ni indemnité est souveraine et se substitue à celle de l’employeur. Les griefs adressés au travailleur doivent faire l’objet d’une analyse rigoureuse des circonstances et du contexte dans lesquels les faits se sont déroulés.
Les malhonnêtetés commises par une caissière, couplées aux déclarations mensongères par lesquelles elle tente de les justifier, sont de nature à justifier son licenciement sur-le-champ.
En réitérant ses doléances et griefs dans des lettres d’avertissement sans pour autant les assortir de menaces de sanctions pour le cas où de nouveaux manquements seraient constatés, l’employeur a, d’une certaine façon, « banalisé » ceux-ci et, de ce fait, la gravité des fautes constatées, de sorte que, même si le dernier manquement constaté pourrait, certes, justifier son souhait de se séparer de son travailleur, l’ampleur de sa gravité ne justifie cependant pas la sanction que représente un licenciement sans préavis ni indemnité.
S’il est vrai que le caractère abusif d’un licenciement peut résulter d’un manquement établi de l’employeur, encore faut-il que celui-ci soit en lien direct avec le licenciement et ait eu lieu à son occasion.
Les rapports d’activité constituant le moyen par excellence que possède l’employeur pour contrôler l’activité d’un travailleur itinérant ainsi que pour connaître la situation de la clientèle et suivre son évolution, est assurément constitutif de motif grave le fait pour un travailleur de refuser de se soumettre à son obligation de « rapportage », ce d’autant que cette obligation lui avait déjà été rappelée à plus d’une occasion et que son attention avait été attirée sur le fait que son non-respect était constitutif de motif grave.
Avant d’examiner si des faits antérieurs peuvent éclairer le motif dont il a à connaître, il s’impose au juge de vérifier si les faits survenus dans les 3 jours ouvrables précédant le congé sont matériellement établis et, dans l’affirmative, s’ils sont constitutifs d’une faute. Encore peut-il s’en écarter s’il estime qu’ils ne constituent pas des circonstances aggravant le dernier fait qui, dénoncé dans le délai requis, est porté à sa connaissance.
Le fait pour une travailleuse de proférer devant témoins des propos déplacés à l’encontre de sa supérieure hiérarchique, par ailleurs accusée de l’avoir fait travailler alors qu’elle était malade, ne constitue pas une insulte telle que la poursuite des relations de travail s’en trouve définitivement compromise.
Après avoir deux mois plus tôt déjà adressé, exemples à l’appui, un courrier à un travailleur lui reprochant ses mensonges à répétition et le mettant en demeure de changer d’attitude, faute de quoi il se verrait dans l’obligation de le licencier pour faute grave, un employeur, convaincu que son travailleur est à l’origine des dégâts survenus au véhicule qu’il conduisait pour aller effectuer une intervention chez un client, peut estimer que les explications peu crédibles fournies par l’intéressé et son refus de signer une lettre reconnaissant sa responsabilité, mais lui garantissant le maintien de son emploi, sont de nature à ce qu’il donne suite à cet avertissement.
Pour apprécier la gravité du motif invoqué pour justifier le congé sans préavis ni indemnité, le juge peut prendre en considération des faits qui sont étrangers à ce motif et ne sont pas invoqués dans la lettre de congé et sont antérieurs au délai de trois jours, lorsqu’ils sont de nature à l’éclairer sur la gravité du motif allégué. En l’espèce, le juge a considéré que le licenciement pour motif grave était légalement justifié dès lors que, deux mois plus tôt, une lettre avait déjà été adressée au travailleur lui reprochant des mensonges à répétition et le mettant en demeure de changer d’attitude à l’égard de son employeur, faute de quoi il serait dans l’obligation de le licencier pour faute grave.
Si les fautes graves mentionnées dans la lettre de congé pour motif grave sont décrites avec suffisamment de précision pour permettre au travailleur de connaître avec exactitude les faits qui lui sont reprochés et au juge d’apprécier la gravité du motif allégué, encore faut-il que l’employeur prouve la véracité de ces fautes graves dont le travailleur se serait rendu coupable. En l’espèce, les seuls éléments de preuve déposés par l’employeur ont mis en évidence des propos qui, bien que déplacés, ne pouvaient pas constituer un motif grave.
Lorsque les motifs ont été demandés et donnés par l’employeur, l’article 10 de la C.C.T. n° 109 du 12 février 2014 prévoit un partage subtil de la charge de la preuve : l’employeur doit démontrer que les motifs du licenciement sont avérés et que ceux-ci ont bien été à l’origine de la décision de licenciement alors que le travailleur doit établir le caractère manifestement déraisonnable du licenciement fondé sur de tels motifs. Ainsi, ne peut être considéré comme un licenciement manifestement déraisonnable au sens de la CCT n°109 le licenciement fondé sur des motifs liés au comportement du travailleur et dont celui-ci n’établit pas qu’il n’aurait jamais été décidé par un employeur normal et raisonnable.
Une asbl peut légitimement conclure au motif grave dans le chef d’un de ses travailleurs qui, sans y être autorisé et sans même l’en informer, affecte une partie des subsides reçus à d’autres fins que celle pour laquelle ils ont été alloués. Ni les compétences ou le dévouement reconnus de l’intéressé, ni le fait que ce « détournement » n’a pas eu lieu à des fins personnelles, ni l’affectation réelle des sommes à d’autres projets en souffrance faute de subsides, ne permettent de justifier une telle initiative, ni de conclure à l’absence de gravité des faits.
Le délai de 3 jours prescrit à l’article 35, alinéa 3, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail commence à courir lorsque la personne qui a le pouvoir de donner congé a une connaissance de tous les éléments de fait qui lui permet de prendre position sur le caractère de gravité des faits à reprocher à la partie qui s’en est rendue coupable. Il ne peut être exigé, sans violer l’article 35 précité, que l’entreprise soit organisée de telle sorte que la personne ayant le pouvoir de licencier soit informée des faits dans un certain délai. Ainsi, le congé pour motif grave notifié n’est pas tardif lorsque les faits ayant eu lieu plusieurs mois auparavant sont seulement connus avec certitude par l’ASBL dans les trois jours précédant le congé. Il n’y a, par ailleurs, pas lieu de considérer que l’ASBL aurait dû ou pu agir dans un délai plus court, sous peine d’ajouter à la disposition légale une condition qui n’y figure pas.
(Décision commentée)
Pour apprécier l’existence du motif économique avancé pour justifier le licenciement d’une employée (dans une petite structure occupant deux employées, l’une à temps plein et l’autre à temps partiel), la cour examine d’abord l’évolution du chiffre d’affaire sur 5 ans. Sauf une légère augmentation passagère, le chiffre a été en baisse constante.
Sur l’engagement de la travailleuse (qui sera licenciée quelques mois plus tard), elle relève qu’à ce moment, le chiffre baissait déjà et que l’engagement s’explique par la démission d’une employée (étant l’employée à temps plein). L’employeur était dès lors autorisé à envisager le remplacement de l’employée démissionnaire par l’engagement d’une autre employée à durée indéterminée, partant, sur le plan financier, des chiffres réalisés l’année précédente, d’autant qu’il n’était pas établi à ce moment qu’une nouvelle diminution du chiffre d’affaires était prévisible.
Ayant licencié moyennant paiement d’une indemnité compensatoire de préavis, l’employeur établit en outre qu’un prêt à tempérament a été souscrit en vue de payer celle-ci, et ce afin d’en étaler le coût sur une durée de 24 mois. Enfin, sur le choix de la travailleuse licenciée, la cour retient l’ancienneté peu importante, eu égard à celle dont bénéficiait sa collègue, qui doit en sus élever seule trois enfants. Le choix s’est dès lors porté sur l’employée à temps plein et le motif est étranger à l’état de grossesse.
Le fait de se tromper de bonne foi dans l’établissement d’une note de frais peut être vu comme une négligence coupable, mais non comme une faute rendant immédiatement et définitivement impossible la poursuite des relations de travail.
Le formulaire C4, dont le destinataire est certes l’ONEm, a toutefois, comme premier récipiendaire, le travailleur qui peut, par ce biais, prendre connaissance des motifs de son licenciement. La volonté des partenaires sociaux ayant été de ne pas imposer un cadre trop formaliste aux employeurs, il n’y a pas plus de raison d’écarter ce type de communication que d’ignorer l’existence d’une lettre de recommandation, remise au travailleur pour lui servir dans sa recherche d’un nouvel emploi, qui, en excluant l’existence du moindre reproche à son égard, confirme, pour autant que de besoin, que les motifs concrets du licenciement tiennent aux raisons économiques mentionnées dans ledit formulaire.
(Décision commentée)
La circonstance que l’administrateur délégué approuve et fasse rembourser les notes de frais qu’un travailleur rentre en dépit du fait qu’elles ne correspondent pas à des frais professionnels effectifs accrédite l’explication fournie par ce dernier (étant qu’il a été autorisé à rentrer de fausses notes à concurrence d’un montant donné dans l’attente qu’il soit définitivement statué sur sa demande d’augmentation salariale) et permet de conclure que ce procédé ne constitue pas, dans son chef, un motif grave de rupture.
(Décision commentée)
Pour un travailleur bénéficiant d’une protection au sens de la loi du 19 mars 1991, le motif grave s’apprécie selon les règles générales. La preuve du motif grave doit être apportée de manière certaine. Vu la gravité de la mesure, la jurisprudence se montre exigeante et rigoureuse quant à la preuve du motif grave. Dès lors, si la partie qui invoque le motif grave échoue à rapporter cette preuve, le doute profite à l’autre partie, le motif ne pouvant être retenu.
Les erreurs de fait et de droit ainsi que les omissions auxquelles il est renoncé dans une convention bilatérale signée au moment de la démission du travailleur ne visent que l’existence et l’étendue des droits qui ont fait l’objet de la convention et non l’ensemble des droits que les parties auraient l’une à l’égard de l’autre du fait du contrat de travail. La clause de renonciation ne fait dès lors pas obstacle aux demandes formées par l’employé relatives à la régularisation de certains montants ou avantages.
La notion de division d’une entreprise n’est pas définie dans la loi du 19 mars 1991. La jurisprudence considère qu’il doit s’agir d’une partie de l’entreprise qui (i) est suffisamment distincte du reste de l’entreprise, (ii) montre une certaine cohésion et se distingue par une indépendance technique et une activité durable distincte à laquelle un groupe de personnes est attaché et (iii) qui est chargée d’une tâche spécifique, exécutée par un groupe de personnes avec un directeur propre, une organisation propre, des locaux et du matériel séparés, et ce même si les activités de la division sont étroitement liées à celles de l’entreprise elle-même.
Ni les problèmes familiaux rencontrés par un travailleur ni son ancienneté certaine n’enlèvent à la gravité de comportements inappropriés qu’il tend à multiplier sur les lieux de travail.
Il résulte de l’arrêt n° 116/2015 de la Cour constitutionnelle qu’il convient, sous peine de créer une discrimination injustifiée, de traiter de la même manière tous les ouvriers des secteurs visés par l’article 70 de la loi sur le statut unique. Il n’est donc pas justifié qu’une partie de ceux-ci, qui se voient appliquer le même régime transitoire prenant fin le 31 décembre 2017, ne se voient pas accorder, pour la même période, la mesure protectrice dont l’objectif est de compenser l’application des délais de préavis réduits.
Outre le fait que la date du 31 décembre 2015 applicable aux ouvriers visés par l’article 70, § 1er, n’est nullement justifiée dans la C.C.T. n° 109, le principe de levelling up commande que l’échéance du 31 décembre 2017, applicable, aux termes dudit arrêt, aux ouvriers visés par l’article 70, § 4, soit retenue pour l’ensemble des ouvriers de ce secteur.
Par application de l’article 159 de la Constitution, l’échéance antérieure à cette dernière date prévue dans l’article 2, § 2, de la C.C.T. précitée doit donc être écartée en ce qu’elle crée une discrimination contraire à ses articles 10 et 11.
Même non mises à exécution, des menaces d’atteinte à l’intégrité physique d’un collègue de travail rendent immédiatement et définitivement impossible la poursuite des relations de travail, et ce quelles que soient l’ancienneté du travailleur ou l’absence d’antécédents.
L’absence d’audition préalable n’est pas préjudiciable au travailleur faisant l’objet d’un trajet de réintégration dont la fin du contrat de travail a été constatée pour cause de force majeure après que le conseiller en prévention-médecin du travail l’eut estimé, sans que sa décision fut contestée dans le délai imparti, définitivement inapte à reprendre le travail convenu, sans pour autant être en état d’effectuer chez son employeur un travail adapté ou autre.
Pour être correctement appréciés, les faits invoqués à la base d’une demande d’autorisation de licencier pour motif grave doivent être situés dans le contexte de grève en cours au sein de l’établissement. S’agissant de caricatures de membres de la direction, la cour considère que celles-ci s’inscrivent dans le cadre des revendications et des reproches exprimés par les organisations syndicales et qu’elles en constituent des illustrations, notamment au niveau du profit jugé excessif en faveur des dirigeants et alors qu’un manque de moyens pour le personnel et les résidents est dénoncé. Ces griefs ne sont d’ailleurs nullement dénués de fondement, ce qui ressort notamment d’un rapport d’une institution autorisée, à la suite de plaintes déposées. L’examen de ces caricatures ne permet pas de conclure à l’existence d’un motif grave.
En vertu de l’article 35 L.C.T., seul peut être invoqué le motif grave notifié dans les trois jours ouvrables qui suivent le congé. Le terme « seul » vise, outre l’information du destinataire, l’éventuel débat judiciaire dont il fixe déjà les frontières. Il est admis que la précision requise dans l’énonciation des faits peut résulter de la référence à d’autres éléments, tels notamment un entretien, une plainte, un avertissement, dans la mesure où l’ensemble de ceux-ci permet d’apprécier avec certitude les motifs de rupture, ce qui implique que ces éléments soient portés à la connaissance du travailleur. Il ne peut par ailleurs être suppléé par des témoignages à l’imprécision de la notification des motifs graves.
L’article 11, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 19 mars 1991 prévoit que la requête est introduite par lettre recommandée à la poste et qu’elle est envoyée par le greffe à toutes les parties.
En l’espèce, n’étant pas contesté que la candidature de l’intéressé a été présentée par une organisation syndicale représentative, celle-ci a la qualité de partie au litige. La notion de ’parties’ vise l’employeur, le travailleur et l’organisation qui a présenté sa candidature. La requête d’appel doit donc viser également l’organisation. L’article 11 de la loi du 19 mars 1991 n’est cependant pas prescrit à peine de nullité, le but de la disposition étant par ailleurs atteint par la présence in fine de l’organisation (qui a comparu volontairement). L’omission dans la requête d’appel n’ayant entraîné aucun préjudice pour l’employeur, l’appel est recevable.
En ce qu’il heurte de front le respect des convenances que tout travailleur se doit d’observer (LCT, art. 16), un comportement révélant une véritable culture de l’agressivité ne saurait être toléré sur les lieux de travail. Les insultes et l’agressivité dont un travailleur fait preuve à l’encontre de collègues se présentent ainsi comme une accumulation de faits d’autant plus fautifs que des antécédents de même nature lui avaient déjà valu plusieurs rappels à l’ordre.
En cas de pluralité de motifs, l’employeur qui soutient que l’ensemble de ceux-ci constitue un motif grave unique devra prouver que le dernier fait intervenu dans le délai légal de 3 jours constitue en lui-même une faute. Aussi, dès lors qu’il refuse le caractère de faute à celui-ci, le juge n’a pas à examiner les faits qui se situent plus de 3 jours ouvrables avant le congé, ceux-ci n’étant pas susceptibles d’avoir une incidence sur la gravité d’un comportement dont le caractère fautif a été dénié.
L’indemnité accordée pour licenciement manifestement déraisonnable est un avantage auquel le travailleur peut prétendre en raison de son engagement et représente donc de la rémunération au sens de la loi du 12 avril 1965, qui fait courir les intérêts de plein droit.
Nonobstant la possible gradation de l’indemnité, il s’agit d’une indemnité forfaitaire et, dès lors, d’une dette de somme sur laquelle des intérêts moratoires sont dus de plein droit à dater de son exigibilité, soit à dater du licenciement. Ils sont dus depuis cette date jusqu’à celle de son paiement.
En présence de deux mentions contradictoires des services de la poste (« adresse insuffisante/incorrecte » en ce qui concerne le premier envoi et « non réclamé » en ce qui concerne le second), il appartient à l’employeur de procéder aux vérifications d’usage, voire, le cas échéant, de renouveler l’envoi de la lettre de licenciement à l’adresse identifiée sous l’ancienne et la nouvelle dénomination de rue.
Le délai prévu par l’article 12 de la loi du 19 mars 1991 étant, comme l’a rappelé la Cour de cassation (cf. son arrêt du 14 juin 1996, Pas., I, p. 831), un délai de déchéance ayant pour objectif de faire naître, dans un délai maximum, une certitude quant à la subsistance ou non du contrat, il s’ensuit qu’un licenciement notifié au-delà de celui-ci est à considérer comme irrégulier, de telle sorte qu’il importe peu que, après le tribunal, la cour ait admis l’existence du motif reproché et levé la protection dont bénéficiait le travailleur : cette décision ne met, en effet, pas fin au contrat, mais a pour seul objet de reconnaître la gravité du motif invoqué et de permettre à l’employeur, dans un second temps, de procéder au licenciement dans le respect du délai imparti par l’article susdit.
Ledit article ayant pour seul objectif de définir le mode de calcul de la prise de cours de ce délai, il est, dès lors, inexact de soutenir que la protection prend fin dès le moment où la juridiction du travail a admis le motif grave : elle demeure acquise au travailleur jusqu’à ce que l’employeur lui notifie la rupture de son contrat de travail dans les formes et délais requis.
Un manque délibéré et répété d’égards et de respect vis-à-vis du travailleur traduit la volonté de l’employeur de ne pas poursuivre l’exécution du contrat, ce que démontrent également l’inexécution fautive et persistante par lui de ses obligations légales et contractuelles, l’incitation de son travailleur à la démission, l’annonce à l’intéressé de son changement de fonction et de statut, ainsi que celle, dans des conditions plus que douteuses, d’une mise au chômage économique à durée illimitée.
(Décision commentée)
L’exposé des motifs de la loi du 26 décembre 2013 renvoie au critère de l’ancienneté de service, compte tenu des règles de calcul du délai de préavis applicables jusqu’au 31 décembre 2013, l’existence d’une clause d’essai en cours étant en tant que telle sans incidence sur la détermination de l’ancienneté du travailleur. Celle-ci doit se calculer depuis le début de son occupation, en ce compris la clause d’essai.
L’article 71 de la loi, selon lequel les clauses d’essai figurant dans le contrat de travail dont l’exécution a débuté avant le 1er janvier 2014 continuent à sortir leurs effets jusqu’à leur échéance et se voient appliquer les règles en vigueur au 31 décembre 2013, n’est pas applicable tel quel, puisqu’au moment du licenciement, la clause était expirée.
Lorsque l’employeur, qui a reçu une demande de communication des motifs concrets de licenciement, envoie sa réponse par courriel et non par lettre recommandée, il y a lieu à application de la sanction civile forfaitaire fixée par l’article 7 de la C.C.T. n° 109.
En l’absence de faute, l’article 35 LCT ne peut trouver à s’appliquer. Ainsi, dans le chef d’un travailleur dépourvu de volonté ou inconscient des actes qu’il pose et qui ne peut, de ce fait, être déclaré responsable de ceux-ci, ni se voir imputer quelque faute qu’il soit.
Si l’intoxication alcoolique sur le lieu de travail et les débordements qu’un tel état peut provoquer constituent, en règle, un comportement inacceptable, il convient néanmoins d’examiner les conditions dans lesquelles l’imprégnation éthylique se manifeste. Ainsi, le caractère fautif de l’ivresse devra-t-il être apprécié avec plus de souplesse lorsque celle-ci apparaît au cours d’une réception que l’employeur organise ou tolère, et au cours de laquelle il prévoit ou accepte la consommation d’alcool, de telle sorte que son personnel a pu se sentir autorisé ou encouragé à en consommer. Il en est d’autant plus ainsi lorsque, au cours de cette réception, l’employeur se trouve lui-même en état d’ébriété, ce qui peut implicitement, mais certainement, s’interpréter comme une autorisation donnée aux travailleurs de boire plus que de raison.
Le fait que, au moment du licenciement, l’employeur n’avait pas connaissance de la plainte formelle déposée par le travailleur n’implique pas nécessairement qu’il a mis fin à la relation de travail pour des motifs étrangers au dépôt de celle-ci ou aux motifs y insérés.
La protection instaurée par la loi du 4 août 1996 est acquise dès lors qu’il y a dépôt de la plainte auprès d’une des instances habilitées à la recevoir (au niveau de l’entreprise ou auprès du fonctionnaire compétent, des services de police, d’un membre du ministère public ou d’un juge d’instruction), indépendamment de la qualité de la personne visée (membre de la direction ou tout autre membre du personnel). Elle est, en outre, indépendante de l’appréciation ultérieure portant sur son bien-fondé ou non.
Il ne suffit pas à l’employeur de simplement constater que le licenciement s’inscrit dans le projet de réorganisation de l’entreprise pour considérer qu’il ne revêt pas un caractère abusif : il est, tout au contraire, exigé qu’il établisse la nécessité de licencier au regard de cette réorganisation qu’il juge indispensable pour recouvrer sa capacité concurrentielle au sein du secteur industriel qui est le sien.
L’article 21 de la loi de 1948 vise la fin de l’appartenance du délégué à l’organisation représentative des travailleurs qui a présenté la candidature ou le cas de révocation du mandat de délégué du personnel pour faute grave prononcée à la requête de l’organisation qui a présenté celle-ci. Le retrait du mandat de délégué syndical n’étant pas visé par la loi, aucune conséquence ne peut être tirée de cet élément.
Il apparaît du texte de la loi du 19 mars 1991 que le critère pour distinguer la durée de la protection des candidats n’est pas fonction du fait qu’il s’agit d’une première candidature ou d’une candidature subséquente en tant que telle et quel qu’en soit le résultat, mais bien du fait d’avoir déjà été candidat et de ne pas avoir été élu lors des élections précédentes.
Le candidat non élu ne jouit donc pas d’une protection uniquement lors de sa première candidature, mais bien d’une protection identique à celle du délégué lors de celle-ci et d’une protection réduite à deux ans lorsqu’il n’a pas été élu à l’occasion des élections précédentes.
L’attitude du travailleur tenant, par SMS, des propos qui ne traduisent pas simplement une expression légitime d’un droit à l’appréciation, mais, par leur caractère dénigrant à l’égard de l’employeur, manifestent son intention de lui nuire ne peut que rompre immédiatement et définitivement la confiance de ce dernier.
Par l’effet de l’arrêt n° 140/2018 de la Cour constitutionnelle ci-dessus, il y a lieu, pour la détermination de la première partie du délai de préavis à notifier à un travailleur dont le contrat comportait une clause de préavis valide de faire application de celle-ci, fût-elle moins favorable que le régime légal établi par l’article 68, alinéa 3, de la loi du 26 décembre 2013.
Le fait que la Cour constitutionnelle ait, constatation faite de la lacune existant à leur détriment, invité les juridictions du travail à garantir sans discrimination, en application du droit commun des obligations, les droits de tous les travailleurs du secteur public en cas de licenciement manifestement déraisonnable, en s’inspirant, le cas échéant, de la C.C.T. n° 109, ne peut constituer un fondement pour une application pure et simple de celle-ci aux intéressés. Ainsi est-il exclu de leur accorder, à titre d’indemnisation, l’indemnité forfaitaire dont elle prévoit le paiement.
Une faute consistant, essentiellement, en un défaut d’information de l’employeur d’une initiative prise dans le cadre du travail, ne présente pas un degré de gravité tel qu’elle est de nature à rompre de manière définitive et immédiate toute relation de confiance et, donc, à rendre impossible sur-le-champ la poursuite des relations contractuelles.
Doit être qualifié d’abusif le licenciement d’un travailleur justifié par son attitude d’isolement et les réactions verbales violentes dont il s’est rendu coupable à l’égard de certains de ses collègues lorsque ce comportement doit être analysé à l’aune d’un système de défense visant à contrer une situation de violence au travail qui, caractérisée par des agressions racistes à son endroit, n’ont pas été appréhendées adéquatement par son employeur.
Le seul fait que l’article 2 de la loi du 12 avril 1965 exclut les pécules de vacances du concept de rémunération n’a pas pour effet que le mode de calcul du pécule de vacances, en usage dans l’entreprise, ne puisse être considéré comme un élément essentiel du contrat. Il est, au contraire, incontestable qu’il s’agit d’un élément avantageux pour le travailleur, en telle sorte que, sauf effets d’une clause contractuelle le permettant, il n’y a pas de modification possible.
Constitue un comportement inapproprié et fautif le fait, pour un responsable de caisse, de prélever de la caisse le montant liquide dont il l’avait auparavant créditée par le paiement effectué par le débit de sa carte bancaire, façon d’agir qui a requis la création, l’espace d’un instant, d’une fausse facture pour l’annuler aussitôt. Compte tenu du contexte dans lequel cette faute a été commise, contexte caractérisé par l’absence d’un quelconque détournement de fonds (débit de sa carte bancaire précédant le retrait du même montant en liquide après annulation de la facture) et par l’inexistence de toute dissimulation, ce comportement fautif doit toutefois être considéré comme étant d’une gravité certaine, mais pas telle qu’il était de nature à rompre de manière immédiate et définitive la confiance devant être placée en lui, et ce même en tenant compte de l’avertissement antérieur concernant une infraction à la réglementation interne.
Les dispositions transitoires de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés ne sont pas d’application en cas de succession d’un CDD, venant à échéance le 31 décembre 2013, et d’un CDI, prenant cours le 1er janvier 2014.
Il ne peut être question de communication spontanée des motifs de licenciement que si celle-ci est intervenue avant la demande du travailleur. Le délai de réponse à partir de celle-ci est de deux mois et il commence à courir le troisième jour ouvrable après la notification. Le dies a quo ne compte pas, le dies ad quem étant cependant dans le délai. L’on peut faire ici une analogie avec le délai de l’article 35, alinéa 4, de la loi du 3 juillet 1978, à propos du délai de trois jours. De même, il peut être renvoyé à l’article 2261 du Code civil.
(Décision commentée)
Les faits constitutifs de motif grave ne peuvent être liés à l’exercice du mandat de délégué du personnel. Il s’agit des faits liés à l’exercice du mandat de délégué d’une manière conforme à la loi. Des actes fautifs qui empêcheraient immédiatement et définitivement la poursuite des relations professionnelles ne sont pas couverts, ne relevant pas de l’exercice par le délégué de son mandat d’une manière conforme à la loi. Ils peuvent aboutir à un licenciement pour motif grave même s’ils ont été commis à l’occasion de l’exercice du mandat.
N’est pas fautif le fait que le travailleur ait participé à diverses réunions auprès d’une société externe pour le compte de son organisation syndicale, dont une réunion relative à l’examen des comptes annuels. En outre, les démarches effectuées auprès de cette société pour soutenir deux travailleurs de l’entreprise ne sont pas nécessairement fautives à l’égard de l’employeur, étant étrangères à la relation de travail avec celui-ci.
La circonstance que le travailleur n’ait élevé aucune contestation suite à la réception du courrier lui notifiant son congé pour motif grave ne permet nullement d’en déduire un quelconque élément de nature à apporter la preuve de la précision requise de la lettre de rupture, alors même que sa rédaction sommaire ne peut que le laisser dans l’incertitude de ce qui, parmi les faits qui lui sont reprochés et qui ont donné lieu à une enquête interne, a emporté la conviction qu’ils étaient constitutifs de motif grave.
Une relation amicale ne justifie pas le non-respect des devoirs qui s’imposent à une assistante sociale vis-à-vis d’une travailleuse protégée dont elle a la charge et dont elle connaît, mieux que quiconque, la fragilité psychologique. En devenant sa débitrice, sans honorer ensuite ses engagements, l’intéressée a commis une faute déontologique qui, si elle est née dans la sphère privée et n’a généré aucun dommage direct pour l’employeur, n’en reste pas moins intrinsèquement grave et justifie la perte de confiance dont elle doit jouir dans son cadre professionnel.
La protection n’est pas liée au bien-fondé de la plainte mais au dépôt de celle-ci. Le législateur a voulu protéger le travailleur pendant la durée de l’instruction de cette plainte contre des mesures qui seraient fondées sur des faits mentionnés dans la plainte, entraînant la poursuite des comportements de harcèlement dénoncés. Le juge doit vérifier si la mesure litigieuse a un lien avec les griefs repris dans la plainte déposée en vue d’une intervention formelle. Il ne s’agit donc pas d’examiner le bien-fondé des griefs (pour lequel s’applique l’article 32decies de la loi du 4 août 1996), mais le lien entre la mesure préjudiciable et les griefs (fondés ou non), repris dans la plainte déposée.
La sanction minimale de trois semaines se justifie dès lors que le motif mal apprécié dans le chef de l’employeur est d’ordre organisationnel et que la travailleuse (qui n’a pas demandé à connaître les motifs du licenciement, conformément à la C.C.T. 109) ne démontre aucunement que la décision est prise en représailles d’un comportement ou d’une situation qui n’aurait pas plu à l’employeur et que ce dernier n’a manifesté aucune intention de nuire.
Renonciation et transaction ne doivent pas nécessairement être concomitantes, cette dernière pouvant parfaitement être conclue a posteriori lorsqu’elle constitue la simple expression des modalités convenues contractuellement à la suite d’une renonciation abdicative à entamer une action judiciaire en contestation d’un licenciement.
Dès lors qu’elle a été portée à la connaissance de l’intéressé, la renonciation par le travailleur à son droit d’action contre son ex-employeur, est un acte unilatéral irrévocable empêchant son auteur de se désister.
A défaut pour l’employeur d’avoir introduit, dans le délai prescrit à peine de déchéance, les recours spécifiquement prévus par la loi électorale, la candidature est définitivement validée et l’employeur perd le droit de la contester. La remise en cause de la protection prévue par la loi de 1991 ne pourrait donc s’envisager que vis-à-vis d’un candidat non élu dont les conditions personnelles d’éligibilité n’ont pu être contestées en cours de procédure électorale.
Une politique d’autogestion ne peut prendre le pas sur la responsabilité que doit prendre l’employeur de donner à son personnel les moyens de celle-ci. Elle ne peut l’exempter de se comporter en employeur normalement raisonnable et prudent, ce qui est manifestement le cas lorsque, après avoir confié la responsabilité d’un service à un employé qui a dû se former sur le tas, il lui impute la responsabilité du dysfonctionnement de celui-ci alors même que les manquements reprochés relèvent davantage de défaillances dans l’organisation de la fonction que de problèmes propres à l’intéressé.
La modification unilatérale d’un élément essentiel du contrat de travail suppose notamment que la modification soit effective ou en tout cas qu’une décision définitive soit prise. Dès lors que l’employé était en incapacité de travail et que le contrat entre parties était ainsi suspendu, il conservait en l’espèce la possibilité de faire des contrepropositions ou de rejeter les propositions faites. Dans cette hypothèse, il était tenu, après sa période de maladie, de se représenter au travail et aurait pu alors exiger d’être replacé dans la situation qui était la sienne auparavant.
S’il est exact qu’en matière de contrat de travail, un employeur conserve le pouvoir d’agencer son entreprise aux exigences économiques du monde du travail, l’assiette d’exercice de ce ius variandi ne peut que concerner des éléments accessoires du contrat, soit qu’ils le soient par nature, soit qu’ils aient conventionnellement été qualifiés comme tels. C’est donc le caractère accessoire ou essentiel de l’élément modifié qui constitue la mesure distinctive de ce droit et de l’acte équipollent à rupture, en ce que ce droit ne saurait porter sur des éléments essentiels du contrat dont la modification requiert le rapprochement des consentements des parties.
La chute des revenus bancaires liée à la baisse des taux, à l’accélération de la numérisation, à la concurrence dans le domaine et à la hausse des coûts opérationnels ainsi que le respect des règles liées à Bâle 2, imposant aux banques d’améliorer leurs ratios de solvabilité, sont autant de facteurs justifiant la mise en œuvre de mesures sévères, dont le licenciement de collaborateurs, fussent-ils en crédit-temps.
De l’avis de la Cour constitutionnelle (arrêt n° 165, du 10 novembre 2011, ultérieurement confirmé par arrêts n° 191/2011, du 15 décembre 2011, n° 80/2012, du 28 juin 2012 et n° 90/2012, du 12 juillet 2012, ci-dessus), il n’est pas contraire aux principes d’égalité et de non-discrimination de traiter de manière différente un licenciement opéré pendant une période de congé parental et celui intervenant pendant une période de crédit-temps. En effet, la loi offre une protection suffisante en cas de licenciement d’un travailleur en crédit-temps en ce qu’elle prévoit que le délai de préavis est calculé sur la base de la rémunération annuelle de base comme si le travailleur n’avait pas réduit ses prestations de travail et que l’indemnité forfaitaire de protection est égale à la rémunération de 6 mois.
En outre, le congé parental et le crédit-temps avec motif (prendre soin d’un enfant de moins de 8 ans) sont distincts par leurs objectifs et modalités d’application.
Partant, il n’existe aucun motif de droit permettant de justifier, en l’hypothèse, le calcul de l’indemnité compensatoire de préavis sur la base de la rémunération fictive à temps plein comme dans le cas d’un congé parental. (arrêt cassé par Cass., 22 juin 2020, S.19.0031.F)
Un comportement révélant une véritable « culture de l’agressivité », se traduisant par la multiplication d’attitudes inadaptées, voire brutales, tant à l’égard de sa hiérarchie que de ses collègues et des personnes placées sous sa garde, ne saurait, quand bien même elle trouverait sa source dans des difficultés liées à la vie privée de la personne qui manifeste cette tendance, être admis sur les lieux de travail.
Modifie unilatéralement un élément essentiel du contrat de travail convenu l’employeur qui, sans avoir recueilli au préalable l’accord exprès du travailleur ainsi que l’y obligeait le règlement de travail, lui retire ses fonctions et responsabilités, et ce sans accompagner sa décision d’aucune proposition de réaffectation vers une fonction équivalente en termes de contenu et de niveau de responsabilité, mais en faisant, au contraire, dépendre de négociations bilatérales ultérieures, la possibilité, pour l’intéressé, de poursuivre sa carrière au sein de la société.
Une clause conventionnelle, visant le calcul de l’ancienneté et précisant que, pour déterminer le délai de préavis, celle-ci prend cours, non à la date de conclusion du contrat, mais à une date antérieure, ne modifie pas le mode de calcul de celui-ci tel que désormais prévu pour les contrats conclus à partir du 1er janvier 2014. Pour tenir compte du calcul prévu par les dispositions transitoires de la loi du 26 décembre 2013, elle aurait dû prévoir la prise en compte d’une durée de préavis fixe correspondant à l’ancienneté conventionnelle arrêtée au 31 décembre 2013 et, ensuite, au moment de la rupture ou mentionner un complément d’indemnité sur la base préfixée conformément auxdites dispositions.
Manque gravement à ses devoirs le travailleur qui choisit délibérément d’adopter, de façon répétée et en dépit d’avertissements, des comportements constitutifs d’une insubordination outrancière, traduite, dans les faits, par la transgression de nombreux aspects de l’organisation mise en place par son employeur ainsi que l’adoption de modes d’action préjudiciables à ses collègues, à sa ligne hiérarchique ainsi qu’à la clientèle.
(Décision commentée)
La demande d’un employeur en vue du remboursement de sommes qu’il estime payées indûment ne dérive pas du contrat de travail mais des dispositions du Code civil relatives à la répétition de l’indu et est dès lors soumise au délai de prescription général (avec renvoi à Cass., 10 octobre 2016, n° S.14.0061.N - publié ci-dessus).
Il ne suffit pas de prétendre, en se fondant à cet effet sur l’enseignement déduit de l’arrêt HOFFMAN (Aff. n° 184/83, Rec. 3047), que la Directive n° 2006/54/CEE, transposée par la loi « genre » du 10 mai 2007, vise à protéger « une femme enceinte en raison de sa condition biologique pendant la grossesse et la maternité de même qu’à prévoir des mesures de protection de la maternité comme moyen de parvenir à une réelle égalité entre les sexes » pour pouvoir prétendre cumuler l’indemnité forfaitaire prévue par l’article 23 de ladite loi avec l’indemnité protectionnelle visée par l’article 40 de la loi du 16 mars 1971. Encore faut-il pouvoir identifier l’existence d’un facteur aggravant le dommage couvert par la loi du 16 mars 1971 et non réparé spécifiquement par l’indemnité prévue par son article 40, dont l‘objet est de protéger les femmes enceintes contre les conséquences dommageables pour leur santé physique et psychique d’un licenciement opéré dans des circonstances que cette législation prohibe.
L’article 8 de la C.C.T. n° 109 ne requiert pas que l’attitude ou la conduite invoquée soit fautive mais il faut qu’une conduite, fautive ou non, à l’origine du licenciement, soit avérée. Le juge doit ainsi vérifier si le motif du licenciement lié à la conduite alléguée est réel et n’en cache pas d’autres inavouables. Le seul fait d’invoquer un (ou plusieurs) motif(s), même non fautif(s), lié(s) à l’attitude du travailleur ne permet pas à l’employeur de s’exonérer de toute obligation de payer une indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable. Raisonner autrement reviendrait à permettre à tout employeur qui voudrait s’assurer de ne pas devoir payer cette indemnité d’invoquer quelque motif lié à l’attitude du travailleur dont il souhaite se séparer pour être dispensé de tout paiement, le motif invoqué fût-il purement fictif.
À défaut de mise en demeure préalable, un employeur ne peut invoquer l’acte équipollent à rupture qu’il reproche à son travailleur, à savoir le fait que celui-ci aurait, par sa négligence persistante à lui adresser le(s) certificat(s) couvrant son absence au travail, manifesté sa volonté tacite mais certaine de rompre le contrat de travail.
La circonstance que le travailleur, ayant déposé plainte auprès de l’Inspection du Contrôle du bien-être au travail, n’ait pas estimé utile de donner suite à la demande du conseiller en prévention de lui faire parvenir les faits pour lesquels il souhaitait son intervention ainsi qu’il ressort du rapport de l’inspecteur social, ne le prive pas de la protection de l’article 32tredecies.
Dans un contexte de modification unilatérale des conditions contractuelles par l’employeur, les insubordinations reprochées au travailleur au titre de motif grave, qu’elles concernent le secteur de prospection ou les consignes relatives à la planification des visites, qu’il lui était reproché de ne pas respecter ou suivre, n’ont pas de caractère fautif ou, à tout le moins, pas celui de faute grave de nature à rendre immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle.
Echoue à démontrer avoir donné congé exclusivement pour des motifs étrangers à l’action en justice intentée et à la plainte déposée par le travailleur, l’employeur qui, dans le courrier notifiant le motif grave, reproche à l’intéressé d’avoir agi en justice, notamment pour solliciter des dommages et intérêts en raison de faits de harcèlement, ce reproche de s’être plaint d’être victime de faits de harcèlement ayant du reste été formulé à de très nombreuses autres reprises, en termes de correspondance cette fois.
Même si certains sont démontrés et fautifs, on peut difficilement imputer à motif grave des propos tenus dans le contexte, inquiétant pour l’emploi, d’une société ayant informé ses travailleurs des difficultés financières rencontrées et qui, non contente de les imputer aux absences légitimes du personnel pour maladie, avait également indiqué avoir envisagé de sanctionner ces absences légitimes en cessant de les rémunérer légalement ou d’instaurer une forme d’encouragement pécuniaire pour les travailleurs non malades.
Indépendamment de leur caractère fautif et de la part de responsabilité que porte l’employeur dans le contexte dans lequel les faits en question ont été posés, il est compréhensible, et donc pas manifestement déraisonnable, que ce dernier ne souhaite plus collaborer avec une travailleuse qui, alors qu’elle avait la responsabilité de la gestion du personnel, avait annoncé sa démission en vantant les conditions d’occupation plus favorables auprès d’un employeur concurrent, avait fait état de la possibilité pour ses collègues d’en bénéficier aussi et organisé, au moins a minima, leur changement d’employeur. Son licenciement n’est, par conséquent, pas abusif au sens de l’article 63 LCT.
L’objectivité du propos d’un consultant externe appelé pour tenter de démontrer que la dégradation des relations entre un travailleur, qu’il n’a jamais rencontré, et son supérieur hiérarchique lui serait imputable et pourrait constituer un motif suffisant, paraît douteuse lorsque l’attestation qu’il délivre pour les besoins de la cause prend les allures d’un panégyrique dudit manager et n’établit, en outre, nullement la prétendue nécessité de réduire le personnel dans le domaine d’expertise du travailleur.
Les motifs du licenciement doivent être étrangers non seulement au dépôt de la plainte, mais aussi aux faits invoqués dans celle-ci. Il serait, en effet, dénué de sens de prévoir qu’une plainte en harcèlement - ou, dans le cas classique, une demande d’intervention formelle - fait courir un mécanisme de protection à l’égard de la victime si elle peut être licenciée en vertu des actes de harcèlement dont elle se plaint.
Toutefois, si la protection instaurée par l’article 32tredecies est d’abord destinée à protéger le travailleur des représailles de l’employeur, motivées par le fait même du dépôt de sa plainte, et si le législateur a également voulu le protéger, pendant la durée de l’examen de celle-ci, contre des mesures qui seraient fondées sur les faits qui y sont relatés, prolongeant ainsi le harcèlement dénoncé, il n’est pas interdit à l’employeur de tenir compte de faits cités dans la plainte, pour autant que sa décision ne trouve pas sa raison d’être dans la comportement dénoncé comme constitutif de harcèlement moral.
La convocation, adressée à un enseignant en application de l’article 71septies du décret du 1er février 1993 fixant le statut des membres du personnel subsidiés de l’enseignement libre subventionné, ne vise pas à le licencier immédiatement mais à l’entendre en vue de lui permettre d’exercer ses droits à la défense au regard d’un possible licenciement.
Dans la mesure où il n’est pas concevable qu’une décision ferme et définitive soit prise avant que la personne mise sur la sellette puisse exposer son point de vue et faire valoir ses pièces et arguments, le licenciement est, à ce stade, loin d’être acquis, ce qui emporte pour conséquence, lorsque le recommandé par lequel l’intéressé a été convoqué à un entretien potentiellement préalable à son licenciement est daté du même jour que la plainte, que l’on ne puisse considérer que la procédure pouvant mener au licenciement a été entamée avant le dépôt de la plainte et, partant, que le congé qui en est l’aboutissement est antérieur à celle-ci.
On n’imagine pas qu’un employeur, dont une partie non négligeable de l’activité consiste précisément à envoyer des colis à l’étranger, admette que son personnel puisse faire appel à sa guise, sans avertissement préalable ni contrepartie, aux services de son expéditeur sans en rembourser les frais. À procéder de la sorte, un employé du service transmission/réception, soit une des personnes devant connaître toutes les procédures relatives à l’envoi de courrier/colis privés, abuse de la confiance de son employeur, comportement constitutif de faute grave autorisant la rupture du contrat sans préavis ni indemnité.
Agit avec une précipitation injustifiée, l’employeur qui licencie un travailleur alors que des discussions étaient toujours en cours sur la poursuite de leur collaboration et les termes d’un possible avenant contractuel. Ce faisant, il commet une faute potentiellement génératrice d’un sentiment de brutalité et de vexation dans le chef du travailleur licencié qui, à ce stade des tractations, s’était borné à souhaiter obtenir des précisions complémentaires.
L’entrée en vigueur de la CCT n° 109 n’a pas privé le travailleur licencié de la possibilité d’invoquer les articles 1134 et 1382 C. civ. pour solliciter des dommages et intérêts. Ce n’est cependant possible, compte tenu de l’interdiction de cumul énoncée par l’article 9 de ladite CCT, qu’à la condition que la faute invoquée ne concerne pas les motifs du licenciement, mais qu’elle ait trait, par exemple, aux circonstances dans lesquelles il a été donné, ces circonstances n’étant pas visées par cette CCT.
(Décision commentée)
Même si la matière des cotisations de sécurité sociale est d’ordre public, l’O.N.S.S. ne peut se substituer aux parties à la convention de transaction. S’agissant d’une transaction valable, la convention a, au sens de l’article 2052 du Code civil, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort et la renonciation de l’employé qu’elle contiendrait est opposable à l’O.N.S.S., dans la mesure où l’avantage faisait partie d’un litige entre les parties au contrat de travail.
Le fait que les droits invoqués par l’O.N.S.S. intéressent l’ordre public ne dispense pas celui-ci de respecter les effets externes de la transaction conclue dès lors que celle-ci porte sur des droits dont les parties pouvaient disposer.
(Décisions commentée, liée à C. trav. Bruxelles, 7 mars 2018, R.G. 2015/AB/1.021)
La mission première d’un notaire, considérée comme capitale tant par le législateur, qui l’assortit de sanctions pénales, que par les organes régulateurs de la profession, consiste à assurer l’authenticité des actes. Porte ainsi gravement atteinte au ministère de son employeur, dès lors fondé à ne pas lui maintenir sa confiance et à estimer immédiatement et définitivement impossible la poursuite de leur collaboration, le clerc qui, après réception d’un acte notarié, viole son caractère authentique en y ajoutant une clause omise dans le projet d’acte.
La circonstance que tant le notaire, que le juriste de l’étude et le client auraient pu, voire même dû, s’apercevoir en temps utile de cette omission, si elle est de nature à atténuer sa responsabilité quant à celle-ci, n’enlève rien au fait qu’il porte l’entière responsabilité de la falsification.
La requalification de la rupture entraîne l’obligation objective pour l’employeur de fournir un reclassement professionnel. Sur cette base, la réparation doit avoir lieu en nature.
Peut légitimement invoquer la rupture de confiance rendant immédiatement et définitivement impossible la poursuite des relations professionnelles, l’employeur sciemment trompé par le travailleur (i) ayant fait une fausse déclaration à la police en jugeant opportun de ne rien lui dire à propos de cette déclaration, qui visait une infraction mineure de roulage, et (ii) ayant, en outre, tenté de tromper à nouveau ce dernier lorsqu’il a été convoqué devant le tribunal, en niant avoir été entendu par la police.
C’est avec témérité qu’un employeur congédie un travailleur à qui il prête l’intention de divulguer des données confidentielles auprès de la concurrence, sans avoir recueilli tous les éléments utiles pour prendre une décision en parfaite connaissance de cause, en particulier sans avoir préalablement entendu l’intéressé. En s’abstenant de ce faire, il fait preuve d’une précipitation blâmable, susceptible de consacrer une rupture dépourvue de tout motif avéré ou raisonnable.
Le fait, pour un employé d’un organisme de crédit financier, de manipuler frauduleusement les données d’un compte bancaire aux fins de s’attribuer une somme d’argent est de nature à rompre immédiatement et définitivement la confiance entre ledit organisme et lui, ce sans que la circonstance que cette manipulation ait été opérée sur le compte du père de l’intéressé et que ce dernier ait consenti à telle manipulation soit de nature à atténuer la gravité de la faute.
Il est compréhensible qu’un travailleur, maintenu en service après reprise de l’entreprise, porte un regard critique sur sa restructuration et ses nouveaux collègues. Cette attitude, pour blâmable qu’elle soit, ne rend toutefois pas immédiatement et définitivement impossible la poursuite des relations de travail.
La déclaration d’un collègue de la travailleuse faisant état de l’humeur « joyeuse » dans laquelle se trouvait l’intéressée au retour de la pause-déjeuner qu’elle avait prise à l’extérieur et de la présence d’une bouteille de bière vide sur son bureau ne suffit pas à établir à suffisance de droit que celle-ci s’adonnait à la boisson durant ses heures de travail.
Le refus d’une mutation à l’étranger dans le cadre d’une réorganisation constitue un motif étranger justifiant la levée de la protection du travailleur en crédit-temps.
Sur la base de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle ayant retenu une discrimination contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution (cf. son arrêt n° 22/2018 du 22 février 2018 ci-dessus), il y a lieu de conclure à l’existence d’une faute de la part de l’autorité publique qui licencie un contractuel sans audition préalable dans le respect du principe Audi alteram partem, faute ouvrant droit à réparation si l’intéressé démontre qu’elle est en lien de causalité avec un dommage lié à la perte d’une chance de conserver son emploi. Celle-ci est toutefois inexistante dans le chef de qui avait déjà reçu un dernier avertissement et était, de ce fait, prévenu que toute éventuelle future incartade pourrait, à l’avenir, être considérée comme constituant un motif grave.
Pour décider si les conditions prévues à l’alinéa 4 de l’article 35 L.C.T. ont été respectées : le juge peut se borner à vérifier si le motif grave invoqué à l’appui du licenciement est suffisamment précisé pour, d’une part, permettre au travailleur de connaître les motifs de la décision et de s’en défendre, et, d’autre part, permettre ensuite au juge de s’assurer que les motifs invoqués devant lui sont bien ceux qui ont été notifiés au travailleur. Ce faisant, il ne statue pas davantage sur l’existence des faits et sur leur caractère de gravité.
En ce qui concerne le personnel commercial prestant à l’extérieur de l’entreprise et dont la rémunération est en partie dépendante des résultats de vente auprès des clients visités pour compte de l’employeur, la clientèle est incontestablement un élément essentiel du contrat de travail. Une modification unilatérale de la clientèle par l’employeur, consistant dans l’octroi à un autre délégué des clients précédemment visités et pour lesquels était perçue une rémunération variable, n’est dès lors pas autorisée. Est sans pertinence la circonstance que le délégué ne bénéficiait pas de l’exclusivité dans le secteur qui lui était attribué. Il a droit au respect de la consistance de la clientèle qu’il visitait précédemment pour compte de l’employeur et qui ont apporté des commandes entraînant une rémunération.
Pour décider si le congé a été ou non donné dans le délai prévu par l’article 35, alinéa 3, LCT, le juge saisi peut, conformément à l’enseignement de la Cour de cassation (arrêt du 19 mars 2001, R.G. S.00.0129.N), se borner à examiner si la connaissance invoquée au moment du congé n’existait pas depuis plus de trois jours ouvrables. Ce faisant, il ne statue pas sur l’existence des faits et sur leur caractère de gravité.
Couplées à un taux de productivité insuffisant au regard de l’augmentation de la charge de travail connue dans le service, des absences nombreuses et ponctuelles – facteur qui ajoute à la désorganisation de celui-ci et nuit à son rendement général – constituent des motifs étrangers à la suspension du contrat de travail justifiant qu’il y soit mis fin sans que le travailleur puisse prétendre à une quelconque indemnité de protection.
Le fait, pour une partie, de ne pas hésiter à prendre contact avec un client de la société créée par son ancien travailleur pour l’informer de la plainte pour harcèlement déposée par celui-ci contre une de ses ex-collègues et de lui demander de témoigner de son expérience avec l’intéressé constitue une démarche qui dépasse l’exercice normal des droits de la défense. Il constitue également un abus de droit en lien avec le dommage moral causé à ce dernier en invoquant, pour justifier son licenciement, un motif fallacieux, portant atteinte à son honneur et à sa probité. Ce comportement révèle tant une intention de nuire qu’une volonté d’échapper au paiement de l’indemnité de protection due sur pied de l’article 32tredecies de la loi du 4 août 1996.
Le licenciement intervenu en représailles aux demandes d’explication légitimes du travailleur relativement à la modification unilatérale de ses fonctions ainsi qu’à la suppression brutale et non annoncée de sa carte carburant et de la carte de crédit dont il disposait pour régler ses frais de déplacement, hôtel, repas, invitations clients, entretien du véhicule de fonction, etc. est constitutif d’abus de droit dans le chef de l’employeur au regard du principe général d’exécution de bonne foi des conventions. En ce qu’il engendre une situation particulièrement humiliante pour le travailleur et rend difficile, sinon impossible, l’exercice de ses fonctions, il lui cause un dommage distinct de celui couvert pas son indemnité de rupture (évalué ex aequo et bono à 5.000,00 €).
(Décision commentée)
En cas de crédit-temps, l’indemnité compensatoire de préavis n’est due que sur la rémunération réduite. Le délai lui-même doit être calculé sur la base d’un temps plein fictif, seul étant réduit le montant de l’indemnité elle-même.
Cette règle vaut tant pour l’interruption de carrière prise en application de la loi du 22 janvier 1985 que dans le cadre des conventions collectives n° 77bis ou 103. Dans l’ensemble de ces hypothèses, l’indemnité compensatoire de préavis doit être calculée sur la base de la rémunération effectivement payée au moment de la rupture.
En vertu de l’enseignement de la Cour constitutionnelle, le principe de l’interdiction de discrimination n’est pas enfreint, les dispositions constitutionnelles étant lues le cas échéant avec les normes européennes imposant l’égalité de traitement entre hommes et femmes ou interdisant la discrimination sur la base de l’âge. Seule est admise l’hypothèse du congé parental, dans laquelle, malgré la diminution des prestations de travail, la rémunération doit être calculée sur un temps plein, et ce aux fins de respecter le principe communautaire du droit au congé parental. Cette règle ne peut cependant être étendue aux autres hypothèses d’interruption de carrière.
Trouve-t-elle explication dans un état particulier d’énervement, la tenue de propos racistes à l’encontre d’un client est d’autant plus inadmissible que la personne qui les a proférés avait déjà fait l’objet d’un signalement auprès de la direction pour avoir utilisé des expressions de même nature à l’égard de collègues, ce qui, compte tenu de la situation géographique du magasin ainsi que de l’origine de sa clientèle, de son personnel et des membres du service de sécurité, autorise l’employeur à considérer qu’il y va d’une faute rendant immédiatement et définitivement impossible la poursuite de toute collaboration avec l’intéressée.
(Décision commentée)
S’il appartient au travailleur d’apporter la preuve du caractère abusif du licenciement, dès lors qu’il ressort d’une série d’éléments résultant notamment de pièces produites et qui ne sont pas valablement contredites par la société que le caractère illégal d’une pratique commerciale dénoncée apparaît établi (politique commerciale apparaissant contraire à l’article 10 de la loi du 25 mars 1964 sur les médicaments), la charge de la preuve contraire incombe de toute évidence à l’employeur.
Le fait d’invoquer comme motif de licenciement ne serait-ce qu’un motif ne correspondant pas à la réalité laisse clairement apparaître que l’exercice du droit de licencier est intervenu d’une manière qui dépasse manifestement les limites de l’exercice normal que ferait de ce droit un employeur prudent et diligent, le droit ayant ainsi été détourné de sa finalité économique et sociale.
Le fait qu’un travailleur aurait, à de nombreuses reprises, pu faire valoir ses observations n’est, en soi, pas pertinent pour écarter le principe de l’audition préalable, devant, dans le chef des employeurs publics, intervenir dans des conditions conformes au principe audi alteram partem (convocation préalable avec indication de l’objet de l’audition, possibilité de consulter le dossier et d’être assisté par un conseiller juridique).