En matière de motif grave, voir également sur la question la rubrique « Fin du contrat de travail > Modes de rupture > Licenciement pour motif grave > Notification du congé > Délai > Point de départ > Secteur public > Audition »
Commentaire de C.E., 27 septembre 2016, n° 235.871
Mis en ligne le 27 janvier 2017
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 26 septembre 2022, R.G. 2019/AB/473
Mis en ligne le 13 février 2023
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 2 mars 2022, R.G. 2019/AB/71
Mis en ligne le 29 août 2022
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 15 février 2022, R.G. 2019/AB/123
Mis en ligne le 14 octobre 2022
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 9 mars 2021, R.G. 2018/AB/255
Mis en ligne le 15 juin 2021
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 28 février 2017, R.G. 2014/AB/1.128
Mis en ligne le 12 octobre 2017
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 9 juin 2015, R.G. 2013/AB/727
Mis en ligne le 11 décembre 2015
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 8 janvier 2013, R.G. 2011/AB/712
Mis en ligne le 27 mai 2013
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 12 septembre 2012, R.G. 2008/AB/51.416
Mis en ligne le 27 décembre 2012
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 30 novembre 2011, R.G. 2010/AB/586
Mis en ligne le 15 mai 2012
Commentaire de Trib. trav. Liège (div. Verviers), 8 février 2023, R.G. 22/30/A
Mis en ligne le 14 juillet 2023
Commentaire de Trib. trav. fr. Bruxelles, 13 juin 2019, R.G. 14/13.388/A
Mis en ligne le 31 octobre 2019
Commentaire de Trib. trav. Hainaut (div. Mons), 22 octobre 2018, R.G. 17/1.439/A
Mis en ligne le 29 mars 2019
Commentaire de Trib. trav. Bruxelles, 14 avril 2016, R.G. 14/13.388/A
Mis en ligne le 9 juin 2016
Commentaire de Trib. trav. Bruxelles, 10 mai 2007, R.G. 2.235/06
Mis en ligne le 27 mars 2008
Les articles 32, 3°, et 37, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, interprétés comme faisant obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs liés à sa personne ou à son comportement, violent les articles 10 et 11 de la Constitution.
Les mêmes dispositions, interprétées comme ne faisant pas obstacle au droit d’un travailleur employé par une autorité publique à être entendu préalablement à son licenciement pour des motifs liés à sa personne ou à son comportement, ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution. (dispositif)
Si une autorité administrative décide de mettre un terme au contrat de travail d’un agent contractuel, elle n’est pas tenue de motiver formellement le licenciement. La réglementation relative à la rupture des contrats de travail à durée indéterminée n’impose par ailleurs pas à l’employeur d’entendre le travailleur avant de procéder à son licenciement. Les travailleurs contractuels (donc hors situation statutaire) au service des communes sont soumis à l’article 1er, 2e alinéa de la loi sur les contrats de travail et il ne peut y être fait exception sur la base du principe général de droit de bonne administration.
(Décision commentée)
Dans son arrêt du 12 octobre 2015, la Cour de cassation a jugé que ni la loi du 29 juillet 1991 ni les principes généraux de bonne administration, et plus particulièrement celui de l’audition préalable, ne s’appliquent au licenciement de l’agent contractuel au service d’un employeur public. Elle a également précisé qu’un principe général de bonne administration ne saurait faire obstacle à l’application des dispositions de la loi du 3 juillet 1978 LCT. Le principe « audi alteram partem » n’impose dès lors pas à l’employeur d’entendre avant de le licencier un agent contractuel d’une intercommunale.
Le principe audi alteram partem impose l’audition du travailleur du secteur public par l’organe compétent pour adopter la décision de licenciement. Le travailleur invoquant la perte d’une chance de conserver son emploi, la cour relève que pour que le dommage existe il faut que la chance soit réelle, ce qui est le cas en l’espèce. Elle évalue ex aequo et bono l’indemnisation à 3.000 euros bruts.
La réparation du préjudice lié à la perte d’une chance de conserver son emploi consiste en une fraction (taux de probabilité exprimant la chance d’obtenir l’avantage espéré) de la rémunération que le travailleur aurait continué à percevoir s’il était resté en service au vu de ses perspectives concrètes de carrière (préjudice final effectivement subi déduit de la perte d’emploi). Il s’ensuit que la réparation du préjudice lié à la perte d’une chance de conserver son emploi ne couvre en définitive rien d’autre qu’une partie du dommage entier lié à la perte du travail. On ne voit pas à quel titre il en irait autrement, à quel titre la perte d’une chance de conserver son emploi serait soustraite de l’ensemble du dommage déjà réparé forfaitairement par l’indemnité de préavis. La réparation procurée par l’indemnité de préavis est forfaitaire et fixée au jour de la rupture, sans qu’il faille se soucier de la question de savoir si le travailleur était en incapacité de travail ou s’il a retrouvé un emploi par la suite, mais cela ne change rien à la nature du dommage qui n’est alors fondamentalement pas différente de celle du dommage lié à la perte d’une chance de conserver son emploi.
Le principe général de bonne administration audi alteram partem impose à l’autorité publique d’entendre préalablement la personne à l’égard de laquelle est envisagée une mesure grave pour des motifs liés à sa personne ou à son comportement. Son respect doit permettre à l’intéressé de faire valoir utilement son point de vue sur les faits en question et sur la mesure envisagée. Cela implique qu’il ait été préalablement informé de ces faits, qu’il ait eu accès au dossier, qu’il se voie accorder un délai raisonnable pour préparer sa défense et qu’il puisse être assisté du conseil de son choix. Si tant est que ces préalables aient été respectés, ce n’est pas parce que l’employeur n’a finalement pas suivi la position du travailleur (visant à conserver son emploi) que l’audition était de « pure forme » et qu’elle n’a pas eu d’effet utile.
(Décision commentée)
En vertu du principe général de bonne administration audi alteram partem, l’autorité publique doit entendre la personne lorsqu’une mesure grave est envisagée pour des motifs liés à elle-même ou à son comportement. Dès lors que l’employeur a agi avec légèreté et précipitation, ne permettant pas au travailleur de se défendre, il y a faute. Pour ce qui est du dommage, il doit s’agir d’un dommage distinct du préjudice matériel et moral causé par le licenciement lui-même. Il doit être certain et non seulement hypothétique, conjectural ou éventuel. Si est invoquée la théorie de la perte d’une chance, la chance doit être réelle. Le demandeur a la charge de la preuve. La perte de chance doit être appréciée en fonction des circonstances particulières propres à la cause, devant être certaine et pas seulement probable ou éventuelle.
Les principes généraux de droit, tels ceux de bonne administration, ne peuvent contrevenir à une règle de droit, de surcroît doublement impérative, comme celle de l’article 35, alinéas 3 et 4, de la loi du 3 juillet 1978, qui impose le respect d’un double délai de 3 jours en cas de notification d’un congé pour motif grave. Dès lors qu’il s’impose de faire prévaloir cette règle par rapport aux principes de droit administratif d’un rang hiérarchiquement inférieur, l’audition d’un contractuel engagé par une autorité publique sur qui pèsent des soupçons de manquements constitutifs de motif grave ne saurait avoir pour effet de dénaturer ladite règle : elle ne postpose ainsi le point de départ du délai de 3 jours que lorsqu’elle s’avère nécessaire à l’acquisition d’une certitude suffisante dans le chef de l’employeur et, lorsqu’il est acquis qu’il avait une connaissance certaine et suffisante des faits avant l’audition du travailleur, ne peut, en tout état de cause, être utilisée pour recréer fictivement un nouveau délai.
(Décision commentée)
S’agissant en l’espèce d’un licenciement intervenu le 3 mars 2016, l’Etat belge, qui n’a pas auditionné le travailleur contractuel avant de le licencier, ne s’est pas comporté comme tout employeur public raisonnable et prudent placé dans les mêmes circonstances. Vu les débats en doctrine et les décisions de jurisprudence, l’erreur invincible ou toute autre cause de justification ne peut être retenue. Il y a une faute et celle-ci a causé un dommage en lien causal. Il s’agit de la perte d’une chance de conserver l’emploi. La cour applique le mode d’évaluation habituel, étant l’évaluation ex aequo et bono. Elle alloue de ce chef une indemnité de 2.500 euros, s’alignant sur diverses décisions en ce sens.
(Décision commentée)
Une association de C.P.A.S., constituée conformément à l’article 118 de la loi organique des C.P.A.S., est une autorité publique à qui le principe audi alteram partem s’applique. Il s’agit en effet d’une A.S.B.L. de droit public, dont les membres sont des C.P.A.S. identifiés ainsi que, en l’occurrence, une université. L’Association ainsi constituée est soumise à une influence déterminante des C.P.A.S., pouvoirs publics. En l’espèce, en tant que hôpital créé dans le cadre de l’article 118, celle-ci poursuit une mission d’intérêt général et dispose d’un pouvoir de décision contraignant à l’égard des tiers. La cour conclut dès lors à l’obligation d’audition préalable au licenciement d’une travailleuse contractuelle, ce licenciement étant une mesure grave liée, en partie en l’espèce, à son comportement.
En convoquant un agent contractuel à un entretien, un commune reconnaît l’existence d’une obligation d’audition préalable à une éventuelle mesure de licenciement et, corrélativement, le droit pour l’intéressé de faire valoir ses moyens de défense à l’encontre des accusations lancées envers lui. Il n’y a, dès lors, pas lieu de lui retirer ensuite ce droit au prétexte qu’il se serait rendu coupable d’insubordination en refusant d’assister à l’entrevue à laquelle il avait été convoqué, alors même que ce prétendu refus, assorti d’une demande de report de date par son conseil, traduisait simplement sa volonté de préparer la défense de ses intérêts, rendue impossible par l’absence de communication de son dossier administratif et, partant, de faire usage de son droit, ce qui impliquait le respect des garanties liées à son exercice effectif.
(Décision commentée)
L’employeur public qui n’a pas auditionné le travailleur contractuel avant de le licencier a commis une faute au sens de l’article 1382 du Code civil. Si la causalité certaine entre la faute et le dommage tel qu’il s’est réalisé in concreto n’est pas avérée, il peut néanmoins apparaître que la faute a entraîné de façon certaine au moins la perte d’une chance. C’est cette perte d’une chance qui est le préjudice spécifique qu’il convient de réparer. Il faut vérifier s’il existe un lien de « conditio sine qua non » entre la faute et cette perte de chance, c’est-à-dire si la chance perdue était réelle ou sérieuse. Il ne peut s’agir d’un dommage incertain.
L’absence d’audition préalable n’est pas préjudiciable au travailleur faisant l’objet d’un trajet de réintégration dont la fin du contrat de travail a été constatée pour cause de force majeure après que le conseiller en prévention-médecin du travail l’eut estimé, sans que sa décision fut contestée dans le délai imparti, définitivement inapte à reprendre le travail convenu, sans pour autant être en état d’effectuer chez son employeur un travail adapté ou autre.
Le fait qu’un travailleur aurait, à de nombreuses reprises, pu faire valoir ses observations n’est, en soi, pas pertinent pour écarter le principe de l’audition préalable, devant, dans le chef des employeurs publics, intervenir dans des conditions conformes au principe audi alteram partem (convocation préalable avec indication de l’objet de l’audition, possibilité de consulter le dossier et d’être assisté par un conseiller juridique).
Le travailleur, contractuellement occupé par un employeur de la fonction publique, qui ne parvient pas à démontrer l’existence d’une causalité certaine entre la faute commise par ce dernier en ne respectant pas le principe général de bonne administration audi alteram partem s’imposant pourtant à lui (voy. C. const., arrêt n° 86/2017, ci-dessus) et le dommage tel qu’il s’est réalisé in concreto, a la possibilité de démontrer que cette faute a entraîné de façon certaine au moins la perte d’une chance de conserver son emploi et d’obtenir ainsi réparation du dommage subi à concurrence de la valeur économique de la chance perdue, valeur qui ne peut consister en la somme totale de la perte subie ou du gain perdu (cf. Cass., 17 décembre 2009, Pas., I, p. 3056).
L’estimation de la probabilité de conserver un poste de travail grâce à une audition préalable qui aurait permis la contestation des griefs reprochés par le développement de moyens de défense étant impossible à évaluer, force est au juge de recourir à une estimation ex aequo et bono du dommage subi, lequel, ne pouvant être envisagé que sous le seul angle financier puisque c’est la valeur économique de la chance perdue qui est susceptible de réparation, consiste ainsi exclusivement en un préjudice patrimonial.
L’arrêt de la Cour de cassation du 12 octobre 2015 doit être compris en tenant compte des conclusions du Parquet général de Cassation selon lesquelles le contrat de travail présente un caractère multilatéral et, par conséquent, se situe hors du champ d’application de la loi relative à la motivation des actes administratifs, que les pouvoirs publics acquièrent en concluant un contrat de travail la qualité d’employeur avec toutes les conséquences qui en découlent et qu’il ne s’agit plus de normes qui sont imposées unilatéralement. La relation entre le pouvoir public employeur et le travailleur subit un processus d’horizontalisation, les pouvoirs publics se soumettant ainsi aux règles du droit des contrats de travail et le licenciement ne constituant pas un acte administratif car aucune autorité publique n’est exercée. Les actes unilatéraux posés dans le cadre d’un contrat sortent du champ d’application de la loi relative à la motivation des actes administratifs, ce qui vaut aussi pour le licenciement.
Lorsqu’un employeur public prend la décision unilatérale de licencier un agent contractuel, il n’agit pas sur la base de ses prérogatives exorbitantes de puissance publique, mais en tant que titulaire d’un droit contractuel de résiliation que lui reconnaît la loi du 3 juillet 1978. Dès lors, le correctif que constituent les principes de bonne administration n’a pas lieu d’être, les garanties offertes par le droit administratif ne s’ajoutant pas à celles que le travailleur puise dans la loi relative aux contrats de travail.
Soutenir cette thèse serait contraire au principe de la prééminence de la loi sur les principes généraux du droit, qui a pour conséquence que ceux-ci ne s’appliquent légalement que lorsque le litige ne peut être réglé sur la base d’un texte légal, soit en l’absence de règle, soit lorsque celle-ci présente des lacunes. Or la loi du 3 juillet 1978 règle expressément le régime légal du licenciement, y compris celui d’un agent contractuel au service d’une autorité publique.
(Décision commentée)
Lors du licenciement d’un contractuel, l’employeur public n’est, en application de la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass., 12 octobre 2015), tenu que par les obligations des articles 32, 3°, 37, § 1er, alinéa 1er, et 39, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail.
Lorsque l’administration conclut un contrat, elle abandonne son rôle de pouvoir public et devient un employeur ordinaire.
(Décision commentée)
L’obligation d’entendre l’agent contractuel découle d’un principe de droit administratif : Audi alteram partem. L’autorité administrative qui envisage de prendre une mesure grave à l’encontre d’un agent fondée sur des motifs liés à sa personne ou à son comportement doit entendre celui-ci préalablement.
L’obligation d’audition préalable ne concerne que les licenciements fondés sur le comportement du travailleur entendu au sens large englobant, également, un état d’insuffisance professionnelle dans son chef. Elle ne trouve pas à s’appliquer lorsque la décision prise par l’autorité l’est, en application de l’article 78 de la loi relative aux contrats de travail, sur la base du constat d’une incapacité de travail depuis plus de six mois.
L’audition du travailleur intéressé ne lui aurait, en effet, pas permis de faire valoir ses moyens de défense sur des faits lui reprochés ou sur le caractère répréhensible de son comportement, seule une incapacité de longue durée expliquant la mesure prise à son endroit conformément à la politique menée par son employeur au sein de ses services.
L’obligation d’audition préalable en cas de licenciement d’un agent contractuel des services publics ne s’applique que dans les cas où une mesure grave est prise à l’encontre d’un agent en raison de son comportement. Elle ne s’impose pas lorsque, d’une part, le licenciement de l’intéressé est lié à son inaptitude à exercer le travail convenu et assurer son service dans les postes auxquels il a été réaffecté et que, d’autre part, son employeur a tenté de trouver l’occupation qui serait la plus adaptée à son état, notamment en modifiant son affectation à deux reprises.
S’il est vrai que la loi du 3 juillet 1978 ne prévoit aucune obligation générale d’audition préalable avant la notification d’un licenciement, ceci n’empêche pas que, en sa qualité d’autorité administrative, un employeur public soit astreint au respect de règles propres au droit administratif comme le principe général audi alteram partem ou sa mise en œuvre plus précise par arrêté du Conseil communal et que les garanties ainsi offertes à l’agent contractuel par le droit administratif se cumulent avec les droits qu’il puise dans la loi précitée.
Aux termes de la Nouvelle loi communale (art. 92, 1°, et 106), il est par ailleurs interdit à tout membre du Collège des bourgmestre et échevins d’être présent à une délibération sur des objets auxquels il a un intérêt distinct. Il est ainsi exclu que, dans l’hypothèse où le licenciement d’un agent contractuel est motivé par son implication dans un incident survenu entre un échevin et d’autres personnes, cet échevin, ayant un intérêt personnel direct au licenciement dudit agent, assiste à son audition et participe à la délibération à ce sujet.
(NB voir cependant Cass., 16 octobre 2015, n° S.13.0026.N)
Audition et motivation - sanctions - appréciation du préjudice
(Décision commentée)
Absence d’audition et de motivation de la rupture – dommages et intérêts pour préjudice matériel et moral
(Décision commentée)
Absence d’audition – sanctions
(Décision commentée)
Réparation du préjudice consécutif à l’absence d’audition préalable au licenciement
Inapplication du principe « audi alteram partem » à la rupture pour motif grave d’un contractuel dans la fonction publique
Audition et motivation - sanction - appréciation du préjudice, étant la perte d’une chance de conserver son emploi
Absence d’audition et de motivation - perte d’une chance de conserver son emploi - 12.500 €
La STIB, disposant d’un pouvoir de décision unilatérale, est une autorité administrative soumise à l’obligation d’audition préalable
Une partie importante de la jurisprudence accepte de longue date que l’absence d’audition préalable par l’employeur du secteur public peut donner lieu à l’octroi de dommages et intérêts compensant d’éventuels dommages subis (jurisprudence confirmée par la Cour constitutionnelle dans son arrêt du 6 juillet 2017, n° 86/2017). L’octroi de dommages et intérêts n’est cependant pas automatique, l’obligation d’audition préalable (et de motivation) ayant pour but de permettre à l’autorité de prendre sa décision en connaissance de cause, de manière réfléchie et impartiale. Cette audition préalable doit également offrir à l’administré une chance d’infléchir la décision envisagée.
On peut inférer des arrêts rendus en la matière par la Cour constitutionnelle (voy. ci-dessus) que l’obligation d’audition préalable s’impose uniquement lorsque l’autorité envisage de licencier un agent contractuel en raison de son comportement ou de sa personne, l’objectif étant que l’intéressé puisse faire valoir ses moyens de défense par rapport à ce qui lui est reproché et obtienne une chance de conserver son emploi. Elle n’a, en revanche, aucun sens dès lors que le motif du licenciement est une restructuration puisqu’il n’est, en ce cas, rien reproché au travailleur.
(Décision commentée)
L’enseignement de l’arrêt de cassation du 10 juin 2005 (n° C.04.0278.N) que la Cour a rendu en matière de marché public est transposable aux relations existantes entre une société de logement social et son personnel. Il est, en effet, inconcevable qu’une société de logement social puisse être considérée comme une autorité administrative lorsqu’elle prend une décision à l’égard de son personnel si elle ne l’est pas à l’égard de tiers à son administration. Aucune obligation d’audition préalable du travailleur licencié ne peut dès lors lui être imposée.
Le principe audi alteram partem se veut garantir une sorte de « présomption d’innocence ». En prenant une décision sans avoir entendu le travailleur contractuel, l’administration communale employeur l’a ainsi privé de ses droits de défense. A tout le moins, elle a soumis ceux-ci à une nouvelle exigence : apporter des éléments manifestes permettant d’être innocenté. Le dommage subi sera évalué en tant que perte d’une chance de conserver son emploi et, par voie de conséquence, la rémunération afférente. Il est évalué en l’espèce ex aequo et bono à 5.000 euros.
(Décision commentée)
Le principe d’audition préalable n’est pas absolu et l’administration peut passer outre cette formalité lorsqu’elle est inutile ou lorsque l’urgence de la situation le requiert. Ces circonstances ne sont cependant nullement établies en l’espèce et une faute a dès lors été commise. Pour ce qui est du dommage, si la Commune estime que, vu ses manquements, l’intéressée aurait de toute façon perdu son emploi, le tribunal retient que les critiques qui lui étaient faites concernaient un poste mais non une autre fonction, qu’elle aurait néanmoins pu occuper. Il y a dès lors dommage matériel distinct de la perte de l’emploi, dommage fixé à 2.500 euros ex aequo et bono.
En refusant de postposer l’audition du travailleur jusqu’à ce qu’il soit en mesure d’y faire psychologiquement face, l’employeur le prive d’une chance de conserver son emploi. Ce refus ne peut, en toute hypothèse, être légitimé par l’incapacité de travail de l’intéressé, les sorties étant, du reste, autorisées, alors même que la cause de cette incapacité est l’état de stress du travailleur qui l’empêchait d’affronter sereinement cette audition.
Cette précipitation à procéder au licenciement sans audition est d’autant plus suspecte que la décision ne présentait aucun degré d’urgence, le contrat étant légalement suspendu. Certes, l’employeur était tenu de payer le salaire garanti, mais ce désagrément temporaire (puisque limité à un mois) est sans commune mesure avec le préjudice encouru par le travailleur en ayant perdu une chance de présenter des moyens qui auraient pu déboucher sur une autre décision. Le tribunal alloue 12.500 € au titre de dommage matériel et le même montant pour le dommage moral.
(Réformé par C. trav. Bruxelles, 26 septembre 2022, R.G. 2019/AB/473)
Ne peut être considéré comme ayant perdu une chance de conserver son emploi s’il avait été entendu, le travailleur dont le parcours professionnel et le dossier disciplinaire font apparaître que, même avec audition préalable, il aurait, en tout état de cause, fait l’objet d’un licenciement.
(Décision commentée)
S’agissant d’un membre du personnel contractuel dans le secteur public, le licenciement abusif, dans la théorie générale, peut se manifester notamment par les circonstances entourant celui-ci, par le détournement du droit de sa finalité, ou encore par l’intention de nuire.
Ces règles doivent être combinées avec celles de la C.C.T. n° 109, et ce vu la jurisprudence de la Cour constitutionnelle, qui a estimé que les juridictions doivent garantir les droits de tous les travailleurs du secteur public en cas de licenciement manifestement déraisonnable en s’inspirant, le cas échéant, de celle-ci.
L’autorité a l’obligation de procéder à l’audition du travailleur avant de le licencier. Il s’agit d’un principe général. Il en découle que l’audition doit être effective. L’absence de cette formalité peut causer un sentiment d’injustice et entraîner un dommage moral.
L’arrêt de la Cour de cassation du 12 octobre 2015 statue dans le secteur public sur la base des principes de droit administratif, et ce au regard des moyens développés à l’appui du pourvoi. Il n’évoque aucune disposition internationale. Il y a cependant lieu d’avoir égard à l’article 30 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée. L’approche du tribunal – quel que soit le secteur, public ou privé – est indépendante du droit administratif et règle toute question liée aux principes d’égalité et de non-discrimination dès lors qu’elle s’impose à tous les employeurs du secteur public et du secteur privé, outre le fait qu’elle place des travailleurs contractuels sur le même pied d’égalité que les agents statutaires qui bénéficient de ce préalable en application du droit administratif.
(Décision commentée)
L’arrêt de la Cour de cassation du 12 octobre 2015 n’a pas mis fin à la controverse relative à la motivation du licenciement des contractuels du secteur public, l’arrêt pouvant être interprété comme n’excluant pas l’application du principe d’audition préalable à ceux-ci. Une différence de traitement prohibée par le principe d’égalité des articles 10 et 11 de la Constitution peut subsister entre agents (statutaires et contractuels). Aussi, y a-t-il lieu d’interroger la Cour constitutionnelle, deux questions étant posées, toutes deux fondées sur les articles 32, 3° et 37, § 1er, de la loi du 3 juillet 1978. La première question vise la constitutionnalité de la différence de traitement entre le travailleur contractuel et le travailleur statutaire (pour qui s’applique l’adage « audi alteram partem »). Le même contrôle de constitutionnalité est demandé sur la question de l’audition préalable au licenciement.
(Décision commentée)
Sanction de l’absence d’audition préalable dans le cadre d’un travailleur sous contrat « article 60 »
STIB - renvoi à C.E., 31 août 1994 (arrêt n° 48.829)
La violation de l’obligation d’audition préalable n’a pour effet ni la nullité du congé ni l’ouverture automatique du droit à une indemnité compensatoire de préavis - elle ouvre, le cas échéant, le droit à des dommages et intérêts
Le principe général audi alteram partem ne requiert pas que l’audition de l’agent envers qui une mesure grave est envisagée se déroule nécessairement devant l’autorité compétente pour adopter la décision finale. En annulant la décision de licenciement d’un travailleur contractuel d’une commune au seul motif que l’audition de celui-ci n’a pas été faite par le collège communal mais par le directeur général et, partant, méconnaîtrait le principe général audi alteram partem, l’acte attaqué viole ledit principe général et ne repose pas sur une motivation adéquate.