S’il paraît évident que de simples négligences ne peuvent justifier un licenciement pour motif grave, il en va bien évidemment autrement si le travailleur refuse de faire preuve de responsabilité professionnelle en faisant amende honorable et reproduit quelque temps plus tard le même comportement que celui qui fut dénoncé aux termes d’un avertissement sévère, de telle sorte que les manquements dont il s’est rendu coupable traduisent en réalité une désinvolture délibérée dans son chef constitutive d’un motif grave. Ainsi, pour un employé d’une société spécialisée dans la vente de produits alimentaires dans la grande distribution, si des manquements sont constatés par rapport au respect de règles d’hygiène et une désinvolture ainsi qu’un refus caractérisé d’effectuer le travail confié.
Méconnaît l’obligation de respect du secret professionnel qui lui incombait par application de l’article 458 du Code pénal le brancardier ayant évoqué devant certains collègues la présence au sein de l’institution hospitalière qui l’occupe de patients atteints ou suspectés d’être atteints de la Covid-19. En révélant ainsi des informations ayant vocation à rester confidentielles et qui lui avaient été confiées ou dont il avait pris connaissance du fait de sa profession, il a commis une faute de nature à semer une forme d’émoi au sein de la clinique et à faire naître des doutes sur sa communication officielle, ce qui est assurément dommageable mais, pour autant, n’est pas de nature à rendre toute collaboration professionnelle définitivement impossible.
Ainsi, aucune information à caractère personnel n’a été communiquée et n’a lésé de patients dont la protection est la raison d’être du secret médical. Par ailleurs, il n’est pas démontré que les conséquences potentielles évoquées par son employeur en termes de panique au sein du personnel ou de perte de crédibilité se seraient concrètement réalisées. Rien ne montre non plus que l’intéressé ait été animé d’une intention de nuire. Tout au plus a-t-il agi de manière légère et imprudente, ce qui est évidemment regrettable dans une situation sanitaire critique mais, pour partie, explicable dans ce contexte anxiogène.
Le fait de tenir des propos pouvant être perçus comme intimidants au cours d’une discussion à forte charge émotionnelle avec sa supérieure hiérarchique est sans doute inapproprié, mais non de nature à rendre la poursuite des relations de travail immédiatement et définitivement impossible.
Comportement non collégial - manquement de nature à entraîner la rupture mais n’empêche pas la poursuite des relations comme motif grave
Comportement qui « dépasse les limites » mais ne rend pas la collaboration professionnelle immédiatement et totalement impossible
Comportement ne constituant pas nécessairement un motif grave
La tenue de propos inappropriés envers une cliente de l’entreprise est, assurément fautive et inacceptable, comme le sont, du reste, la réponse apportée en l’espèce par leur auteur lors de son audition par les services de police suite à la plainte pénale déposée à son encontre par l’intéressée ainsi que son absence de prise de conscience de l’inadéquation de certains de ses comportements.
Un brancardier, tenu au secret professionnel et par un devoir de discrétion, commet, certes, une faute en évoquant, devant collègues, des cas de suspicion de covid-19 dans la clinique où il travaille. Cette faute n’est toutefois pas de nature à justifier son licenciement immédiat dès lors que les propos qu’il a tenus, sans fournir aucun nom de malades et sans intention d’engendrer un état de panique, l’ont été dans un contexte de stress généralisé justifié par la pandémie exceptionnelle traversée.
Le fait de modifier les commentaires de résultats d’analyse (et non les résultats eux-mêmes) après validation technique par un collègue (mais avant validation médicale par les médecins/pharmaciens biologistes attachés au laboratoire de biologie clinique) ne présente pas le seuil de gravité requis pour justifier un licenciement sur-le-champ étant donné qu’une telle modification n’est pas susceptible d’orienter le choix thérapeutique de la prise en charge d’un patient, sauf à considérer - ce qui n’est pas plausible - que les médecins et/ou les pharmaciens biologistes, responsables de la validation médicale, se contentent de lire les commentaires du technologue sans lire l’ensemble des résultats chiffrés.
Il en va de même des modifications de pure forme (ponctuation, inversion dans l’ordre des phrases, majuscules devenues des minuscules) apportées, après validation médicale, dans les commentaires encodés par un collègue, lesquelles ne sont pas davantage de nature à influencer le choix thérapeutique de la prise en charge du patient.
Il appartient à l’employeur de mettre au point des procédures de sécurité en adéquation avec les horaires de travail de son personnel et de désigner nommément les personnes qui peuvent avoir accès au coffre et, par conséquent, disposer du code d’ouverture de celui-ci.
S’il ne l’a pas fait, il ne peut, même si ce comportement peut, a priori, sembler blâmable, reprocher à la gérante, empêchée d’être présente à chaque ouverture ou fermeture du magasin en raison de son horaire de travail, d’avoir elle-même pris les dispositions utiles pour que d’autres personnes disposent de ce code pour pouvoir y déposer le contenu des caisses journalières. Eu égard à ce même horaire, il est également mal venu de reprocher à l’intéressée de n’avoir pas vérifié le sac de ses collègues à chaque ouverture/fermeture du magasin.
Suite de Trib. trav. Liège (div. Liège), 26 octobre 2015, R.G. 15/1.880/A