Commentaire de Trib. trav. Liège (div. Liège), 24 septembre 2019, R.G. 16/1.082/A
Mis en ligne le 13 mars 2020
Commentaire de Trib. trav. Liège (div. Namur), 26 mars 2019, R.G. 17/1.199/A
Mis en ligne le 14 octobre 2019
Commentaire de Trib. trav. Liège (div. Dinant), 19 décembre 2016, R.G. 15/743/A
Mis en ligne le 15 juin 2017
Pour que le licenciement ne soit pas manifestement déraisonnable, il faut, en vertu de l’article 8 de la convention collective de travail n° 109 du 12 février 2014, non seulement que le motif soit en lien avec l’aptitude, la conduite du travailleur ou les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service, mais également qu’il ne s’agisse pas d’une décision qui n’aurait jamais été prise par un employeur normal et raisonnable.
En l’espèce, il s’agit d’un licenciement opéré dans l’intérêt de l’entreprise, la travailleuse licenciée ayant une personnalité « peu encline au consensus » et ayant manifesté sa volonté de quitter celle-ci (étude notariale). Est en outre démontré dans son chef un manque de motivation pour suivre une formation permanente – indispensable aux yeux de l’employeur vu la fonction exercée. Aussi, la cour considère-t-elle que l’employeur n’a pas exercé son droit de manière imprudente et disproportionnée (contrôle marginal).
Un employeur normalement prudent et diligent confronté à un premier manquement ne peut, compte tenu de l’ancienneté du travailleur et de son attitude transparente à son égard, s’orienter vers un licenciement, qui plus est s’il ne peut formuler aucun grief concret à son encontre.
Statue dans le même sens que Trib. trav. Liège (div. Dinant), 20 mars 2017, R.G. 15/1.317/A ci-dessous quant à la manière dont il y a lieu de lire et d’interpréter l’article 8 de la C.C.T. n° 109.
Le fait que d’autres solutions qu’un licenciement aient pu être envisagées, mais n’aient finalement pas été retenues, ne donne pas à la mesure prise un caractère manifestement déraisonnable, l’employeur restant libre de licencier pour autant qu’il ne détourne pas ce droit de son exercice normal.
N’agit pas de manière imprudente et disproportionnée l’employeur qui se sépare d’un travailleur ne présentant plus le profil requis pour travailler de manière sereine en équipe.
Le motif invoqué doit être légitime, valable et raisonnable. Cet examen passe par celui de la proportionnalité de la mesure aux circonstances de la cause.
Si le travailleur a demandé et reçu la motivation du licenciement, un partage de la charge de la preuve s’installe, l’employeur devant démontrer la véracité des motifs invoqués et le travailleur le caractère manifestement déraisonnable de ceux-ci.
Dès lors que l’employeur fait valoir la dégradation progressive de la relation du fait de la personnalité de l’intéressé et son hostilité à une nouvelle organisation de l’entreprise, la thèse de l’employeur est crédible, les éléments relatifs à la personnalité de l’intéressé étant de nature à justifier un licenciement raisonnable. Ceci sauf si le demandeur apportait la preuve d’un détournement de ce licenciement de sa finalité économique, notamment au titre de représailles – ce qu’il ne fait pas. L’employeur a satisfait à la part de la charge de la preuve qui lui incombe, tandis que le requérant ne rapporte pas la preuve du caractère déraisonnable du licenciement, et ce notamment par interposition de motifs.
(Décision commentée)
Le contrôle judiciaire porte sur la légalité du motif invoqué, sa réalité et le lien de causalité nécessaire entre celui-ci et le licenciement. Juge des nécessités de l’entreprise, de sa gestion et de la valeur des travailleurs, l’employeur demeure libre de licencier, le tribunal ayant un contrôle marginal de légalité et non un contrôle d’opportunité. Le choix ne peut cependant relever de l’arbitraire. Dans son examen, le juge doit respecter également un principe de proportionnalité dans l’appréciation du motif, et ce eu égard à la jurisprudence de la Cour de cassation rendue à propos de l’ancien article 63 L.C.T. En d’autres termes, le motif doit être légitime, valable et raisonnable.
Sur la base de son libellé, lu strictement, l’application de l’article 8 de la CCT n° 109 suppose deux conditions cumulatives : (1) un motif sans lien avec l’aptitude, la conduite ou les nécessités de l’entreprise ; (2) une décision que n’aurait pas prise un employeur normal et prudent, ce dont contradiction avec son commentaire, mais encore conflit avec l’article 23 de la Constitution consacrant le principe de standstill, dès lors que la conjonction de coordination « et » qui y a été introduite revient à vider de sa substance la protection reconnue par l’ancien article 63 LCT tel qu’interprété par la Cour de cassation.
Une lecture de la CCT sous forme positive est néanmoins possible consistant à retenir qu’un licenciement est régulier s’il se base sur un motif en lien avec l’aptitude, la conduite ou les nécessités de fonctionnement et si la décision de licencier aurait été prise par un employeur normal et prudent.
En cela, elle rejoint le contenu de l’ancien article 63 LCT et se trouve être la seule admissible au regard tant de l’article 23 précité, que de l’article 30 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE et des l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée (Dans le même sens : Trib. trav. Liège (div. Dinant), 20 mars 2017, R.G. 16/276/A (bis) ; id. 2 juin 2017, R.G. 16/531/A.)
(Décision commentée)
Les motifs visés par la Convention collective de travail n° 109 étant ceux de l’ancien article 63 de la loi du 3 juillet 1978, il faut examiner ceux-ci à la lumière des deux arrêts de cassation rendus le 27 septembre 2010 (n° S.09.0088.F) et le 22 novembre 2010 (n° S.09.0092.N), arrêts qui ont introduit un principe de proportionnalité dans l’appréciation du motif invoqué à l’appui du licenciement. C’est celui-ci que le juge doit vérifier, ce contrôle ne portant pas sur l’opportunité de la rupture.