Commentaire de C. trav. Bruxelles, 21 février 2019, R.G. 2018/AB/1.048
Mis en ligne le 30 janvier 2020
Si le juge doit tenir compte de l’ensemble des faits et circonstances visés à l’article 4, § 1er, de la loi du 19 mars 1991, ainsi que de faits antérieurs repris dans cette lettre comme éclairant les faits ou constituant des circonstances aggravantes, ni l’article 4 ni l’article 7 de la loi ne lui permettent de prendre en compte, dans l’appréciation du fait susceptible d’entraîner le licenciement sans préavis, des faits et circonstances qui n’ont pas été mentionnés dans la lettre visée à l’article 4, § 1er, au titre de faits antérieurs susceptibles d’éclairer les faits en cause ou de constituer des circonstances aggravantes.
(Décision commentée)
Les faits constitutifs de motif grave ne peuvent être liés à l’exercice du mandat de délégué du personnel. Il s’agit des faits liés à l’exercice du mandat de délégué d’une manière conforme à la loi. Des actes fautifs qui empêcheraient immédiatement et définitivement la poursuite des relations professionnelles ne sont pas couverts, ne relevant pas de l’exercice par le délégué de son mandat d’une manière conforme à la loi. Ils peuvent aboutir à un licenciement pour motif grave même s’ils ont été commis à l’occasion de l’exercice du mandat.
N’est pas fautif le fait que le travailleur ait participé à diverses réunions auprès d’une société externe pour le compte de son organisation syndicale, dont une réunion relative à l’examen des comptes annuels. En outre, les démarches effectuées auprès de cette société pour soutenir deux travailleurs de l’entreprise ne sont pas nécessairement fautives à l’égard de l’employeur, étant étrangères à la relation de travail avec celui-ci.
L’article 4, § 3, de la loi du 19 mars 1991 impose à l’employeur de faire mention, dans les lettres recommandées par lesquelles il informe le travailleur protégé et l’organisation syndicale qui l’a présenté de son intention de licenciement, de tous les faits dont il estime qu’ils rendraient toute collaboration professionnelle définitivement impossible.
En vertu de son article 7, dans la seconde phase de la procédure, la citation doit mentionner le motif qui justifie la demande. Les faits invoqués ne peuvent être différents de ceux qui ont été notifiés en application de l’article 4. Aucun autre motif ne pourra être soumis à la juridiction du travail.
La notification du motif invoqué à l’appui de l’intention doit être précise afin de permettre au travailleur et à son organisation syndicale d’en connaître et, ensuite, au juge de s’assurer que les motifs plaidés devant lui sont bien ceux qui ont donné lieu à la notification. Des appréciations sur un comportement ou une accusation générale ne sont pas des faits précis.
Uniquement les faits repris dans la lettre de demande d’autorisation de licencier - non prise en compte d’autres faits
Dans le cadre de la loi du 19 mars 1991, la notion fondamentale de motif grave s’apparente clairement à celle développée par l’article 35 L.C.T., avec toutefois la limite spécifique que prévoit son article 4, § 3, étant que les faits reprochés ne peuvent être liés à l’exercice du mandat de délégué, ce pour autant que ces faits rentrent dans l’exercice normal de ce mandat que le travailleur protégé est tenu d’exercer en « bon père de famille ».
Tel n’est pas le cas lorsque, dans le cadre d’un mouvement « sauvage » initié par lui seul, l’intéressé empêche collègues et fournisseurs d’accéder à l’entreprise, sinon en passant sur un terrain privé, dont l’accès n’est possible que dans des contextes d’urgence (incendie, évacuation, etc.).