Commentaire de C. trav. Bruxelles, 15 mars 2017, R.G. 2015/AB/208
Mis en ligne le 15 juin 2017
Si le fait de désactiver le badge d’accès du travailleur aux locaux de l’entreprise sans l’en informer au préalable est évidemment regrettable, il ne suffit pas à conférer au licenciement de l’intéressé un caractère abusif en ce que ce comportement témoignerait d’un manquement aux égards élémentaires que se doivent les parties au contrat ou serait contraire au principe de l’exécution de bonne foi de celui-ci.
Reste en défaut de faire preuve de respect et d’égards à l’adresse d’un de ses agents contractuels mais, au contraire, adopte une attitude humiliante et vexatoire envers lui la commune qui, tout en offrant à l’intéressé la possibilité de se faire assister par un conseil à l’occasion d’une entrevue destinée à débattre des problèmes de collaboration professionnelle préalablement à un éventuel licenciement, empêche, dans les faits, volontairement qu’il puisse présenter ses moyens de défense en lui imposant une confrontation sans lui permettre de disposer de son dossier administratif et de l’assistance de son conseil.
Recruter un travailleur pour un projet qui, à ce moment, n’a pas de véritable consistance et ne connaîtra pas de début de concrétisation entre ce recrutement, assorti d’une invitation à se dégager de toute autre obligation professionnelle pour une date donnée, et le licenciement - intervenu peu avant cette échéance -, témoigne d’un manque d’égard dont tout employeur normalement prudent et diligent se serait abstenu.
Étant propres à ce mode de rupture, qui implique le départ du travailleur de la société lors de la notification du congé et la restitution de l’ensemble des biens et documents en sa possession appartenant à la société, les circonstances dans lesquelles intervient un licenciement avec effet immédiat moyennant paiement d’une indemnité compensatoire de préavis ne permettent pas de conclure à la nature vexatoire et abusive de celui-ci, ce quand bien-même les collègues de l’intéressé ont pu croire à un licenciement pour motif grave.
(Décision commentée)
Des dommages et intérêts peuvent être cumulés avec l’indemnité prévue à l’article 63, si le licenciement est intervenu dans des circonstances peu respectueuses de la personne du travailleur. Il s’agit d’une réparation fondée sur la théorie civiliste de l’abus de droit et ils peuvent être alloués eu égard au procédé et à la manière utilisés pour licencier (la cour précisant que ceux-ci ont en l’espèce provoqué un choc émotionnel et moral chez l’intéressée, déjà fragilisée par un faible niveau de qualification ainsi que par de longues périodes sans travail). L’employeur n’a pas eu le comportement qu’il aurait dû avoir, dans la mesure où il s’est fondé sur l’exposé des faits de l’utilisateur pour congédier l’ouvrière sans préavis ni indemnité le jour où celui-ci estimait ne plus avoir besoin d’elle.
Le fait de ne pas hésiter à licencier un travailleur par téléphone, sans réunion préalable et alors même que l’intéressé est en incapacité, en réduisant ainsi ses chances de retrouver rapidement un emploi dans le contexte sanitaire lié au Covid-19, démontre un manque de prise en considération de la dimension humaine du pouvoir de licencier et le caractère abusif de son exercice.
En procédant au licenciement d’un travailleur en période d’incapacité de travail, l’employeur se rend coupable d’un manque de respect et de reconnaissance d’autant plus flagrant que l’intéressé, qui disposait d’une ancienneté importante, marquée par l’absence d’avertissements ou de blâmes et l’obtention de résultats de qualité, n’a fait l’objet d’aucune audition préalablement à la prise de cette décision.