Si le travailleur poursuit l’exécution du contrat de travail après avoir constaté la rupture sur le champ de celui-ci du fait d’une modification unilatérale d’une condition essentielle, ceci peut signifier que ce faisant il a renoncé à se prévaloir de la rupture irrégulière à charge de l’employeur et qu’il y a accord tacite sur les nouvelles conditions de travail. La renonciation tacite ne peut se présumer et ne peut être déduite que de faits qui ne peuvent faire l’objet d’une autre interprétation.
N’a pas manifesté tacitement son accord sur la modification du système de commissionnement le travailleur qui, s’il a continué à travailler pendant trois ans après cette modification, n’a, durant ce temps, cessé de contester celle-ci, en particulier la suppression de sa commission trimestrielle, de manière claire et répétée, le fait qu’il n’ait pas agi plus tôt en justice pouvant s’expliquer par de nombreuses raisons, dont la crainte de perdre son emploi avec probabilité élevée de ne pas en retrouver un autre eu égard à son âge.
A partir du moment où le travailleur a refusé de signer l’avenant réduisant la durée hebdomadaire de ses prestations et a réclamé le respect de ses heures contractuelles (ou, si cela s’avérait impossible, sa mise en chômage économique), le fait qu’il ait ultérieurement continué à effectuer ses prestations de travail, sans acter un acte équipollent à rupture dans le chef de son employeur, ne constitue pas une preuve suffisante de ce qu’il aurait finalement marqué son accord sur cette réduction et renoncé à réclamer la réparation du dommage en lien de causalité avec la faute liée à cette diminution.
Lorsque la décision de l’employeur est définitive, le travailleur est tenu de réagir immédiatement ou après un bref temps de réflexion, de mettre un terme au contrat pour motif grave ou encore d’arrêter les prestations de travail. S’il continue à prester pendant quelques mois encore, ceci peut être considéré comme une acceptation tacite de la modification des conditions de travail. Lorsque l’employeur modifie unilatéralement les conditions essentielles du contrat, la poursuite des prestations par le travailleur pendant une période plus longue que ce qui est nécessaire pour prendre attitude peut en effet impliquer qu’il renonce à se prévaloir de la modification unilatérale intervenue, et ce même si la poursuite des prestations de travail s’accompagne de la formulation de réserves.
Lorsqu’un employeur a modifié unilatéralement les éléments essentiels du contrat de travail, la poursuite des prestations de travail par l’employé au-delà du délai nécessaire pour prendre attitude au sujet de la conclusion éventuelle d’un nouveau contrat peut, fût-elle accompagnée de réserves, impliquer renonciation à invoquer la rupture imputable à l’employeur et accord tacite sur les nouvelles conditions de travail (avec renvoi à Cass., 17 février 2002, n° S.99.0144.F).
Le travailleur confronté à une modification unilatérale de son contrat de travail peut accorder à son employeur un délai pour régulariser la situation, auquel cas il ne peut, dans le cours de celui-ci, invoquer la rupture imputable à l’employeur. Il peut également, pour la constater, attendre d’avoir examiné si les faits reprochés constituent une rupture irrégulière ou à partir de quel moment ils le deviennent. Poursuivre, même en formulant des réserves, l’exécution du contrat au-delà du délai nécessaire pour prendre attitude équivaut toutefois à une renonciation à invoquer la rupture imputable à l’employeur.
Absence de réaction dans un délai raisonnable : application de la théorie du « rechtsverwerking »
Obligation pour le travailleur de prendre position dans un délai raisonnable - sanction : rupture (volontaire) dans son chef
La poursuite des prestations ou leur reprise dans les nouvelles conditions au-delà du délai nécessaire pour prendre attitude, fussent-elles accompagnées de réserves, peuvent impliquer accord tacite sur les nouvelles conditions