Terralaboris asbl

Dispense


Cass.


C. trav.


Documents joints :

Cass.


  • (Décision commentée)
    La compétence des juridictions du travail fixée par les articles 17 et 22 de l’arrêté royal n° 38 n’est pas une compétence de pleine juridiction, ces dispositions réservant à la Commission des dispenses de cotisations le pouvoir discrétionnaire d’apprécier l’état de besoin du travailleur indépendant.

  • Lorsque la commission des dispenses de cotisations décide de ne pas accorder la dispense demandée et que le travailleur indépendant conteste cette décision, il naît entre celui-ci et l’État belge une contestation sur l’obligation de payer les cotisations sociales, qui résulte des lois et règlements sur le statut social des travailleurs indépendants. En vertu de l’article 581, 1°, du Code judiciaire, cette contestation relève de la compétence matérielle du tribunal du travail et, partant, du pouvoir de juridiction des cours et tribunaux.
    La circonstance que la décision contestée de la commission des dispenses de cotisations est une décision discrétionnaire n’affecte ni l’attribution de la contestation aux juridictions de l’ordre judiciaire ni la compétence, au sein de ces juridictions, du tribunal du travail. La question de l’étendue du contrôle qu’exerce le juge est étrangère à la détermination de sa compétence.

C. trav.


  • (Décision commentée)
    Les travaux préparatoires de la loi du 2 décembre 2018 révèlent la volonté du législateur quant à la transformation des règles en matière d’octroi d’une dispense de cotisation au statut social. Le critère actuel est unique : il faut se trouver dans une situation financière ou économique difficile, les critères précédents (état de besoin ou situation voisine de l’état de besoin) étant considérés comme vagues. Ces travaux préparatoires ont souligné les avantages du nouveau système de dispense, en précisant que le caractère temporaire est essentiel, l’objectif n’étant pas que les indépendants introduisent une demande chaque année. L’aide accordée par l’octroi de la dispense doit être ponctuelle, s’agissant de permettre au travailleur indépendant de faire face à de grosses difficultés, quelle que soit l’importance de ses revenus professionnels. Il est par ailleurs souligné que la constitution d’un patrimoine immobilier ne peut se faire au détriment du paiement des cotisations sociales. Le nouveau système est un « changement de paradigme », dans lequel l’accent est mis sur des difficultés imprévues.

  • (Décision commentée)
    En cas de recours contre une décision de la Commission des dispenses de cotisations, les tribunaux du travail n’ont pas de compétence de pleine juridiction, ne pouvant se substituer à la Commission, mais ils peuvent, dans le cadre de leur contrôle de légalité, dire si la motivation de la décision répond aux conditions de la loi du 29 juillet 1991 sur la motivation formelle des actes administratifs.
    Dès lors que la décision administrative ne reprend pas expressément l’énumération exhaustive des charges du demandeur mais qu’elle a procédé à un examen correct de sa situation économique et qu’au vu de celui-ci et mettant en balance les revenus et charges pour l’ensemble de la période considérée elle a conclu qu’il n’était pas en mesure de supporter la totalité de sa dette, justifiant ainsi une dispense partielle, la motivation peut être considérée suffisante.

  • Constitue une motivation suffisante, permettant au destinataire de la décision de comprendre en quoi les éléments sur lesquels elle se fonde ont amené la CDC à conclure à l’absence d’état de besoin, celle qui, bien que ne mentionnant pas de manière explicite le montant des dettes fiscales, précise que ces dernières résultent directement des revenus promérités au cours des années auxquelles elle se réfère, indiquant par là à suffisance que ces dettes pouvaient être anticipées et n’étaient pas exceptionnelles, de sorte que, à première vue, elles n’ont pu être à l’origine d’un état de besoin.
    Ne rend, par ailleurs, pas la motivation inadéquate le fait que la Commission évalue l’état de besoin à l’aune du montant du revenu d’intégration sociale. Même si ce dernier n’a qu’une valeur indicative, il n’en fournit pas moins une référence qui ne manque pas de pertinence.

  • Pour être adéquatement motivée, la décision de la Commission de dispense doit se prononcer non seulement au regard des revenus du demandeur ─ et préciser leur montant, faute de quoi on ne peut savoir, à sa lecture, pourquoi l’état de besoin ou la situation proche de l’état de besoin ne peuvent être reconnus ─, mais aussi des charges supportées par l’intéressé et les membres de son ménage. C’est, en effet, de l’insuffisance des revenus par rapport aux charges qu’est susceptible de naître un état de besoin ou proche de l’état de besoin.

  • L’état de besoin (ou la situation voisine de l’état de besoin), qui justifie une éventuelle dispense de cotisations, est nécessairement lié aux revenus du travailleur indépendant concerné. Dès lors, une décision de la CDC qui se limite à faire référence aux revenus de l’intéressé, sans autre précision ou indication des éléments concrets sur lesquels elle se base, étant les éléments de fait qui l’ont amenée à refuser la dispense, ne peut être considérée comme motivée au sens des articles 2 et 3 de la loi sur la motivation formelle des actes administratifs.

  • (Décision commentée)
    Lorsque la Commission de dispense des cotisations décide de ne pas accorder la dispense demandée et que le travailleur conteste cette décision, il naît entre lui et l’Etat belge une contestation sur l’obligation de payer les cotisations sociales. Celles-ci relèvent de la compétence matérielle du tribunal du travail.
    La décision rendue ne répond pas aux exigences de motivation au sens de la loi du 29 juillet 1991 dès lors qu’elle est vague et stéréotypée et ne permet pas de comprendre de manière concrète sur la base de quels éléments et au regard de quels critères la décision a été prise.

  • A défaut de règles spécifiques de prescription ou de forclusion, une demande en contestation des décisions de la CDC pouvait, auparavant, être formée dans les 10 ans suivant leur notification. Depuis la loi du 25 avril 2014 portant des dispositions diverses en matière de sécurité sociale, la règle a été modifiée, la requête auprès du tribunal du travail devant, sous peine de déchéance, être introduite dans les 2 mois de la notification de la décision. En vertu de la jurisprudence de la Cour de cassation, la loi nouvelle s’applique immédiatement. Cependant, lorsqu’elle réduit la durée d’une prescription en cours, la prescription réduite commence à courir du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder le délai prévu par la loi antérieure.

  • La décision de la CDC doit permettre de comprendre pourquoi la dispense a été accordée pour certains trimestres et refusée pour d’autres. Il ne peut être admis qu’une même motivation puisse justifier « tout et son contraire ». Il ne peut davantage être fait une distinction entre une situation « proche de l’état de besoin », pour laquelle la dispense ne devrait être accordée que pour certains trimestres, et celle de « état de besoin », pour laquelle la dispense devrait être totale.

  • Une décision de la CDC prise sur la base d’une motivation stéréotypée ne permet pas de savoir pourquoi il y a refus de dispense pour un nombre important de trimestres, la référence à des « difficultés financières non négligeables » pouvant difficilement asseoir une décision de refus de dispense. Le caractère inadéquat de la motivation peut également ressortir de l’absence de référence aux charges supportées par le travailleur indépendant (avec renvoi à C.E. du 24 avril 2012, n° 219.016).

  • Les décisions de la Commission de dispense de cotisations doivent être motivées et cette motivation doit être adéquate. Ceci signifie que les raisons invoquées doivent être suffisantes pour justifier la décision. Ne répond pas à cette exigence une indication selon laquelle les faits invoqués sont anciens et auraient déjà été pris en compte dans des décisions antérieures. Une telle motivation ne permet d’ailleurs pas de savoir pourquoi les éléments invoqués par l’intéressé ne pouvaient justifier la dispense.
    Une décision n’est pas adéquatement motivée lorsqu’elle ne permet pas de s’assurer que la Commission a bien tenu compte des charges (du ménage) du requérant, ni a fortiori de comprendre les motifs pour lesquels de telles charges n’ont pas pu être mises dans la balance à effectuer avec les ressources du ménage, compte tenu de la composition de celui-ci (avec renvoi à C.E., n° 2019.016 du 24 avril 2012).

  • Preuve de la situation voisine de l’état de besoin – non constituée par le constat d’un endettement limité au loyer et au remboursement d’un prêt hypothécaire pour l’acquisition de deux immeubles

  • Condition d’octroi – introduction dans les 12 mois qui suivent l’avis de régularisation – cas d’espèce

Trib. trav.


  • Le contrôle de légalité se double d’un contrôle portant sur le caractère raisonnable et non arbitraire de l’appréciation de l’autorité administrative. Lorsque le tribunal est saisi d’un recours relevant de la compétence discrétionnaire de l’autorité, il lui est loisible d’annuler la décision mais il ne peut substituer à la décision litigieuse sa propre décision.

  • Les tribunaux du travail, compétents sur la base de l’article 580, 1°, du Code judiciaire, ne peuvent exercer un contrôle de pleine juridiction mais un contrôle de légalité interne et externe. Le contrôle de légalité interne implique que le juge doit vérifier l’exactitude des faits sur lesquels repose la décision, l’exactitude de la qualification juridique de ceux-ci et l’existence d’un examen sérieux du dossier. Le contrôle de légalité externe implique celui du respect de la loi du 29 juillet 1991, de la compétence de l’auteur de l’acte, du respect des procédures ainsi que de celui des principes de bonne administration.

  • Les références aux données relatives aux revenus de la partie demanderesse, aux difficultés financières non négligeables que celle-ci éprouvait lorsque la commission des dispenses de cotisations a adopté la décision litigieuse et la présence de « quelques autres éléments dans le dossier démontrant la situation actuelle proche de l’état de besoin » ne satisfont pas aux exigences de la loi du 29 juillet 1991. Cette motivation ne permet pas de comprendre en quoi ces éléments ont amené la commission à considérer que la partie demanderesse était dans une situation proche de l’état de besoin justifiant que la dispense des cotisations afférentes à une partie de la période lui soit accordée mais que le bénéfice de pareille mesure ne lui soit pas reconnu pour les autres cotisations qui font l’objet de la demande.

  • La référence aux données relatives aux revenus du demandeur, aux difficultés financières qu’il éprouvait au moment où la CDC a adopté sa décision et à la présence de « quelques autres éléments dans le dossier démontrant la situation actuelle proche de l’état de besoin de l’intéressé » ne satisfait pas aux exigences de la loi du 29 juillet 1991 en ce qu’elle ne permet pas de comprendre en quoi ces éléments l’ont amenée à ne donner suite à la demande de dispense que pour une partie des trimestres qui faisaient l’objet de celle-ci. Il lui appartient dès lors de reprendre l’instruction administrative de la demande pour ces autres trimestres.

  • La compétence reconnue aux juridictions sociales n’implique pas l’appréciation de la décision discrétionnaire de la Commission des dispenses quant à la dispense ou à la levée de la responsabilité solidaire. Les tribunaux du travail ne peuvent ici exercer un contrôle de pleine juridiction mais un contrôle de légalité interne et externe. Le principe de la séparation des pouvoirs ainsi que celui de l’appréciation discrétionnaire de la Commission s’opposent en effet à ce que les tribunaux du travail se prononcent sur les conditions de la dispense et fassent primer leur appréciation sur celle de la Commission.

  • Les juridictions du travail jouissent en la matière d’un pouvoir d’annulation mais non d’un pouvoir de substitution (l’appel interjeté contre ce jugement a donné lieu à l’arrêt de l Cour du travail de Liège du 11 juillet 2016 ci-dessus).


  • (Décision commentée)
    La Commission est tenue d’apporter la preuve de la légalité de la décision prise. Elle doit conserver pendant un temps raisonnable les documents qui sont le résultat naturel de ses recherches et constatations. Cette obligation fait partie intégrante de l’obligation générale – issue du principe de l’état de droit – dans le chef de l’autorité de prouver la régularité des décisions qu’elle prend. La Commission doit également déposer un dossier administratif.
    S’ajoutent à ces obligations celles de la loi du 29 juillet 1991 sur la motivation formelle des actes administratifs, avec les exigences habituelles pour que la motivation formelle puisse être retenue, dans le respect de l’article 2 de celle-ci.


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