Commentaire de Cass., 9 février 2009, R.G. S.08.0090.F
Mis en ligne le 3 août 2009
Commentaire de C. trav. Liège (div. Liège), 14 octobre 2022, R.G. 2021/AL/552
Mis en ligne le 7 août 2023
Commentaire de C. trav. Liège (div. Namur), 20 novembre 2018, R.G. 2018/AN/26
Mis en ligne le 25 juin 2019
Commentaire de C. trav. Liège (div. Namur), 29 août 2017, R.G. 2016/AN/246
Mis en ligne le 15 janvier 2018
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 28 mars 2013, R.G. 2011/AB/1.109
Mis en ligne le 4 septembre 2013
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 14 avril 2010, R.G. 2009/AB/51.676
Mis en ligne le 21 septembre 2010
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 19 février 2009, R.G. 49.694
Mis en ligne le 18 juin 2009
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 11 décembre 2008, R.G. 50.173
Mis en ligne le 15 juin 2009
Commentaire de C. trav. Bruxelles, 11 octobre 2007, R.G. 44.783
Mis en ligne le 21 mars 2008
Le droit à l’aide sociale naît dès qu’une personne se trouve dans une situation qui ne lui permet pas de vivre conformément à la dignité humaine. Ce droit n’est pas affecté par la circonstance que la personne ne se trouve plus dans une telle situation au moment où le juge statue. L’on ne peut dès lors refuser l’aide sociale pour une période passée au motif que le demandeur ne remplissait plus les conditions pour en bénéficier au moment où le juge a statué.
(Décision commentée)
Le droit à l’aide sociale existe lorsque le demandeur remplit les conditions d’octroi, indépendamment de la date à laquelle il produit la preuve qu’il en réunit les conditions.
Il suit de l’article 1er, alinéa 1er, de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d’action sociale que toute personne a droit à l’aide sociale, qui a pour but de mener une vie conforme à la dignité humaine. Le droit à l’aide sociale naît dès qu’une personne se trouve dans une situation qui ne lui permet pas de vivre conformément à la dignité humaine. Aucune disposition légale ne prévoit que l’aide sociale ne peut pas être rétroactivement accordée à la personne qui y a droit pour la période qui s’est écoulée entre sa demande et la décision judiciaire faisant droit à celle-ci.
Il est de jurisprudence constante que l’aide sociale ne peut, ni directement, ni indirectement servir au remboursement de dettes sauf si le non-paiement de certaines de celles-ci est de nature à empêcher la personne de mener une vie conforme à la dignité humaine. Il incombe dès lors au C.P.A.S. de prendre en charge les dettes du demandeur, fussent-elles nées avant la demande d’aide sociale, mais ceci uniquement si ces dettes font actuellement obstacle à ce que l’intéressé puisse mener une vie conforme à la dignité humaine.
(Décision commentée)
L’article 21, § 5, de la loi du 26 mai 2002 concernant le droit à l’intégration sociale dispose que la décision qui accorde ou majore un revenu d’intégration, intervenue à la suite d’une demande introduite, sort ses effets à la date de réception de cette demande. Il en découle qu’une demande de revenu d’intégration sociale ne peut être introduite pour le passé, une telle demande pouvant cependant faire l’objet d’une aide sociale si les conditions sont remplies. Le critère de l’aide sociale est en effet, en vertu de l’article 1er de la loi du 8 juillet 1976 organique des C.P.A.S., le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine, et ce au regard du paramètre légal, qui est l’état de besoin. Celui-ci est démontré en cas de dettes ou de difficultés relatives aux besoins de base, auxquels le demandeur ne peut faire face par ses propres moyens.
Lorsque l’état de besoin est prouvé pour la période litigieuse passée, il convient d’octroyer des arriérés « globaux » ou (en l’espèce) proportionnés à l’état de besoin démontré, sans limiter le montant à des dettes relatives au passé mais empêchant actuellement une vie conforme à la dignité humaine. Rien ne justifie d’accorder une prime au C.P.A.S. ayant adopté à tort une décision de refus par rapport à celui ayant pris d’emblée une décision d’octroi de l’aide, et il serait particulièrement paradoxal que le droit fondamental à mener une vie conforme à la dignité humaine soit le seul dont la violation ne serait pas susceptible de réparation, et de réparation intégrale, a posteriori.
Il relève des missions du C.P.A.S. d’octroyer l’aide la plus appropriée au moment où elle est demandée. Ainsi, par exemple, l’aide sociale peut être sollicitée et accordée pour apurer des dettes, dont la naissance est nécessairement antérieure à la demande d’aide sociale, lorsque ces dettes empêchent de mener une vie conforme à la dignité humaine.
Il s’agit en l’espèce d’arriérés de frais d’hébergement en institution, la nécessité de vivre en résidence n’étant pas formellement contestée et la cour notant que la dignité humaine de l’intéressé sera davantage préservée dans le cadre d’un hébergement au sein de cet établissement qu’à la rue, où il risque de se retrouver si les frais d’hébergement ne sont pas financièrement pris en charge par le C.P.A.S.
L’article 1er de la loi du 8 juillet 1976 ne prévoit pas que l’aide sociale est accordée pour une période prenant cours à la date de la demande. La Cour constitutionnelle (arrêt du 17 septembre 2003, n° 112/2003) a précisé que le C.P.A.S. peut, dans les limites de sa mission légale, octroyer une aide visant à remédier aux effets encore actuels d’une existence non conforme à la dignité humaine menée précédemment, dans la mesure où ils empêchent l’intéressé de mener désormais une vie conforme à la dignité humaine. La seule question que doit se poser le C.P.A.S. (et le juge après lui) est de savoir si l’aide sollicitée est la plus appropriée et si elle est nécessaire au moment où elle est demandée pour mener une vie conforme à la dignité humaine.
Une situation n’est pas contraire à la dignité humaine lorsque celui qui la connaît a la possibilité d’y remédier lui-même, par ses propres efforts ou en faisant valoir les droits dont il dispose. Si l’octroi d’une aide sociale (financière ou autre) implique de démontrer qu’elle est nécessaire pour mener une vie conforme à la dignité humaine, cette nécessité passée et présente doit être démontrée. Concrètement, elle trouve souvent à s’exprimer sous la forme de dettes diverses ou de recours qui a été fait à des associations ou à des tiers pour survivre. Il n’y a pas d’obstacle de principe à octroyer une aide sociale pour le passé. Il y a dès lors lieu de vérifier si l’intéressé avait besoin d’une sociale et à quelle hauteur.
Lorsque l’état de besoin est prouvé pour la période litigieuse passée, il convient d’octroyer des arriérés d’aide sociale sans limiter le montant à des dettes relatives au passé mais de prendre en compte celles qui empêchent actuellement une vie conforme à la dignité humaine. Pour qu’il puisse être dérogé à l’exigibilité des arriérés, il faudrait qu’existe une règle spéciale autorisant le juge, pour la période de la durée de la procédure, à s’écarter de la norme dont la violation est admise. Une telle règle n’existe pas en la matière.
Rien ne justifie d’octroyer une prime au C.P.A.S. ayant adopté à tort une décision de refus par rapport à celui ayant pris d’emblée une décision d’octroi de l’aide. Il serait particulièrement paradoxal que le droit fondamental à mener une vie conforme à la dignité humaine soit le seul dont la violation ne serait pas susceptible de réparation et de réparation intégrale a posteriori.
(Décision commentée)
Le droit à l’aide sociale est un droit subjectif. Les juridictions du travail ont sur cette question un contrôle de pleine juridiction. Le critère à retenir – et qui est la seule question qui doit se poser au C.P.A.S. et au juge ensuite – est de savoir si l’aide sollicitée est la plus appropriée et si elle est nécessaire au moment où elle est demandée, et ce eu égard au critère de la dignité humaine. En conséquence, rien ne fait obstacle à ce que soit allouée une aide sociale équivalente au revenu d’intégration sociale et aux prestations familiales pour une période antérieure à la demande.
(Décision commentée)
Même lorsqu’elle est de nature financière et récurrente ou qu’elle est équivalente à une autre prestation sociale, l’aide sociale ne doit pas uniquement concerner une période postérieure à la demande adressée au C.P.A.S., comme c’est le cas en matière de revenu d’intégration. La question à vérifier par le C.P.A.S. est de savoir si l’aide sociale sollicitée est la plus appropriée et si elle est nécessaire au moment de la demande pour mener une vie conforme à la dignité humaine. Ainsi, des dettes peuvent empêcher ceci.
Vu l’impossibilité de rétablir purement et simplement, pour le passé, le demandeur d’aide dans des conditions de vie conformes à la dignité humaine, il faut réparer, autant que faire se peut, les conséquences actuelles du manquement passé d’une vie conforme à la dignité humaine. L’intéressé doit dès lors établir en l’espèce qu’il subit actuellement encore les conséquences de la privation de l’aide sociale pour la période passée, en raison par exemple de dettes contractées alors, faisant obstacle actuellement à ce qu’il mène une vie conforme à la dignité humaine.
Une distinction doit être opérée entre d’une part les dettes à l’égard de fournisseurs d’énergie, gaz, électricité et eau, ou de loyers, qui – impayées – sont susceptibles de réduire, voire d’interrompre, la fourniture de ces énergies, nécessaires à ce que la personne puisse mener, selon les critères de notre société, une vie conforme à la dignité humaine, ou encore de priver la personne de logement si l’expulsion était demandée par le bailleur vu le non-paiement de loyers et, de l’autre, d’autres dettes à l’égard de personnes privées, de sociétés de téléphonie ou d’accès à la télévision ou internet, ou encore des factures d’hôpital ou de pharmacie pour des soins qui ont été fournis mais dont le paiement n’implique aucune atteinte à une vie conforme à la dignité humaine.
En matière d’aide sociale, des arriérés doivent être versés à une demanderesse (dès lors que les conditions d’octroi ont été vérifiées) tant en son nom propre qu’en sa qualité de représentant légal de sa fille mineure pour toute la période où elles étaient en séjour légal au sens de l’article 57, § 2, de la loi du 8 juillet 1976. Ceci vise également l’existence d’un document spécial de séjour (annexe 35).
Les répercussions actuelles du non paiement de dettes exigibles doit être établie par des documents probants. La référence générale à une longue période de précarité ne suffit pas.
(Décision commentée)
Le droit à l’aide sociale naît au moment où une personne se trouve en état d’indigence. Aucune disposition légale ne permet d’exclure le droit à l’aide sociale à la personne qui y a droit pour la période entre la date de la demande et celle du prononcé. Lorsque le demandeur d’aide sociale remplit les conditions d’octroi du droit à l’aide sociale, le droit au paiement de celle-ci ne dépend pas de la date à laquelle il a produit la preuve de la réunion de ces conditions.
Le fait que l’intéressé est parvenu à rembourser la plupart de ses dettes grâce à un emploi qu’il a pu obtenir après la régularisation de sa situation de séjour n’implique pas qu’il n’aurait plus droit à l’aide sociale.
L’écoulement du temps ne peut en règle affecter le droit à l’aide mais comme aucune disposition légale ne fixe le montant de celle-ci, le juge pourrait établir une distinction entre le montant qui couvre le passé et celui octroyé pour l’avenir. L’appréciation de la prise en charge de l’aide pour la période antérieure au jugement peut en outre être différente selon qu’il s’agit d’une aide ponctuelle ou d’une aide récurrente.
La condition en matière d’arriérés est de ne pas pouvoir mener aujourd’hui une vie conforme à la dignité humaine en raison d’une carence passée.
Le droit à l’aide sociale est indépendant de la date où l’état de besoin est prouvé.
L’octroi d’arriérés n’est pas incompatible par nature avec la loi du 8 juillet 1976.
Les arriérés peuvent être accordés aux fins de réparer autant que faire se peut les conséquences actuelles du défaut (passé) d’une vie conforme à la dignité humaine (renvoi à Cass., 17 déc. 2007 et à C. trav. Mons, 20 oct. 2010).
Vu la jurisprudence de la Cour de cassation dans son arrêt du 9 février 2009, la solution dégagée par la Cour constitutionnelle dans son arrêt du 17 septembre 2003 (n° 112/2003) doit être considérée comme obsolète sur la question de la rétroactivité de l’aide sociale, la Cour de cassation ayant adopté une interprétation différente de l’article 1er de la loi du 8 juillet 1976 de celle contenue dans la question préjudicielle ayant abouti à l’arrêt de la Cour constitutionnelle.
(Décision commentée)
Il est admis que peuvent exister des circonstances particulières où l’aide peut, si elle est nécessaire pour vivre conformément à la dignité humaine, être accordée pour une période antérieure à la demande. Le droit à l’aide sociale naît dès qu’une personne se trouve dans une situation qui ne lui permet pas de mener une vie conforme à la dignité humaine, aucune disposition légale n’empêchant que cette aide soit rétroactivement accordée. L’octroi dépend de l’état de besoin et non de la date à laquelle cet état de besoin a été constaté.
La Cour s’appuie également sur sa propre jurisprudence : dans son arrêt du 19 février 2009, elle avait décidé que « les recours (…) ne peuvent aboutir, au seul motif de l’écoulement du temps, à priver un demandeur de l’aide à laquelle il a légalement droit » (R.G. n° 49 694).
Il faut prouver la nature et l’ampleur de l’état de besoin : une attestation du propriétaire signalant que les intéressés ont des difficultés à payer leur loyer ne signifie pas qu’ils sont encore en train d’apurer des dettes passées.
L’octroi d’arriérés est possible pour autant qu’ils soient nécessaires pour mener une vie conforme à la dignité humaine.
La demande d’aide ne peut porter que sur les besoins réels et actuels. Dès lors que le juge doit uniquement statuer sur une période révolue et que l’intéressée ne justifie pas de dettes dont l’apurement aurait encore aujourd’hui des répercussions l’empêchant de mener une vie conforme à la dignité humaine, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande d’arriérés.
L’octroi est lié à la condition que les arriérés permettent autant que faire se peut de réparer les conséquences actuelles de l’absence passée de vie conforme à la dignité humaine
Des arriérés peuvent être alloués pour le remboursement de dettes passées non encore résorbées au moment où le juge statue et qui empêchent l’intéressé de mener une vie conforme à la dignité humaine.
Aucune disposition légale ne prévoit que l’aide sociale ne peut pas être accordée avec effet rétroactif pour la période se situant entre la demande et la décision judiciaire.
(Décision commentée)
A peine de priver un demandeur de l’aide à laquelle il a légalement droit, les recours possibles contre une décision se prononçant sur le droit à une aide sociale ou évaluant l’aide sociale à accorder ne peuvent aboutir, au seul motif de l’écoulement du temps, à priver un demandeur de l’aide à laquelle il a légalement droit. L’aide sociale est en effet légalement due dès que les conditions d’octroi sont réunies, s’agissant d’un droit subjectif protégé par l’article 23 de la Constitution.
(Décision commentée)
Dès lors que le CPAS ne se fonde sur aucune enquête sociale sérieuse, sa décision doit être mise à néant. Quant au droit à des arriérés d’aide, il faut rechercher les dettes qui seraient de nature à empêcher l’intéressé de mener « hic et nunc » une vie conforme à la dignité humaine, ainsi, en l’espèce, les dettes locatives.
Des arriérés peuvent être octroyés en cas de persistance des effets d’une vie non conforme à la dignité humaine, empêchant l’intéressé de mener désormais une vie décente - renvoi à C. Const. 17 septembre 2003.
(Décision commentée)
Il n’existe pas de normes légales déterminant dans quelle mesure et sous quelle forme l’aide doit être accordée. C’est par conséquent au CPAS, dans les limites de sa mission légale, d’octroyer une aide visant à remédier aux effets encore actuels d’une existence non-conforme à la dignité humaine passée, dans la mesure où ils empêchent l’intéressé de mener désormais une vie répondant aux conditions de celle-ci. Dans la mesure où le demandeur n’établit en aucune manière qu’il y aurait empêchement « hic et nunc » de mener une vie conforme à la dignité humaine suite à la décision du CPAS, il ne satisfait pas aux conditions légales permettant l’octroi de cette aide.
Le fait que la décision sort en principe ses effets à la date de la réception de la demande par le C.P.A.S. n’exclut pas que l’aide sociale puisse, dans des circonstances exceptionnelles, être accordée pour une période antérieure. Le demandeur est, dans cette hypothèse, tenu de démontrer que son état de besoin était antérieur à la date d’introduction de cette demande et qu’il n’avait pas pu s’adresser plus tôt au C.P.A.S.