Commentaire de C. trav. Liège (div. Liège), 20 mars 2024, R.G. 2023/AL/264
Mis en ligne le 3 octobre 2024
Commentaire de C. trav. Liège (div. Liège), 22 juin 2023, R.G. 2022/AL/478
Mis en ligne le 1er décembre 2023
En matière de taux majoré d’orphelin, (…) il existe trois catégories d’enfants orphelins soumis au régime des prestations familiales en Région wallonne. Premièrement, les enfants nés à partir du 1er janvier 2020 sont entièrement soumis au décret du 8 février 2018. Deuxièmement, les enfants nés avant cette date et devenus orphelins avant le 1er janvier 2019 restent entièrement soumis à la LGAF. Troisièmement, les enfants nés avant le 1er janvier 2020 mais devenus orphelins après le 1er janvier 2019 sont soumis à la LGAF, excepté pour la règle de remise en ménage du parent survivant, qui ne leur est pas applicable (B.2.2.).
La Cour est interrogée sur la différence de traitement qui existe entre la deuxième et la troisième catégorie, en ce que les enfants relevant de la troisième catégorie ne se voient pas appliquer la règle tenant à la remise en ménage du parent survivant. La situation de ces enfants est plus favorable que celle de l’enfant devant la juridiction a quo, en ce sens qu’en cas de remise en ménage du parent survivant, ils conservent leur droit au taux majoré d’orphelin.
Pour la Cour, le législateur décrétal a voulu éviter que des enfants reçoivent des allocations familiales moins élevées pendant la période transitoire que celles qu’ils recevaient sous l’empire de l’ancienne législation fédérale. Toutefois, pour un certain nombre d’entre eux, (il) a souhaité immédiatement supprimer la règle de cette ancienne législation qu’il considérait comme la plus problématique, à savoir la règle relative à la remise en ménage du parent survivant. Ce faisant, (il) a dû aussi tenir compte de l’incidence budgétaire de la réforme des allocations familiales, ce qui l’a amené à ne pas étendre la suppression de cette règle à tous les enfants sans exception. La différence de traitement est raisonnablement justifiée.
En ce qui concerne le choix de la date du 1er janvier 2019 comme date-pivot de l’application du régime transitoire en cause, il est également raisonnablement justifié par le fait qu’il s’agit de la date d’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation relative aux allocations familiales (B.11. et B.12.)
Les articles 120 et 122, alinéa 2, du décret de la Région wallonne du 8 février 2018 « relatif à la gestion et au paiement des prestations familiales » et les articles 50bis et 56bis de la loi générale du 19 décembre 1939 relative aux allocations familiales ne violent dès lors pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Saisie d’un recours en annulation des articles 3 et 120 du décret de la Région wallonne du 8 février 2018 relatif à la gestion et au paiement des prestations familiales (fondé sur la différence de traitement entre, d’une part, les enfants bénéficiaires de prestations familiales qui sont nés à partir de la date fixée par le Gouvernement wallon et, d’autre part, ceux qui sont nés au plus tard la veille de cette date), la Cour constitutionnelle a rejeté celui-ci au motif essentiel qu’il appartient en principe au législateur, lorsqu’il décide d’introduire une nouvelle réglementation, d’estimer s’il est nécessaire ou opportun d’assortir celle-ci de dispositions transitoires. Le principe d’égalité et de non-discrimination n’est violé que si le régime transitoire ou son absence entraîne une différence de traitement dénuée de justification raisonnable ou s’il est porté une atteinte excessive au principe de la confiance légitime. La différence de traitement qui résulte de l’article 3 du décret du 8 février 2018 repose sur un critère objectif, à savoir la date de naissance de l’enfant bénéficiaire des prestations familiales. (considérants B.11 et B.12)
(Décision commentée)
L’Arrêté du Gouvernement wallon du 26 octobre 2018 exécutant l’article 13, § 1er, du Décret wallon relatif à l’accès à la gestion et au paiement des prestations familiales du 8 février 2018 précise la notion de revenus à prendre en compte pour l’octroi des suppléments d’allocations familiales : il s’agit soit des revenus du seul allocataire soit des revenus de celui-ci et de son conjoint ou de la personne avec laquelle il forme un ménage de fait (la domiciliation commune de l’allocataire avec une personne autre qu’un parent ou allié jusqu’au troisième degré inclusivement faisant présumer jusqu’à preuve du contraire l’existence d’un tel ménage de fait).
À l’époque des faits examinés par la cour (2019), il y avait octroi provisoire d’office des suppléments mais ce système a été abandonné au profit d’un paiement définitif intervenant au moment où le montant des revenus est connu.
En vertu de l’article 96 du décret de la Région wallonne du 8 février 2018 relatif à la gestion et au paiement des prestations familiales, les actions dont disposent, sur la base du texte, les personnes à qui les prestations familiales sont dues ou doivent être versées, doivent être intentées dans les cinq ans, délai qui prend cours le premier jour du mois qui suit celui auquel les prestations familiales se rapportent. Pour la prime de naissance il prend cours le premier du mois qui suit celui au cours duquel la naissance a eu lieu.
En cas d’action en reconnaissance de paternité, la demande d’allocations devait être introduite dans le délai et même si la paternité n’était pas encore établie. Aucune condition légale ne prévoit en effet dans la loi générale d’être le père légal pour pouvoir ouvrir un droit aux allocations familiales y compris la prime de naissance pour un enfant qui fait partie de son ménage et dont on a la charge.
La loi du 15 décembre 1980 a prévu que dès lors que le délégué du ministre donne instruction à la Commune d’inscrire l’étranger au registre des étrangers et de le mettre en possession d’une attestation d’immatriculation, celui-ci est autorisé à séjourner dans le Royaume, fût-ce de manière temporaire et précaire (avec renvoi à Cass., 8 avril 2019, S.17.0086.F - statuant en matière de prestations familiales garanties).
Si l’article 4 du Décret wallon du 8 février 2018 relatif à la gestion et au paiement des prestations familiales dispose qu’une attestation d’immatriculation ne constitue en aucun cas un titre de séjour au sens de la réglementation, la cour constate en l’espèce que l’intéressée, de nationalité française, disposait pendant la période litigieuse d’une attestation d’enregistrement et qu’elle avait, ainsi, un titre de séjour et n’est pas concernée par la disposition.