La protection instaurée par les articles 26 et 28 de la convention collective de travail du 21 septembre 2015 fixant le statut des délégations syndicales, conclue au sein de la commission paritaire n° 311 des grandes entreprises de détail et rendue obligatoire par l’arrêté royal du 8 novembre 2016 ne s’étend au délégué suppléant que s’il remplace un délégué effectif.
(Cassation de C. trav. Liège (div. Liège), 21 avril 2022, R.G. 2021/AL/108)
La convention collective de travail du 30 juin 1980 conclue au sein de la C.P. de la construction, concernant le statut des délégations syndicales, prévoit qu’un délégué ne peut être licencié pour quelque motif que ce soit, sauf pour motif grave, que si la procédure qu’elle institue a été observée. Si, en cas de licenciement collectif en raison de la fermeture de l’entreprise, tout risque de discrimination par l’employeur entre les travailleurs licenciés se trouve écarté, l’article 17 de la convention collective doit néanmoins être respecté. En cas de non-respect, les indemnités de protection sont dues, le pourvoi introduit par les curateurs à la faillite de la société devant être rejeté.
Il ressort de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 10 février 2003 que, parce que n’exerçant pas de mandat, un délégué suppléant ne fait pas partie de la délégation syndicale et, sous réserve de dispositions plus favorables prévues par C.C.T. sectorielle ou d’entreprise, ne bénéficie donc de la protection assurée à ses membres que s’il remplace le délégué effectif, pour la durée de ce remplacement. La matière étant d’ordre public et imposant des contraintes à l’employeur, pareilles C.C.T. ne peuvent toutefois faire l’objet d’une interprétation extensive. Ainsi doit-on considérer que si, en adoptant la C.C.T. du 26 mars 2014 régissant les principes relatifs à la délégation syndicale au sein de la commission paritaire des entreprises de travail adapté, les partenaires sociaux avaient voulu étendre la protection aux membres suppléants, ils l’auraient clairement mentionné, ce d’autant que l’article 3 de ladite C.C.T. prévoit que, lorsqu’elles ne peuvent désigner un membre de la délégation syndicale qui n’a pas été candidat aux dernières élections sociales ou si aucun candidat ne manifeste son intérêt pour le mandat, les organisations syndicales s’engagent à ne pas augmenter le nombre de protégés dans l’entreprise, ce qui démontre leur volonté de limiter leur nombre et non de l’étendre, comme, par exemple, aux suppléants.
Se rend coupable d’abus de droit le travailleur qui, suspectant l’imminence de son licenciement, se fait désigner par son organisation syndicale pour exercer le mandat de délégué syndical qu’elle avait déclaré vacant. Ce faisant, il use d’un droit reconnu en vue d’assurer la représentation des travailleurs en le détournant de sa finalité économique et sociale à son seul profit, dans le but de faire échec à son licenciement ou pour piéger son employeur aux fins de rendre celui-ci plus onéreux en spéculant clairement sur l’irrespect par ce dernier de la procédure applicable en cas de licenciement d’un délégué du personnel. Il s’impose, dès lors, de considérer que sa désignation doit être tenue pour nulle et non avenue.
Le fait pour un délégué syndical d’avoir, à certaines occasions, exprimé envers deux collègues (mais non à son employeur) son souhait d’obtenir son licenciement pour force majeure médicale, ne peut être interprété comme procédant de sa volonté de provoquer son licenciement avec une double indemnité.
(Cassé par Cass., 15 mai 2023, n° S.22.0038.F)
Doit être tenue pour nulle et non avenue la désignation en qualité de délégué syndical qu’un travailleur, remplissant par ailleurs les conditions prescrites par la C.C.T. applicable, obtient en détournant l’usage d’un droit reconnu en vue d’assurer la représentation des travailleurs, à l’effet de faire échec à son propre licenciement ou de le rendre plus onéreux en spéculant clairement sur l’irrespect par son employeur de la procédure applicable en cas de licenciement d’un délégué syndical.
Désignation par l’organisation représentative - début de la protection - connaissance par l’employeur
Délégation syndicale de fait : absence de protection de ses membres
Sauf si une C.C.T. sectorielle le prévoit, le simple fait d’être désigné comme délégué syndical suppléant ne suffit pas à octroyer une protection contre le licenciement. Partant, si un délégué suppléant amené à remplacer un délégué effectif bénéficie de la même protection que ce dernier aussi longtemps qu’il le remplace, il perd celle-ci lorsque le remplacement prend fin, ce sans égard au fait qu’il ait pu participer de façon ponctuelle à l’une ou l’autre mission.