Commentaire de Trib. trav. Liège (div. Dinant), 9 novembre 2018, R.G. 17/469/A
Mis en ligne le 28 mai 2019
Il ne peut être exigé, sans ajouter à la C.C.T. n° 109 des conditions qu’elle ne contient pas, qu’un travailleur, au courant de ce que son employeur n’a pas retiré le pli recommandé contenant sa demande d’être informé des motifs concrets de son licenciement, l’en avertisse par un autre biais.
Lorsque le travailleur n’a pas introduit de demande visant à connaître les motifs de son licenciement dans le délai requis par l’article 4 de la CCT n°109, il lui appartient de fournir la preuve d’éléments qui indiquent le caractère manifestement déraisonnable de celui-ci. En l’espèce, le travailleur, dont le dernier rapport d’évaluation fait état d’un score global « insuffisant » et de difficultés relationnelles, n’établit pas que son licenciement n’eût aucun lien avec son aptitude ou sa conduite, ni avec les nécessités de fonctionnement de l’entreprise et qu’un employeur normal et raisonnable ne l’eût pas licencié. Dès lors, la demande de paiement d’une indemnité pour licenciement manifestement déraisonnable est non fondée.
Ce n’est que dans l’hypothèse où il communique spontanément les motifs du licenciement au travailleur qu’aucun formalisme particulier n’est imposé à l’employeur. S’il répond à une demande formelle de l’intéressé, il doit, en revanche, respecter certaines formes, étant l’envoi par courrier recommandé. Dès lors que cette formalité n’a pas été respectée, il importe peu que le travailleur ait pu prendre connaissance des motifs de son licenciement par l’intermédiaire de son conseil.
Un employeur qui n’a pas répondu dans le délai de deux mois requis à la demande du travailleur de connaître les motifs concrets de son licenciement ne peut soutenir qu’’il n’est redevable d’aucune amende civile en avançant avoir été temporairement délié de son obligation pour le double motif que (i) il avait préparé une réponse circonstanciée, reprenant les reproches adressés à l’intéressé, mais (ii) a été empêché d’expédier sa réponse en raison d’un cas de force majeure, étant la crise du coronavirus et l’obligation de télétravail qui en a découlé. Cette position ne peut, en effet, nullement être suivie dès lors (i) que les bureaux de poste et autres commerces proposant des services postaux étaient demeurés ouverts et (ii) que la rédaction d’un courrier en réponse à la demande dont il était saisi pouvait parfaitement être réalisée en télétravail.
(Décision commentée)
La forme de la demande de communication des motifs concrets du licenciement est la lettre recommandée. La motivation spontanée ne fait, quant à elle, l’objet d’aucune exigence sur ce plan. Se pose la question de savoir si la formalité de la voie recommandée est un élément probatoire ou une formalité prescrite à peine de nullité. Il existe une divergence d’opinions doctrinale (confirmée dans la jurisprudence). Il est ici opté pour le caractère probatoire, au motif que la convention collective a pour objet de permettre au travailleur de connaître les motifs concrets de son licenciement, but atteint dès lors qu’il est avéré que la lettre a été envoyée.
Appel de ce jugement a été interjeté.