Terralaboris asbl

RIS payé au titre d’avance sur allocations de chômage : conditions et validité de la subrogation légale

Commentaire de C. trav. Liège, 11 février 2009, R.G. 34.080/06 et 34.522/06

Mis en ligne le mardi 4 août 2009


Cour du travail de Liège, 11 février 2009, R.G. 34.080/06 et 34.522/06

TERRA LABORIS ASBL – Sandra Cala

Dans un arrêt du 11 février 2009, la Cour du travail de Liège a rappelé les conditions de validité de la notification du CPAS : à l’organisme de paiement ? à l’ONEm ?

Les faits

Monsieur C. sollicite auprès du CPAS le revenu d’intégration sociale dans l’attente d’allocations de chômage. Celui-ci lui est accordé pendant six mois. Le CPAS notifie dès lors à l’organisme de paiement (d’un syndicat) qu’il intervient et qu’il paie le RIS au titre d’avance sur allocations de chômage. Il notifie dès lors la subrogation légale, étant subrogé aux droits de l’intéressé. Ce dernier cependant perçoit ultérieurement les arriérés d’allocations de chômage en cause mais à partir de la CAPAC, qui était auparavant l’organisme payeur de ses allocations, le transfert d’organisme n’étant intervenu que plus tard. Le CPAS va alors assigner l’ONEm en paiement du montant correspondant au revenu d’intégration, au motif que l’ONEm a commis une faute en ne l’informant pas de l’identité exacte de la caisse de paiement. Pour le CPAS, il s’agit d’une violation de l’article 24, § 1er, 2° de la loi du 26 mai 2002.

Position du tribunal

Le premier juge dit l’action du CPAS non fondée. Pour le tribunal, il n’est pas établi que la demande de subrogation légale a été introduite au bureau compétent de l’ONEm alors que c’est celui-ci qui est débiteur de l’allocation de chômage. La responsabilité de l’ONEm n’est dès lors pas établie.

Position des parties en appel

Le CPAS considère démontrer que l’ONEm a été averti par l’organisme de paiement (syndicat) de l’existence de la subrogation et qu’il n’a pas fait circuler cette information à la CAPAC. Il fait également grief à l’Office de ne pas l’avoir avisé de la modification de la caisse de paiement. La faute de ce dernier lui cause dès lors un préjudice en ne lui permettant pas de récupérer les montants versés (un peu plus de 4.000€).

Pour l’ONEm, le CPAS n’a pas notifié la subrogation légalement, à savoir qu’elle n’a été faite ni à lui-même ni à la CAPAC. La modification d’organisme de paiement étant intervenue plus tard, il ne peut avoir averti le CPAS de celle-ci. Pour lui, c’est au contraire le CPAS qui a fait preuve de négligence en ne notifiant pas la subrogation directement à l’Office.

La position de la Cour

La Cour examine, d’abord, sa compétence matérielle, rappelant que celle-ci doit s’apprécier en fonction non de l’objet réel du litige mais de la demande telle est qu’elle est formulée par le demandeur (Cass. 11 mai 1990, Pas. 1990, I, p. 1054 et Cass. 19 décembre 1985, Pas. 1986, I, p. 271). La Cour se déclare compétente en vertu de l’article 580 du Code judiciaire, le CPAS intervenant dans une contestation relative aux droits et obligations des travailleurs salariés et apprentis et de leurs ayants droit résultant des lois et règlements prévus à l’article 580, 1°, parmi lesquels le chômage. Dans la mesure où le CPAS est subrogé aux droits du bénéficiaire, à ce stade seule la compétence doit être examinée et non la validité de la subrogation, qui est une question de fond. Pour la Cour il peut être admis que le CPAS exerce les droits du bénéficiaire en réclamant à l’ONEm le paiement des allocations de chômage ce qui se conçoit dès lors que l’ONEm est le débiteur des dites allocations.

En ce qui concerne le fond, la Cour rappelle que l’article 24 de la loi du 26 mai 2002 prévoit un système de subrogation par lequel le CPAS évite les inconvénients qui pourraient exister pour lui en raison des dispositions de l’article 1410 du Code judiciaire en lui permettant de percevoir les allocations sociales comme s’il était lui-même le bénéficiaire de celles-ci. Si ce mécanisme opère de plein droit, encore faut-il que le débiteur subrogé soit informé de l’existence de la subrogation. En l’espèce il s’agit de l’ONEm, débiteur des allocations de chômage, étant admis que les caisses n’interviennent que comme exécutant les décisions que seul l’ONEm peut prendre relativement au paiement de celles-ci. La Cour relève, à partir des pièces produites, que l’ONEm a été avisé de la subrogation dès le mois d’octobre 2003 et qu’il ne pouvait dès lors autoriser le paiement des allocations au profit du chômeur pour la période en cause. La subrogation privait en effet l’intéressé du droit de percevoir celles-ci, les droits étant transférés au CPAS en vertu de la subrogation légale.

En ce qui concerne l’exigence de la notification de la subrogation à l’ONEm plutôt qu’à l’organisme de paiement, la Cour relève qu’il est ’préférable’ que le CPAS effectue celle-ci afin d’éviter, précisément, des situations telles que celle du cas d’espèce. Mais pour la Cour il ne peut être reproché au CPAS d’avoir informé l’organisme de paiement qu’il croyait, sur la base des informations fausses fournies par l’intéressé, être celui qui devrait payer. La mise en œuvre de la subrogation n’est, pour la Cour, soumise à aucune forme particulière dès lors que le débiteur subrogé est informé – ce qui fut le cas.

En conséquence, l’ONEm est tenu de payer les allocations de chômage au CPAS et devra se retourner contre l’intéressé.

Intérêt de la décision

Cette décision clarifie les procédures dans l’hypothèse d’une subrogation : elle relève que l’ONEm doit être avisé pour que celle-ci puisse jouer, même si la notification a été faite à un organisme de paiement – comme en l’occurrence - non compétent.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be