Terralaboris asbl

Indemnité compensatoire de préavis : rémunération de base en cas de maladie au moment du licenciement

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 13 août 2010, R.G. 2007/AB/49.806

Mis en ligne le vendredi 8 octobre 2010


Cour du travail de Bruxelles, 13 août 2010, R.G. n° 2007/AB/49.806

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 13 août 2010, la Cour du travail de Bruxelles rappelle l’enseignement de la Cour constitutionnelle du 28 mai 2009 à propos de l’application de l’article 39 dans l’hypothèse d’une incapacité de travail.

Les faits

Madame J. est au service d’une société depuis 1989. Elle a la qualité d’employée et est chargée de travaux administratifs. Elle reçoit une promotion en 1998 et passe en catégorie 3, l’employeur appliquant les barèmes de la CPNAE.

Un an plus tard, elle reçoit de nouvelles fonctions et devient coordinatrice de ventes.

Au début de l’année 2003, elle tombe en incapacité de travail et en fin d’année 2003 la société notifie la rupture du contrat de travail moyennant un préavis de dix mois. L’intéressée étant toujours en incapacité de travail à ce moment, le préavis est suspendu. L’employée va épuiser ses congés annuels en décembre 2003 et, ensuite, reprend à temps partiel à partir de janvier 2004 dans le cadre d’un mi-temps médical, ayant obtenu l’autorisation du médecin-conseil de son organisme assureur.

La relation contractuelle prendra fin en novembre 2004.

L’organisation syndicale intervient, par la suite, demandant un complément d’indemnité compensatoire de préavis, le montant de dix mois étant insuffisant.

La procédure

Vu le refus de la société, l’employée introduit une action devant le tribunal du travail de Bruxelles en demandant un total d’indemnité compensatoire de seize mois sous déduction des montants déjà versés depuis le début du préavis.

La société introduit, pour sa part, une demande reconventionnelle, portant sur ses frais de défense. Elle introduit une seconde demande du même type, en dommages et intérêts pour procédure téméraire et vexatoire.

Le jugement du tribunal du travail va contenir la condamnation de la société au paiement des sommes réclamées par l’employée. Il y a en conséquence débouté des demandes de l’employeur.

La position des parties en appel

La société interjette appel et maintient ses chefs de demande, soutenant, en sus, que l’acte d’introductif d’instance était nul, les moyens de fait et de droit à la base de l’action n’y figurant pas.

Quant à l’employée, elle demande la confirmation du jugement dans toutes ses dispositions, celui-ci ayant fait droit à la demande introduite.

La position de la Cour

La Cour du travail rappelle d’abord, sur la nullité de la citation, que, dès lors que celle-ci contient un bref historique des faits qui servent de fondement à la demande, ainsi que la contestation de la durée du préavis notifié et une demande d’indemnité compensatoire de préavis dont le montant est déterminable, elle répond au prescrit de l’article 702, 3° du Code judiciaire. En outre, la société n’établit aucun préjudice procédural du fait de la nullité invoquée. La Cour rappelle encore que, selon la Cour de cassation, les termes « moyens » et « exposé sommaire des moyens » ne visent nullement la norme juridique mais les éléments de fait qui servent de fondement à la demande (Cass., 24 novembre 1978, Pas., 1979, I, p.352).

La Cour en vient alors à l’évaluation du préavis convenable, pour laquelle elle reprend les critères habituels de l’article 82, § 3 de la loi sur les contrats de travail et s’attache plus particulièrement à la question de la rémunération de base. Elle rappelle en premier lieu que la rémunération au début des relations contractuelles n’a aucune importance et qu’est notamment indifférent le fait qu’elle ne dépassait pas le seuil fixé à l’article 82.

Mais c’est essentiellement la question du licenciement intervenant pendant la période d’incapacité et de la reprise du travail à temps partiel qui fait l’objet de développements.

La société soutient en effet à cet égard qu’au moment du licenciement, l’employée avait une rémunération à temps partiel, vu l’autorisation du médecin-conseil de reprendre dans le cadre de prestations réduites. La Cour relève que cette thèse est contraire aux faits et n’a pas été suivie par le tribunal, qui a considéré que les prestations à temps partiel pour cause médicale sont intervenues après la notification du congé, en date du 16 octobre 2003.

Pour déterminer la rémunération de base visée à l’article 39, la circonstance qu’il y ait incapacité temporaire de travail (totale ou partielle) est indifférente et il est donc sans intérêt de rechercher si le contrat n’est temporairement plus exécuté ou ne l’est qu’à temps partiel. La Cour rappelle que la suspension de l’exécution du contrat n’affecte ni sa nature ni le régime de travail convenu et que la rémunération à prendre en considération est la rémunération applicable à la durée du travail qui était contractuellement convenue. En l’espèce il s’agissait bien sûr d’un temps plein.

La Cour rappelle alors l’enseignement de la Cour constitutionnelle. Dans un arrêt du 28 mai 2009 (C. Const., 28 mai 2009, n° 98/2009), celle-ci a considéré qu’interpréter l’article 39, § 1er de la loi sur les contrats de travail en ce sens que le travailleur en incapacité de travail qui reprendrait partiellement le travail avec l’accord du médecin-conseil de la mutuelle n’aurait droit qu’à une indemnité de congé sur la base de la rémunération en cours pour les prestations de travail réduites violerait la Constitution. Tel n’est cependant pas le cas si cette même interprétation intervient en calculant la rémunération de base sur des prestations de travail complètes à laquelle le travailleur a droit en vertu du contrat de travail au moment du préavis. Il y a dès lors lieu, pour la Cour, de retenir la rémunération complète en ce compris les avantages acquis en vertu du contrat pour des prestations de travail complètes. Ceci concerne la quote-part patronale dans les tickets-repas, qui est un avantage rémunératoire et doit être inclus dans la rémunération de base pour des prestations à temps plein.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles rappelle un principe de base, en cas d’incapacité de travail, étant que cette incapacité, qu’elle soit totale ou partielle, entraîne une suspension de l’exécution du contrat ou des prestations réduites, malgré qu’elle est sans incidence sur la rémunération à prendre en compte pour l’indemnité compensatoire de préavis.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be