Terralaboris asbl

Indemnité en compensation du licenciement et rupture du contrat d’un commun accord

Commentaire de C. const., 18 novembre 2021, n° 167/21

Mis en ligne le lundi 29 novembre 2021


C. const., 18 novembre 2021, n° 167/21

Terra Laboris

Le Tribunal du travail de Gand (division Alost) a posé, par jugement du 3 décembre 2020 (inédit), une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle. Il s’agissait d’un travailleur en service depuis le 1er décembre 2008 dont le contrat de travail avait été résilié avec préavis à prester à partir du 22 mai 2019. Pendant cette période, il fut mis fin d’un commun accord au contrat de travail, le travailleur licencié ayant retrouvé un emploi. Se pose la question de son droit à l’indemnité en compensation du licenciement. L’ONEm avait en effet refusé celle-ci au motif que le travailleur avait volontairement mis fin à son contrat de travail.

Il s’agit donc d’un travailleur entré en fonction avant le 31 décembre 2013 et licencié après cette date. L’indemnité de compensation du licenciement compense, pour les travailleurs entrés en fonction avant le 1er janvier 2014 et licenciés après le 31 décembre 2013, la différence entre le délai de préavis (ou indemnité compensatoire) que l’employeur doit octroyer et le délai (ou indemnité) qu’il aurait dû octroyer si l’ancienneté totale avait été acquise après le 31 décembre 2013.

Pour le travailleur, cette indemnité est due à tout travailleur entré en fonction avant le 1er janvier 2014 et licencié après le 31 décembre 2013, même si c’est lui qui met fin à son contrat de travail d’un commun accord pendant la durée du préavis parce qu’il a trouvé un autre emploi.

Pour le tribunal du travail, se pose la question d’une discrimination possible eu égard à la situation des travailleurs entrés en fonction après le 31 décembre 2013 et qui concluent une convention de rupture d’un commun accord, comme en l’espèce, ceux-ci n’ayant pas droit à une indemnité pour la durée du préavis non prestée.

Pour la Cour constitutionnelle, la ratio legis de l’indemnité en compensation du licenciement est de garantir aux travailleurs entrés en fonction avant le 1er janvier 2014 qu’ils ne reçoivent pas un traitement moins favorable que ceux entrés en fonction après le 31 décembre 2013, lesquels ont droit à un préavis plus long.

Elle précise qu’il ne lui appartient pas de juger si l’interprétation du juge a quo est correcte mais de déterminer si la disposition en cause, dans cette interprétation, viole les articles 10 et 11 de la Constitution au motif d’une différence de traitement entre deux catégories de travailleurs licenciés après le 31 décembre 2013 et ayant mis d’un commun accord un terme avec l’employeur au contrat de travail pendant le délai de préavis, et ce eu égard à leur entrée en fonction, qui est soit avant le 1er janvier 2014, soit après le 31 décembre 2013.

Elle rappelle que l’indemnité en compensation du licenciement s’applique aux travailleurs pour lesquels le délai de préavis (ou l’indemnité compensatoire) est au moins partiellement fixé(e) sur la base de l’ancienneté acquise en qualité d’ouvriers au cours de la période antérieure au 1er janvier 2014 et pour lesquels il est considéré que l’ancienneté a entièrement été acquise après cette date, afin que les délais de préavis soient calculés en vertu de la nouvelle législation, qui est plus favorable.

La charge de délais plus longs ne devant pas être assumée par le seul employeur, l’ONEm va compenser la différence entre le montant calculé par l’employeur et celui auquel le travailleur aurait droit si son ancienneté de service avait totalement été acquise après le 31 décembre 2013.

La Cour conclut que deux interprétations de la disposition sont possibles.

La première n’est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution. Une telle interprétation suppose en effet que les personnes entrées en fonction avant le 1er janvier 2014 et licenciées après le 31 décembre 2013 ont droit à l’indemnité en compensation du licenciement dans l’hypothèse visée, dans la mesure où il y aurait ainsi une différence de traitement injustifiée à l’égard des personnes entrées en fonction après le 31 décembre 2013 et licenciées après cette date (qui ne peuvent pas faire valoir un droit à une indemnité de préavis en cas de rupture d’un commun accord pendant le délai de celui-ci).

La Cour ajoute toutefois qu’une autre interprétation est possible, renvoyant à l’article 7, § 1ersexies, alinéa 1er, de l’arrêté-loi du 28 décembre 1944, aux termes duquel une indemnité de compensation du licenciement n’est due au travailleur entré en fonction avant le 1er janvier 2014 et licencié après le 31 décembre 2013 que si celui-ci est traité moins favorablement que s’il était entré en fonction après le 31 décembre 2013 (ceci n’étant pas le cas dans la situation visée). Dans cette interprétation, il n’y a pas de différence de traitement.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be