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Prolongation irrégulière d’un contrat P.T.P. : les dispositions de la Charte de l’assuré social au secours du chômeur de bonne foi

Commentaire de C. trav. Liège, 14 décembre 2006, R.G. 33.050/05

Mis en ligne le mercredi 26 mars 2008


Cour du travail de Liège, 14 décembre 2006, R.G. 33.050/05

TERRA LABORIS ASBL – Sophie Remouchamps

Dans un arrêt du 14 décembre 2006, la Cour du travail de Liège a été amenée à se prononcer sur la régularité de l’octroi d’allocations dans le cadre d’un contrat de travail « Programme de transition professionnelle », conclu au-delà de la durée maximale, ainsi que de la régularité de la décision de récupération ordonnée par l’ONEm. Relevant l’existence d’une erreur dans le chef du bureau de chômage, la Cour, par application de l’article 17 de la « Charte », refuse tout effet rétroactif à cette décision.

Les faits

Madame D. est engagée en qualité de puéricultrice, dans le cadre d’un programme de transition professionnelle, une première fois pour une durée de 9 mois (du 6 octobre 1998 au 30 juin 1999) et une deuxième fois pour une durée de 10 mois (du 1er septembre 1999 au 30 juin 2000).

L’ONEm « autorise » ensuite un nouvel engagement pour la même fonction, pour la période du 1er septembre 2000 au 30 juin 2001, soit 10 mois.

L’on peut déjà relever qu’en principe, ce type d’engagement, fortement subsidié, ne peut dépasser 24 mois pour l’ensemble de la carrière professionnelle de l’intéressé, sauf si celui-ci réside dans une commune au taux de chômage élevé.

Il faut également noter que ce n’est qu’à dater du 1er septembre 2000 que la commune de Verviers a été classée dans la liste des communes ayant un taux de chômage d’au moins 20% supérieur au taux moyen de la région.

Eu égard à cette circonstance, le directeur du bureau de chômage adresse, le 24 octobre 2000, une demande d’information à son administration centrale pour vérifier si cette nouvelle circonstance permet un engagement de Mme D. pendant 36 mois dans le cadre du programme de transition professionnelle.

Le bureau de chômage reçoit une réponse négative (27 octobre) mais n’en avise pas l’intéressée, qui preste jusqu’à l’issue de son dernier contrat.

L’ONEm rejette les dépenses de l’organisme de paiement pour les allocations de transition à partir de février 2001, au motif que le contrat P.T.P. a pris fin le 31 janvier 2001 (à l’issue des 24 mois). L’organisme de paiement adresse en conséquence des demandes de remboursement, pour les mois de février à juin 2001 inclus (4 décisions de récupération).

L’intéressée introduit un recours à l’encontre de chacune de ces décisions, recours déclaré non fondé par le Tribunal du travail, qui retient la durée maximale de 24 mois.

L’intéressée interjette appel de cette décision.

La décision de la cour

Après avoir rappelé les dispositions réglementaires pertinentes (article 5, § 3 et 4, de l’arrêté royal du 9 juin 1997, pris en exécution de l’article 7, § 1er, alinéa 3, m, de l’arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs salariés), la Cour constate que, pour la fixation de la durée maximale de l’engagement dans le cadre d’un P.T.P., c’est la durée applicable au début de la première occupation qui doit être prise en compte.

La durée d’engagement maximale étant de 24 mois, la Cour confirme le jugement sur ce point.

Cependant, elle relève qu’au moment de la conclusion du 3e contrat, seul un « crédit » de 24 mois pouvait être alloué, dont 19 avaient déjà été épuisés. La décision de l’ONEm d’accorder plus que les 5 mois restants intervient dès lors en violation des dispositions réglementaires applicables.

En conséquence, la Cour retient une erreur de droit, ou à tout le moins une erreur matérielle, dans le chef de l’ONEm.

La Cour estime qu’il y a lieu à application de l’article 17 de la Charte de l’assuré social, qui dispose qu’en cas de revision d’une décision entachée d’une erreur de droit ou matérielle, la nouvelle décision ne produit ses effets, lorsque l’erreur est due à l’institution de sécurité sociale, que le 1er jour du mois qui suit sa notification, sauf si l’assuré social savait ou devait savoir qu’il n’avait pas droit à l’intégralité de la prestation.

Elle relève par ailleurs que, vu la complexité de la réglementation, attestée par le fait que le directeur du bureau de chômage dut lui-même prendre ses renseignements auprès de l’administration centrale, l’on ne peut considérer que Mme D. savait ou devait savoir qu’elle n’avait plus droit aux allocations versées.

La Cour dit ainsi pour droit que l’intéressée a droit aux allocations.

Intérêt de la décision

L’importance de cette décision réside dans l’application des dispositions de la Charte de l’assuré social, dans un cas d’espèce où la revision de la décision initiale du bureau de chômage est due à une erreur de droit de celui-ci dans la décision initiale. Concrètement, cette disposition fait obstacle au caractère rétroactif de la nouvelle décision et permet aux intéressés de bonne foi de conserver les prestations perçues.


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