Terralaboris asbl

Accident du travail : rémunération de base du travailleur intérimaire

Commentaire de Trib. trav. Mons et Charleroi (div. Charleroi), 7 octobre 2015, R.G. 14/1.116/A

Mis en ligne le vendredi 8 janvier 2016


Tribunal du travail de Mons et Charleroi, division de Charleroi, 7 octobre 2015, R.G. 14/1.116/A

Dans un jugement du 7 octobre 2015, le Tribunal du travail de Mons et de Charleroi, Division de Charleroi, reprend l’enseignement de la Cour de cassation relatif à la rémunération de base à retenir pour les indemnités journalières dues pendant l’incapacité temporaire.

Les faits

Une travailleuse intérimaire est affectée auprès d’une société de distribution (grande surface). Le contrat, non daté, prévoit quatre prestations d’un jour entrecoupées chacune de périodes de non-activité. La durée du travail hebdomadaire est fixée à trente-six heures et le salaire à 11,8381€ / heure.

Elle a un accident sur le lieu du travail le dernier des quatre jours en cause, étant qu’alors qu’elle était occupée à de l’emballage, elle se tord le pied et tombe, en allant chercher du fromage.

Dans le cadre de l’incapacité temporaire, elle est indemnisée pour une période de sept mois. L’assureur lui écrit, à l’issue de celle-ci, que le salaire de référence a été calculé de manière provisoire et qu’il y a un trop payé, après détermination du salaire définitif, de l’ordre de 7.000€.

Un accord-indemnité est alors proposé et l’intéressée le signe. Le FAT refuse de procéder à l’entérinement, ne marquant pas accord avec le mode de calcul aboutissant à un indu. Le FAT précise qu’au moment de l’accident la victime était sous contrat de travail avec une société d’intérim et que l’assureur, qui a calculé la rémunération de base, a tenu compte des trois semaines de prestations qui ont précédé l’accident et établi une moyenne hebdomadaire sur cette base. Pour le FAT, il est incorrect de considérer ce contrat de travail comme étant à temps partiel en comparant les prestations de la semaine de l’accident du travail aux prestations hebdomadaires normales à temps plein.

L’assureur-loi introduit dès lors une procédure devant le Tribunal du travail de Mons et de Charleroi (division de Charleroi) demandant au tribunal d’entériner l’accord-indemnité sur la base des propositions faites par lui, en ce compris la rémunération de base de l’ITT. Il demande également le remboursement de l’indu d’indemnités d’incapacité temporaire allouées sur une base supérieure à celle qu’il a retenue définitivement.

Décision du tribunal du travail

Le tribunal reprend, en droit, les conditions de l’accident tant sur son existence que sur ses conditions de réparation.

Il renvoie à l’arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 2014 (Cass., 10 mars 2014, R.G. n° S.12.0094.N) en ce qui concerne la rémunération de base à retenir et reprend la règle dégagée par la Cour suprême assez longuement, eu égard à son importance.

Pour le calcul de la rémunération de base, les définitions des données relatives au temps de travail sont déterminées par l’arrêté royal du 10 juin 2001 portant définition uniforme des notions de temps de travail en sécurité sociale en application de l’article 39 de la loi du 26 juillet 1996. Le travailleur à temps plein est celui dont la durée contractuelle normale de travail correspond à la durée de travail maximale en vigueur dans l’entreprise en vertu de la loi. Par contre, le travailleur à temps partiel est celui dont la durée contractuelle normale de travail est en moyenne inférieure à la durée du travail de la personne de référence.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation a rappelé également que la journée de travail ne peut excéder huit heures et la semaine quarante heures. En conséquence, dans le cadre de la loi du 10 avril 1971, le travailleur qui a un accident du travail doit être considéré comme un travailleur à temps plein si le jour de l’accident il était lié par un contrat journalier stipulant une durée de travail de huit heures. Raisonner autrement est contraire à la loi.

Le tribunal du travail constate, ainsi, que l’intéressée prestait pour une journée entière, ce qui n’est pas assimilable à un temps partiel, même si l’on prend en compte les quatre journées ci-dessus. Le contrat est en effet conclu pour chaque journée de travail.

Il considère dès lors qu’il faut fixer la rémunération de base au sens de l’article 34, alinéa 3 de la loi du 10 avril 1971 en définissant le temps de travail comme l’a fait l’arrêté royal du 10 juin 2001 ci-dessus. Prestant à temps plein le jour de l’accident, l’intéressée doit être indemnisée sur cette base.

Le tribunal réserve à statuer sur les montants.

Pour le surplus, il entérine les termes de l’accord proposé, les parties s’accordant sur les séquelles de l’accident, et ce sur la base d’un rapport médical circonstancié.

Intérêt de la décision

Ce jugement rappelle à très juste titre l’arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 2014, qui a également été rendu dans le cadre de travail intérimaire et à propos de la rémunération à prendre en compte pour fixer les indemnités journalières dans le cadre de l’incapacité temporaire. Dans cet arrêt, la Cour suprême avait bien précisé que si, le jour de l’accident, le travailleur est lié par un contrat journalier avec une durée de huit heures, il doit être considéré comme un travailleur à temps plein et qu’il n’y a aucune base légale permettant de renvoyer à la durée hebdomadaire de travail moyenne contractuelle de ce travailleur.

En application de la jurisprudence de la Cour de cassation, il y a lieu de citer également un arrêt de la Cour du travail de Liège (division Liège) du 24 octobre 2014 (R.G. n° 2013/AL/440), qui a admis que, en cas d’occupation pour une durée journalière de 7,4 heures (soit moins de 8 heures), il y a également temps plein, dans la mesure où ceci correspond à la durée de travail du travailleur à temps plein dans l’entreprise.

Rappelons également que, dans le cadre d’un temps partiel, le travailleur ne serait indemnisé qu’en fonction du salaire perçu, l’article 37bis, § 1er s’appliquant s’il y a occupation dans le cadre d’un seul contrat et l’article 37bis, § 2 en cas d’occupation dans le cadre de plusieurs contrats mais toujours et uniquement à temps partiel.

Ces discussions n’interviennent que dans le cadre de l’incapacité temporaire, puisque en cas d’incapacité permanente, il faut suivre les règles habituelles, étant qu’est réparée la perte de potentiel économique de la victime.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be