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Travailleurs indépendants : conditions de carrière en cas de demande de pension anticipée

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 6 octobre 2014, R.G. 2013/AB/1.136

Mis en ligne le mercredi 17 décembre 2014


Cour du travail de Bruxelles, 6 octobre 2014, R.G. n° 2013/AB/1.136

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 6 octobre 2014, la Cour du travail de Bruxelles reprend les conditions relatives à la carrière du travailleur indépendant, en cas de demande d’une pension de retraite ou d’une pension de retraite anticipée.

Les faits

Une travailleuse indépendante a introduit auprès de son administration communale une demande de pension de retraite, celle-ci devant courir à partir du 1er avril 2013. Il s’agit d’une demande de pension de retraite anticipée.

L’I.N.A.S.T.I. lui fait savoir que celle-ci doit être refusée au motif qu’elle ne répond pas aux conditions de carrière requises pour cette forme de pension.

L’intéressée introduit un recours devant le Tribunal du travail de Bruxelles.

Celui-ci la déboute. Le tribunal rappelle que la pension de retraite prend cours à partir du premier jour du mois qui suit celui au cours duquel le demandeur atteint l’âge de la pension, celui-ci étant de 65 ans. Celle-ci peut néanmoins prendre cours au choix et à la demande de l’intéressé avant cet âge, le premier jour du mois suivant le 60e anniversaire, à la condition que l’intéressée prouve une carrière d’au moins 40 années civiles. Pour ouvrir un droit à la pension, les années civiles sont prises en considération à la condition qu’elles comportent au moins deux trimestres susceptibles d’ouvrir ce droit.

Le tribunal constate que l’intéressée a été indépendante de 2001 à 2012, soit pendant 12 ans, et que, précédemment, elle a eu une carrière dans le régime des salariés pendant 24 ans. Le total est de 36 années civiles, qui peuvent intervenir dans le cadre du calcul de la carrière exigée pour permettre de bénéficier de la pension anticipée. Dans les années à prendre en considération eu égard aux critères de l’activité salariée, le tribunal en écarte deux, au motif qu’elles ne peuvent entrer en ligne de compte, l’intéressée ayant été occupée moins d’un tiers d’un temps plein. En sus, l’année 2001 est déjà prise en compte dans le calcul de la carrière en tant qu’indépendante et ne peut, de ce fait, être retenue dans le régime des salariés.

Le tribunal en conclut que, la condition de carrière de 40 années civiles n’étant pas remplie, l’intéressée ne peut bénéficier de la pension de retraite anticipée.

Appel est interjeté, la demanderesse considérant que l’exigence de 40 années civiles de carrière ne peut lui être opposée, mais bien un chiffre de 36 années. Elle considère établir des prestations pendant 37 années et estime ainsi être en droit de bénéficier de la pension de retraite demandée.

La décision de la cour

La cour rappelle qu’en la matière, la première question examinée est la prise de cours de la pension, et ce aux fins de déterminer les conditions applicables. En l’occurrence, il s’agit du 1er avril 2013. La cour renvoie aux dispositions applicables, étant l’arrêté royal du 30 janvier 1997 relatif aux régimes de pensions des travailleurs indépendants, pris en application de la loi du 26 juillet 1996 portant modernisation de la sécurité sociale et assurant la viabilité des régimes légaux de pensions. Celui-ci a été modifié par la loi du 29 mars 2012 portant des dispositions diverses (I), dont l’article 81, 3°, a) prévoit que la possibilité d’obtenir une pension de retraite anticipée est soumise dans le chef de la demanderesse à la condition de prouver une carrière d’au moins 40 années civiles susceptibles d’ouvrir des droits à la pension en vertu d’un ou plusieurs régimes légaux belges de pensions ou de régimes qui relèvent du champ d’application des règlements européens.

S’agissant en l’espèce d’une carrière mixte (indépendante et salariée), la cour rappelle que l’arrêté royal du 30 janvier 1997 impose de calculer les périodes à prendre en compte conformément aux critères fixés dans la réglementation correspondante. Elle constate également que les critères fixés concernant les années civiles à retenir pour l’octroi de la pension anticipée sont différents de ceux relatifs à la carrière pouvant servir de base au calcul de la pension de retraite elle-même.

Les conditions relatives aux possibilités d’obtenir une pension de retraite anticipée sont fixées à l’article 3, § 3 de l’arrêté royal, qui prévoit notamment l’exclusion de périodes d’études dans les conditions qu’il fixe.

La cour conclut que, dans la mesure où, à partir du 1er janvier 2013, il est exigé une carrière de 40 années civiles, le débat relatif à la prise en compte ou non d’une année isolée est sans intérêt. L’intéressée ne peut davantage bénéficier de mesures transitoires fixées par la loi du 29 mars 2012, ne remplissant pas les conditions réglementaires exigées des pensions anticipées prenant cours, comme en l’espèce, le 1er avril 2013.

La cour confirme dès lors le jugement.

Intérêt de la décision

Cet arrêt statue dans le cadre d’une demande de pension anticipée dans le régime des travailleurs indépendants après la modification introduite à l’arrêté royal du 30 janvier 1997 par la loi du 29 mars 2012 portant des dispositions diverses (I). Celle-ci a apporté, par son article 81, une modification à l’arrêté royal du 30 janvier 1997, pour les pensions qui prennent cours effectivement et pour la première fois au plus tôt le 1er janvier 2013. Il est en effet actuellement exigé une carrière d’au moins 40 années civiles susceptibles d’ouvrir des droits à la pension. La faculté antérieure d’obtenir celle-ci avec une carrière d’au moins 35 années civiles n’est dès lors plus applicable aux pensions prenant cours à partir de cette date.


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