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Pension de retraite et rémunération perçue pendant l’année de prise de cours

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 18 juin 2014, R.G. 2010/AB/1.156

Mis en ligne le lundi 27 octobre 2014


Cour du travail de Bruxelles, 18 juin 2014, R.G. n° 2010/AB/1.156

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 18 juin 2014, la Cour du travail de Bruxelles, statuant après l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 13 juin 2013, rappelle la légalité de la non-prise en compte des rémunérations de l’année de prise de cours de la pension, avant la loi du 19 avril 2014.

Les faits

Un travailleur salarié sollicite le bénéfice d’une pension anticipée, étant âgé de 60 ans. La demande prend effet au 1er avril 2008. Dans sa décision d’octroi, l’O.N.P. ne tient pas compte des rémunérations relatives à cette année.

Un recours est introduit par l’intéressé, qui conteste cette non-prise en compte. Il fait également valoir un autre point, relatif au calcul des coefficients de revalorisation (article 29bis de l’arrêté royal n° 50).

Ayant été débouté par le tribunal, il a interjeté appel.

L’arrêt de la cour du travail du 23 mai 2012

Dans cet arrêt (précédemment commenté), la cour du travail avait réservé des développements importants à la question de l’exclusion de l’année de prise de cours de la pension, prévue par l’article 7 de l’arrêté royal n° 50 (alinéas 7 et 8). Elle avait estimé devoir réinterroger la Cour constitutionnelle (qui s’était prononcée dans un arrêt du 15 juillet 1993 – arrêt n° 61/93), considérant que la jurisprudence avait évolué sur le critère de comparabilité. La cour du travail faisait également valoir que, dans la mesure où des cotisations de sécurité sociale avaient été prélevées sur les rémunérations en cause, leur non-prise en compte pourrait être contraire à l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l’Homme.

Elle avait dès lors interrogé la Cour sur la question de savoir s’il n’y avait pas violation des articles 10 et 11 de la Constitution, dans la mesure où l’article 7 avait pour conséquence que l’année au cours de laquelle la pension de retraite débute n’était pas prise en considération pour le calcul de la pension, alors que cette année était entièrement comptée comme période de service dans l’hypothèse du calcul d’une pension de retraite du secteur public.

L’arrêt de la Cour constitutionnelle

La Cour constitutionnelle s’est prononcée par arrêt du 13 juin 2013 (arrêt n° 88/2013) et elle a considéré qu’il n’y avait pas violation des articles 10 et 11 lus ou non en combinaison avec l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l’Homme et avec l’article 14 de la Convention.

La Cour a rappelé sa jurisprudence (arrêts n° 17/91, 54/92, 88/93, 48/95, 112/2001, 4/2006 et 73/2006), dans laquelle elle a régulièrement réaffirmé que les régimes de pension des travailleurs salariés et des agents du secteur public nommés à titre définitif sous statut diffèrent quant à leur objectif et leur mode de financement et quant aux conditions de leur octroi. Dans la mesure où des différences fondamentales existent et qu’elles répondent ainsi à la logique de chacun des systèmes, le droit privé régissant la situation juridique des travailleurs salariés et la situation juridique des agents statutaires étant régie par le droit public, ces deux catégories de personnes ne peuvent être comparées.

L’arrêt de la cour du travail du 18 juin 2014

La cour du travail rappelle les termes de la question posée et constate qu’il y a été répondu négativement.

Elle conclut dès lors que l’appel n’est pas fondé. La cour ne fait pas droit, par ailleurs, à la demande de l’intéressé de réinterroger la Cour constitutionnelle.

La cour rappelle, cependant, qu’une modification législative est intervenue aux articles 7 et 8 de l’arrêté royal n° 50, modification introduite par la loi du 19 avril 2014 modifiant l’arrêté royal n° 50 (M.B., 7 mai 2014). La dernière année d’activité est désormais prise en compte pour le calcul de la pension de retraite. La cour du travail relève que, indépendamment de ce qu’a décidé la Cour constitutionnelle dans l’affaire tranchée, le législateur a estimé devoir contribuer à supprimer la différence entre les régimes, et ce eu égard au fait que les derniers mois de la carrière professionnelle sont effectivement pris en compte pour le calcul de la pension légale des fonctionnaires statutaires (la cour renvoyant à l’Exposé des motifs, Doc. Parl., Ch., 53-3377/001, p. 4). Cette modification ne s’applique, cependant, pas à l’espèce en cause, l’article 4 de la loi disposant que celle-ci est applicable aux pensions qui prennent cours effectivement et pour la première fois au plus tôt le 1er janvier 2015.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles met un terme au litige, dans lequel l’intéressé a vaillamment poursuivi seul sa défense. S’il a été l’occasion de confirmer la position de la Cour constitutionnelle sur la non-comparabilité des deux régimes de pension, l’on constate que le législateur est intervenu de manière à corriger le calcul de la carrière des travailleurs salariés pour laquelle l’exclusion de l’année de prise de cours de la pension trouvait difficilement à s’expliquer.


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