Terralaboris asbl

Accord sur la durée du préavis : preuve à rapporter par l’employeur

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 25 avril 2014, R.G. n° 2013/AB/430

Mis en ligne le vendredi 18 juillet 2014


Cour du travail de Bruxelles, 25 avril 2014, R.G. n° 2013/AB/430

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 25 avril 2014, la Cour du travail de Bruxelles rappelle que si l’accord du travailleur sur la durée du préavis n’est pas soumis à des conditions de forme, il doit cependant être certain et ne peut résulter de l’exécution du préavis sans réserves.

Les faits

Un employé est licencié moyennant préavis de 9 mois, devant débuter le 1er octobre 2010.

En cours de prestation, il est dispensé du solde à partir du 23 mai. La fin prévue normalement est le 30 juin 2011.

En octobre 2011, l’organisation syndicale du travailleur réclame un complément d’indemnité de 4 mois, ainsi que le jour férié survenant dans les trente jours de la rupture.

La société refuse de faire droit à la demande, au motif d’un accord intervenu sur la durée du préavis. Une procédure est dès lors introduite en paiement des sommes ci-dessus à majorer des intérêts.

Par jugement du 12 mars 2013, le tribunal du travail fait droit à la demande de l’intéressé, réduisant cependant le montant du complément demandé.

La société interjette appel du jugement, considérant qu’un accord est intervenu entre parties concernant la durée du délai de préavis. Elle se fonde l’absence de contestation dans le chef de l’intéressé, et ce tant pendant la période où le préavis a été presté qu’à l’issue immédiate de celui-ci. Elle se fonde également sur les mentions du C4, dont il ressort que l’intéressé demandait les allocations de chômage à partir du 1er juillet 2011, celui-ci précisant également qu’aucune indemnité de rupture n’avait été payée et que l’occupation s’était terminée au 30 juin 2011.

Décision de la cour du travail

La cour examine essentiellement la question de l’accord sur la durée du préavis, ainsi qu’appréhendé par la jurisprudence.

Elle rappelle que, si cet accord n’est pas soumis à des conditions de forme, ceci ne signifie pas qu’il puisse être déduit du silence du travailleur et de l’exécution des prestations pendant le délai de préavis. La cour renvoie à deux décisions, la première de la Cour du travail d’Anvers du 15 octobre 1977 et la seconde de la Cour du travail de Gand du 27 avril 2011 (C. trav. Anvers, 15 octobre 1977, R.G. n° J.T.T., 1978, p. 27 & C. trav. Gand, 27 avril 2011, T.G.R., 2011, p. 390).

La cour précise que semblable accord ne peut non plus être déduit de la circonstance que le travailleur n’a pas formulé de réserves quant au préavis qu’il lui a été notifié, renvoyant ici également à des décisions rendues sur la question par les mêmes cours (C. trav. Gand, 14 décembre 1987, T.G.R., 1988, p. 139 & C. trav. Anvers, 27 juin 2007, J.T.T., 2007, p. 487).

Elle poursuit, aboutissant à la même conclusion en ce qui concerne les mentions du C4, mentions qui sont le fait de l’employeur et dont il ne ressort nullement que le travailleur a marqué son accord sur leurs termes.

Enfin, la circonstance que celui-ci ait sollicité le bénéfice des indemnités de chômage ne peut être interprétée comme un accord sur le délai de préavis, le travailleur devant obtenir un revenu, à l’issue du contrat de travail.

L’accord n’est dès lors pas établi.

En ce qui concerne le complément alloué, elle s’aligne sur l’appréciation du tribunal.

La cour examine, ensuite, le droit du travailleur au paiement du jour férié dans les trente jours de la rupture, en l’occurrence le 21 juillet.

Ce droit git dans l’article 14, § 1er, 2° de l’arrêté royal du 18 avril 1974 déterminant les modalités générales d’exécution de la loi du 4 janvier 1974 relative aux jours fériés. Cette disposition prévoit que le droit à la rémunération afférente au jour férié est conservé pour ceux qui surviennent dans les trente jours qui suivent la fin du contrat de travail ou des prestations de travail pour autant que le travailleur soit resté au service de l’entreprise sans interruption qui lui soit attribuable pendant une période de plus d’un mois.

Ce droit n’existe pas si le travailleur démissionne sans motif grave ou si l’employeur mit fin au contrat de travail pour motif grave. De même si le travailleur commence à travailler chez un nouvel employeur.

La cour écarte l’argument de la société selon lequel la charge de la preuve de l’absence de reprise de travail réside chez le travailleur, et ce eu égard à l’article 1315, alinéa 2, du Code civil.

La cour alloue le pécule de vacances sur le salaire relatif à ce jour férié, s’agissant d’un avantage différé qui trouve sa cause dans le contrat de travail. Elle renvoie ainsi à un arrêt rendu le 6 mars 2012 (C. trav. Bruxelles, 6 mars 2012, J.T.T., 2012, p. 269).

En ce qui concerne les intérêts, elle les alloue également, et ce à partir de l’exigibilité des sommes, rappelant en ce qui concerne le pécule de vacances, que ceux-ci sont dus à dater de la mise en demeure.

Intérêt de la décision

Cet arrêt abord deux questions récurrentes, étant d’une part l’accord donné par le travailleur sur la durée du préavis et d’autre part le droit aux jours fériés survenant dans les trente jours de la rupture.

Sur le premier point, il faut effectivement rappeler que l’accord n’est soumis à aucune forme mais que la partie qui s’en prévaut doit néanmoins établir qu’il a effectivement été donné. Il ne peut se déduire d’éléments qui ne reflètent que l’exécution normale des obligations du travailleur dans le cours du préavis à prester ou de celles de l’employeur à l’issue du contrat.

Le deuxième point, relatif aux jours fériés survenant dans les trente jours de la rupture, rappelle, conformément aux principes généraux, que pour être dispensé de l’obligation de paiement, l’employeur doit prouver que le travailleur ne rentre pas dans les conditions légales.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be