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Dépassement du délai raisonnable en matière de litiges portant sur le recouvrement des cotisations de sécurité sociale pour travailleurs salariés

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 12 janvier 2011, n° 1999/AB/38.962

Mis en ligne le mardi 11 octobre 2011


Cour du travail de Bruxelles, 12 janvier 2011, R.G. n° 1999/AB/38.962

Les faits de la cause

Mme C.Q. a, en 1984 et 1985 été citée par l’O.N.S.S. à comparaître devant le tribunal du travail de Bruxelles pour avoir omis de déclarer une partie des rémunérations de deux travailleurs domestiques qu’elle avait engagés en 1979.

Par un jugement du 27 novembre 1990, le tribunal a ordonné la réouverture des débats en vue d’obtenir divers documents de l’administration des contributions directes, documents qui seront produits dès le mois de décembre 1990.

Il a déclaré la demande de l’O.N.S.S. recevable et fondée par jugement du 10 juin 1999, que Mme C.Q. a déféré à la cour d’appel par une requête du 20 août 1999.Mme C.Q. conteste notamment la production et/ou la valeur probante des documents communiqués à la suite du jugement du 27 novembre 1990, contestation que la cour du travail écarte.

Elle demande également qu’en raison de la longueur de la procédure, l’O.N.S.S. soit débouté de toutes ses demandes.

La cour du travail, se référant à plusieurs arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, rappelle que l’article 6 de la Convention est applicable aux contestations en matière de sécurité sociale et qu’en règle, le caractère raisonnable de la durée de la procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause eu égard aux critères consacrés par la jurisprudence de la Cour européenne en particulier la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes ainsi que l’enjeu du litige pour les intéressés. La Cour européenne a considéré qu’un litige portant sur le recouvrement de cotisations de sécurité sociale dues par un indépendant belge et qui avait duré vingt-deux ans dépassait les limites du délai raisonnable même si le requérant lui-même avait sollicité plusieurs reports de l’affaire (arrêt Poelmans / Belgique, du 3 février 2009).

En l’espèce, le délai raisonnable a été dépassé. L’O.N.S.S. a été peu diligent dans la mise en état de l’affaire.

En ce qui concerne les conséquences du dépassement raisonnable, la cour du travail procède à une distinction entre le montant en principal et les intérêts.

Le non-fondement de la demande n’est une sanction adéquate du dépassement du délai raisonnable qu’en cas de violation des droits de la défense, ce qui n’est pas établi en l’espèce, les éléments du litige étant globalement inchangés depuis l’origine. La sanction du dépassement du délai raisonnable ne peut donc consister en une réduction du montant du principal.

Par contre, dans la mesure où le dépassement dudit délai est imputable à l’O.N.S.S., la cour du travail décide d’une suspension du cours des intérêts judiciaires.

Intérêt de la décision

Il est de plus en plus fréquent que le dépassement du délai raisonnable soit invoqué dans les litiges de sécurité sociale.

On observera que, s’agissant d’une réclamation relative au montant des cotisations d’indépendant, les cours et tribunaux apprécient le délai raisonnable au regard de l’ensemble de la procédure fiscale et sociale. La Cour de cassation a implicitement confirmé cette solution (cf., Cass., 11 octobre 2010, S.09.0095.F).


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