Terralaboris asbl

Incapacité de travail et allocations de chômage

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 27 février 2013, R.G. 2011/AB/263

Mis en ligne le lundi 8 juillet 2013


Cour du travail de Bruxelles, 27 février 2013, R.G. n° 2011/AB/263

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 27 février 2013, la Cour du travail de Bruxelles rappelle que le critère d’aptitude en chômage renvoie en négatif à l’incapacité en AMI essentiellement. Les conditions de l’incapacité dans ce secteur sont sévères. Une perte d’aptitude plus restreinte que la réduction de la capacité de gain de deux tiers ou plus n’est pas incompatible avec les allocations de chômage.

Les faits

Une personne au chômage est dispensée temporairement de suivre la procédure d’activation en vue de la recherche d’emploi. Le motif est une inaptitude (temporaire) d’au moins 33%. Deux ans plus tard, le médecin traitant refait un certificat confirmant l’inaptitude à 33% au moins. L’intéressée se retrouve également à cette période en interruption d’activité pendant plusieurs périodes de un à trois mois, des certificats étant émis en ce sens. Elle émarge alors à la mutuelle et l’ONEm prend une décision avec effet rétroactif remontant au début de la première période d’interruption d’activité. La décision l’exclut du droit aux allocations et une récupération est ordonnée, en sus d’une exclusion pendant une durée de quatre semaines au motif qu’elle n’a pas complété sa carte de contrôle conformément aux instructions figurant sur celle-ci.

Pour l’ONEm, l’intéressée n’était pas apte au travail pendant la période concernée, l’aptitude existant ou non en référence à la situation AMI. La sanction se fonde sur l’absence de biffure de la carte de contrôle pour les jours de maladie.

Cinq jours après la notification de la décision, l’intéressée est revue par le médecin de l’ONEm, qui confirme l’inaptitude temporaire d’au moins 33% (dans le cadre de la procédure d’activation), et ce pour une nouvelle période de deux ans. Il constate également qu’à ce moment l’intéressée est inapte au sens de la législation AMI. Elle est alors exclue du droit aux allocations par une nouvelle décision, notifiée immédiatement.

Un recours est introduit contre la première décision.

Décision du tribunal du travail

Par jugement du 11 février 2011, le Tribunal du travail de Bruxelles met à néant la décision administrative, au motif que les certificats produits par l’intéressée sont à interpréter en fonction de la procédure d’activation, même s’ils faisaient en apparence état d’une incapacité de plus de 66%. Pour le tribunal, l’intéressée a pu se méprendre sur la portée de ceux-ci et ainsi ne pas remplir sa carte de contrôle.

Position des parties en appel

L’ONEm rappelle l’article 60 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991, qui exige du chômeur qu’il soit apte au travail pour bénéficier des allocations de chômage. La référence est faite en négatif par rapport à la législation AMI. Or, les certificats médicaux indiquent le contraire. L’intéressée dit également être inapte. Pour l’ONEm une telle déclaration empêche l’octroi des allocations de chômage, et ce peu importe que l’inaptitude soit vérifiée médicalement.

Quant à l’intimée, elle demande confirmation de la décision.

Décision de la cour du travail

Après avoir rappelé l’exigence d’aptitude au travail contenue dans l’article 60 de l’arrêté royal, la cour examine les dispositions suivantes, dont l’article 62, § 1er, alinéa 1er : le travailleur qui sur l’avis du médecin de l’ONEm est considéré comme inapte au travail au sens de la législation AMI ne peut bénéficier d’allocations.

La cour considère dès lors devoir interpréter les certificats déposés.

L’article 60 renvoyant à la notion d’inaptitude dans la législation AMI, la cour reprend l’article 100 de la loi coordonnée le 14 juillet 1994, qui admet qu’il y a incapacité de travail en cas de réduction importante de la capacité de gain, étant de deux tiers ou plus. C’est un critère spécifique dans le cadre de cette législation et la cour renvoie par exemple au secteur des personnes handicapées où quelqu’un peut être reconnu incapable de travailler au sens de cette législation, mais ceci ne vaut pas inaptitude au sens de l’article 60. La cour se réfère à un arrêt du 3 septembre 2009 (C. trav. Bruxelles, 3 septembre 2009, R.G. 46.623), qui a rappelé que le constat d’une aptitude réduite n’est pas un motif d’exclusion du droit aux allocations de chômage.

Les certificats médicaux délivrés ne constatent pas, comme le relève expressément la cour, une incapacité de travail au sens de la législation AMI. La cour considère qu’il s’agit de certificats « d’interruption d’activité » standardisés constatant simplement une incapacité de travail et elle relève d’ailleurs que si de tels certificats étaient produits dans le cadre d’une contestation d’une décision administrative en AMI, ils seraient certainement considérés insuffisants pour emporter la désignation d’un expert. Ils ne peuvent dès lors signifier inaptitude. La cour va dès lors confirmer le jugement, sauf pour la période de trois mois, où l’intéressée a été reconnue incapable de travailler par sa mutuelle.

Intérêt de la décision

Cet arrêt rappelle la difficulté présentée par les notions d’aptitude et d’incapacité dans les réglementations visées. Pour bénéficier des allocations de chômage il faut être apte au travail, sans que cette notion ne soit définie. Le renvoi à la législation AMI permet de considérer en tout cas qu’en cas d’incapacité (terme utilisé ici) au sens de la loi du 14 juillet 1994, il y a perte de capacité de deux tiers ou plus et dès lors inaptitude au sens de la réglementation de chômage. En dehors de cette situation (ainsi que des hypothèses de l’article 61), la question de l’inaptitude au sens de la réglementation de chômage ne peut en principe se poser, une aptitude réduite n’étant pas incompatible avec l’octroi d’allocations.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be