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Prise de cours de la pension de retraite en cas de bénéfice de la prépension conventionnelle

Commentaire de C. trav. Mons, 13 décembre 2012, R.G. 2011/AM/423

Mis en ligne le mardi 30 avril 2013


Cour du travail de Mons, 13 décembre 2012, R.G. n° 2011/AM/423

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 13 décembre 2012, la Cour du travail de Mons rappelle que, en cas de bénéfice de la prépension conventionnelle – qu’elle ait été demandée avant ou après 60 ans -, ce statut reste acquis jusqu’à l’âge de 65 ans et que c’est le choix opéré par le travailleur licencié à l’expiration de son préavis qui est déterminant en ce qui concerne son statut ultérieur, en ce compris en vue de l’ouverture de ses droits à la pension de retraite.

Les faits

Un employé, qui a fait l’essentiel de sa carrière au sein d’un groupe international, dans plusieurs pays d’Europe (Belgique, Suisse et France) est licencié le 1er avril 2005. L’intéressé est né en 1949. Il bénéficie de la prépension conventionnelle à partir du 1er août 2007.

Il demande ultérieurement à percevoir une retraite française (CRAM) et une pension complémentaire française (AGIRC et ARRCO) à partir du 1er octobre 2009. Il reste, dans le même temps, le bénéficiaire des allocations de chômage dans le cadre de la prépension ainsi que du complément versé par l’employeur.

Le 30 mars 2010, il est exclu des allocations de chômage à dater du 1er octobre 2009, date de perception des pensions françaises.

Un recours est introduit devant le tribunal du travail de Mons.

Par la suite, il va demander le bénéfice d’une pension de retraite anticipée au 1er octobre 2009, demande qui est considérée irrecevable, vu la prépension conventionnelle.

Décision du tribunal

Par jugement du 7 octobre 2011, examinant les deux décisions, le Tribunal du travail de Mons (Section La Louvière) déclare le recours contre la décision de l’ONEm non fondé, mais accueille celui contre la décision de l’ONP, condamnant l’Office au paiement de la pension de retraite à la date de la demande.

Appel du jugement est interjeté par l’ONP.

Position des parties

Pour l’ONP, le statut de prépensionné est conféré une fois pour toutes et la pension de retraite du bénéficiaire d’une prépension conventionnelle ne peut être acquise que le premier jour du mois suivant celui où l’intéressé atteint l’âge de 65 ans. Pour l’ONP, il s’agit de l’application de l’arrêté royal du 23 décembre 1996 (article 4, § 4, alinéa 1er). Dans un tel cas de figure, l’ONP considère que l’intéressé aurait dû faire postposer le point de départ de la pension de retraite française, afin de le faire coïncider avec le régime belge.

Quant à l’intéressé, il demande de poser une question à la Cour constitutionnelle sur l’existence d’une discrimination entre le travailleur entré en prépension avant l’âge de 60 ans (qui n’aurait pas le choix de demander à 60 ans la pension anticipée) par rapport au même travailleur prépensionnable à 60 ans.

En ce qui concerne la disposition visée par l’ONP, il considère également que l’article 4, § 4 de l’arrêté royal du 23 décembre 1996 ne peut s’appliquer qu’au moment où le travailleur atteint l’âge de 60 ans (auquel il a le droit de choisir entre la pension anticipée et la prépension conventionnelle).

Décision de la Cour

La cour reprend les dispositions applicables, étant précisément le contenu dans l’arrêté royal du 23 décembre 1996. La pension de retraite prendra cours le premier jour du mois qui suit celui au cours duquel la demande est introduite et au plus tôt lorsque l’âge de la pension (65 ans) et au plus tôt le premier jour du mois qui suit l’âge de 65 ans (âge de la pension). La pension peut cependant prendre cours anticipativement au choix et à la demande de l’intéressé. L’âge de 65 ans ci-dessus est alors ramené à 60 ans. En ce qui concerne le prépensionné (bénéficiaire d’une prépension conventionnelle à temps plein), la pension de retraite pend cours le premier jour du mois où il atteint ses 65 ans. La cour rappelle encore le régime de la prépension, ainsi que sa finalité, qui est de faire face à des situations de sous-emploi et de permettre de maintenir au travail des travailleurs moins âgés.

Elle renvoie à la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass., 12 mai 1997, n° S.96.0089.N) en ce qui concerne le statut du prépensionné, qui est accordé une fois pour toutes, étant que, une fois qu’il est définitivement acquis, l’indemnisation chômage se fera en conséquence, statut qui restera identique jusqu’à l’âge de 65 ans. La cour du travail précise que tel est le cas quels que soient les faits survenant après l’acquisition de ce statut et, en l’occurrence, s’il a été exclu du bénéfice des allocations de chromage, vu l’interdiction de cumul avec des pensions françaises, l’intéressé reste néanmoins bénéficiaire d’une prépension conventionnelle au sens de la disposition ci-dessus (article 4, § 4). Pour la cour, le prépensionné bénéficiaire de la prépension conventionnelle n’a pas le choix de la date à laquelle il prendra sa pension, c’est 65 ans. La cour précise que telle est la solution quel qu’ait été son âge au moment de l’admission à la prépension.

Elle rejette l’hypothèse d’une discrimination, le statut de prépensionné (auquel il est librement adhéré) présentant des avantages certains. Elle précise avec le ministère public que c’est au contraire la situation invoquée par l’intéressé qui serait source de discrimination, puisqu’elle fixerait des droits différents pour le bénéficiaire d’une prépension avant 60 ans ou à partir de cet âge.

Intérêt de la décision

Ce bref arrêt rappelle l’articulation des règles posées dans l’arrêté royal du 23 décembre 1996, exécutant les articles 15, 16 et 17 de la loi du 26 juillet 1996 portant modernisation de la sécurité sociale et assurant la viabilité des régimes légaux des pensions : une fois fait le choix de la prépension conventionnelle, le passage à la pension de retraite ne peut intervenir que lorsque l’âge de 65 ans sera atteint.

Dans son arrêt du 12 mai 1997 ci-dessus, la Cour de cassation a en effet posé le principe selon lequel le travailleur licencié qui accepte le régime de la prépension bénéficie de celui-ci jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de la retraite, de sorte qu’il a quitté en principe définitivement le marché du travail.


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