Terralaboris asbl

Compétence des juridictions du travail (après l’arrêt de la Cour constitutionnelle)

Commentaire de C. trav. Mons, 2 mai 2012, R.G. 2009/AM/21.575

Mis en ligne le jeudi 19 juillet 2012


Cour du travail de Mons, 2 mai 2012, R.G. n° 2009/AM/21.575

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 2 mai 2012, la Cour du travail de Mons statue après l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle du 22 septembre 2011, à laquelle elle avait posé une question préjudicielle par arrêt du 15 novembre 2010 sur les compétences des juridictions du travail pour connaître de ce type de litige.

Les faits

Un membre du corps de sapeurs-pompiers d’une commune du Hainaut soutient avoir été victime d’un accident du travail lors d’une intervention (incendie) en 2004. Une déclaration d’accident est faite et elle constate que des soins ont été donnés, l’intéressé s’étant blessé en descendant du camion.

La commune refus son intervention, suivant en cela son assureur, auprès de qui elle avait souscrit une assurance collective accident contre le risque d’accident subi par les membres du corps de sapeurs-pompiers volontaires.

Suite à un premier jugement du 16 janvier 2008, les parties furent invitées, dans le cadre d’une réouverture des débats, à préciser le statut de l’intéressé, engagé comme sapeur-pompier volontaire.

Le tribunal vida sa saisine par jugement du 1er avril 2009 considérant que l’action était non fondée tant dans le cadre de la loi réparant les accidents du travail dans le secteur public que dans celle relative au secteur privé, au double motif que le pompier était membre du personnel du secteur public sans contrat de travail et que la police d’assurance produite aux débats était une assurance collective couvrant tant les accidents corporels que les accidents de la vie privée et les accidents du travail.

Les décisions de la cour du travail et de la Cour constitutionnelle

Arrêt du 15 novembre 1988 de la Cour du travail de Mons

Suite à l’appel formé par le pompier, la Cour du travail de Mons posa, par arrêt du 15 novembre 2010 une question à la Cour constitutionnelle, aux fins de vérifier sa compétence d’attribution. Elle y rappelait que dans un arrêt du 19 décembre 1988 (Pas., 1989, I, 436), la Cour de cassation avait considéré que les accidents du travail au sens de l’article 579, 1° du Code judiciaire sont ceux couverts par une assurance légale obligatoire en vertu de la loi du 10 avril 1971 (et de celle du 3 juillet 1967). Par ailleurs, dans un arrêt du 4 juin 2009 (arrêt n° 094/2009), la Cour constitutionnelle avait considéré qu’il y avait violation de la Constitution en ses articles 10 et 11 si le Code judiciaire (article 579, 1°) était interprété comme ne permettant pas de connaître d’une demande relative à un accident couvert par une assurance accident de droit commun. Il s’agissait en l’espèce de participants à une formation professionnelle.

La cour posa, dès lors, la question à la Cour constitutionnelle.

Arrêt de la Cour constitutionnelle du 22 septembre 2011

La Cour donne une conclusion identique à celle de son arrêt du 4 juin 2009, appliquant son enseignement à l’hypothèse d’un accident survenu à des sapeurs-pompiers volontaires couverts par une assurance accident de droit commun.

La Cour considère que la nature des accidents donnant lieu à des demandes de réparation et l’importance des garanties à donner par les assureurs sont identiques ou analogues. Qu’elles soient fournies respectivement par une assurance de droit commun ou dans le cadre de la loi du 3 juillet 1967 ne peut justifier la compétence des tribunaux différents.

Arrêt du 2 mai 2012 de la Cour du travail de Mons

Vu l’enseignement de la Cour constitutionnelle, confirmant la compétence des juridictions du travail pour connaître de demandes relatives à la réparation de dommages découlant d’accidents du travail couverts par une police d’assurance de droit commun, la cour se déclare donc compétente s’agissant effectivement en l’espèce d’une police souscrite par une commune au profit des sapeurs-pompiers volontaires prestant à son service.

La cour du travail en vient ainsi du fond et constate que subsiste un doute quant à l’existence de l’événement soudain. Se pose en effet un problème de preuve de celui-ci. La cour rappelle les principes en la matière, principes qui mettent à charge du demandeur, en vertu des articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire, la preuve du fait accidentel.

Celui-ci demandant de pouvoir apporter la preuve de l’événement soudain par toutes voies de droit, témoins y compris, la cour rappelle que, lorsque cette demande porte sur un fait précis, pertinent et non contredit par les autres éléments du dossier, le juge est impérativement tenu d’y faire droit. C’est un droit absolu reconnu à toute partie désireuse de prouver le fait allégué. Le juge ne peut méconnaître celui-ci dès lors que le fait soumis à preuve répond aux conditions exigées par la Cour de cassation sur le plan de la précision et de la pertinence requises par l’article 955 du Code judiciaire. La cour renvoie ici à un arrêt de la Cour de cassation du 16 septembre 1996 (Cass., 16 septembre 1996, J.T.T., 1996, p. 501).

Il y a, dès lors, tenue d’enquête, le sapeur-pompier étant autorisé à apporter la preuve d’un fait précis, pertinent et admissible, permettant de conclure à la survenance d’un événement soudain.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la cour du travail de Mons boucle un débat sur la compétence des juridictions du travail pour connaître de polices d’assurance de droit commun conclues par les communes en faveur de sapeurs-pompiers volontaires. La Cour constitutionnelle était déjà intervenue précédemment sur la question des stagiaires en formation professionnelle.

Nul doute que si d’autres situations similaires lui étaient présentées, elle ne confirmerait cet enseignement, la nature du risque étant la même.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be