Terralaboris asbl

Sanction de la résiliation anticipée et sans motif valable d’une convention de formation professionnelle en entreprise

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 21 mai 2012, R.G. 2010/AB/255

Mis en ligne le mercredi 18 juillet 2012


Cour du travail de Bruxelles, 21 mai 2012, R.G. n° 2010/AB/255

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 21 mai 2012, la Cour du travail de Bruxelles examine la sanction à appliquer en cas de résiliation anticipée et sans motif valable d’une convention de formation professionnelle en entreprise.

Les faits

Dans le cadre d’une convention de formation professionnelle signée pour une période de 26 semaines, un employeur notifie un avertissement au travailleur et, trois semaines avant la fin de la formation, le travailleur est licencié. Le VDAB, partie à la convention, est informé et ne marque pas son accord sur la résiliation du contrat.

Une procédure est introduite par le travailleur devant le Tribunal du travail de Bruxelles, aux fins d’obtenir paiement de la prime correspondant à la partie restante de la formation, une rémunération pour une période de 26 semaines, une indemnité de rupture équivalente à 4 semaines ainsi que d’autres postes, l’employeur n’ayant pas payé la rémunération en totalité.

Décision du tribunal du travail

Par jugement du 8 février 2010, le Tribunal du travail de Bruxelles admet que l’employeur doit l’indemnité correspondant à la rémunération pour la partie restante de la formation, ainsi qu’un autre poste (frais de déplacement).

Appel est interjeté par le travailleur devant la cour du travail.

Décision de la cour du travail

La cour est saisie essentiellement de la demande relative à une indemnité correspondant au salaire pour une période de 26 semaines, ainsi qu’à une indemnité de rupture de 4 semaines.

Elle va examiner successivement la nature du contrat, la sanction de sa rupture, ainsi qu’un argument invoqué par la société tiré de la rupture du principe d’égalité, si la situation présente est comparée à celle d’un contrat à durée déterminée.

En ce qui concerne la nature du contrat, la cour rappelle qu’il s’agit d’un contrat de formation professionnelle en entreprise, régi par l’arrêté du gouvernement flamand du 21 décembre 1988 portant organisation de l’Office flamand de l’emploi et de la formation professionnelle (VDAB). Il ne s’agit dès lors pas d’un contrat soumis à la loi du 3 juillet 1978. L’objet du contrat n’est pas la fourniture de prestations de travail mais la formation du travailleur stagiaire.

La spécificité de ce type de contrat réside dans l’engagement de l’employeur de conclure avec le stagiaire un contrat à durée indéterminée à l’issue de la convention de formation, contrat auquel il ne peut être mis fin au plus tôt qu’après une période égale à celle de la durée de la formation, soit 6 mois.

Pendant la durée de la convention de formation professionnelle, il ne peut y avoir résiliation que par décision du VDAB ou en cas de fermeture d’entreprise (art. 121 de l’arrêté). La sanction d’une rupture anticipée est prévue et est reprise dans la convention de formation, étant qu’une résiliation anticipée intervenant sans motif valable et sans l’accord du VDAB implique l’obligation de payer une indemnité correspondant aux primes couvrant la période allant jusqu’à la fin de la convention de formation, ainsi que le salaire dont l’entreprise serait redevable dans le cadre du contrat à durée indéterminée devant être conclu à l’issue de celle-ci. Par ailleurs, en cas d’absence d’engagement du stagiaire à l’issue de la période de formation, l’entreprise doit verser une indemnité correspondant à la période équivalente à celle couverte par la convention de formation.

En l’occurrence, il y a eu résiliation anticipée et la cour constate que celle-ci est intervenue sans l’accord du VDAB. L’entreprise ne prouve pas, par ailleurs, l’existence d’un motif valable et la cour considère que la production d’une lettre d’avertissement, non étayée, ne suffit pas.

Il en découle que l’entreprise est redevable d’une indemnité égale au salaire de 6 mois, en sus des primes auxquelles elle a déjà été condamnée par le tribunal.

Il n’y a cependant pas lieu d’ajouter à ceci une indemnité de rupture correspondant à 4 semaines de rémunération, demande qui ne trouve son fondement ni dans l’arrêté du gouvernement ni dans le contrat. Il ne peut davantage être recouru au dispositif de la loi du 3 juillet 1978 puisqu’elle n’est pas applicable. La sanction du comportement de la société est celle visée dans la convention.

Enfin, à la société qui fait valoir qu’elle se trouve dans une position inégale par rapport à un employeur lié par un contrat à durée déterminée, la cour répond que la situation de ces deux catégories d’employeurs n’est pas comparable. Les contrats n’ont en effet pas le même objet, le premier étant un contrat en vue de la formation du stagiaire tandis que le second porte sur l’exécution d’un travail au sens de la loi du 3 juillet 1978.

La cour renvoie également à la politique des autorités publiques en matière de formation professionnelle, et particulièrement d’insertion professionnelle des chômeurs. Les employeurs concourent à la mise en œuvre de cette politique et la cour rappelle qu’ils bénéficient des avantages liés à celle-ci, ce qui justifie une sanction en cas de non-respect des dispositions en cause. Il n’y a, dès lors, pas de discrimination.

La cour va également rejeter l’argument de la société relatif à la nature de l’indemnité, qu’elle considère être une clause pénale, pouvant être réduite. La cour considère sur cette question que l’indemnité n’excède pas manifestement la réparation du dommage résultant de l’inexécution de la convention.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles rappelle les limitations à la possibilité de licencier dans le cadre d’un contrat de formation professionnelle et, particulièrement, en l’espèce, l’exigence d’un motif valable. A défaut de pouvoir justifier de celui-ci, l’entreprise qui a résilié anticipativement une convention de formation professionnelle en entreprise est tenue au paiement de l’indemnité forfaitaire de 6 mois, étant l’indemnité correspondant au salaire pour la durée équivalente à celle de la convention de formation.


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