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ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

14 octobre 2010 (*)

«Sécurité sociale – Règlement (CEE) n° 1408/71 – Titre III, chapitre 1 – Articles 28, 28 bis et 33 – Règlement (CEE) n° 574/72 – Article 29 –Libre circulation des personnes – Articles 21 TFUE et 45 TFUE – Prestations de l’assurance maladie – Titulaires de pension de vieillesse ou de rente d’incapacité du travail – Résidence dans un autre État membre que l’État débiteur de la pension ou rente – Fourniture de prestations en nature dans l’État de résidence à la charge de l’État débiteur – Absence d’inscription dans l’État de résidence – Obligation de paiement des cotisations dans l’État débiteur – Modification de la législation nationale de l’État débiteur – Continuité de l’assurance maladie – Différence de traitement entre résidents et non-résidents»

Dans l’affaire C‑345/09,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Centrale Raad van Beroep (Pays-Bas), par décision du 26 août 2009, parvenue à la Cour le 27 août 2009, dans la procédure

J. A. van Delft,

J. C. Ramaer,

J. M. van Willigen,

J. F. van der Nat,

C. M. Janssen,

O. Fokkens

contre

College voor zorgverzekeringen,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de chambre, MM. A. Arabadjiev, A. Rosas, U. Lõhmus et A. Ó Caoimh (rapporteur), juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 20 mai 2010,

considérant les observations présentées:

–        pour MM. van Delft et van Willigen, par Me E. Pijnacker Hordijk, advocaat,

–        pour M. Janssen, par Mes H. Frantzen et H. Ebbink, advocaten,

–        pour M. Fokkens, par lui-même,

–        pour le College voor zorgverzekeringen, par MM. M. van Dijen et R. G. van der Wissel, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement néerlandais, par Mme C. Wissels et M. J. Langer, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et D. Hadroušek, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement français, par M. G. de Bergues et Mme A. Czubinski, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement finlandais, par Mme A. Guimaraes-Purokoski, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par MM. V. Kreuschitz et M. van Beek, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 15 juillet 2010,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 28, 28 bis et 33, ainsi que des dispositions de l’annexe VI, section R, point 1, sous a) et b), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1992/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006 (JO L 392, p. 1, ci-après le «règlement n° 1408/71»), de l’article 29 du règlement (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d’application du règlement (CEE) n° 1408/71 relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté (JO L 74, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 311/2007 de la Commission, du 19 mars 2007 (JO L 82, p. 6, ci-après le «règlement n° 574/72»), ainsi que des articles 21 TFUE et 45 TFUE.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant MM. van Delft, Ramaer, van Willigen, van der Nat, Janssen et Fokkens (ci-après, ensemble, les «requérants au principal») au College voor zorgverzekeringen (Conseil des assurances soins de santé, ci-après le «CVZ») au sujet du paiement de cotisations dues au titre du régime légal obligatoire d’assurance maladie applicable aux Pays-Bas.

 Le cadre juridique

 La réglementation de l’Union

3        L’article 13 du règlement n° 1408/71, qui relève du titre II de celui-ci, intitulé «Détermination de la législation applicable», dispose:

«Règles générales

1.      Sous réserve des articles 14 quater et 14 septies, les personnes auxquelles le présent règlement est applicable ne sont soumises qu’à la législation d’un seul État membre. Cette législation est déterminée conformément aux dispositions du présent titre.

2.      Sous réserve des articles 14 à 17:

[…]

f)      la personne à laquelle la législation d’un État membre cesse d’être applicable, sans que la législation d’un autre État membre lui devienne applicable en conformité avec l’une des règles énoncées aux alinéas précédents ou avec l’une des exceptions ou règles particulières visées aux articles 14 à 17, est soumise à la législation de l’État membre sur le territoire duquel elle réside, conformément aux dispositions de cette seule législation.»

4        Contenu dans le même titre II, l’article 17 bis du règlement n° 1408/71, intitulé «Règles particulières concernant les titulaires de pensions ou de rentes dues au titre de la législation d’un ou de plusieurs États membres», est libellé comme suit:

«Le titulaire d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation d’un État membre ou de pensions ou de rentes dues au titre des législations de plusieurs États membres, qui réside sur le territoire d’un autre État membre, peut être exempté, à sa demande, de l’application de la législation de ce dernier État, à condition qu’il ne soit pas soumis à cette législation en raison de l’exercice d’une activité professionnelle».

5        Le titre III du règlement n° 1408/71 contient les dispositions particulières aux différentes catégories de prestations auxquelles celui-ci est applicable en vertu de son article 4, paragraphe 1. Le chapitre 1, du titre III dudit règlement concerne les prestations de maladie et de maternité.

6        Contenu dans la section 5, dudit chapitre 1, intitulée «Titulaires de pensions ou de rentes et membres de leur famille», l’article 28 du règlement n° 1408/71, intitulé «Pensions ou rentes dues en vertu de la législation d’un seul ou de plusieurs États, un droit aux prestations n’existant pas dans le pays de résidence», dispose:

«1.      Le titulaire d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation d’un État membre ou de pensions ou de rentes dues au titre des législations de deux ou plusieurs États membres qui n’a pas droit aux prestations au titre de la législation de l’État membre sur le territoire duquel il réside bénéficie néanmoins de ces prestations pour lui-même et les membres de sa famille, dans la mesure où il y aurait droit en vertu de la législation de l’État membre ou de l’un au moins des États membres compétents en matière de pension, compte tenu, le cas échéant, des dispositions de l’article 18 et de l’annexe VI, s’il résidait sur le territoire de l’État concerné. Le service des prestations est assuré dans les conditions suivantes:

a)      les prestations en nature sont servies pour le compte de l’institution visée au paragraphe 2 par l’institution du lieu de résidence, comme si l’intéressé était titulaire d’une pension ou d’une rente en vertu de la législation de l’État sur le territoire duquel il réside et avait droit aux prestations en nature;

[…]

2.      Dans les cas visés au paragraphe 1, la charge des prestations en nature incombe à l’institution déterminée selon les règles suivantes:

a)      si le titulaire a droit auxdites prestations en vertu de la législation d’un seul État membre, la charge en incombe à l’institution compétente de cet État;

[…]»

7        Contenu dans la même section, l’article 28 bis du règlement n° 1408/71, intitulé «Pensions ou rentes dues en vertu de la législation d’un seul ou de plusieurs États membres autres que le pays de résidence, un droit aux prestations en nature existant dans ce dernier pays», prévoit:

«En cas de résidence du titulaire d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation d’un État membre ou de pensions ou rentes dues au titre des législations de deux ou plusieurs États membres, sur le territoire d’un État membre, selon la législation duquel le droit aux prestations en nature n’est pas subordonné à des conditions d’assurance ou d’emploi et au titre de la législation duquel aucune pension ou rente n’est due, la charge des prestations en nature qui sont servies à ce titre ainsi qu’aux membres de sa famille incombe à l’institution de l’un des États membres compétents en matière de pensions, déterminée selon les règles fixées à l’article 28 paragraphe 2, pour autant que ledit titulaire et les membres de sa famille auraient droit à ces prestations en nature en vertu de la législation appliquée par ladite institution s’ils résidaient sur le territoire de l’État membre où se trouve cette institution.»

8        Aux termes de l’article 33 du règlement n° 1408/71, qui figure également à la section 5 du titre III, chapitre 1, dudit règlement et qui est intitulé «Cotisations à charge des titulaires de pensions ou de rentes»:

«1.      L’institution d’un État membre débitrice d’une pension ou d’une rente qui applique une législation prévoyant des retenues de cotisations à la charge du titulaire d’une pension ou d’une rente, pour la couverture des prestations de maladie et de maternité, est autorisée à opérer ces retenues, calculées suivant ladite législation, sur la pension ou la rente dues par elle, dans la mesure où les prestations servies en vertu des articles 27, 28, 28 bis, 29, 31 et 32 sont à la charge d’une institution dudit État membre.

2.      Lorsque, dans les cas visés à l’article 28 bis, le titulaire d’une pension ou d’une rente est soumis, du fait de sa résidence, à cotisations ou retenues équivalentes pour la couverture des prestations de maladie et de maternité en vertu de la législation de l’État membre sur le territoire duquel il réside, ces cotisations ne sont pas exigibles.»

9        Conformément à l’article 36, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71, les prestations en nature servies par l’institution d’un État membre pour le compte de l’institution d’un autre État membre, en vertu notamment des dispositions des articles 28, 28 bis et 33 de ce règlement, donnent lieu à remboursement intégral.

10      Le point 1, sous a) à c), de la section R de l’annexe VI au règlement n° 1408/71 s’énonce comme suit:

«1. Assurance soins de santé

a)      En ce qui concerne le droit aux prestations en nature en vertu de la législation néerlandaise, il y a lieu d’entendre par bénéficiaire des prestations en nature, aux fins de l’application du chapitre 1er et du chapitre 4 du titre III du présent règlement:

i)      la personne tenue de s’assurer auprès d’un organisme d’assurance soins de santé en vertu de l’article 2 de la Zorgverzekeringswet (loi sur l’assurance soins de santé),

et

ii)      la personne non visée au point i) qui réside dans un autre État membre et qui, en vertu du règlement, peut prétendre à des soins de santé dans son pays de résidence à la charge des Pays-Bas.

b)      Les personnes visées au point a) i) doivent, conformément aux dispositions de la Zorgverzekeringswet (loi sur l’assurance soins de santé), s’assurer auprès d’un organisme d’assurance soins de santé et les personnes visées au point a) ii) doivent s’inscrire au College voor zorgverzekeringen (Conseil des assurances soins de santé).

c)      Les dispositions de la Zorgverzekeringswet (loi sur l’assurance soins de santé) et de la Algemene wet bijzondere ziektekosten (loi générale sur les frais médicaux spéciaux) relatives à l’obligation de payer des cotisations s’appliquent aux personnes visées au point a) et aux membres de leur famille. Pour ce qui est des membres de la famille, les cotisations sont prélevées auprès de la personne dont découle le droit aux soins de santé».

11      L’article 29 du règlement n° 574/72, qui fixe les modalités d’application du règlement n° 1408/71, prévoit, sous l’intitulé «Prestations en nature aux titulaires de pensions ou de rentes et aux membres de leur famille n’ayant pas leur résidence dans un État membre au titre de la législation duquel ils bénéficient d’une pension ou d’une rente et ont droit aux prestations»:

«1.      Pour bénéficier des prestations en nature en vertu de l’article 28 paragraphe 1 et de l’article 28 bis du règlement, sur le territoire de l’État membre où il réside, le titulaire de pension ou de rente est tenu de se faire inscrire ainsi que les membres de sa famille résidant dans le même État membre, auprès de l’institution du lieu de résidence, en présentant une attestation certifiant qu’il a droit auxdites prestations, pour lui-même et pour les membres de sa famille, en vertu de la législation ou de l’une des législations au titre desquelles une pension ou une rente est due.

2.      Cette attestation est délivrée, à la demande du titulaire, par l’institution ou par l’une des institutions débitrices de pension ou de rente ou, le cas échéant, par l’institution habilitée à décider du droit aux prestations en nature, dès que le titulaire satisfait aux conditions d’ouverture du droit à ces prestations. Si le titulaire ne présente pas l’attestation, l’institution du lieu de résidence s’adresse pour l’obtenir à l’institution ou aux institutions débitrices de pension ou de rente ou, le cas échéant, à l’institution habilitée à cet effet. En attendant la réception de cette attestation, l’institution du lieu de résidence peut procéder à une inscription provisoire du titulaire et des membres de sa famille résidant dans le même État membre, au vu des pièces justificatives admises par elle. Cette inscription n’est opposable à l’institution à laquelle incombe la charge des prestations en nature que lorsque cette dernière institution a délivré l’attestation prévue au paragraphe 1.»

12      L’article 95 dudit règlement prévoit que le montant des prestations en nature servies en vertu des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 est remboursé par les institutions compétentes aux institutions qui ont servi lesdites prestations, sur la base d’un forfait aussi proche que possible des dépenses réelles, dont les modalités de calcul sont définies par cette disposition.

13      Ainsi qu’il ressort de la décision n° 153 de la commission administrative des Communautés européennes pour la sécurité sociale des travailleurs migrants, du 7 octobre 1993, concernant les modèles de formulaires nécessaires à l’application des règlements (CEE) n° 1408/71 et (CEE) n° 574/72 du Conseil (E 001, E 103 - E 127) (JO 1994, L 244, p. 22), telle que modifiée par la décision n° 202 de la commission administrative des Communautés européennes pour la sécurité sociale des travailleurs migrants, du 17 mars 2005 (JO 2006, L 77, p. 1), le formulaire E 121 constitue l’attestation requise aux fins de l’inscription d’un titulaire de pension ou de rente et des membres de sa famille auprès de l’institution du lieu de leur résidence conformément aux prévisions des articles 28 du règlement n° 1408/71 et 29 du règlement n° 574/72.

 La réglementation nationale

14      Avant le 1er janvier 2006, la loi sur les caisses de maladie (Ziekenfondswet, ci-après la «ZFW») prévoyait un régime légal obligatoire d’assurance maladie pour les seuls travailleurs salariés dont le revenu était inférieur à un certain seuil.

15      Ce régime légal obligatoire était également applicable, sous certaines conditions, aux non-résidents titulaires d’une pension au titre de la loi portant régime général d’assurance vieillesse (Algemene Ouderdomswet, ci-après la «AOW») ou d’une rente au titre de la loi relative à l’assurance contre l’incapacité de travail (Wet op de arbeidsongeschiktheidsverzekering, ci-après la «WAO»).

16      Les personnes ne relevant pas de ce régime devaient, en revanche, pour être couvertes en ce qui concerne le risque de maladie, conclure à titre privé un contrat d’assurance auprès d’une compagnie d’assurances.

17      Depuis le 1er janvier 2006, la loi sur l’assurance soins de santé (Zorgverzekeringswet, ci-après la «ZVW») institue un régime légal obligatoire d’assurance maladie pour toutes les personnes résidant ou travaillant aux Pays-Bas.

18      L’article 69 de ladite loi, dans sa version applicable au 1er août 2008, est libellé comme suit:

«1.      Les personnes résidant à l’étranger qui, par application d’un règlement du Conseil des communautés européennes ou par application d’un règlement adopté en vertu de l’accord sur l’Espace économique européen ou d’un traité en matière de sécurité sociale, ont droit, en cas de besoin, aux soins ou au remboursement de ceux-ci, comme le prévoit la législation sur l’assurance des soins dans leur pays de résidence, se font connaître auprès du [CVZ], à moins qu’elles relèvent, en vertu de la présente loi, de l’assurance obligatoire.

2.      Les personnes visées au premier alinéa sont redevables d’une cotisation qui sera fixée par arrêté ministériel. Pour une partie qui sera fixée par cet arrêté, ladite cotisation est considérée, pour l’application de la loi sur les allocations de soins de santé [(Wet op de zorgtoeslag)] comme une prime pour une assurance soins de santé.

3.      Si elle ne s’est pas fait connaître dans les quatre mois de la naissance du droit visé au paragraphe 1, le [CVZ] impose à la personne qui aurait dû le faire une amende égale à 130 % d’une partie fixée par arrêté ministériel de la cotisation visée au paragraphe 2, sur une période équivalant à la période écoulée entre le jour de la naissance du droit et le jour où la personne s’est fait connaître, sans excéder cinq ans.

4.      Le [CVZ] est chargé de l’administration résultant des dispositions du premier alinéa et des règlements internationaux qui y sont mentionnés, ainsi que des décisions concernant le prélèvement et la perception de la cotisation mentionnée au deuxième alinéa […]»

19      Les articles 6.3.1, paragraphe 1, et 6.3.2, paragraphe 1, du règlement sur l’assurance soins de santé (Regeling zorgverzekering) disposent, respectivement, ce qui suit:

«La cotisation due pour une personne visée à l’article 69, premier alinéa, de la [ZVW] est calculée en multipliant la base de la cotisation par le chiffre représentant le rapport entre les dépenses moyennes de soins pour une personne à charge de l’assurance maladie dans le pays de résidence de cette personne, et les dépenses moyennes de soins pour une personne à charge de l’assurance maladie aux Pays‑Bas.

[…]

La cotisation visée à l’article 6.3.1 pour une personne visée à l’article 69, premier alinéa, de la [ZVW] qui ouvre le droit à une pension ou rente et pour les membres de sa famille est retenue par l’institution qui octroie la pension ou la rente sur cette pension ou cette rente, et transférée à la caisse d’assurance soins de santé.»

20      L’article 2.5.2, paragraphe 2, de la loi portant application et adaptation de la loi sur l’assurance soins de santé (Invoerings- en aanpassingswet Zorgverzekeringswet, ci-après l’«IZVW») prévoit:

«Un accord portant sur l’assurance pour les soins médicaux ou leurs coûts, conclu pour ou avec une personne résidant à l’étranger qui, par application d’un règlement du Conseil des Communautés européennes ou par application d’un règlement adopté en vertu de l’accord sur l’Espace économique européen ou d’un traité en matière de sécurité sociale, a droit aux soins ou au remboursement de ceux-ci, comme cela est prévu par la législation sur l’assurance des soins dans son pays de résidence, cesse ses effets à dater du 1er janvier 2006, dans la mesure où il faisait naître des droits équivalant à ceux dont l’intéressé peut se prévaloir à partir de ce moment par application d’un tel règlement ou traité, si l’assuré a satisfait avant le 1er mai 2006 à l’obligation de se faire connaître auprès du [CVZ] conformément à l’article 69 de la [ZVW]».

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

21      Les requérants au principal, tous ressortissants de nationalité néerlandaise résidant dans un autre État membre que le Royaume des Pays-Bas, en l’occurrence, selon le cas, en Belgique, en Espagne, en France et à Malte, sont titulaires, soit d’une pension au titre de la AOW, soit d’une rente au titre de la WAO.

22      Avant le 1er janvier 2006, ces requérants, dont aucun n’était assuré au titre du régime légal obligatoire d’assurance maladie institué par la ZFW, avaient conclu à titre privé, en vue de se couvrir contre le risque de maladie, des contrats d’assurance auprès de compagnies d’assurances établies, selon le cas, aux Pays-Bas ou dans d’autres États membres.

23      À la suite de l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2006, de la ZVW, le CVZ a considéré que, puisque les requérants au principal auraient relevé, s’ils avaient résidé aux Pays-Bas, du régime légal obligatoire d’assurance maladie prévu par la ZVW, ils ont dorénavant droit, conformément aux articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, aux prestations en nature dans leur État de résidence à la charge des institutions de l’État débiteur de la pension ou de la rente, à savoir les Pays-Bas. Le CVZ a dès lors transmis à chacun de ces requérants un formulaire E 121 afin qu’ils puissent s’inscrire auprès d’une caisse de maladie dans leur État de résidence. MM. Ramaer, van der Nat et Fokkens ont procédé à cette inscription, mais «sous réserve» pour ce dernier. En revanche, MM. van Delft, van Willigen et Janssen ont refusé de s’inscrire.

24      À la même date du 1er janvier 2006, les requérants au principal qui avaient conclu à titre privé un contrat d’assurance avec une compagnie établie aux Pays-Bas ont vu ce contrat résilié de plein droit en vertu des dispositions de l’IZVW. En revanche, ceux d’entre eux qui avaient conclu un tel contrat avec une compagnie établie dans un autre État membre l’ont conservé.

25      Par décisions prises, selon le cas, dans le courant de l’année 2006 ou en 2007, le CVZ a retenu sur les pensions et rentes servies aux requérants au principal le montant de la cotisation prévue à l’article 69 de la ZVW pour bénéficier du régime légal obligatoire d’assurance maladie institué par cette loi.

26      Par jugements des 31 janvier et 17 décembre 2008, le Rechtbank te Amsterdam a rejeté les recours introduits par les requérants au principal en vue de contester ces décisions.

27      Ces requérants ont saisi le Centrale Raad van Beroep d’un appel contre ces jugements.

28      Selon la décision de renvoi, l’ensemble des requérants au principal soutiennent, dans le cadre de cet appel, que les articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 ne contiennent pas des règles contraignantes visant à déterminer la législation applicable sur la base de laquelle ils seraient d’office soumis au régime des prestations en nature de l’État membre de résidence. Ces requérants estiment, en revanche, qu’ils disposent du choix, soit de s’inscrire, au moyen du formulaire E 121, auprès de l’institution compétente de l’État de résidence, conformément à l’article 29 du règlement n° 574/72, afin de bénéficier des prestations en nature dans cet État au titre des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, soit, à défaut d’inscription auprès de ladite institution, de conclure un contrat d’assurance privée. Dans ce dernier cas, l’État membre débiteur des pensions et rentes ne pourrait retenir une cotisation aux termes de l’article 33 dudit règlement puisque les prestations en nature ne seraient alors pas à la charge d’une institution de cet État.

29      Par ailleurs, toujours selon la décision de renvoi, tous les requérants au principal font valoir une violation des droits qu’ils tirent des articles 21 TFUE et 45 TFUE du fait qu’ils sont obligés de payer une cotisation pour des prestations dans l’État de résidence dont ils ne souhaitent pas bénéficier dès lors qu’elles sont, selon eux, moins avantageuses. Ils souhaiteraient, en revanche, le maintien de la situation antérieure au 1er janvier 2006 afin de pouvoir conclure eux-mêmes un contrat d’assurance à titre privé pour l’ensemble des frais de maladie.

30      Il ressort de la décision de renvoi que le CVZ soutient, pour sa part, que le droit aux prestations en nature au titre des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 ne dépend pas de l’inscription auprès de l’institution compétente de l’État de résidence, de sorte que, même si les intéressés ne se sont pas inscrits auprès de celle-ci et n’ont donc pas fait valoir le droit aux prestations en nature résultant de ces dispositions, l’État membre débiteur de la pension ou de la rente est autorisé à opérer une retenue sur celle-ci. Dans le cas contraire, il serait porté atteinte à la solidarité du régime de sécurité sociale dès lors que tout intéressé pourrait se permettre d’attendre le moment où il a besoin des soins pour s’inscrire et, partant, pour être redevable du paiement des cotisations.

31      La juridiction de renvoi relève que plusieurs éléments semblent indiquer que le règlement n° 1408/71 exclut le droit d’option invoqué par les requérants au principal. En effet, ledit règlement déterminerait de façon contraignante l’État qui doit octroyer les prestations à l’intéressé et l’État à charge duquel ces prestations sont dues. Par ailleurs, lorsque le règlement n° 1408/71 prévoit un droit d’option, il le ferait de manière expresse. En revanche, il pourrait ressortir tant de l’article 29 du règlement n° 574/72 que de l’arrêt du 3 juillet 2003, van der Duin et ANOZ Zorgverzekeringen (C‑156/01, Rec. p. I‑7045, point 40), que l’inscription auprès de l’institution de l’État de résidence est l’élément qui entraîne l’application des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71. Dans ces conditions, à défaut d’une telle inscription, les requérants au principal ne seraient pas à la charge des institutions compétentes aux Pays-Bas au sens de l’article 33 du règlement n° 1408/71 puisque aucune prestation ne pourrait, dans un tel cas, leur être octroyée. Les conditions d’application prévues par cette disposition pour le prélèvement d’une cotisation ne seraient donc pas toutes remplies.

32      Par ailleurs, selon la juridiction de renvoi, si le droit d’option invoqué par les requérants était exclu par le règlement n° 1408/71, la question se poserait de savoir si la cotisation retenue en application de l’article 69 de la ZVW et de l’article 33 dudit règlement est contraire aux articles 21 TFUE et/ou 45 TFUE.

33      À cet égard, ladite juridiction relève que, si l’application d’un coefficient de résidence a eu pour effet de réduire le montant dû par les non-résidents par rapport à celui dû par les résidents et si le droit de l’Union ne garantit pas à un travailleur que le transfert de ses activités ou de sa résidence dans un autre État membre soit neutre en matière de sécurité sociale, il demeure que, pour les requérants au principal, déjà couverts à titre privé par un contrat d’assurance à la date d’entrée en vigueur de la ZVW, celle-ci pourrait avoir pour effet qu’il devient moins intéressant de continuer à se prévaloir de leur droit de circuler et de séjourner librement en dehors des Pays-Bas. En effet, d’une part, ils devraient exposer davantage de frais pour l’assurance maladie et, d’autre part, ils bénéficieraient de soins moins avantageux. Or, si le souhait du législateur néerlandais de prévoir une assurance maladie obligatoire en faveur de tous les résidents aux Pays-Bas peut être considéré comme un motif fondé sur des considérations objectives d’intérêt général, la conformité au principe de proportionnalité de l’obligation de payer à cet effet une cotisation même en l’absence d’inscription dans l’État de résidence n’apparaîtrait pas clairement.

34      Dans ces conditions, le Centrale Raad van Beroep a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Les articles 28, 28 bis et 33 du règlement n° 1408/71, les dispositions de l’annexe VI au règlement n° 1408/71, section R, point 1, sous a) et b), et l’article 29 du règlement n° 574/72 doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition nationale telle que l’article 69 de la [ZVW], dans la mesure où le titulaire d’une pension ou d’une rente, qui peut, en principe, faire valoir le droit aux articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, est tenu de se faire connaître auprès du [CVZ] et qu’une cotisation doit être retenue sur la pension ou la rente de ce titulaire, même s’il n’est pas inscrit au sens de l’article 29 du règlement n° 574/72?

2)      L’article [21 TFUE] ou l’article [45 TFUE] doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition nationale telle que l’article 69 de la [ZVW] dans la mesure où un citoyen de l’[Union] qui peut, en principe, faire valoir le droit aux articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, est tenu de se faire connaître auprès du [CVZ] et qu’une cotisation doit être retenue sur la pension ou la rente de ce citoyen, même s’il n’est pas inscrit au sens de l’article 29 du règlement n° 574/72?»

35      Sur demande de la juridiction de renvoi, le président de la Cour a décidé que cette affaire devait être jugée par priorité en vertu de l’article 55, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure de la Cour.

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question

36      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande si les articles 28, 28 bis et 33 du règlement n° 1408/71, lus en combinaison avec l’article 29 du règlement n° 574/72, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation de cet État qui, à l’instar des requérants au principal, résident dans un autre État membre, doivent, pour y bénéficier des prestations de maladie en nature auxquelles ils ont droit à charge du premier État membre, d’une part, se faire connaître auprès de l’institution compétente de celui-ci et, d’autre part, s’acquitter, sous forme de retenue sur ladite pension ou rente, d’une cotisation au titre desdites prestations, même lorsqu’ils ne se sont pas inscrits auprès de l’institution compétente de l’État membre de leur résidence.

37      Il ressort de la décision de renvoi que cette question est posée dans le cadre d’un litige portant sur la légalité de cotisations réclamées aux requérants au principal par les autorités néerlandaises au titre des prestations de maladie en nature servies, en vertu des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, dans l’État membre de leur résidence à la charge du Royaume des Pays-Bas, à la suite de l’entrée en vigueur dans cet État membre, le 1er janvier 2006, du nouveau régime légal obligatoire d’assurance maladie institué par la ZVW, qui, remplaçant celui prévu avant cette date par la ZFW pour les seuls travailleurs salariés dont les revenus étaient inférieurs à certains seuils, s’applique désormais à l’ensemble des personnes résidant ou travaillant dans cet État membre.

38      À cet égard, il convient d’emblée de rappeler que les articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 énoncent une «règle de conflit» permettant de déterminer, pour les titulaires d’une pension ou d’une rente résidant dans un État membre autre que l’État débiteur de ladite pension ou rente, l’institution chargée du service des prestations qui y sont visées, ainsi que la législation applicable (voir arrêts du 10 janvier 1980, Jordens-Vosters, 69/79, Rec. p. 75, point 12; du 10 mai 2001, Rundgren, C‑389/99, Rec. p. I‑3731, points 43 et 44, ainsi que van der Duin et ANOZ Zorgverzekeringen, précité, point 39).

39      Conformément à l’article 28 du règlement n° 1408/71, les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation d’un État membre qui résident dans un autre État membre, dans lequel ils n’ont pas droit aux prestations de maladie en nature, bénéficient, pour le compte et à la charge de l’État débiteur de ladite pension ou rente, de ces prestations servies par l’institution compétente de l’État membre de leur résidence, dans la mesure où ils auraient droit à celles-ci en vertu de la législation de l’État débiteur de la pension ou rente s’ils résidaient sur le territoire de celui-ci (voir arrêt van der Duin et ANOZ Zorgverzekeringen, précité, points 40, 47 et 53).

40      L’article 28 bis du règlement n° 1408/71 prévoit une règle en substance comparable lorsqu’un droit aux prestations de maladie en nature existe dans l’État membre de résidence, ce dernier ne subordonnant pas ce droit aux prestations à des conditions d’assurance ou d’emploi, et ce, afin de ne pas pénaliser les États membres dont la législation ouvre un droit aux prestations en nature sur le seul fondement de la résidence sur leur territoire (voir arrêt Rundgren, précité, points 43 et 45).

41      Il s’ensuit que, en l’occurrence, à la suite de l’entrée en vigueur de la ZVW, les titulaires d’une pension ou rente due au titre de la législation néerlandaise, tels les requérants au principal, résidant dans un autre État membre que les Pays-Bas, qui, avant cette date, ne relevaient pas des dispositions des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 – étant exclus, eu égard à leur niveau de revenus, et quel que soit leur lieu de résidence, des prestations de maladie prévues par le régime légal obligatoire d’assurance maladie – relèvent, à compter du 1er janvier 2006, des dispositions desdits articles.

42      En vertu de l’annexe VI, section R, point 1, sous a) et b), du règlement n° 1408/71, de tels titulaires d’une pension ou rente, qui ont droit, à charge du Royaume des Pays-Bas, aux prestations de maladie en nature dans l’État membre de leur résidence en vertu des articles 28 et 28 bis de ce règlement, doivent se faire connaître à cette fin auprès du CVZ. En outre, aux termes de l’article 29 du règlement n° 574/72, ils doivent également s’inscrire, pour bénéficier de ces prestations, auprès de l’institution compétente de l’État membre de leur résidence, en présentant une attestation certifiant leur droit auxdites prestations en vertu de la législation de l’État débiteur de la pension ou rente. Cette attestation est constituée par le formulaire E 121.

43      Il ressort des éléments du dossier présentés devant la Cour que, en l’occurrence, l’obligation pour les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation néerlandaise qui résident dans un autre État membre que les Pays-Bas de se faire connaître, afin d’y bénéficier des prestations de maladie en nature au titre des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, auprès du CVZ, même si elle est mentionnée dans le libellé de la première question préjudicielle, n’est mise en cause dans le cadre du litige au principal que dans la mesure où elle déclenche la rétention par ledit État sur leur pension ou rente des cotisations dont la légalité est contestée.

44      Dans ces conditions, il convient de considérer que, par sa première question, la juridiction de renvoi vise en substance à savoir si des titulaires d’une pension ou rente qui, tels que les requérants au principal, résident dans un État membre autre que l’État débiteur de leur pension ou rente peuvent, en s’abstenant de s’inscrire auprès de l’institution compétente de l’État membre dans lequel ils résident, choisir de se soustraire à l’application du règlement n° 1408/71, et, partant, de renoncer au bénéfice des prestations servies dans ce dernier État membre en vertu des articles 28 et 28 bis de ce règlement et, ainsi, ne pas être tenus au paiement des cotisations dues à ce titre, conformément à l’article 33 dudit règlement, dans l’État membre débiteur de leur pension ou rente.

45      À titre liminaire, MM. Janssen et Fokkens soutiennent cependant que, contrairement à ce que suppose la juridiction de renvoi, leur situation relève, non pas des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, mais de l’article 13, paragraphe 2, sous f), de ce règlement, en vertu duquel, dès lors que la législation néerlandaise ne leur est plus applicable du fait de la cessation de leurs activités professionnelles aux Pays-Bas, ils relèvent exclusivement de la législation de l’État membre de leur résidence, sans qu’ils disposent de la moindre possibilité de choix. Le Royaume des Pays-Bas ne serait donc pas compétent pour prélever une cotisation au titre de telles prestations.

46      À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1408/71, la personne à laquelle la législation d’un État membre cesse d’être applicable, sans que la législation d’un autre État membre lui devienne applicable en vertu des dispositions des articles 13, paragraphe 2, sous a) à d), ou 14 à 17 de ce même règlement, est soumise à la législation de l’État membre sur le territoire duquel elle réside. Selon une jurisprudence constante, ledit article 13, paragraphe 2, sous f), est applicable, notamment, aux personnes ayant définitivement cessé toute activité (arrêts du 11 juin 1998, Kuusijärvi, C‑275/96, Rec. p. I‑3419, points 39 et 40, ainsi que du 11 novembre 2004, Adanez-Vega, C‑372/02, Rec. p. I‑10761, point 24).

47      Toutefois, cette disposition de caractère général qui figure sous le titre II du règlement n° 1408/71, intitulé «Détermination de la législation applicable», ne trouve à s’appliquer que dans la mesure où les dispositions particulières aux différentes catégories de prestations qui forment le titre III du même règlement n’y apportent pas de dérogation (voir arrêt du 27 mai 1982, Aubin, 227/81, Rec. p. 1991, point 11).

48      Or, précisément, les articles 28 et 28 bis de ce règlement, qui figurent sous le titre III, chapitre 1, de celui-ci, intitulé «Maladie et maternité», dérogent à ces règles générales en ce qui concerne le service des prestations de maladie en nature aux titulaires d’une pension ou d’une rente qui résident dans un État membre autre que l’État débiteur de ladite pension ou rente.

49      C’est dès lors à juste titre que, dans une affaire telle que celle au principal, la juridiction de renvoi a écarté l’application de l’article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1408/71, au profit des articles 28 et 28 bis de ce règlement.

50      À cet égard, la juridiction de renvoi s’interroge en substance, d’une part, sur le caractère impératif du régime institué par lesdits articles 28 et 28 bis pour les titulaires de pension ou de rente relevant du champ d’application de ces dispositions et, d’autre part, sur l’obligation pour ceux-ci de s’acquitter du paiement de cotisations au titre des prestations prévues par ces dispositions.

51      En ce qui concerne, en premier lieu, la possibilité pour des titulaires d’une pension ou d’une rente qui résident dans un autre État membre que l’État débiteur de celle-ci de renoncer à l’application du régime prévu aux articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, les dispositions du règlement n° 1408/71 déterminant la législation applicable forment un système de règles de conflit dont le caractère complet a pour effet de soustraire aux législateurs nationaux le pouvoir de déterminer l’étendue et les conditions d’application de leur législation nationale en la matière, quant aux personnes qui y sont soumises et quant au territoire à l’intérieur duquel les dispositions nationales produisent leurs effets (voir, notamment, arrêt Adanez-Vega, précité, point 18 et jurisprudence citée).

52      Or, les règles de conflit prévues par le règlement n° 1408/71 s’imposant ainsi de manière impérative aux États membres, il ne saurait à plus forte raison être admis que les assurés sociaux relevant du champ d’application de ces règles puissent en contrecarrer les effets en disposant du choix de s’y soustraire. En effet, l’application du système de conflit de loi instauré par le règlement n° 1408/71 ne dépend que de la situation objective dans laquelle se trouve le travailleur intéressé (voir, en ce sens, arrêts du 12 décembre 1967, Couture, 11/67, Rec. p. 487, 500; du 13 décembre 1967, Guissart, 12/67, Rec. p. 551, 562, et du 29 juin 1994, Aldewereld, C‑60/93, Rec. p. I‑2991, points 16 à 20).

53      Dans ce contexte, la Cour a déjà jugé, s’agissant de travailleurs migrants, que ni le traité FUE, notamment son article 45, ni le règlement n° 1408/71 n’offrent à ces travailleurs le choix de renoncer par avance au bénéfice du mécanisme mis en place, notamment par l’article 28, paragraphe 1, dudit règlement (arrêt du 5 mars 1998, Molenaar, C‑160/96, Rec. p. I‑843, point 42).

54      Au demeurant, lorsque le règlement n° 1408/71 ouvre un droit d’option aux assurés sociaux relevant de son champ d’application quant à la législation applicable, il le prévoit explicitement (arrêt Aubin, précité, point 19).

55      Certes, tel est le cas, notamment, ainsi que l’ont souligné MM. van Delft et van Willigen, de l’article 17 bis du règlement n° 1408/71, qui permet aux titulaires de pension ou de rente due au titre de la législation d’un ou de plusieurs États membres qui résident dans un autre État membre de demander à être exemptés de l’application de la législation de ce dernier État membre à condition qu’ils ne soient pas soumis à celle-ci en raison de l’exercice d’une activité professionnelle.

56      Toutefois, il est constant que cette disposition, qui figure sous le titre II du règlement n° 1408/71, n’est pas applicable dans une affaire telle que celle au principal, dès lors que, comme l’ont reconnu MM. van Delft et van Willigen, les articles 28 et 28 bis dudit règlement contiennent, s’agissant des prestations de maladie dues à ces titulaires de pension ou rente, des règles particulières dérogatoires.

57      En revanche, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 47 de ses conclusions, les articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 n’offrent, aux termes de leur libellé, aucun droit d’option aux titulaires de pensions et de rentes qui relèvent de ces dispositions. En effet, l’article 28 de ce règlement prévoit de façon impérieuse que, lorsque le titulaire d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation d’un État membre réside dans un autre État membre dans lequel il n’a pas droit aux prestations, il «bénéficie» néanmoins des prestations en nature servies par l’institution compétente de cet État membre, dans la mesure où il y aurait droit s’il résidait dans l’État membre débiteur de sa pension ou rente. De même, lorsque l’État membre de résidence prévoit un droit aux prestations en nature, l’article 28 bis de ce règlement impose à l’État membre débiteur de la pension ou de la rente, sans offrir aucune alternative, de prendre en charge ces prestations, dans la mesure également où le titulaire de ladite pension ou rente y aurait droit s’il résidait dans l’État membre débiteur de celle-ci.

58      Les requérants au principal allèguent toutefois que, selon les termes de l’article 29 du règlement n° 574/72, «pour bénéficier» des prestations en nature en vertu des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 dans l’État membre de leur résidence, le titulaire d’une pension ou d’une rente doit se faire inscrire auprès de l’institution compétente de cet État en présentant une attestation, sous la forme du formulaire E 121, certifiant qu’il a droit à ces prestations en vertu de la législation au titre de laquelle ladite pension ou rente est due.

59      Ces mêmes requérants soutiennent à cet égard que, aux points 40, 47 et 53 de l’arrêt van der Duin et ANOZ Zorgverzekeringen, précité, la Cour a jugé que ce n’est que «une fois que» le titulaire d’une pension ou d’une rente a souscrit au régime qu’instaure l’article 28 du règlement n° 1408/71 en s’inscrivant auprès de l’institution de l’État membre de résidence que ledit titulaire bénéficie d’un droit aux prestations en nature dans ce dernier État. Il en résulterait que l’absence d’inscription auprès de l’institution compétente de l’État membre de résidence permettrait au titulaire d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation d’un autre État membre de renoncer au droit aux prestations en nature dans l’État membre de résidence.

60      Cette argumentation ne saurait cependant être retenue.

61      En effet, en délivrant le formulaire E 121, l’institution compétente d’un État membre se borne à déclarer que l’assuré social concerné aurait droit aux prestations en nature en vertu de la législation de cet État s’il y résidait (voir, par analogie, arrêts du 10 février 2000, FTS, C‑202/97, Rec. p. I‑883, point 50, ainsi que du 30 mars 2000, Banks e.a., C‑178/97, Rec. p. I-2005, point 53).

62      Un tel formulaire étant purement déclaratif, sa présentation à l’institution compétente d’un État membre en vue d’une inscription de l’assuré social concerné dans ce dernier ne saurait donc constituer une condition de la naissance de droits aux prestations dans cet État membre.

63      Il en résulte que l’inscription auprès de l’institution compétente de l’État membre de résidence prévue à l’article 29 du règlement n° 574/72 constitue uniquement une formalité administrative dont l’accomplissement est nécessaire pour assurer le service effectif des prestations en nature dans cet État membre en vertu des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71. C’est en ce sens que doivent être compris les points 40, 47 et 53 de l’arrêt van der Duin et ANOZ Zorgverzekeringen, précité, dans lesquels la Cour a constaté que ce n’est qu’une fois que les titulaires de pension ou de rente sont inscrits auprès de ladite institution qu’ils bénéficient, conformément aux articles 28 du règlement n° 1408/71 et 29 du règlement n° 574/72, des prestations en nature de la part de cette même institution.

64      Par conséquent, dès lors que le titulaire d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation d’un État membre relève de la situation objective décrite aux articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, la règle de conflit énoncée à ces dispositions lui est applicable sans qu’il puisse y renoncer en s’abstenant de s’inscrire conformément à l’article 29 du règlement n° 574/72 auprès de l’institution compétente de l’État membre de sa résidence.

65      Partant, les articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 revêtent un caractère impératif pour les assurés sociaux relevant de leur champ d’application.

66      En second lieu, en qui concerne l’obligation de paiement de cotisations dans l’État membre débiteur de la pension ou de la rente, MM. Janssen et Fokkens font valoir que l’application des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 ne saurait, en tout état de cause, justifier qu’ils soient tenus de contribuer au régime légal obligatoire de l’assurance maladie institué par la ZVW, puisque, en l’absence de résidence ou de travail aux Pays-Bas, ils n’ont pas droit, dans le cadre de cette nouvelle législation, aux prestations de maladie en nature dans cet État membre. En effet, contrairement à la ZFW, la ZVW exclurait explicitement les non-résidents de son champ d’application.

67      Cette argumentation ignore toutefois que, ainsi qu’il ressort des points 37 à 41 du présent arrêt, les articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 énoncent une «règle de conflit» en vertu de laquelle les titulaires d’une pension ou d’une rente qui résident dans un autre État membre que l’État débiteur de celle-ci ont droit, à charge de ce dernier, aux prestations de maladie en nature dans l’État membre de leur résidence, dans la mesure où ils y auraient droit en vertu de la législation de l’État débiteur de la pension ou rente s’ils résidaient sur le territoire de ce dernier.

68      Par conséquent, s’il est certes exact, ce qui n’est pas contesté, que la ZVW ne s’applique pas aux titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation néerlandaise qui, tels les requérants au principal, résident dans un État membre autre que les Pays-Bas, il demeure que, dès lors que lesdits requérants auraient droit aux prestations de maladie en nature aux Pays-Bas en vertu de la ZVW s’ils résidaient dans cet État membre, ils ont le droit, en vertu du régime institué aux articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, de bénéficier, à charge de ce même État, de ces prestations dans l’État membre de leur résidence.

69      À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 33, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71, l’institution d’un État membre débitrice d’une pension ou d’une rente qui applique une législation prévoyant des retenues de cotisations à la charge du titulaire de cette pension ou rente pour la couverture de prestations de maladie est en droit d’opérer ces retenues sur la pension ou rente due par elle dans la mesure où les prestations servies en vertu des articles 28 et 28 bis dudit règlement sont à la charge d’une institution dudit État membre.

70      En l’occurrence, il est constant que la législation néerlandaise au titre de laquelle la pension ou rente des requérants au principal est due prévoit de telles retenues de cotisations.

71      Or, dans le cadre du régime institué aux articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, les prestations en nature sont servies au titulaire d’une pension ou d’une rente par l’institution compétente de l’État membre de résidence à la charge de l’État membre débiteur de la pension ou de la rente.

72      Dans ces conditions, dès lors que, ainsi qu’il résulte de ce qui précède, les titulaires d’une pension ou d’une rente relevant des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, eu égard au caractère impératif du régime institué par ces dispositions, ne peuvent choisir de renoncer au droit aux prestations en nature dans l’État membre de leur résidence en s’abstenant de s’inscrire auprès de l’institution compétente de cet État membre, un tel défaut d’inscription ne saurait avoir pour effet de les exonérer du paiement des cotisations dans l’État membre débiteur de leur pension ou rente, puisqu’ils demeurent, en tout état de cause, à charge de ce dernier État, ne pouvant se soustraire au régime prévu par ledit règlement.

73      Certes, à défaut d’inscription auprès de l’institution compétente de l’État membre de résidence, un tel assuré social ne peut bénéficier du service effectif desdites prestations dans cet État et, partant, il n’engendre aucune dépense que l’État membre débiteur de sa pension ou de sa rente devrait rembourser à l’État membre de sa résidence au titre de l’article 36 du règlement n° 1408/71, lu en combinaison avec l’article 95 du règlement n° 574/72.

74      Toutefois, une telle circonstance n’affecte en rien l’existence du droit à ces prestations et, partant, l’obligation corrélative de payer aux institutions compétentes de l’État membre dont la réglementation fonde l’existence d’un tel droit les cotisations dues en contrepartie du risque supporté par celui-ci en vertu des dispositions du règlement n° 1408/71. En effet, ainsi que la Cour l’a déjà jugé, aucune règle du droit de l’Union n’impose à l’institution compétente d’un État membre de vérifier qu’un assuré social est susceptible de pouvoir bénéficier effectivement de l’intégralité des prestations d’un régime d’assurance maladie avant de procéder à son affiliation et au prélèvement des cotisations correspondantes (arrêt Molenaar, précité, point 41).

75      Ainsi que le gouvernement néerlandais et la Commission européenne l’ont fait valoir, une telle obligation de paiement des cotisations en raison de l’existence d’un droit aux prestations, même en l’absence de bénéfice effectif desdites prestations, est inhérente au principe de solidarité mis en œuvre par les régimes nationaux de sécurité sociale dès lors que, en l’absence d’une telle obligation, les intéressés pourraient être incités à attendre la réalisation du risque avant de contribuer au financement de ce régime.

76      La circonstance alléguée par MM. van Delft et van Willigen, selon laquelle, compte tenu de leur âge, ces derniers, qui étaient et demeurent assurés contre le risque de maladie dans le cadre de contrats d’assurance privée, n’ont aucun intérêt à adopter ce genre de comportements spéculatifs est, à cet égard, sans pertinence, dès lors qu’il est constant que le risque de tels comportements ne peut être exclu en ce qui concerne au moins une partie des assurés sociaux relevant du régime de sécurité sociale en cause. Sous peine d’être privée de l’essentiel de son contenu, la solidarité d’un tel régime doit en effet être assurée de manière contraignante par l’ensemble des assurés sociaux qui en relèvent indépendamment du comportement individuel que chacun d’eux est susceptible d’adopter en fonction de paramètres personnels.

77      Par ailleurs, c’est à tort que MM. van Delft et van Willigen font valoir que l’État membre débiteur de la pension ou de la rente ne peut tirer argument de la solidarité du régime en cause dès lors qu’il ne supporte pas le risque du service des prestations de maladie en nature dans l’État membre de résidence.

78      En effet, même si, en vertu de l’article 95 du règlement n° 574/72, le montant des prestations servies en vertu des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71 est en principe remboursé à l’institution de l’État membre de résidence par l’institution compétente de l’État membre débiteur de la pension ou de la rente au moyen d’un forfait, il demeure que celui-ci est destiné à couvrir l’ensemble des prestations en nature servies aux intéressés et que son montant est fonction du coût moyen annuel des soins de santé générés par un titulaire de pension ou de rente relevant de l’État membre de résidence, forfait qui, aux termes de ladite disposition, est «aussi proche que possible» des dépenses réelles (voir, en ce sens, arrêt van der Duin et ANOZ Zorgverzekeringen, précité, point 44).

79      Il en résulte que l’État membre débiteur de la pension ou rente versée à un titulaire qui réside dans un autre État membre supporte l’essentiel du risque lié au service des prestations de maladie en nature dans l’État membre dans lequel réside ce dernier.

80      Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre à la première question que les articles 28, 28 bis et 33 du règlement n° 1408/71, lus en combinaison avec l’article 29 du règlement n° 574/72, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation de cet État qui résident dans un autre État membre dans lequel ils ont droit, en application desdits articles 28 et 28 bis, aux prestations de maladie en nature servies par l’institution compétente de cet État membre, doivent s’acquitter, sous forme de retenue sur ladite pension ou rente, d’une cotisation au titre desdites prestations, même lorsqu’ils ne se sont pas inscrits auprès de l’institution compétente de l’État membre de leur résidence.

 Sur la seconde question

81      Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande si les articles 21 TFUE et 45 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation de cet État qui résident dans un autre État membre dans lequel ils ont droit, en vertu des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, aux prestations de maladie en nature servies par l’institution compétente de ce dernier État membre, doivent, d’une part, se faire connaître auprès de l’institution compétente de l’État membre débiteur de cette pension ou rente et, d’autre part, s’acquitter, sous forme de retenue sur ladite pension ou rente, d’une cotisation au titre desdites prestations, même lorsqu’ils ne sont pas inscrits auprès de l’institution compétente de l’État membre de leur résidence.

82      Ainsi qu’il ressort déjà du point 43 du présent arrêt, l’obligation pour lesdits titulaires d’une pension ou rente de se faire connaître auprès du CVZ, afin de bénéficier des prestations de maladie en nature au titre des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, n’est pas, en tant que telle, mise en cause dans le cadre du litige au principal.

83      Dans ces conditions, il convient de comprendre la seconde question comme visant en substance à savoir si les articles 21 TFUE et 45 TFUE s’opposent à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal qui, conformément aux articles 28, 28 bis et 33 du règlement n° 1408/71, prévoit que les titulaires d’une pension ou d’une rente qui résident dans un État membre autre que l’État débiteur de celle-ci sont tenus au paiement de cotisations dans ce dernier État pour le service des prestations de maladie en nature dans l’État membre de leur résidence, même lorsqu’ils ne sont pas inscrits auprès de l’institution compétente de celui-ci.

84      Il convient de rappeler qu’il ressort tant de la jurisprudence de la Cour que de l’article 168, paragraphe 7, TFUE que le droit de l’Union ne porte pas atteinte à la compétence des États membres pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale et pour prendre, en particulier, des dispositions destinées à organiser et à fournir des services de santé et de soins médicaux. En l’absence d’une harmonisation au niveau de l’Union européenne, il appartient à la législation de chaque État membre de déterminer les conditions d’octroi des prestations en matière de sécurité sociale. Toutefois, dans l’exercice de cette compétence, les États membres doivent respecter le droit de l’Union, notamment les dispositions du traité relatives à la libre circulation des travailleurs ou encore à la liberté reconnue à tout citoyen de l’Union de circuler et de séjourner sur le territoire des États membres (voir en ce sens, notamment, arrêts du 16 juillet 2009, von Chamier-Glisczinski, C‑208/07, Rec. p. I‑6095, point 63 et jurisprudence citée, ainsi que du 15 juin 2010, Commission/Espagne, C‑211/08, non encore publié au Recueil, point 53).

85      Cela étant, l’interprétation du règlement n° 1408/71 donnée par la Cour en réponse à la première question doit s’entendre sans préjudice de la solution qui découlerait de l’applicabilité éventuelle de dispositions du droit primaire. En effet, le constat qu’une mesure nationale puisse être conforme à un acte de droit dérivé, en l’occurrence le règlement n° 1408/71, n’a pas pour effet de la faire échapper aux dispositions du traité (voir, notamment, arrêts du 16 mai 2006, Watts, C‑372/04, Rec. p. I‑4325, point 47; von Chamier-Glisczinski, précité, point 66, et Commission/Espagne, précité, point 45).

86      Il s’ensuit que l’applicabilité des articles 28, 28 bis et 33 du règlement n° 1408/71 à une situation telle que celle en cause au principal n’exclut pas en soi que les requérants au principal puissent s’opposer, au titre du droit primaire, aux retenues de cotisations opérées par l’institution compétente de l’État membre débiteur de leur pension ou de leur rente pour le service des prestations de maladie en nature par l’institution compétente de l’État membre de leur résidence (voir, par analogie, arrêt von Chamier-Glisczinski, précité, point 66).

87      En l’occurrence, il convient d’examiner au préalable si une situation telle que celle en cause au principal relève du champ d’application des dispositions citées dans la seconde question posée, à savoir les articles 21 TFUE et 45 TFUE.

88      S’agissant, tout d’abord, de l’applicabilité de l’article 45 TFUE, il convient de rappeler d’emblée que la notion de «travailleur» en droit de l’Union n’est pas univoque, mais varie selon le domaine d’application envisagé. Ainsi, la notion de «travailleur» utilisée dans le cadre de l’article 45 TFUE ne coïncide pas nécessairement avec celle qui a cours dans le domaine de l’article 48 TFUE et du règlement n° 1408/71 (voir arrêt von Chamier-Glisczinski, précité, point 68 et jurisprudence citée).

89      En ce qui concerne l’article 45 TFUE, il est de jurisprudence constante que la notion de «travailleur» au sens de cette disposition revêt une portée autonome propre au droit de l’Union et ne doit pas être interprétée de manière restrictive. Doit être considérée comme travailleur toute personne qui exerce des activités réelles et effectives, à l’exclusion d’activités tellement réduites qu’elles se présentent comme purement marginales et accessoires. La caractéristique de la relation de travail est, selon cette jurisprudence, la circonstance qu’une personne accomplit pendant un certain temps, en faveur d’une autre et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle perçoit une rémunération (voir arrêt von Chamier-Glisczinski, précité, point 69 et jurisprudence citée).

90      Par ailleurs, si l’article 45, paragraphe 3, sous d), TFUE, ainsi que l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO L 158, p. 77), prévoient le droit pour une personne de demeurer après la cessation de son activité professionnelle dans l’État membre où elle s’était déplacée afin d’y occuper un emploi, il ressort de la jurisprudence qu’une personne ayant exercé l’ensemble de son activité professionnelle dans l’État membre dont elle est ressortissante et n’ayant fait usage du droit de séjourner dans un autre État membre qu’après avoir pris sa retraite, sans aucune intention d’exercer dans cet autre État une activité salariée, ne peut se prévaloir du principe de la libre circulation des travailleurs (arrêts du 9 novembre 2006, Turpeinen, C‑520/04, Rec. p. I‑10685, point 16, et du 23 avril 2009, Rüffler, C‑544/07, Rec. p. I‑3389, point 52).

91      En l’occurrence, les éléments figurant dans le dossier soumis à la Cour tendent à indiquer que les requérants au principal, qui ont tous atteint l’âge de la retraite, sont des ressortissants néerlandais titulaires d’une pension ou d’une rente, respectivement, au titre de la AOW et de la WAO, qui, ayant exercé l’ensemble de leur carrière professionnelle aux Pays-Bas, ont par la suite établi leur résidence dans un autre État membre dans lequel ils n’exercent aucune activité professionnelle et n’ont jamais été à la recherche d’un emploi.

92      MM. van Delft et van Willigen font certes valoir que leur situation pourrait relever de l’article 45 TFUE. Ils ne fournissent cependant à l’appui de cette allégation aucun élément concret susceptible de remettre en cause les considérations qui précèdent. Bien au contraire, ces requérants indiquent explicitement avoir émigré dans un autre État membre après avoir pris leur retraite.

93      Dans ces conditions, il convient de considérer, à l’instar de la Commission, ainsi que des gouvernements français et finlandais, que l’article 45 TFUE n’apparaît pas pouvoir trouver application dans un litige tel que celui au principal.

94      Il convient, en revanche, de souligner que les requérants au principal, en tant que ressortissants néerlandais, jouissent, en tout état de cause, du statut de citoyen de l’Union en vertu de l’article 20, paragraphe 1, TFUE.

95      En se rendant dans un autre État membre et en y établissant leur résidence, ils ont exercé les droits qui leur étaient conférés par l’article 21, paragraphe 1, TFUE. Une situation telle que la leur relève donc du droit de libre circulation et de libre séjour des citoyens de l’Union sur le territoire d’un État membre autre que celui dont ils sont ressortissants.

96      Aux termes de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, tout citoyen de l’Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et des conditions prévues par le traité et par les dispositions prises pour son application.

97      À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante que les facilités ouvertes par le traité en matière de circulation des citoyens de l’Union ne pourraient produire leurs pleins effets si un ressortissant d’un État membre pouvait être dissuadé d’en faire usage par les obstacles mis à son séjour dans un autre État membre en raison d’une réglementation de son État membre d’origine le pénalisant du seul fait qu’il les a exercées (voir arrêt von Chamier-Glisczinski, précité, point 82 et jurisprudence citée).

98      En l’occurrence, les requérants au principal soutiennent que, en raison du transfert de leur résidence dans un État membre autre que les Pays-Bas, ils se trouvent, en ce qui concerne la fourniture des prestations de maladie en nature, dans une situation moins favorable par rapport à celle qui aurait été la leur s’ils avaient résidé aux Pays-Bas. En effet, du fait de l’entrée en vigueur de la ZVW en date du 1er janvier 2006, ils auraient subi, contrairement aux résidents néerlandais, une régression significative du niveau de protection dont ils bénéficiaient contre le risque de maladie, dès lors que, tant en termes de coûts que de qualité, les prestations fournies dans le cadre de la législation de l’État membre de résidence sont moins avantageuses que celles offertes dans le cadre des contrats d’assurance privée. En revanche, les prestations offertes aux résidents néerlandais dans le cadre de la ZVW seraient, quant à elles, comparables à ces dernières.

99      À cet égard, il convient de rappeler que l’article 48 TFUE prévoyant une coordination des législations des États membres, et non leur harmonisation, les différences de fond et de procédure entre les régimes de sécurité sociale de chaque État membre et, partant, dans les droits des personnes y affiliées, ne sont pas touchées par cette disposition, chaque État membre restant compétent pour déterminer dans sa législation, dans le respect du droit de l’Union, les conditions d’octroi des prestations d’un régime de sécurité sociale (voir, en ce sens, arrêt von Chamier-Glisczinski, précité, point 84).

100    Dans ces conditions, l’article 21, paragraphe 1, TFUE ne saurait garantir à un assuré qu’un déplacement dans un autre État membre soit neutre en matière de sécurité sociale, notamment sur le plan de prestations de maladie. Compte tenu des disparités existant entre les régimes et les législations des États membres en la matière, un tel déplacement peut, selon les cas, être plus ou moins avantageux ou désavantageux pour la personne concernée sur le plan de la protection sociale (voir arrêt von Chamier-Glisczinski, précité, point 85).

101    Il en découle que, même dans le cas où son application est ainsi moins favorable, une législation nationale en matière de sécurité sociale demeure conforme aux dispositions de l’article 21 TFUE, pour autant qu’elle ne conduit pas purement et simplement à verser des cotisations sociales à fonds perdus (voir, par analogie, arrêts du 19 mars 2002, Hervein e.a., C‑393/99 et C‑394/99, Rec. p. I‑2829, point 51; du 9 mars 2006, Piatkowski, C‑493/04, Rec. p. I‑2369, point 34, ainsi que du 18 juillet 2006, Nikula, C‑50/05, Rec. p. I‑7029, point 30).

102    Or, en l’occurrence, ainsi qu’il ressort du point 41 du présent arrêt, si les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation néerlandaise résidant dans un autre État membre que les Pays-Bas relèvent, depuis le 1er janvier 2006, des prestations de maladie en nature prévues par la législation de l’État membre de leur résidence, alors qu’auparavant ils ne relevaient d’aucun régime légal obligatoire d’assurance maladie et pouvaient donc uniquement être couverts contre le risque de maladie dans le cadre de contrats d’assurance privée, c’est en raison de la décision du législateur néerlandais, dans l’exercice de ses compétences en matière d’aménagement des régimes de sécurité sociale, d’étendre le régime légal obligatoire d’assurance maladie, notamment, à l’ensemble des résidents aux Pays-Bas, laquelle a eu pour conséquence, compte tenu des règles de conflit prévues aux articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, d’inclure lesdits titulaires de pension et de rente parmi les bénéficiaires des prestations de maladie servies dans l’État membre de leur résidence.

103    Force est de constater que, comme le gouvernement néerlandais l’a fait valoir, la réglementation nationale en cause au principal, en ce qu’elle prévoit, conformément aux dispositions du règlement n° 1408/71, que les titulaires de pension ou de rente non-résidents ont droit aux prestations de maladie en nature dans le cadre de la législation de l’État membre de leur résidence, est davantage de nature à faciliter la libre circulation des citoyens de l’Union qu’à la restreindre, dès lors qu’une telle réglementation permet à ces derniers d’accéder dans l’État membre de résidence aux soins correspondant à leur état de santé dans des conditions d’égalité par rapport aux personnes affiliées au système de sécurité sociale de cet État membre.

104    Cela est d’autant plus le cas dans l’affaire au principal qu’il est constant que, à la suite de procédures judiciaires en référé introduites par les requérants au principal devant les juridictions nationales, le montant des cotisations à acquitter par les titulaires de pension ou de rente due au titre de la législation néerlandaise qui résident dans un autre État membre que les Pays-Bas, étant affecté d’un coefficient reflétant le coût de la vie dans l’État membre de résidence, est désormais inférieur à celui acquitté par les titulaires des mêmes pensions ou rentes qui résident aux Pays-Bas.

105    Certes, il ne saurait être exclu que, comme le font valoir les requérants au principal, les prestations de maladie en nature servies, conformément au règlement n° 1408/71, dans l’État membre de résidence soient, en termes de coût et de qualité, moins avantageuses que celles offertes aux résidents néerlandais dans le cadre de la ZVW.

106    Toutefois, une telle différence dans le niveau de protection contre le risque de maladie entre les régimes nationaux de sécurité sociale des États membres, dès lors qu’elle résulte de l’absence d’harmonisation du droit de l’Union en la matière, ne saurait être considérée, conformément à la jurisprudence citée aux points 99 et 100 du présent arrêt, comme une restriction relevant de l’article 21, paragraphe 1, TFUE. Il est sans pertinence à cet égard, contrairement à ce qu’ont soutenu MM. van Delft et van Willigen, que ceux-ci aient transféré leur résidence dans un autre État membre avant, et non après, l’entrée en vigueur de la ZVW.

107    Par ailleurs, la réglementation nationale en cause au principal n’impose pas aux titulaires de pension ou de rente résidant dans un autre État membre que les Pays-Bas de cotiser à un régime de sécurité sociale sans offrir de protection sociale correspondante.

108    En effet, même si, à défaut d’inscription dans l’État membre de leur résidence, aucune prestation de maladie en nature ne peut y être servie aux titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation néerlandaise, il demeure que le paiement de cotisations aux Pays-Bas donne droit, au bénéfice de ces assurés sociaux, au service de prestations correspondantes dans l’État membre de leur résidence à la charge des Pays-Bas.

109    Cela étant, il convient de relever que, en l’occurrence, la réglementation en cause au principal ne s’est pas limitée à étendre le régime légal obligatoire d’assurance maladie, notamment, à l’ensemble des résidents aux Pays-Bas et à prévoir, conformément au règlement n° 1408/71, que les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation néerlandaise résidant dans un autre État membre que les Pays-Bas bénéficient, moyennant le paiement d’une cotisation dans ce dernier État membre, des prestations de maladie en nature dans l’État membre de leur résidence. Parallèlement, cette même réglementation a en effet prévu, en outre, la résiliation de plein droit, à compter du 1er janvier 2006, des contrats d’assurance conclus avant cette date par de tels non-résidents avec une compagnie établie aux Pays-Bas, dans la mesure où ces contrats faisaient naître des droits équivalant à ceux découlant de l’application du règlement n° 1408/71.

110    MM. van Delft, van Willigen et Fokkens soutiennent que cette résiliation de plein droit, prévue à l’article 2.5.2 de l’IZVW, a affecté de manière substantielle les droits acquis par les non-résidents titulaires d’une pension ou d’une rente au titre de la législation néerlandaise dans le cadre des contrats d’assurance conclus sous l’empire du régime légal antérieur avec des compagnies d’assurances établies aux Pays-Bas. En effet, du fait de cette résiliation légale, ces non-résidents auraient été contraints, afin d’assurer la continuité du niveau de protection globale qui découlait de ces contrats, de souscrire, après le 1er janvier 2006, de nouveaux contrats d’assurance en vue de compléter les prestations de base servies dans l’État membre de résidence. Compte tenu de leur âge, ces nouveaux contrats n’auraient pu être conclus qu’à des conditions tarifaires particulièrement désavantageuses.

111    Selon MM. van Delft et van Willigen, les résidents et les non-résidents n’ont pas à cet égard subi le même traitement. En effet, dans la pratique, les conditions tarifaires stipulées dans les nouveaux contrats d’assurance conclus par des résidents après l’entrée en vigueur de la ZVW correspondraient en substance à celles auxquelles ils avaient souscrit dans le cadre des contrats d’assurance conclus sous l’empire de la ZFW, alors que, en revanche, s’agissant des non-résidents, les conditions proposées par les compagnies d’assurances après cette entrée en vigueur seraient substantiellement moins avantageuses que celles applicables auparavant dans le cadre de leurs anciens contrats.

112    Le gouvernement néerlandais, interrogé sur ce point à l’audience, a souligné que l’IZVW n’avait prévu la résiliation de plein droit, à la date du 1er janvier 2006, des contrats d’assurance conclus avec des compagnies établies aux Pays-Bas avant l’entrée en vigueur de la ZVW que «dans la mesure» où ces contrats faisaient naître, s’agissant des prestations de maladie en nature, des droits équivalant à ceux dont les intéressés pouvaient se prévaloir, après cette entrée en vigueur, en vertu des dispositions du règlement n° 1408/71. Cette résiliation de plein droit concernerait donc non pas l’intégralité du contenu des contrats d’assurance mais uniquement la partie de ceux-ci qui correspondait au régime légal de base prévu par l’État membre de résidence afin d’éviter les doubles assurances et donc le double paiement de cotisations.

113    Le gouvernement néerlandais admet que, certes, dans la pratique, les contrats d’assurance en question auraient, dans la plupart des cas, été résiliés dans leur intégralité, obligeant les intéressés souhaitant maintenir, après le 1er janvier 2006, une protection complémentaire contre le risque de maladie par rapport au régime légal de base à conclure de nouveaux contrats d’assurance. Toutefois, les résidents et les non-résidents auraient à cet égard subi le même traitement.

114    Il y a lieu de rappeler qu’il n’appartient pas à la Cour de se prononcer, dans le cadre d’un renvoi préjudiciel, sur l’interprétation des dispositions nationales ou sur l’appréciation du contexte factuel ayant entouré le litige au principal, cette mission incombant exclusivement à la juridiction de renvoi (voir en ce sens, notamment, arrêt du 23 avril 2009, Angelidaki e.a., C‑378/07 à C‑380/07, Rec. p. I‑3071, point 48).

115    C’est donc à la juridiction de renvoi qu’il appartient d’établir si, et dans quelle mesure, la réglementation nationale en cause au principal prévoit une différence de traitement entre les résidents et les non-résidents.

116    À cet égard, s’il devait être établi que ladite réglementation contient des mesures visant à garantir la continuité de la protection globale découlant des contrats d’assurance conclus avant l’entrée en vigueur de la ZVW et que ces mesures concernent uniquement ceux d’entre eux qui ont été conclus par des résidents, une telle différence de traitement par rapport aux non-résidents constituerait, ainsi que M. l’avocat général l’a indiqué au point 79 de ses conclusions, une restriction à la libre circulation des citoyens de l’Union au sens de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, dès lors qu’elle serait susceptible, conformément à la jurisprudence citée au point 97 du présent arrêt, de dissuader des titulaires de pension ou de rente due au titre de la législation néerlandaise, tels les requérants au principal, de maintenir leur résidence dans un État membre autre que les Pays-Bas. Or, ni le gouvernement néerlandais ni le CVZ n’ont apporté, dans le cadre du présent renvoi préjudiciel, le moindre élément en vue de justifier une telle différence de traitement.

117    Afin de procéder à l’examen de l’existence d’une restriction au sens de l’article 21 TFUE, la juridiction de renvoi devra tout particulièrement prendre en compte les éléments pertinents suivants qui ressortent du dossier soumis à la Cour.

118    Premièrement, il résulte des termes mêmes de l’article 2.5.2, paragraphe 2, de l’IZVW que celui-ci prévoit la résiliation de plein droit des seuls contrats d’assurance conclus par des non-résidents. Il ne vise pas, en revanche, les contrats d’assurance conclus par des résidents.

119    En vue de déterminer si cette disposition institue, comme son libellé tend ainsi à l’indiquer, une différence de traitement entre résidents et non-résidents, il appartiendra à la juridiction de renvoi d’établir si la réglementation nationale en cause au principal comporte, comme l’a suggéré le gouvernement néerlandais, une autre disposition légale qui prévoit également et de la même manière la résiliation de plein droit des contrats d’assurance conclus par des résidents avant l’entrée en vigueur de la ZVW.

120    Dans l’affirmative, il incombera également à cette juridiction de vérifier si cette résiliation de plein droit contient des effets identiques pour les résidents et les non-résidents, et en particulier si, comme ce même gouvernement l’a soutenu, cette résiliation concerne dans les deux cas la seule partie du contrat qui faisait naître des droits équivalant à ceux découlant du régime légal obligatoire applicable.

121    Deuxièmement, il ressort tant des observations écrites de MM. van Delft et van Willigen que de celles du gouvernement néerlandais que, en ce qui concerne les résidents qui étaient liés, à la date du 1er janvier 2006, par un contrat d’assurance, la réglementation nationale en cause au principal a imposé aux compagnies participant au régime légal obligatoire d’assurance maladie prévu par la ZVW d’accepter l’ensemble de ceux-ci comme assurés pour l’intégralité des prestations de maladie en nature qui leur étaient offertes dans le cadre de ces contrats, à savoir tant pour les prestations de base correspondant aux droits prévus par la ZVW que pour les prestations complémentaires excédant cette protection légale minimale.

122    En revanche, selon MM. van Delft et van Willigen, cette réglementation n’a pas imposé à ces mêmes compagnies d’assurances, lorsqu’elles sont établies aux Pays-Bas, une telle obligation d’acceptation en ce qui concerne les non-résidents qui étaient assurés, avant l’entrée en vigueur de la ZVW, au titre d’un contrat d’assurance avec celles-ci et qui, depuis cette entrée en vigueur, ont droit, en vertu des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, aux prestations en nature servies dans l’État membre de résidence à la charge des Pays-Bas.

123    Si, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer, l’exactitude de ces explications devait être établie, il en résulterait également une différence de traitement entre les résidents et les non-résidents plaçant ces derniers dans une situation moins favorable lors de l’entrée en vigueur de la ZVW.

124    En effet, en l’absence d’obligation légale d’assurer les non-résidents, en particulier en ce qui concerne les prestations de maladie complémentaires par rapport aux prestations de base auxquelles ces non-résidents ont droit dans l’État membre de leur résidence, une telle réglementation nationale aurait été propre à inciter les compagnies d’assurances concernées à saisir l’occasion de l’entrée en vigueur de la ZVW pour résilier intégralement les contrats d’assurance conclus antérieurement avec ces non-résidents, lesquels sont perçus comme relevant de la catégorie des «mauvais risques» compte tenu de leur âge et de leur état de santé, afin de réapprécier et d’adapter les conditions tarifaires proposées à ceux-ci en tenant compte de l’évolution de ces paramètres depuis la date de la conclusion du contrat initial.

125    Enfin, troisièmement, MM. van Delft et van Willigen ont mis en exergue, lors de l’audience, que l’entrée en vigueur de la ZVW avait été précédée d’une négociation étroite entre le gouvernement néerlandais et les compagnies d’assurances en question. Au terme de cette négociation, il aurait été prévu, en tout cas d’un point de vue politique, que les résidents devaient se voir offrir des conditions tarifaires raisonnables et en substance analogues à celles qui prévalaient dans le cadre des contrats conclus avant le 1er janvier 2006.

126    Interrogé sur ce point lors de l’audience, le gouvernement néerlandais a fait valoir que la résiliation intégrale des contrats d’assurance conclus avant l’entrée en vigueur de la ZVW, outre qu’elle concerne tant les résidents que les non-résidents, ne lui est en rien imputable, dès lors que l’IZVW se bornerait à imposer la résiliation partielle des contrats en cause. Les conditions tarifaires prétendument désavantageuses imposées aux requérants au principal lors de la conclusion de ces nouveaux contrats d’assurance pour l’octroi d’une protection complémentaire trouveraient donc leur source dans les seules décisions commerciales prises de manière autonome par les compagnies d’assurances concernées.

127    Il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer si, comme MM. van Delft et van Willigen l’ont soutenu, un tel engagement a effectivement été pris par les compagnies d’assurances concernées, à la demande du gouvernement néerlandais, de garantir la continuité de la protection globale qui découlait des contrats d’assurance conclus avant l’entrée en vigueur de la ZVW et, dans l’affirmative, si cette garantie concerne les seuls résidents ou s’applique également aux non-résidents.

128    Il importe cependant de souligner que toute différence de traitement entre les résidents et les non-résidents induite par le gouvernement néerlandais et exécutée avec son concours par les compagnies d’assurances établies aux Pays-Bas, si elle devait être établie, n’échapperait pas à l’interdiction prévue à l’article 21 TFUE, contrairement à ce qu’a soutenu le gouvernement néerlandais, du seul fait qu’elle n’est pas fondée sur des décisions ayant un effet légal obligatoire pour ces entreprises.

129    En effet, même des actes des autorités des États membres dépourvus de force contraignante peuvent être de nature à influer sur le comportement des entreprises et avoir ainsi pour effet de mettre en échec la finalité poursuivie par l’article 21 TFUE. Or, tel serait le cas si une pratique tarifaire adoptée par des compagnies d’assurances constituait la mise en œuvre d’un accord «politique» défini par le gouvernement néerlandais visant à garantir la continuité de la protection globale des seuls résidents à l’exclusion de celle des non-résidents (voir, par analogie, arrêt du 24 novembre 1982, Commission/Irlande, 249/81, Rec. p. 4005, points 27 à 29).

130    Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre à la seconde question que l’article 21 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation de cet État résidant dans un autre État membre dans lequel ils ont droit, en application des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, aux prestations de maladie en nature servies par l’institution compétente de ce dernier État membre doivent s’acquitter, sous forme de retenue sur ladite pension ou rente, d’une cotisation au titre desdites prestations, même lorsqu’ils ne sont pas inscrits auprès de l’institution compétente de l’État membre de leur résidence.

131    En revanche, l’article 21 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une telle réglementation nationale pour autant que celle-ci induit ou comporte, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, une différence de traitement injustifiée entre les résidents et les non-résidents en ce qui concerne la continuité de la protection globale contre le risque de maladie dont ceux-ci bénéficiaient dans le cadre de contrats d’assurance conclus avant l’entrée en vigueur de cette réglementation.

 Sur les dépens

132    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

1)      Les articles 28, 28 bis et 33 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1992/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006, lus en combinaison avec l’article 29 du règlement (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d’application du règlement (CEE) n° 1408/71 relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, tel que modifié par le règlement (CE) n° 311/2007 de la Commission, du 19 mars 2007, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation de cet État qui résident dans un autre État membre dans lequel ils ont droit, en application des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, aux prestations de maladie en nature servies par l’institution compétente de ce dernier État membre doivent s’acquitter, sous forme de retenue sur ladite pension ou rente, d’une cotisation au titre desdites prestations, même lorsqu’ils ne sont pas inscrits auprès de l’institution compétente de l’État membre de leur résidence.

2)      L’article 21 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal qui prévoit que les titulaires d’une pension ou d’une rente due au titre de la législation de cet État résidant dans un autre État membre dans lequel ils ont droit, en application des articles 28 et 28 bis du règlement n° 1408/71, tel que modifié par le règlement n° 1992/2006, aux prestations de maladie en nature servies par l’institution compétente de ce dernier État membre doivent s’acquitter, sous forme de retenue sur ladite pension ou rente, d’une cotisation au titre desdites prestations, même lorsqu’ils ne sont pas inscrits auprès de l’institution compétente de l’État membre de leur résidence.

En revanche, l’article 21 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une telle réglementation nationale pour autant que celle-ci induit ou comporte, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, une différence de traitement injustifiée entre les résidents et les non-résidents en ce qui concerne la garantie de la continuité de la protection globale contre le risque de maladie dont ceux-ci bénéficiaient dans le cadre de contrats d’assurance conclus avant l’entrée en vigueur de cette réglementation.

Signatures


* Langue de procédure: le néerlandais.