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ARRÊT DE LA COUR

10 février 2000 (1)

«Sécurité sociale des travailleurs migrants - Détermination de la législation applicable - Travailleurs intérimaires détachés dans un autre État membre»

Dans l'affaire C-202/97,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par l'Arrondissementsrechtbank te Amsterdam (Pays-Bas) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Fitzwilliam Executive Search Ltd, agissant sous le nom commercial «Fitzwilliam Technical Services (FTS)»,

et

Bestuur van het Landelijk instituut sociale verzekeringen,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, et de l'article 11, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d'application du règlement n° 1408/71, dans leur version codifiée par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983 (JO L 230, p. 6), et mise à jour jusqu'à l'époque des faits,

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, J. C. Moitinho de Almeida, L. Sevón et R. Schintgen, présidents de chambre, P. J. G. Kapteyn, C. Gulmann, J.-P. Puissochet, G. Hirsch (rapporteur) et M. Wathelet, juges,

avocat général: M. F. G. Jacobs,


greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

-    pour Fitzwilliam Executive Search Ltd, agissant sous le nom commercial «Fitzwilliam Technical Services (FTS)», par Mes P. C. Vas Nunes et G. van der Wal, avocats au barreau de La Haye, et M. R. A. M. Blaakman, expert fiscal à Rotterdam,

-    pour le Bestuur van het Landelijk instituut sociale verzekeringen, par M. C. R. J. A. M. Brent, manager productcluster Bezwaar en Beroep van de uitvoeringsinstelling GAK Nederland BV, en qualité d'agent,

-    pour le gouvernement néerlandais, par M. J. G. Lammers, conseiller juridique remplaçant au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

-    pour le gouvernement belge, par M. J. Devadder, conseiller général au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

-    pour le gouvernement allemand, par MM. E. Röder, Ministerialrat au ministère fédéral de l'Économie, et C.-D. Quassowski, Regierungsdirektor au même ministère, en qualité d'agents,

-    pour le gouvernement français, par MM. M. Perrin de Brichambaut, directeur des affaires juridiques au ministère des Affaires étrangères, et C. Chavance, conseiller des affaires étrangères à la direction des affaires juridiques du même ministère, en qualité d'agents,

-    pour le gouvernement irlandais, par M. A. Buckley, Chief State Solicitor, en qualité d'agent,

-    pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. J. E. Collins, assistant Treasury Solicitor, en qualité d'agent, assisté de M. M. Hoskins, barrister,

-    pour la Commission des Communautés européennes, par MM. P. J. Kuijper et P. Hillenkamp, conseillers juridiques, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Fitzwilliam Executive Search Ltd, agissant sous le nom commercial «Fitzwilliam Technical Services (FTS)», représentée par Me P. C. Vas Nunes et M. R. A. M. Blaakman, du Bestuur van het Landelijk instituut sociale verzekeringen, représenté par Mme M. F. G. H. Beckers, collaborateur juridique au GAK Nederland BV, en qualité d'agent, du gouvernement néerlandais, représenté par M. M. A. Fierstra, chef du service «droit européen» au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, du gouvernement allemand, représenté par M. C.-D. Quassowski, du gouvernement français, représenté par M. C. Chavance, du gouvernement irlandais, représenté par M. A. O'Caoimh, SC, et Mme E. Barrington, BL, du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par M. J. E. Collins, assisté de M. M. Hoskins, et de la Commission, représentée par M. P. J. Kuijper, à l'audience du 24 novembre 1998,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 28 janvier 1999,

rend le présent

Arrêt

1.
    Par jugement du 22 mai 1997, parvenu à la Cour le 27 mai suivant, l'Arrondissementsrechtbank te Amsterdam a posé, en vertu de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, et de l'article 11, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d'application du règlement n° 1408/71, dans leur version codifiée par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983 (JO L 230, p. 6, ci-après le «règlement n° 1408/71» et le «règlement n° 574/72»), et mise à jour jusqu'à l'époque des faits.

2.
    Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Fitzwilliam Executive Search Ltd, opérant sous le nom commercial de Fitzwilliam Technical Services (ci-après «FTS»), société de droit irlandais établie à Dublin et exerçant les activités d'une entreprise de travail temporaire, au Bestuur van het Landelijk instituut sociale verzekeringen (ci-après le «LISV») au sujet de la part patronale des cotisations dues au titre du régime de sécurité sociale néerlandais pour les travailleurs intérimaires occupés aux Pays-Bas pour le compte de FTS.

Sur la réglementation communautaire

Le règlement n° 1408/71

3.
    Le titre II du règlement n° 1408/71, qui comprend les articles 13 à 17 bis, contient les règles portant sur la détermination de la législation applicable en matière de sécurité sociale.

4.
    L'article 13, paragraphe 2, de ce règlement dispose:

«Sous réserve des articles 14 à 17:

a)    la personne qui exerce une activité salariée sur le territoire d'un État membre est soumise à la législation de cet État même si elle réside sur le territoire d'un autre État membre ou si l'entreprise ou l'employeur qui l'occupe a son siège ou son domicile sur le territoire d'un autre État membre».

5.
    L'article 14, paragraphe 1, du même règlement prévoit:

«La règle énoncée à l'article 13 paragraphe 2 sous a) est appliquée compte tenu des exceptions et particularités suivantes:

1) a)    la personne qui exerce une activité salariée sur le territoire d'un État membre au service d'une entreprise dont elle relève normalement, et qui est détachée par cette entreprise sur le territoire d'un autre État membre afin d'y effectuer un travail pour le compte de celle-ci, demeure soumise à la législation du premier État membre, à condition que la durée prévisible de ce travail n'excède pas douze mois et qu'elle ne soit pas envoyée en remplacement d'une autre personne parvenue au terme de la période de son détachement».

6.
    Cette disposition a remplacé l'article 13, sous a), du règlement n° 3 du Conseil, du 25 septembre 1958, concernant la sécurité sociale des travailleurs migrants (JO 1958, 30, p. 561), dans sa version résultant du règlement modificatif n° 24/64/CEE du Conseil, du 10 mars 1964 (JO 1964, 47, p. 746, ci-après le «règlement n° 3»), selon laquelle, sous certaines conditions, «Le travailleur salarié ou assimilé qui, étant au service d'une entreprise ayant sur le territoire d'un État membre un établissement dont il relève normalement, est détaché par cette entreprise sur le territoire d'un autre État membrepour y effectuer un travail pour cette entreprise, reste soumis à la législation du premier État comme s'il continuait à être occupé sur son territoire...»

La décision n° 128 de la commission administrative

7.
    En vertu de l'article 81, sous a), du règlement n° 1408/71, la commission administrative pour la sécurité sociale des travailleurs migrants (ci-après la «commission administrative»), instituée conformément au titre IV dudit règlement, qui est chargée de traiter notamment toute question administrative ou d'interprétation découlant des dispositions du règlement, a pris à ces fins la décision n° 128, du 17 octobre 1985, concernant l'application des articles 14 paragraphe 1 sous a) et 14 ter paragraphe 1 du règlement n° 1408/71 (JO 1986, C 141, p. 6), en vigueur à la date des faits au principal. Cette décision a été remplacée par la décision n° 162, du 31 mai 1996 (JO L 241, p. 28), entrée en vigueur postérieurement auxdits faits.

8.
    Aux termes du point 1 de la décision n° 128, les dispositions de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 s'appliquent également à «un travailleur soumis à la législation d'un État membre qui est embauché dans cet État membre où l'entreprise a son siège ou son établissement en vue d'être détaché soit sur le territoire d'un autre État membre ... à condition:

a)    qu'il subsiste un lien organique entre cette entreprise et le travailleur pendant la période de son détachement;

b)    que cette entreprise exerce normalement son activité sur le territoire du premier État membre, c'est-à-dire dans le cas d'une entreprise dont l'activité consiste à mettre temporairement du personnel à la disposition d'autres entreprises, que celle-ci mette habituellement du personnel à la disposition d'utilisateurs établis sur le territoire de cet État en vue d'être occupé sur ce territoire.»

Le règlement n° 574/72

9.
    Le règlement n° 574/72 dispose, en son article 11, paragraphe 1, qui fait partie du titre III, intitulé «Application des dispositions du règlement relatives à la détermination de la législation applicable»:

«L'institution désignée par l'autorité compétente de l'État membre dont la législation reste applicable délivre un certificat attestant que le travailleur salarié demeure soumis à cette législation et indiquant jusqu'à quelle date:

a)    à la demande du travailleur salarié ou de son employeur dans les cas visés à l'article 14 paragraphe 1 ... du règlement».

10.
    Le certificat mentionné par la disposition susreproduite est connu sous le nom de «certificat de détachement» ou de «certificat E 101».

Sur le litige au principal et les questions préjudicielles

11.
    En qualité d'entreprise de travail intérimaire, FTS exerce des activités de placement de travailleurs intérimaires tant en Irlande qu'aux Pays-Bas. Tous les travailleurs qu'elle emploie - y compris ceux qui sont embauchés pour être directement détachés dans des entreprises établies aux Pays-Bas - sont des ressortissants irlandais domiciliés en Irlande. Les travailleurs envoyés aux Pays-Bas sont occupés essentiellement dans les secteurs de l'agriculture et de l'horticulture tandis que ceux mis à la disposition d'entreprises sises en Irlande exercent leurs activités dans d'autres secteurs.

12.
    FTS exerce toutes ses activités de placement depuis l'Irlande, de telle sorte que tous les contrats de travail, y compris ceux concernant sa clientèle néerlandaise, sont conclus par son bureau de Dublin. Ce dernier compte un effectif de vingt personnes alors que deux personnes seulement sont employées à son agence de Delft (Pays-Bas).

13.
    Les travailleurs sont engagés sur la base de contrats de travail conformes au droit irlandais et affiliés au régime de sécurité sociale irlandais, y compris pendant la période de détachement aux Pays-Bas. FTS retient les contributions correspondantes sur les salaires bruts des travailleurs, à savoir les contributions afférentes à la «pay related social insurance», et verse aux autorités irlandaises les contributions ainsi retenues, soit la part de l'employeur et le précompte professionnel.

14.
    S'agissant des travailleurs détachés aux Pays-Bas, des certificats E 101 et E 111, ces derniers concernant l'assurance maladie, sont demandés au Department of Social Welfare (ministère des Affaires sociales, ci-après le «DSW»).

15.
    Si le chiffre d'affaires réalisé par FTS, pendant les trois années 1993 à 1996, était plus élevé aux Pays-Bas qu'en Irlande, le rapport entre les résultats respectivement obtenus dans ces deux États membres a toutefois varié en fonction de la conjoncture économique dans l'un ou l'autre de ceux-ci.

16.
    Compte tenu du volume des activités exercées par FTS aux Pays-Bas, la Nieuwe Algemene Bedrijfsvereniging (ci-après la «NAB»), l'organisme ayant précédé le LISV, a estimé que les travailleurs envoyés par FTS aux Pays-Bas étaient à tort affiliés au régime irlandais de sécurité sociale. FTS ayant contesté cette appréciation, la NAB, au terme d'un débat contradictoire, a confirmé son interprétation par une décision du 31 mars 1996 par laquelle elle a assujetti les employés de cette dernière travaillant aux Pays-Bas au régime de sécurité sociale néerlandais. Par conséquent, elle a mis en recouvrement les cotisations patronales qui étaient dues à ce titre.

17.
    FTS a saisi la juridiction de renvoi d'un recours contre cette dernière décision en soutenant que la délivrance de certificats E 101 par le DSW aux travailleurs détachés devrait être déterminante et que toutes les conditions énoncées à l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 ainsi que celles de la décision n° 128 avaient été respectées.

18.
    Estimant que la solution du litige au principal dépend à la fois de l'interprétation des critères d'application de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 et des effets du certificat E 101, lesquels n'ont pas encore été clairement définis par la jurisprudence, l'Arrondissementsrechtbank te Amsterdam a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les deux questions préjudicielles suivantes:

«1)    a)    La notion d''entreprise dont elle relève normalement‘, visée à l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71, peut-elle être interprétée en imposant d'autres exigences ou conditions, non expressément citées par cette disposition?

    b)    En cas de réponse affirmative,

        i)    les autorités d'un État membre peuvent-elles formuler de manière indépendante ces exigences ou conditions?

        ii)    Peut-on fixer, aux fins d'interprétation de la notion d''entreprise dont il relève normalement‘, visée à l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71, des exigences quantitatives - fondées ou non sur la Décision 128 - relatives aux activités exercées dans les différents États membres, au chiffre d'affaires réalisé et aux personnes occupées?

        iii)    Peut-on exiger à cet égard que les activités exercées par l'employeur dans les différents États membres soient exactement les mêmes activités?

        iv)    Si les exigences visées aux points ii) et iii) ci-dessus ne peuvent pas être fixées, quelles sont les (sortes d')exigences que l'on peut fixer?

        v)    Ces exigences - éventuellement - à fixer doivent-elles être communiquées à l'employeur avant le commencement des activités?

    c)    En cas de réponse négative à la question 1, sous a),

        i)    Les institutions chargées de l'exécution disposent-elles encore d'une marge d'interprétation en ce qui concerne la notion d''entreprise dont il relève normalement‘, visée à l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71, compte tenu de vos arrêts dans les affaires 19/67 (Van der Vecht) et 39/70 (Manpower)?

        ii)    En cas de réponse affirmative, de quelle marge d'interprétation disposent-elles?

2)    a)    L'attestation délivrée par une institution d'un État membre compétente à cet effet, telle que visée à l'article 11, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 574/72, lie-t-elle en toutes circonstances les autorités d'un autre État membre en ce qui concerne les effets juridiques déterminés par l'attestation?

    b)    En cas de réponse négative,

        i)    Dans quelles circonstances n'est-ce pas le cas?

        ii)    La valeur probante de l'attestation peut-elle être écartée par les autorités d'un État membre, sans intervention de l'institution qui a établi l'attestation?

        iii)    Si la réponse à cette question est négative, en quoi doit consister l'intervention de l'institution qui a délivré l'attestation?»

Sur la première partie de la première question

19.
    Par la première partie de sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance, dans le cadre de l'interprétation de la notion d'«entreprise dont elle relève normalement» visée à l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71, si, pour bénéficier de l'avantage offert par cette disposition, une entreprise de travail temporaire qui met, à partir d'un premier État membre, des travailleurs temporairement à la disposition d'entreprises situées sur le territoire d'un autre État membre doit avoir des attaches avec le premier État membre en ce sens qu'elle y exerce normalement ses activités.

20.
    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que les dispositions du titre II du règlement n° 1408/71, dont fait partie l'article 14, constituent, selon une jurisprudence constante de la Cour, un système complet et uniforme de règles de conflit des lois dont le but est de soumettre les travailleurs qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté au régime de la sécurité sociale d'un seul État membre, de sorte que les cumuls de législations nationales applicables et les complications qui peuvent en résulter soient évités (voir arrêts du 3 mai 1990, Kits van Heijningen, C-2/89, Rec. p. I-1755, point 12; du 16 février 1995, Calle Grenzshop Andresen, C-425/93, Rec. p. I-269, point 9; du 13 mars 1997, Huijbrechts, C-131/95, Rec. p. I-1409, point 17, et du 11 juin 1998, Kuusijärvi, C-275/96, Rec. p. I-3419, point 28).

21.
    Il ressort des arrêts du 5 décembre 1967, Van der Vecht (19/67, Rec. p. 445), et du 17 décembre 1970, Manpower (35/70, Rec. p. 1251), relatifs à l'article 13, sous a), du règlement n° 3, aussi bien dans sa version initiale que dans celle résultant du règlement n° 24/64, qui a précédé les dispositions de l'article 14, paragraphe 1, sousa), du règlement n° 1408/71, que l'exception par laquelle il est dérogé à la règle selon laquelle le travailleur est soumis à la législation de l'État membre sur le territoire duquel il exerce une activité salariée (ci-après la «règle de l'État d'emploi»), désormais consacrée par l'article 13, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71, n'est susceptible de s'appliquer aux entreprises de travail temporaire que si, entre autres, les deux conditions suivantes sont respectées.

22.
    Ainsi que le soutient notamment FTS dans ses observations écrites, la première condition concerne l'existence et la qualité d'un lien nécessaire entre l'entreprise de travail temporaire et le travailleur détaché, dans la mesure où celui-ci doit relever normalement de l'entreprise qui l'a détaché sur le territoire d'un autre État membre.

23.
    La seconde condition a trait à la relation existant entre l'entreprise de travail temporaire et l'État membre où celle-ci est établie. La Cour a jugé, à cet égard, au point 16 de l'arrêt Manpower, précité, que l'exception qui permet de déroger à la règle de l'État d'emploi dans le cas de travailleurs temporairement détachés n'est applicable qu'aux seuls travailleurs engagés par des entreprises exerçant normalement leur activité sur le territoire de l'État dans lequel elles sont établies.

Sur la notion d'«entreprise dont elle relève normalement»

24.
    À cet égard, il suffit de relever, ainsi qu'il ressort de l'ensemble des observations présentées, que cette notion exige, conformément à la décision n° 128, le maintien d'un lien organique entre l'entreprise établie dans un État membre et les travailleurs qu'elle a détachés sur le territoire d'un autre État membre pendant la durée du détachement de ces derniers. Aux fins d'établir l'existence d'un tel lien organique, il est essentiel de déduire de l'ensemble des circonstances de l'occupation que le travailleur est placé sous l'autorité de ladite entreprise (voir, à cet égard, les arrêts précités Van der Vecht, p. 457, et Manpower, points 18 et 19).

25.
    Or, même si la juridiction nationale est seule compétente pour vérifier si tel est le cas dans le litige dont elle est saisie, il convient de constater que ni les parties au principal ni les États membres ayant présenté des observations en application de l'article 20 du statut CE de la Cour de justice n'ont émis de doutes quant à l'existence d'un tel lien organique dans l'affaire au principal.

Sur l'exigence d'attaches de l'entreprise avec l'État membre d'établissement

26.
    Hormis FTS qui émet des doutes à cet égard, tous les autres intervenants soutiennent que, tant sous le régime du règlement n° 1408/71 que sous celui du règlement n° 3, il est nécessaire que l'entreprise concernée entretienne des attaches avec l'État membre d'établissement de celle-ci. Pour justifier la nécessité de tels liens, la plupart desdits intervenants se fondent sur l'arrêt Manpower, précité. Au point 16 de celui-ci, la Cour a constaté que les entreprises dont relèvent les travailleurs doivent normalement exercer leur activité sur le territoire de l'État dans lequel elles sont établies.

27.
    Afin d'examiner si la condition résultant de l'arrêt Manpower, précité, continue de s'appliquer, il convient de se référer aux objectifs poursuivis par l'exception instaurée à la règle de l'État membre d'emploi par l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71.

28.
    Il convient de relever que l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 a notamment pour objet de promouvoir la libre prestation des services au bénéfice des entreprises qui en font usage en envoyant des travailleurs dans d'autres États membres que celui dans lequel elles sont établies. En effet, elle vise à surmonter les obstacles susceptibles d'entraver la libre circulation des travailleurs et également à favoriser l'interpénétration économique en évitant les complications administratives, en particulier pour les travailleurs et les entreprises (arrêt Manpower, précité, point 10).

29.
    Ainsi que la Cour l'a constaté au point 11 de l'arrêt Manpower, précité, afin d'éviter qu'une entreprise établie sur le territoire d'un État membre ne soit obligée d'affilier ses travailleurs, soumis normalement à la législation de sécurité sociale de cet État, au régime de sécurité sociale d'un autre État membre où ils seraient envoyés pour accomplir des travaux d'une durée limitée dans le temps - ce qui rendrait plus compliqué l'exercice de la libre prestation des services - l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 permet à l'entreprise de conserver l'affiliation de ses travailleurs au régime de sécurité sociale du premier État membre dans la mesure où cette entreprise respecte les conditions régissant cette liberté de prestation des services.

30.
    Il en découle que la disposition de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 demeure une exception à la règle de l'État d'emploi (voir arrêt Manpower, point 10) et que, dès lors, l'entreprise de travail temporaire, désireuse d'offrir des services transfrontaliers, ne peut bénéficier de l'avantage offert par cette disposition que si elle exerce normalement des activités dans l'État membre d'établissement.

31.
    Par conséquent, il y a lieu de constater que la condition énoncée, certes sous le régime du règlement n° 3, au point 16 de l'arrêt Manpower, précité, continue à s'appliquer dans le cadre du règlement n° 1408/71.

32.
    Cette conclusion est corroborée par le point 1, sous b), de la décision n° 128, même si une telle décision, tout en étant susceptible de fournir une aide aux institutions de sécurité sociale chargées d'appliquer le droit communautaire dans ce domaine, n'est pas de nature à obliger ces institutions à suivre certaines méthodes ou à adopter certaines interprétations lorsqu'elles procèdent à l'application des règles communautaires (voir arrêts du 14 mai 1981, Romano, 98/80, Rec. p. 1241, point 20, et du 8 juillet 1992, Knoch, C-102/91, Rec. p. I-4341, point 52). Au demeurant, tous les intervenants devant la Cour admettent que le libellé de ce point n'a fait que reprendre la condition énoncée par l'arrêt Manpower, précité.

33.
    Il résulte de toutes les considérations qui précèdent que l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 doit être interprété en ce sens que, pour bénéficier de l'avantage offert par cette disposition, une entreprise de travail temporaire qui met, àpartir d'un État membre, des travailleurs à la disposition d'entreprises situées sur le territoire d'un autre État membre doit exercer normalement ses activités dans le premier État.

Sur la seconde partie de la première question

34.
    Par la seconde partie de sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance quels sont les critères qui lui permettent, d'une part, de constater qu'une entreprise de travail temporaire exerce normalement ses activités dans l'État membre où elle est établie et, d'autre part, de vérifier si une telle entreprise satisfait à cette condition.

35.
    FTS, les gouvernements irlandais et du Royaume-Uni, ainsi que la Commission, font valoir qu'une entreprise exerce normalement son activité dans un État membre lorsqu'elle y effectue une activité réelle. À cet égard, FTS et le gouvernement irlandais interprètent cette notion en s'appuyant tant sur l'arrêt Manpower, précité, que sur la décision n° 128, et plus spécifiquement sur une exégèse du mot «normalement» tel qu'explicité au point 1, sous b), de cette décision. Selon eux, cette condition viserait uniquement à combattre les abus et aurait notamment pour but d'empêcher les entreprises «boîtes aux lettres» de tirer avantage de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71.

36.
    FTS, les deux gouvernements susmentionnés et la Commission soutiennent notamment que le LISV ne saurait exiger qu'une entreprise prestataire de services réalise un certain volume d'activités dans l'État membre où elle est établie par rapport à l'activité effectuée dans l'État membre dans lequel sont détachés les travailleurs. Ils considèrent que l'appréciation des volumes d'activité respectifs à partir de certains éléments quantitatifs - tels que le chiffre d'affaires, le nombre d'heures effectuées et la nature des travaux - n'est pas conforme au droit communautaire et plus précisément au point 1, sous b), de la décision n° 128.

37.
    Dans ce contexte, ils arguent également d'un manque de prévisibilité de la méthode retenue par les autorités néerlandaises. En application de celle-ci, en effet, ni les travailleurs détachés ni l'entreprise concernée n'auraient pu connaître à l'avance le régime auquel les travailleurs auraient dû être affiliés.

38.
    Les gouvernements néerlandais, belge, allemand et français soutiennent l'argumentation du LISV. Celui-ci réfute la thèse de FTS selon laquelle cette condition d'activité ne viserait qu'à empêcher des entreprises «boîte aux lettres» de se prévaloir de manière abusive de l'exception prévue à l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71. Selon le LISV, les activités d'une entreprise de travail temporaire sur le territoire de l'État membre où elle est établie doivent avoir une certaine envergure et représenter une partie substantielle de l'ensemble de ses activités.

39.
    Ainsi, pour déterminer si FTS exerce normalement - conformément au point 1, sous b), de la décision n° 128 - son activité sur le territoire de l'État membre d'établissement, le LISV considère qu'il est nécessaire d'établir une comparaison entre le volume des activités exercées par cette entreprise dans ledit État et celui qu'elle réalise dans l'État membre où elle détache des travailleurs.

40.
    À cet égard, il résulte de l'économie du titre II du règlement n° 1408/71 et de l'objectif poursuivi par l'article 14, paragraphe 1, sous a), de ce dernier que seule une entreprise qui exerce habituellement des activités significatives sur le territoire de l'État membre d'établissement peut bénéficier de l'avantage offert par l'exception prévue par cette disposition.

41.
    Seule une telle interprétation est susceptible de concilier la règle générale figurant à l'article 13, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71, selon laquelle les travailleurs sont en principe soumis au régime de sécurité sociale de l'État membre dans lequel ils exercent une activité, avec la règle particulière découlant de l'article 14, paragraphe 1, sous a), dudit règlement et applicable aux travailleurs qui ne sont détachés que pour une période limitée dans un autre État membre.

42.
    Pour déterminer si une entreprise de travail temporaire exerce habituellement des activités significatives sur le territoire de l'État membre où elle est établie, l'institution compétente de ce dernier est tenue d'examiner l'ensemble des critères caractérisant les activités exercées par cette entreprise.

43.
    Au nombre de ces critères figurent notamment le lieu du siège de l'entreprise et de son administration, l'effectif du personnel administratif travaillant respectivement dans l'État membre d'établissement et dans l'autre État membre, le lieu où les travailleurs détachés sont recrutés et celui où sont conclus la plupart des contrats avec les clients, la loi applicable aux contrats de travail conclus par l'entreprise avec ses travailleurs, d'une part, et avec ses clients, d'autre part, ainsi que les chiffres d'affaires réalisés pendant une période suffisamment caractéristique dans chaque État membre concerné. Cette liste ne saurait être exhaustive, le choix des critères devant être adapté à chaque cas spécifique.

44.
    En revanche, il ressort de l'arrêt Van der Vecht, précité, que la nature des travaux confiés respectivement aux travailleurs mis à la disposition d'entreprises situées sur le territoire de l'État membre où est établie l'entreprise de travail temporaire et aux travailleurs détachés sur le territoire d'un autre État membre ne fait pas partie de ces critères. En effet, la Cour a jugé à cet égard qu'il importe peu que les travaux exécutés soient autres que ceux normalement effectués dans cet établissement.

    

45.
    Par conséquent, il y a lieu de répondre à la seconde partie de la première question qu'une entreprise de travail temporaire exerce normalement ses activités dans l'État membre où elle est établie lorsqu'elle effectue habituellement des activités significatives sur le territoire de cet État.

Sur la seconde question

46.
    Par cette question, la juridiction de renvoi demande en substance si et dans quelle mesure un certificat délivré par l'institution désignée par l'autorité compétente d'un État membre, au sens de l'article 11, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 574/72, lie les institutions de sécurité sociale d'un autre État membre.

47.
    Contrairement aux autres gouvernements, FTS ainsi que les gouvernements irlandais et du Royaume-Uni considèrent, en faisant référence aux conclusions de M. l'avocat général sous l'arrêt Calle Grenzshop Andresen, précité, que le certificat E 101 lie l'institution compétente d'un État membre autre que celui sous l'autorité duquel il a été établi jusqu'à ce qu'il soit retiré par l'institution qui l'a délivré.

48.
    Il est constant que la Cour ne s'est pas encore prononcée sur le caractère et la nature juridique du certificat E 101. Il résulte cependant de l'arrêt du 11 mars 1982, Knoeller (93/81, Rec. p. 951, point 9), qu'un certificat tel que celui en cause au principal vise - à l'instar de la réglementation de droit matériel prévue à l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 - à faciliter la libre circulation des travailleurs et la libre prestation des services.

49.
    Dans ledit certificat, l'institution compétente de l'État membre où l'entreprise de travail temporaire est établie déclare que son propre régime de sécurité sociale restera applicable aux travailleurs détachés pendant la période de détachement. Ce faisant, en raison du principe selon lequel les travailleurs doivent être affiliés à un seul régime de sécurité sociale, ce certificat implique nécessairement que le régime de l'autre État membre n'est pas susceptible de s'appliquer.

50.
    Toutefois, la force probante du certificat E 101 se limite à la constatation par l'institution compétente de la législation applicable, mais n'est pas de nature à porter atteinte à la liberté des États membres en matière d'organisation de leur propre régime de protection sociale ni à la réglementation par ces derniers des conditions d'affiliation aux divers régimes de sécurité sociale, lesquelles continuent de relever, ainsi que le soutient le gouvernement français, de la seule compétence de l'État membre concerné.

51.
    Le principe de coopération loyale, énoncé à l'article 5 du traité CE (devenu article 10 CE), impose à l'institution compétente de procéder à une appréciation correcte des faits pertinents pour l'application des règles relatives à la détermination de la législation applicable en matière de sécurité sociale et, partant, de garantir l'exactitude des mentions figurant dans le certificat E 101.

52.
    En ce qui concerne les institutions compétentes de l'État membre dans lequel sont détachés les travailleurs, il résulte des obligations de coopération découlant de l'article 5 du traité que celles-ci ne seraient pas respectées - et les objectifs des articles 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 et 11, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 574/72 seraient méconnus - si les institutions dudit État membreconsidéraient qu'elles ne sont pas liées par les mentions du certificat et soumettaient ces travailleurs également à leur propre régime de sécurité sociale.

53.
    Par conséquent, le certificat E 101, dans la mesure où il crée une présomption de régularité de l'affiliation des travailleurs détachés au régime de sécurité sociale de l'État membre où est établie l'entreprise de travail temporaire, s'impose à l'institution compétente de l'État membre dans lequel sont détachés ces travailleurs.

54.
    La solution inverse serait de nature à porter atteinte au principe de l'affiliation des travailleurs salariés à un seul régime de sécurité sociale, ainsi qu'à la prévisibilité du régime applicable et, partant, à la sécurité juridique. En effet, dans des cas où le régime applicable serait difficile à déterminer, chacune des institutions compétentes des deux États membres concernés serait portée à considérer, au détriment des travailleurs concernés, que son propre régime de sécurité sociale leur est applicable.

55.
    Dès lors, aussi longtemps que le certificat E 101 n'est pas retiré ou déclaré invalide, l'institution compétente de l'État membre dans lequel sont détachés les travailleurs doit tenir compte du fait que ces derniers sont déjà soumis à la législation de sécurité sociale de l'État où l'entreprise qui les emploie est établie et cette institution ne saurait, par conséquent, soumettre les travailleurs en question à son propre régime de sécurité sociale.

56.
    Toutefois, il incombe à l'institution compétente de l'État membre qui a délivré ledit certificat E 101 de reconsidérer le bien-fondé de cette délivrance et, le cas échéant, de retirer le certificat lorsque l'institution compétente de l'État membre dans lequel sont détachés les travailleurs émet des doutes quant à l'exactitude des faits qui sont à la base dudit certificat et, partant, des mentions qui y figurent, notamment parce que celles-ci ne correspondent pas aux exigences de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71.

57.
    Dans l'occurrence où les institutions concernées ne parviendraient pas à se mettre d'accord notamment sur l'appréciation des faits propres à une situation spécifique et, par conséquent, sur la question de savoir si celle-ci relève de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71, il leur est loisible d'en appeler à la commission administrative.

58.
    Si cette dernière ne parvient pas à concilier les points de vue des institutions compétentes au sujet de la législation applicable en l'espèce, il est à tout le moins loisible à l'État membre sur le territoire duquel sont détachés les travailleurs concernés et ce, sans préjudice des éventuelles voies de recours de nature juridictionnelle existant dans l'État membre dont relève l'institution émettrice, d'engager une procédure en manquement, conformément à l'article 170 du traité CE (devenu article 227 CE), aux fins de permettre à la Cour d'examiner, à l'occasion d'un tel recours, la question de la législation applicable auxdits travailleurs et, partant, l'exactitude des mentions figurant dans le certificat E 101.

59.
    Il ressort de toutes les considérations qui précèdent que l'article 11, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 574/72 doit être interprété en ce sens que le certificat délivré par l'institution désignée par l'autorité compétente d'un État membre lie les institutions de sécurité sociale des autres États membres dans la mesure où il atteste l'affiliation des travailleurs détachés par une entreprise de travail temporaire au régime de sécurité sociale de l'État membre où cette dernière est établie. Toutefois, lorsque les institutions des autres États membres font valoir des doutes sur l'exactitude des faits sur lesquels repose le certificat, ou sur l'appréciation juridique de ces faits, et en conséquence sur la conformité des mentions dudit certificat avec le règlement n° 1408/71 et notamment avec son article 14, paragraphe 1, sous a), l'institution émettrice est tenue de réexaminer le bien-fondé de celui-ci et, le cas échéant, de le retirer.

Sur les dépens

60.
    Les frais exposés par les gouvernements néerlandais, belge, allemand, français, irlandais et du Royaume-Uni, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR,

statuant sur les questions à elle soumises par l'Arrondissementsrechtbank te Amsterdam, par jugement du 22 mai 1997, dit pour droit:

1)    L'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version codifiée par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, et mise à jour jusqu'à l'époque des faits, doit être interprété en ce sens que, pour bénéficier de l'avantage offert par cette disposition, une entreprise de travail temporaire qui met, à partir d'un État membre, des travailleurs à la disposition d'entreprises situées sur le territoire d'un autre État membre doit exercer normalement ses activités dans le premier État.

2)    Une entreprise de travail temporaire exerce normalement ses activités dans l'État membre où elle est établie lorsqu'elle effectue habituellement des activités significatives sur le territoire de cet État.

3)    L'article 11, paragraphe 1, sous a), du règlement (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d'application du règlement n° 1408/71, dans sa version codifiée par le règlement n° 2001/83 et mise à jour jusqu'à l'époque des faits, doit être interprété en ce sens que le certificat délivré par l'institution désignée par l'autorité compétente d'un État membre lie les institutions de sécurité sociale des autres États membres dans la mesure où il atteste l'affiliation des travailleurs détachés par une entreprise de travail temporaire au régime de sécurité sociale de l'État membre où cette dernière est établie. Toutefois, lorsque les institutions des autres États membres font valoir des doutes sur l'exactitude des faits sur lesquels repose le certificat, ou sur l'appréciation juridique de ces faits, et en conséquence sur la conformité des mentions dudit certificat avec le règlement n° 1408/71 et notamment avec son article 14, paragraphe 1, sous a), l'institution émettrice est tenue de réexaminer le bien-fondé de celui-ci et, le cas échéant, de le retirer.

Rodríguez Iglesias

Moitinho de Almeida
Sevón

Schintgen

Kapteyn
Gulmann

Puissochet

Hirsch
Wathelet

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 février 2000.

Le greffier

Le président

R. Grass

G. C. Rodríguez Iglesias


1: Langue de procédure: le néerlandais.