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Chômage : suspension de la période des 12 premiers mois d’indemnisation par un post-doctorat à l’étranger

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 17 février 2011, R.G. 2007/AB/50.410

Mis en ligne le mardi 24 mai 2011


Cour du travail de Bruxelles, 17 février 2011, R.G. 2007/AB/50.410

TERRA LABORIS A.S.B.L.

Dans un arrêt du 17 février 2011, la Cour du travail de Bruxelles est invitée à examiner l’incidence d’un post-doctorat effectué à l’étranger sur la période des 12 premiers mois d’indemnisation, et ce eu égard au taux des allocations de chômage.

Les faits

Madame D. sollicite le bénéfice des allocations de chômage après avoir terminé un doctorat, en octobre 2001.

Elle bénéficie de celles-ci au taux de 60% jusqu’en janvier 2002, époque à laquelle elle part pour les Etats-Unis aux fins d’y faire un post-doctorat pendant une période d’un an. Il s’agit d’un travail de recherches.

A son retour, un an plus tard, elle s’inscrit au chômage et est admise, mais le taux appliqué est de 40% au motif que plus d’un an s’est écoulé depuis le début de l’indemnisation.

L’intéressée introduit un recours contre cette décision.

Par jugement du 19 octobre 2007, le Tribunal du travail de Nivelles la déboute de sa demande.

Position des parties devant la Cour

Madame D. considère que le post-doctorat qu’elle a effectué à l’étranger doit être assimilé à l’exercice d’une profession n’assujettissant pas le travailleur à la sécurité sociale pour le secteur du chômage. En conséquence, il y aurait suspension de la période et reprise de celle-ci au retour.

Quant à l’ONEm, il renvoie à un arrêt de la Cour de cassation (Cass., 2 juin 1980, J.T.T., 1982, p. 76), selon lequel le suivi d’un post-doctorat ne peut pas être assimilé à une activité professionnelle, ne s’agissant pas d’une activité lucrative. Il considère également qu’il ne s’agit pas d’études de plein exercice, l’intéressée n’ayant, pendant la période litigieuse, suivi ni cours ni formation mais fait des travaux de recherches.

Position de la cour du travail

La cour du travail reprend les textes, essentiellement les articles 114 et 116 de l’arrêté royal, et particulièrement l’article 116, § 2, 2°, qui énumère les faits qui entraînent une prolongation de la période de 12 mois. Dans les hypothèses visées, se trouvent notamment l’exercice d’une profession n’assujettissant pas le travailleur à la sécurité sociale pour le secteur du chômage et une reprise d’études de plein exercice pendant laquelle aucune allocation n’est octroyée, étant les deux hypothèses envisagées par les parties. La cour du travail relève ensuite qu’à l’époque des faits, l’application de la loi du 27 juin 1969 a été étendue aux bénéficiaires d’une bourse de doctorat (bourse faisant l’objet d’une exonération fiscale et pour autant qu’elle ait été accordée par une des institutions visées par la règlementation). Ces dispositions ont été étendues par l’arrêté royal du 26 mars 2003 aux bourses de post-doctorat. Ceci est cependant postérieur aux faits en cause, qui concernent l’année 2002. Revenant aux deux conditions de l’arrêté royal, la cour s’interroge sur la question de savoir si des travaux de recherches peuvent entrer dans l’une ou l’autre catégorie.

S’agissant de travaux menés librement par l’intéressée (en dehors de tout contrat, de toute contrainte), la cour relève que celle-ci a bénéficié de deux bourses, aucune des deux n’étant assujettie à la sécurité sociale. Par ailleurs, les obligations de l’intéressée, dans le cadre de ces bourses, se limitaient à rédiger un rapport des recherches menées et, en aucun cas, les institutions qui ont financé les recherches n’ont chargé Madame D. d’une tâche spécifique.

Pour la cour, il faut donc déduire que cette activité de recherches est une pure activité qualifiante.

Dans le cadre de la réglementation chômage, l’article 116, § 2 de l’arrêté royal n’exclut pas que le terme « études » puisse comprendre un doctorat ou un post-doctorat effectué dans un tel cadre (bourse et absence de but de lucre). Il y a dès lors lieu d’assimiler cette période à une reprise d’études.

La cour relève encore que cette activité a impliqué une présence à temps plein pendant 12 mois à l’étranger, dans le cadre des recherches qui devaient être menées et que l’intéressée n’a perçu aucune allocation pendant cette période.

Elle peut, dès lors, rentrer dans le cas du chômeur qui a repris des études de plein exercice au sens de l’article 116, § 2, 2°, b.

La cour fait, en conséquence, droit à la demande et réforme le jugement du Tribunal du travail.

Intérêt de la décision

L’arrêt de la cour du travail annoté tranche une situation non couverte par la réglementation, à l’époque où les faits se sont produits. Son intérêt est d’assimiler des travaux de recherches (travail de laboratoire, de terrain, collecte de données bibliographiques, etc.) à une reprise d’études, hypothèse visée dans la réglementation.


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