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L’action en révision des conséquences de l’accident du travail n’est pas ouverte lorsque seule la date de la consolidation et le taux d’incapacité permanente ont été fixés par une décision définitive mais non la rémunération de base

Commentaire de Cass., 25 octobre 2010, R.G. S.09.0052.F

Mis en ligne le vendredi 11 mars 2011


Cour de cassation, 25 octobre 2010, R.G. n° : S.09.0052.F

TERRA LABORIS

Dans un arrêt du 25 octobre 2010, la Cour rappelle les règles en matière d’ouverture de l’action en revision.

Les faits de la cause

Le sieur D., travailleur de Fortis (qui était son propre assureur-loi) a été victime d’un accident du travail le 21 décembre 1992. Il a cité l’assureur-loi à comparaître devant le tribunal du travail de Nivelles afin d’obtenir réparation de cet accident. Ce tribunal, par un jugement du 1er octobre 1999, a fixé les taux et périodes d’incapacité temporaire, la date de la consolidation et le taux d’incapacité permanente partielle. Le salaire de base, faisant l’objet d’une contestation, a été réservé. Un jugement ultérieur a ordonné à Fortis de produire des documents et ce jugement a fait l’objet d’un appel de l’assureur-loi qui est toujours pendant.

La procédure devant les juridictions de fond

Par exploit du 4 juin 2002, le sieur D. a introduit une action en révision devant le tribunal du travail de Nivelles, qui, par jugement du 13 décembre 2002 (première chambre) l’a déclarée recevable. Le tribunal a ainsi écarté le moyen de l’assureur qui soutenait que tant que la rémunération de base n’était pas fixée, le délai de révision prévu par l’article 72 de la loi du 10 avril 1971 n’avait pas commencé à courir. Se refusant à résoudre le litige sur la base d’une lecture littérale de cet article 72, le tribunal a considéré que la victime ne devait pas attendre la détermination de la rémunération de base dont le montant est totalement étranger à l’objet de l’action en révision.

L’assureur-loi ayant interjeté appel de cette décision, la sixième chambre de la cour du travail de Bruxelles la confirme par un arrêt du 16 février 2009. La cour décide que le droit à une allocation annuelle découle du jugement coulé en force de chose jugée du 1er octobre 1999. La Cour de cassation a certes, dans un arrêt du 4 septembre 2000 (Pas., 2000, n° 438) posé en règle que le délai de révision ne commence à courir qu’à partir de la date où le jugement ou l’arrêt fixant les autres éléments nécessaires au calcul de l’indemnité annuelle en matière d’accident du travail - tels le taux d’incapacité et la rémunération de base - a acquis force de chose jugée mais dans cette affaire seule la date de consolidation était fixée et pas le taux d’incapacité permanente. Il ne s’en déduit donc pas que l’action en révision ne pourrait être introduite qu’après la décision fixant la rémunération de base, qui est certes un élément nécessaire au calcul de l’indemnité mais qui est étrangère à l’action en révision qui ne concerne que la modification du taux d’incapacité permanente en raison de faits nouveaux.

L’arrêt de la Cour de cassation

La Cour casse l’arrêt attaqué : « La demande en révision des indemnités, fondée sur une modification de la perte de capacité de travail de la victime ou sur son décès dû aux conséquences de l’accident, peut-être introduite dans les trois ans qui suivent la date de l’homologation ou de l’entérinement de l’accord entre les parties ou de la décision fixant le jour ou l’incapacité de travail présente un caractère permanent et où l’indemnité journalière est remplacée par une allocation annuelle calculée d’après la rémunération de base et le degré d’incapacité. Cette décision constitue la décision statuant sur le droit de la victime à une allocation annuelle ».

Dès lors qu’il constate qu’il n’y a pas de décision passée en force de chose jugée sur la rémunération de base de la victime, l’arrêt n’a pu, sans violer les articles 24, alinéa 2 et 72, alinéa 1er, de la loi du 10 avril 1971, décider que le délai de la demande en révision avait pris cours.

Intérêt de la décision

La règle que dégage l’arrêt commenté avait certes déjà été dégagée, mais dans des cas d’espèce différents. Ainsi, l’arrêt de la Cour de cassation du 7 novembre 1983 (Pas., 1984, n° 130) casse une décision fixant la date de prise de cours du délai de révision à la date à laquelle est passée en force de chose jugée la décision accordant à la victime l’indemnisation en droit commun. Quant à l’arrêt du 4 septembre 2000, comme l’a souligné la sixième chambre de la cour du travail de Bruxelles dans son arrêt du 16 février 2009, il casse une décision ayant dit irrecevable une action en révision introduite plus de trois ans après une décision qui n’avait fixé que la date de la consolidation et non le taux d’incapacité permanente partielle, en sorte qu’il restait possible qu’aucune incapacité permanente ne soit reconnue et qu’en définitive aucune allocation annuelle ne soit due.

Aucun de ces arrêts ne concernait dès lors le point de départ de l’action en révision lorsque la date de consolidation et le taux d’incapacité permanente avait été fixé par une décision définitive ayant sur les questions ainsi tranchées autorité de chose jugée, la procédure contentieuse n’ayant plus pour objet que la détermination du salaire de base (voir sur cette question controversée : Guide social permanent, tome IV, commentaire Droit de la sécurité sociale, p. 1 – livre point 2, titre III, chap. 5, V-310 et ss.).

Sources :
Cass., 3e ch., Juridat : F-20101025-3 – R.G. n° S.09.0052.F.


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