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Conditions de la remise totale de dettes

Commentaire de Trib. trav. Charleroi, sect. Charleroi, 10 juin 2010, R.G. 09/108/B

Mis en ligne le mardi 5 octobre 2010


Tribunal du travail de Charleroi, 10 juin 2010, R.G. 09/108/B

TERRA LABORIS ASBL

Dans un jugement du 10 juin 2010, le tribunal du travail de Charleroi rappelle que même si le médiateur fait un procès-verbal de carence, la remise totale de dettes sans plan de règlement n’est pas automatique.

Les faits

Le demandeur est un homme de 24 ans, célibataire, vivant seul et bénéficiaire du revenu d’intégration au taux isolé (soit 725,79€ par mois). Le médiateur de dettes a évalué les charges incompressibles du médié et celles-ci sont d’un montant de 704€ par mois, dont 400€ de loyer.

Après déduction des charges habituelles (électricité, eau, chauffage, …), le demandeur dispose de 160€ environ pour ses frais personnels. Son passif déclaré est supérieur à 10.000€ et concerne six créanciers (dont des amendes pénales pour un montant supérieur à 2.000€). Il est admis au bénéfice de la procédure en règlement collectif de dettes et, après rapport de son médiateur (procès-verbal de carence), le tribunal du travail doit vérifier les conditions de remise totale de dettes, dans une telle hypothèse.

Position du tribunal

Le tribunal rappelle les termes de l’article 1675/13bis du Code judiciaire, selon lequel en cas d’insuffisance de ressources, dûment constatée par le médiateur dans son procès-verbal, impliquant qu’aucun plan amiable ou judiciaire n’est possible, le juge peut accorder la remise totale des dettes sans plan de règlement. Celle-ci peut être assortie de mesures d’accompagnement d’une durée maximale de cinq ans, étant que la remise de dettes est acquise sauf retour à meilleure fortune dans ce délai. En outre, la décision peut, pendant la même période, être révoquée.

Le tribunal rappelle que seules trois conditions doivent être réunies étant : (i) une proposition motivée du médiateur, (ii) l’insuffisance de ressources du débiteur justifiant l’impossibilité de conclure un plan voire même d’envisager un plan judiciaire, et (iii) l’accord du débiteur.

Il poursuit que le recours à la remise totale de dettes n’est possible que si un plan avec remise partielle du principal ne l’est pas, lequel ne peut être envisagé que si un plan judiciaire sans remise de dettes en principal ne suffit pas, ce qui suppose encore qu’aucun plan amiable n’a pu être établi (le tribunal se référant à PATART, D., « La remise totale de dettes du conjoint survivant assujetti avec le défunt à un plan de règlement amiable », obs. sous C. trav. Liège, 30 janvier 2009, J.L.M.B., 2009, p. 1223).

Le tribunal en conclut que la remise totale est une faculté pour le tribunal et qu’elle peut être refusée. Il renvoie ici à un jugement du tribunal du travail de Liège du 24 novembre 2008, RCD 07/1727) qui avait retenu, dans une hypothèse où les revenus étaient inférieurs au minimum saisissable et qu’aucun plan judiciaire n’était possible en l’état ou à bref délai, qu’un effacement des dettes n’était aucunement justifié, au motif que la collectivité faisait preuve de solidarité avec le requérant en lui octroyant un revenu.

En l’espèce, le tribunal constate que la proposition du médiateur est une remise totale avec une mesure d’accompagnement stricte au niveau de la recherche d’un l’emploi. Les explications du demandeur étant assez vagues et en tout état de cause aucune preuve de recherche d’emploi n’étant produite au dossier, le tribunal estime qu’il serait prématuré d’octroyer cette remise compte tenu, en sus, du jeune âge du débiteur. Il impose en conséquence un moratoire de six mois en vue de réaliser une réinsertion sur le marché du travail. Il assortit sa décision d’une série d’exigences dans le chef du requérant aux fins d’établir qu’il s’emploie à redresser sa situation professionnelle et financière.

Intérêt de la décision

Le tribunal du travail de Charleroi rappelle dans un cas d’espèce fréquent que la situation financière du demandeur en règlement collectif de dettes ne suffit pas à entraîner automatiquement une remise totale de celles-ci, la mesure étant une faculté pour le tribunal et pouvant être assortie de conditions.


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