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Une indemnité de démission doit-elle inclure les cotisations de sécurité sociale et le précompte professionnel ?

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 10 mars 2010, R.G. 2008/AB/51.515

Mis en ligne le mardi 20 juillet 2010


Cour du travail de Bruxelles, 10 mars 2010, R.B. 2008/AB/51.515

TERRA LABORIS ASBL – Sophie Remouchamps

Dans un arrêt du 10 mars 2010, la Cour du travail de Bruxelles fait le point sur la question, reprenant l’évolution de la jurisprudence.

Les faits

Un employé signe un contrat de travail à durée déterminée avec une société. Ce contrat est assorti d’une clause d’essai d’une durée de six mois. Une semaine avant la date de prise de cours, l’intéressé fait savoir qu’il souhaite être dégagé de ses obligations, son employeur lui ayant fait des propositions plus intéressantes.

La société notifie, alors, à l’employé son intention de lui réclamer une indemnité compensatoire de préavis, étant le brut de la rémunération correspondant à l’indemnité de démission, en ce que compris le pécule de vacances (simple et double).

Position du tribunal du travail

Le tribunal du travail de Bruxelles rend un jugement le 29 septembre 2008 (R.G. 17.607/07).

Dans celui-ci, il considère que la demande est fondée, essentiellement au motif que la thèse du défendeur originaire, selon laquelle il ne se serait pas agi d’un contrat de travail mais d’une promesse d’engagement, ne pouvait être suivie, le contrat contenant tous les éléments essentiels du contrat de travail. Le tribunal condamne, en conséquence, l’intéressé au paiement de l’indemnité correspondant à un mois et sept jours sur la base de la rémunération brute.

Position des parties en appel

L’employé interjette appel, ne contestant plus devant la Cour que le calcul de l’indemnité. Il fait valoir qu’il faut procéder à une distinction entre la notion juridique de salaire et de celle d’une somme passible de cotisations de sécurité sociale. Pour lui, les sommes présentant un caractère indemnitaire, étant les sommes destinées à couvrir un préjudice et n’ayant pas vocation de remplacer un salaire, n’ont pas de caractère rémunératoire. Il en va, ainsi, pour lui, de l’indemnité compensatoire de préavis, qui est destinée à couvrir un préjudice, et ce quand bien même elle est soumise à retenue de précompte et à cotisations sociales. Elle présente un caractère forfaitaire et n’est pas de la rémunération, cette notion s’entendant, au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation, de la contrepartie du travail effectué en exécution du contrat.

Reprenant, par ailleurs, les appréciations divergentes en jurisprudence sur le calcul de l’indemnité compensatoire, il reprend les décisions qui ont admis que celui-ci devait intervenir sur le net.

Position de la Cour

La Cour reprend les termes de l’article 81, § 1er, § 2 de la LCT et retient que cette disposition est applicable à l’hypothèse de la rupture du contrat avant exécution. Il en ressort que le fondement de la condamnation du défendeur originaire à une indemnité correspondant à la rémunération d’un mois et de sept jours est établi.

Quant à la notion de rémunération, celle-ci est utilisée dans l’article 39, alinéa 2 de la LCT et la Cour du travail reprend également la jurisprudence de la Cour de cassation qui a appliqué cette disposition à la même hypothèse de rupture de contrat avant d’exécution ; il renvoie à la doctrine (J.F. NEVEN, « Quelques questions controversées concernant la base de calcul de l’indemnité compensatoire de préavis », J.T.T. 2005, p. 95 à 100) selon laquelle le fait que l’ exécution du contrat n’ait pas encore pris cours n’empêche pas que l’indemnité doit se calculer en tenant compte de la rémunération à laquelle le travailleur a droit au jour du licenciement.

En jurisprudence, la Cour retient les deux courants existants et suit celui qui fixe l’indemnité sur le brut. Pour la Cour, le montant de l’indemnité doit être calculé en brut, peu importe qu’il s’agisse d’une indemnité revenant à l’employeur ou au travailleur, dans la mesure où l’article 39 § 1er alinéa 2 de la LCT s’applique aussi bien à l’un et à l’autre. Elle renvoie à plusieurs décisions de la Cour du travail de Bruxelles (C. trav. Bruxelles, 3 mai 2006, J.T.T., 2007, p. 98 ; C. trav. Bruxelles, 20 février 2002, R.G. 41.181) sur la question.

Répondant encore à un argument du défendeur originaire, relatif à l’inégalité économique des parties, la Cour constate que prendre celle-ci en compte serait contraire à la volonté du législateur, celui-ci n’ayant pas entendu, en cas de rupture, procéder à une distinction selon que celle-ci émane de l’employeur ou du travailleur.

Les cotisations de sécurité sociale ainsi que le précompte professionnel sont dès lors dus.

Quant à une argumentation subsidiaire de l’employé, selon laquelle le net reviendrait au travailleur et le montant des retenues aux administrations concernées, la Cour la rejette également, au motif que, lorsque l’indemnité est due par le travailleur, elle n’est pas passible de cotisations sociales ni de précompte professionnel.

Il y a dès lors lieu de payer le brut à l’employeur.

Intérêt de la décision

Dans l’arrêt ci-dessus, la Cour du travail de Bruxelles rappelle que la base du calcul de la rémunération au sens de l’article 39, alinéa 2 de la loi du 3 juillet 1978 est identique pour le calcul de l’indemnité compensatoire de préavis ou pour l’indemnité de démission. En l’occurrence, les cotisations de sécurité sociale doivent être incluses dans l’indemnité revenant à l’employeur et ne seront pas versées à l’ONSS.

Ceci découle du caractère forfaitaire de l’indemnité, tel que voulu par la loi.


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