Terralaboris asbl

Exigence de la production d’un certificat susceptible de remettre en cause la décision contestée, et ce eu égard à la législation concernée

Commentaire de C. trav. Mons, 13 mars 2008, R.G. 20.756

Mis en ligne le lundi 3 novembre 2008


Cour du travail de Mons, 13 mars 2008, R.G. n° 20.756

TERRA LABORIS ASBL – Pascal HUBAIN

Dans un arrêt du 13 mars 2008, la Cour du travail de Mons considère que faute de produire des données médicales précises et circonstanciées dans la perspective de la législation concernée, l’assuré social n’apporte pas les éléments de nature à remettre en question la décision contestée.

Les faits

Monsieur P. a été reconnu incapable de travailler par sa mutuelle pour diabète insulinodépendant.

Moins d’un an plus tard, le médecin conseil de la mutuelle considère qu’il n’est plus incapable de travailler au sens de l’article 56 ancien de la loi du 9 août 1963 (article 100 de la loi coordonnée le 14 juillet 1994) car son taux d’incapacité de travail est devenu inférieur à 66 %.

Monsieur P. conteste cette décision devant le tribunal du travail de Charleroi, qui le déboute de sa demande pour le motif que les certificats médicaux qu’il produit ne sont pas circonstanciés et ne contredisent pas efficacement la décision litigieuse.

Monsieur P. interjette appel de ce jugement.

La position des parties en appel

Monsieur P. considère que les certificats médicaux produits attestent d’un taux d’incapacité supérieur à 66% et entraînent donc une divergence médicale nécessitant la désignation d’un expert.

La mutuelle maintient que Monsieur P. n’apporte aucun élément médical neuf permettant de contester valablement la décision de son médecin conseil et demande, dès lors, la confirmation du jugement dont appel.

La décision en degré d’appel

La Cour relève tout d’abord que, à la date litigieuse, la contestation porte sur une période d’invalidité, l’incapacité perdurant depuis plus de six mois.

Dans ce cas, l’ancien article 56 de la loi du 9 août 1963 exige, pour apprécier le taux de capacité de gain, de se reporter à ce qu’une personne de même condition et de même formation peut gagner par son travail dans le groupe de professions dans lesquelles se range l’activité professionnelle exercée par l’intéressé au moment où il est devenu incapable de travailler mais également dans les diverses professions que l’intéressé a exercées ou aurait pu exercer du fait de sa formation professionnelle.

Monsieur P. a exercé les professions de manœuvre dans le secteur de la construction et d’ouvrier d’usine.

Concernant sa formation, il a suivi six années d’enseignement primaire et trois années d’études professionnelles qu’il n’a pas achevées.

La Cour considère, dès lors, qu’il faut tenir compte, outre des professions de manœuvre en bâtiment et d’ouvrier à la chaîne, de tous les métiers non qualifiés y compris légers.

C’est à Monsieur P. de fournir au tribunal les éléments médicaux circonstanciés à partir desquels peut être envisagée l’éventuelle réponse aux critères économiques prévus par la disposition légale. Or, les rapports médicaux produits par Monsieur P. sont insuffisants. L’un se borne à préciser qu’il est incapable de reprendre une activité dans l’ensemble des professions auxquelles il a accès de par sa formation professionnelle, tout en faisant référence au travail de Monsieur P. sur chantier ou comme manœuvre. Dans un autre certificat médical, il est question uniquement des activités de conducteur d’engins ou du travail à la chaîne.

La Cour considère dès lors que les restrictions émises par le médecin de Monsieur P. ne répondent pas aux exigences formulées par l’article 56, qui fait référence aux diverses professions que le travailleur aurait pu exercer du fait de sa formation professionnelle ainsi qu’aux groupes de professions dans lesquels se range l’activité professionnelle.

La Cour en conclut que Monsieur P. n’apporte pas d’éléments de nature à remettre en question la décision contestée ni à réformer le jugement intervenu.

L’intérêt de la décision

Le refus des deux juridictions de désigner un expert judiciaire semble sévère compte tenu du fait que le médecin traitant concluait à une incapacité de reprendre des activités dans l’ensemble des professions auxquelles son patient a accès compte tenu de sa formation professionnelle.

Il semble toutefois que le tribunal puis la Cour du travail de Mons ont été influencés par le fait que dans les deux attestations médicales le médecin fait clairement référence à des professions bien déterminées, étant celles que l’intéressé avait exercées alors qu’il fallait prendre en considération tous les métiers non qualifiés, y compris légers, et ce vu l’absence de toute qualification professionnelle du travailleur.

Cet arrêt de la Cour du travail de Mons rappelle dès lors opportunément que c’est dans la stricte perspective de la législation concernée que les données médicales précises et circonstanciées doivent être produites.

Ce n’est qu’à cette condition qu’une divergence médicale apparaîtra et que le tribunal pourra alors désigner un expert judiciaire.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be