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Accident survenu sur un chantier dans le cadre d’une sous-traitance en dehors de l’horaire normal du travail

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 17 mars 2008, R.G. 46.467

Mis en ligne le mardi 9 septembre 2008


Cour du travail de Bruxelles, 17 mars 2008, R.G. 46.467

TERRA LABORIS ASBL – Sandra Cala

Accident survenu sur un chantier dans le cadre d’une sous-traitance en dehors de l’horaire normal du travail

Dans un arrêt du 17 mars 2008, la Cour du travail de Bruxelles estime que, quoiqu’existent des éléments permettant de soupçonner une fraude, l’accident survenu à un ouvrier maçon affecté un samedi à la pose de carrelage, dans le cadre d’une sous-traitance, est un accident survenu pendant l’exécution du contrat. Elle considère par ailleurs que l’entreprise d’assurances ne démontre pas qu’il y a eu mise à disposition prohibée au sens de la loi du 24 juillet 1987.

Les faits

Monsieur R. est occupé par une société T.D. en qualité d’ouvrier maçon. Le 12 juin 1999, il se coupe la main alors qu’il était affecté sur un chantier (particulier) et occupé à poser du carrelage.

Il est immédiatement conduit à l’hôpital le plus proche, où des lésions au poignet gauche sont mises en évidence.

L’accident est refusé par l’entreprise d’assurances, qui estime que la preuve de ce qu’un accident est survenu pendant l’exécution du contrat le liant à l’employeur assuré n’est pas rapportée.

L’intéressé assigne en conséquence l’entreprise d’assurances, afin d’obtenir sa condamnation à l’indemniser des conséquences de l’accident.

La décision du tribunal

Le Tribunal rejeta la thèse de l’entreprise d’assurances, estimant que les éléments du dossier démontraient à suffisance la survenance de l’accident pendant l’exécution du contrat de travail qui liait l’intéressé à la société T.D.

La position des parties

L’entreprise d’assurances interjette appel de la décision. Elle estime que l’intéressé ne rapporte pas la preuve que l’accident est survenu pendant qu’il était sous l’autorité – même virtuelle – de l’employeur assuré. Elle se fonde sur l’existence de contradictions dans le dossier et soutient que l’intéressé était en réalité au service d’une autre société, une société B.

Elle avance par ailleurs, sur la base de l’article 31 de la loi du 24 juillet 1987, que l’intéressé devait être considéré comme occupé par l’entreprise utilisatrice.

La décision de la Cour

La Cour relève que la discussion porte sur le fait de savoir si l’accident subi par Monsieur R. (dont la réalité n’est pas contestée) est survenu dans le cours de l’exécution du contrat de travail le liant à son employeur.

Si la Cour reconnaît l’existence de discordances et inexactitudes dans les éléments du dossier des parties, elle estime cependant qu’elles ne peuvent mettre en doute l’occupation, au moment de la survenance de l’accident, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.

Elle relève ainsi que

  • quant à la date de l’accident, elle est déterminée de manière certaine, nonobstant l’existence d’une erreur dans l’une des attestations déposées ;
  • la qualification professionnelle de l’intéressé (maçon), en apparente contradiction avec la tâche exercée au moment de l’accident (découpe et pose de carrelage), est indifférente, dès lors que les ouvriers du bâtiment sont en général polyvalents ;
  • le fait que l’accident soit survenu un samedi est indifférent, dès lors que l’intéressé a signalé qu’il s’agissait d’une prestation en remplacement d’un congé pris dans la même semaine ;
  • le fait que l’entrepreneur principal (une société B., qui a comme client le particulier où est survenu l’accident et qui a sous-traité le chantier) ait mentionné à l’inspecteur de l’entreprise d’assurances un autre nom que la société T.D. employeur. La Cour retient en effet l’existence d’une erreur, dès lors que c’est bien l’adresse de T.D. qui a été reprise et qu’une facture à B. émanant de T.B. et reprenant le chantier chez le particulier a été déposée ;
  • le fait qu’il existe des discordances quant à la personne ayant emmené Monsieur R. aux urgences n’est pas susceptible d’étayer l’une ou l’autre position.

La Cour note que la société T.D. est ainsi intervenue en sous-traitance de la société B. et que l’entreprise d’assurances tente d’en tirer parti, en invoquant les dispositions de la loi du 24 juillet 1987 sur le travail temporaire, intérimaire et la mise à disposition des travailleurs.

Elle rappelle à cet égard que la mise à disposition prohibée est celle visée par la loi, c’est-à-dire dès lors que l’employeur-prêteur met à disposition d’un tiers des travailleurs, qu’il utilise et sur lesquels est exercée toute ou une partie de l’autorité patronale.

Dans le cas d’espèce, la Cour relève que l’entreprise d’assurances n’établit en rien qu’une autre personne que l’employeur ait exercé une autorité sur Monsieur R.

Elle confirme ainsi le jugement entrepris.

Intérêt de la décision

L’intérêt de la décision réside en premier lieu dans l’examen réalisé par la Cour de la preuve de la survenance de l’accident pendant le cours de l’exécution du contrat. L’on peut en retenir que l’existence de discordances ou inexactitudes, notamment dans les attestations de tiers déposées, n’exclut pas automatiquement la preuve des faits.

Par ailleurs, la décision rappelle qu’en cas de sous-traitance, les dispositions de la loi du 24 juillet 1987 relatives à la mise à disposition des travailleurs ne trouvent à s’appliquer que s’il y a transfert de l’autorité patronale à l’entreprise utilisatrice et que la charge de la preuve repose sur l’entreprise d’assurances.


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