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La durée de l’indemnisation par le F.M.P. de la travailleuse enceinte écartée peut également comprendre la période d’allaitement

Commentaire de C. trav. Brux., 8 janvier 2007, R.G. 39.616

Mis en ligne le mercredi 26 mars 2008


Cour du travail de Bruxelles, 8 janvier 2007, R.G. 39.616

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 8 janvier 2007, la Cour du travail de Bruxelles considère que, dès lors qu’est établie l’exposition au risque de la maladie professionnelle, la travailleuse écartée en raison de celui-ci peut prétendre aux indemnités, non seulement pendant la grossesse mais également après la fin du repos de maternité, pour la période d’allaitement.

Les faits

Madame M.F. était occupée dans une société d’import-export de boyaux, réalisant le contrôle et le conditionnement de boyaux de porc, mouton et bœuf provenant de divers pays. Elle était chargée de la préparation de boyaux naturels et procédait ainsi au nettoyage des boyaux.

Alors qu’elle était enceinte de 2-3 mois, elle fut convoquée par le médecin du travail, qui fit une proposition d’écartement préventif du travail, dans le cadre de la loi sur la protection de la maternité, et ce pour cause de risques infectieux.

Le médecin du travail rédigea une fiche médicale 146 bis R.G.P.T., considérant que la travailleuse était inapte à poursuivre ses activités pour toute la durée de grossesse. Il constatait qu’il n’y avait pas d’autre poste de travail dans l’entreprise compatible avec celle-ci. Par deux autres fiches 146 bis, le médecin estima que l’inaptitude devait être prolongée jusqu’au 16 septembre 1997 inclus. Ces prolongations s’expliquent par l’allaitement.

Madame M.F. introduisit alors une demande auprès du Fonds des maladies professionnelles, qui se fondait sur le risque codé 1.403.01 (risque professionnel de maladies infectieuses ou parasitaires transmises à l’homme par des animaux ou débris d’animaux). Le Fonds estima cependant qu’aucun écartement temporaire ou définitif ne devait être proposé.

Le Tribunal du travail, saisi par Madame M.F., lui donna raison. Le Fonds interjeta appel de cette décision.

Par un premier arrêt du 17 septembre 2001, la Cour désigna un médecin expert, avec la mission de se prononcer sur le risque éventuel auquel l’activité professionnelle de la travailleuse l’exposait et sur la nécessité de l’écarter pendant la période de congé prophylactique.

L’expert estima que l’activité professionnelle exposait Mme M.F. au risque professionnel susmentionné et que, en raison de celui-ci, il était nécessaire qu’elle s’abstienne d’exercer l’activité du 17 octobre 1996 au 16 septembre 1997

A la suite de l’expertise, le Fonds contesta les conclusions de l’expert. Par ailleurs, il estima que la période d’indemnisation devait être limitée à la période comprise entre le début de la grossesse et le début des 7 semaines préalables à la date présumée de l’accouchement (article 37, § 2, alinéa 2, lois coordonnées du 3 juin 1970 sur les maladies professionnelles) tandis que la travailleuse réclamait les indemnités pour l’ensemble de la période où elle avait été écartée.

La décision de la Cour

Statuant sur le rapport d’expertise, la Cour estima que celui-ci établit à suffisance l’exposition au risque de la maladie professionnelle, le rapport, respectant les règles légales de l’expertise et de la contradiction, étant cohérent et complet. La Cour relève par ailleurs qu’il est indifférent que le Fonds ne partage pas la thèse de l’expert, le rôle de ce dernier étant précisément de départager les avis médicaux.

La Cour estime en conséquence que la travailleuse avait droit aux indemnités d’écartement.

Quant à la période d’indemnisation, la Cour reconnaît, en application de l’article 37, § 2, alinéa 2 des lois coordonnées, le droit aux indemnités pendant la grossesse jusqu’au début des 7 semaines préalables à la date présumée de l’accouchement. Par contre, aucune indemnité à charge du Fonds n’est octroyée pour la période du repos d’accouchement, l’écartement se justifiant par le repos d’accouchement et non en raison du risque professionnel.

Pour la période ultérieure, pendant laquelle la travailleuse avait été écartée en raison de l’allaitement, la Cour estime que la travailleuse a droit aux indemnités, sur la base de l’article 37, § 2, alinéa 1er des lois coordonnées. Se fondant sur les recommandations du médecin du travail et sur le rapport d’expertise, la Cour estime que Madame M.F. établit qu’elle était exposée au risque de la maladie professionnelle pendant la période d’allaitement. Sur ce point, répondant à l’argument du F.M.P. selon lequel l’activité ne présentait pas un danger pour la travailleuse elle-même (mais bien pour son enfant), la Cour l’estime inopérant, dès lors que « ce qui compte, c’est qu’elle a été exposée au risque de la maladie ».

Intérêt de la décision

L’intérêt de cette décision réside dans les considérations réservées par la Cour du travail à la durée de l’indemnisation.

Il résulte de cet arrêt que, dès lors que l’exposition au risque de la maladie professionnelle est reconnue dans le chef de la travailleuse enceinte, qui a effectivement cessé le travail, celle-ci peut obtenir les indemnités à charge du F.M.P., non seulement pour la période visée par le second alinéa du paragraphe 2 de l’article 37 (écartement avant la naissance de l’enfant), mais également pour toute période qui suivra le repos d’accouchement, telle que la période d’allaitement, comme ce fut le cas dans l’affaire tranchée par la Cour.


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