Terralaboris asbl

La poursuite d’études pendant le chômage ne fait pas nécessairement obstacle au bénéfice des allocations

C. trav. Liège, 26 février 2007, R.G. 31.145/02

Mis en ligne le mercredi 26 mars 2008


Cour du travail de Liège, 26 février 2007, R.G. 31.145/02

TERRA LABORIS ASBL – Sophie Remouchamps

Dans un arrêt du 26 février 2007, la cour du travail a eu à connaître du cas d’un chômeur qui avait suivi, pendant qu’il bénéficiait des allocations de chômage, des cours dans un institut d’enseignement de promotion sociale de la Communauté française, en vue d’obtenir un graduat en informatique. Examinant la réglementation, la cour constate que, si celle-ci prévoit la possibilité de demander une dispense des obligations pendant le chômage pour ce type d’études, aucune disposition n’exclut de facto du bénéfice des allocations le chômeur qui suit ces cours.

Les faits

Monsieur T., titulaire d’un graduat en agronomie, s’inscrit comme demandeur d’emploi le 10 septembre 1998. Pendant son stage d’attente, il suit des cours de promotion sociale en environnement.

A l’issue du stage d’attente, il sollicite le bénéfice des allocations d’attente (9 juin 1999), lesquelles lui seront accordées par une deuxième décision de l’ONEm du 16 août 1999 (la première lui refusait le bénéfice des allocations d’attente, vu la poursuite des cours de promotion sociale pendant le stage d’attente).

Peu de temps après, le 28 septembre 1999, Monsieur T. s’inscrit comme élève régulier dans un institut d’enseignement de promotion sociale de la Communauté française, en vue d’obtenir un graduat en informatique. Il s’agit d’un cycle d’études de 2 ans, comprenant un certain nombre d’unités de cours, dispensés à raison de cinq demi-journées par semaine.

Le 6 octobre 1999, il sollicite, auprès du directeur du bureau de chômage, une dispense des obligations imposées pendant le chômage (accepter un emploi convenable, être disponible sur le marché de l’emploi, être et rester inscrit comme demandeur d’emploi, contrôle communal). Cette demande se fonde sur l’article 94 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991.

Par décision du 18 novembre 1999, le directeur du bureau de chômage refuse la dispense, compte tenu du fait que la nature des études s’apparenterait à des études de plein exercice, mais également de la durée des études et de celle du chômage. La motivation précise que les études ne peuvent être suivies avec maintien des allocations. Cette décision a été transmise à l’organisme de paiement.

C’est celui-ci qui transmet la décision du directeur du bureau de chômage à l’intéressé. Monsieur T. poursuit néanmoins ses cours, tout en se présentant cependant au contrôle communal. Le paiement des allocations d’attente est maintenu.

Au début de la seconde année du graduat en informatique, il sollicite à nouveau une dispense, toujours sur la base de l’article 94, dispense qui est refusée par le directeur du bureau de chômage, vu la première décision intervenue.

L’ONEm le convoque par ailleurs le 22 décembre 2000, afin de statuer sur ses droits en matière d’allocations de chômage, vu la perception des allocations pendant la période où les cours ont été suivis.

A l’issue de l’audition, le directeur du bureau de chômage lui notifie une décision par laquelle il l’exclut du bénéfice des allocations à partir du 28 septembre 1999 et ordonne la récupération des allocations versées depuis cette date.

La décision du tribunal

Le tribunal confirme la décision administrative litigieuse mais fait droit à une demande dirigée contre l’organisme de paiement. Celui-ci est ainsi condamné à garantir le chômeur du remboursement des allocations de chômage pour la période du 9 octobre 2000 au 31 janvier 2001. Le tribunal se fonde sur le fait que l’organisme de paiement a fautivement manqué à son devoir d’information en n’avertissant pas le chômeur des conséquences de la poursuite des cours.

La décision de la cour

Examinant les dispositions pertinentes de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 (articles 68, 93 et 94), la cour considère que l’article 68 contient un motif d’exclusion du bénéfice des allocations de chômage en cas de poursuite de certains types d’études.

L’un des cas est celui du chômeur qui suit des études de plein exercice, sauf s’il a obtenu la dispense visée à l’article 93. La cour retient que, de l’appréciation même de l’ONEm, les études suivies n’étaient pas des études de plein exercice. Par ailleurs, le second cas visé par l’article 68 vise la formation prévue par la législation relative à la formation à une profession indépendante, qui n’est pas la formation suivie par le travailleur.

La cour conclut dès lors à la non application de l’article 68 et des mesures d’exclusion qu’il contient.

Examinant ensuite l’article 94, qui régit les possibilités de dispense pour le chômeur lorsqu’il suit une formation qui n’est pas visée par les articles 91 à 93, la cour rappelle que cette disposition ne prévoit pas une exclusion du bénéfice des allocations de chômage et que la seule conséquence du refus de dispense est que le chômeur doit continuer à satisfaire aux diverses obligations mises à sa charge par la réglementation chômage.

La réglementation n’exclut par ailleurs pas que celui-ci, quoique ayant suivi des cours, réponde néanmoins aux conditions de disponibilité visées par la réglementation. Ceci était d’ailleurs plaidé par le travailleur lui-même, qui invoquait la possibilité, en cas d’offre d’emploi, de poursuivre sa formation en cours du soir.

Estimant devoir rouvrir les débats sur ces dernières questions, la cour ne se prononce pas plus en avant.

Intérêt de la décision

Parmi les conditions d’octroi des allocations de chômage, figure l’article 68 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991, qui précise que le chômeur ne peut bénéficier d’allocations pendant la période durant laquelle il suit en Belgique des études de plein exercice (alinéa 1er) ou pendant la période durant laquelle il suit une formation au sens de l’article 92, c’est-à-dire une formation prévue par la législation relative à la formation à une profession indépendante (alinéa 2).

Il n’y a pas de condition spécifique d’octroi dans la réglementation pour ce qui est du type de cours suivi par le chômeur dans le cas visé par l’arrêt, le graduat en informatique poursuivi sur deux ans en promotion sociale n’étant pas considéré par la cour comme étant des études de plein exercice.

Aussi, quoique le travailleur ait demandé à être dispensé des obligations de disponibilité, cela ne signifie pas qu’il ne répondait pas auxdites conditions pendant la période où il a suivi son graduat en informatique.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be