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Etendue du pouvoir de contrôle de l’ONEm en cas d’exercice d’une activité accessoire avant la demande d’allocations de chômage

Commentaire de Trib. trav. Brabant wallon (div. Wavre), 24 juin 2016, R.G. 15/2.749/A

Mis en ligne le mardi 14 mars 2017


Tribunal du travail du Brabant wallon (div. Wavre), 24 juin 2016, R.G. 15/2.749/A

Terra Laboris

Dans un jugement du 24 juin 2016, le Tribunal du travail du Brabant wallon (division Wavre) rappelle que l’exercice d’une activité complémentaire pendant les trois mois qui précèdent la demande d’allocations de chômage n’est pas une condition d’octroi des allocations elles-mêmes, mais uniquement une condition de poursuite de l’activité accessoire pendant le chômage.

Les faits

Une architecte d’intérieur acquiert le statut de travailleuse indépendante, après quelques années d’exercice de son activité dans le cadre d’un contrat de travail, et ce à partir du 1er avril 2013. Il s’agit d’une activité principale. Un an et demi plus tard, elle est de nouveau engagée dans le cadre d’un contrat de travail pour une activité d’attachée commerciale itinérante chargée de la coordination de chantiers. Elle conserve, à partir de ce moment, son statut d’indépendante, mais celui-ci est limité à une activité complémentaire.

Il s’avérera que le contrat de travail ne recevra pas une exécution normale et que l’intéressée devra, en fin de compte, demander l’intervention du tribunal du travail, qui en prononcera la résolution. L’intéressée sollicite ensuite le bénéfice des allocations de chômage, suite à cette activité salariée. Elle y déclare l’activité accessoire, étant celle d’architecte d’intérieur. Le document C1A est dûment complété.

Une enquête est ouverte par l’ONEm et l’intéressée est auditionnée. Elle donne les éléments requis. L’ONEm demande alors les preuves effectives de l’exercice de l’activité, et ce via les factures adressées à ses clients. Ne les ayant pas reçues à temps, l’ONEm procède à une exclusion, considérant qu’il n’y a pas activité accessoire au sens de l’article 48, § 1er, de l’arrêté royal du 25 novembre 1991. Selon la décision administrative, il n’y a pas eu d’exercice effectif de l’activité en cause.

Une procédure est dès lors introduite devant le tribunal du travail.

La décision du tribunal

Celui-ci rappelle les dispositions en cause, ainsi que le principe de l’interdiction de cumul d’une activité effectuée pour compte propre avec la perception d’allocations de chômage, et ce indépendamment du montant des revenus générés. Il s’agit de la jurisprudence de la Cour de cassation et le tribunal renvoie à un arrêt du 4 octobre 2004 (Cass., 4 octobre 2004, n° S.04.0099.N).

Cependant, la réglementation autorise, sous certaines conditions, l’exercice d’une activité accessoire.

En ce qui concerne la condition d’exercice effectif de l’activité, l’arrêté royal prévoit que celle-ci doit avoir existé durant au moins les trois mois précédant la demande d’allocations.

Pour le tribunal, l’ONEm dispose d’éléments objectifs (affiliation de l’intéressée comme indépendante, inscription à la TVA, existence de revenus perçus du fait de cette activité) et ceux-ci sont suffisants. Même si les recettes étaient limitées, elles existent.

Renvoyant à un arrêt de la Cour du travail de Mons (C. trav. Mons, 7 juin 2002, R.G. 17.325, inédit), il rappelle que l’exercice de l’activité n’est pas une condition d’octroi des allocations. Il s’agit, au contraire, d’une tolérance destinée à permettre de ne pas interrompre une activité compatible avec un emploi salarié qui a été exercé antérieurement. Ce sont les termes de l’arrêt de la cour du travail, que le tribunal reprend dans son jugement. Cet exercice, pendant une période qui précède la demande d’octroi d’allocations, est dès lors une condition de poursuite pendant le chômage. Pour le tribunal, l’ONEm n’a pas à vérifier la rentabilité effective ou encore le nombre d’heures de travail de cette activité, mais à vérifier si elle existait avant le chômage. Il doit également vérifier pendant le chômage si l’activité conserve ce caractère accessoire.

Il conclut, en conséquence, à l’annulation de la décision administrative.

Le tribunal retient encore que l’ONEm a conseillé à l’intéressée de solliciter la radiation de son inscription à la TVA, aux fins de régulariser sa situation. Ceci ne se justifiait évidemment pas et il y a faute dans le chef de l’Office. Celle-ci entraîne sa condamnation au paiement du dommage correspondant aux frais relatifs à la radiation en cause.

Intérêt de la décision

Les conditions d’autorisation de la poursuite d’une activité accessoire compatible avec l’octroi des allocations de chômage sont reprises à l’arrêté royal du 25 novembre 1991 et, comme le tribunal le rappelle à très juste titre, elles sont cumulatives. L’exercice de cette activité doit, pour continuer à être autorisé, respecter l’ensemble de celles-ci et l’ONEm pourra effectuer, en cours de chômage, toutes vérifications sur ce point.

En ce qui concerne la condition d’exercice préalable à la demande d’octroi d’allocations, qui impose que cette activité ait été exécutée pendant une période de trois mois au moins, le tribunal retient ici que l’ONEm n’a aucun pouvoir d’appréciation sur la rentabilité de l’activité elle-même. Dès lors que les éléments objectifs établissent que les formalités administratives ont été faites et que l’activité a été exercée, même si c’est très peu (l’intéressée s’étant plainte lors de son audition d’avoir eu peu de clients), il n’y a pas de pouvoir d’appréciation de l’Office quant à la réunion des critères.

L’on soulignera encore le renvoi à un arrêt de la Cour de cassation du 4 octobre 2004, dans lequel celle-ci avait relevé l’incompatibilité de l’exercice d’une activité (pour compte propre) avec les allocations de chômage, et ce indépendamment du profit retiré de cette activité. Cette règle constitue le principe et l’exception doit réunir les conditions de l’article 48.


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