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Versement excédentaire à l’ONSS des retenues sur factures opérées dans le cadre de l’article 30ter de la loi du 27/06/1969 : Quid de l’obligation de remboursement de l’Office ?

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 24 mai 2007, R.G. 39.679

Mis en ligne le vendredi 21 mars 2008


Cour du travail de Bruxelles, 24 mai 2007, R.G. 39.679

TERRA LABORIS ASBL – Sophie Remouchamps

Dans un arrêt du 24 mai 2007, la Cour du travail de Bruxelles rappelle que, si en application de l’article 30ter de la loi du 27/06/1969, l’entrepreneur principal verse des sommes au-delà de la part des travaux confiés au sous-traitant défaillant, il y a obligation de remboursement de la part de l’ONSS.

Les faits

Dans le cadre du chantier d’un des bâtiments de l’Union européenne, l’Etat attribue celui-ci à une association momentanée X. Une partie des travaux sont sous-traités à une autre association momentanée A, qui sous-traite à une entreprise B, celle-ci confiant elle-même une partie de son chantier à une société C.

Cette dernière ne remplit pas ses obligations sociales et fiscales. Averti de la situation, X, en sa qualité d’entrepreneur principal, effectue un versement auprès de l’ONSS, à concurrence de la part de chantier de A effectué par C, évaluée à ce moment à 9,5 % de la facture de A. Il s’avèrera ultérieurement que le pourcentage était plus faible (4%).

Le versement fait par X (entrepreneur principal) a été effectué, conformément à la loi applicable, par le biais de retenues sur la facture de A, qui a répercuté la retenue sur la facture de B. L’entreprise B applique également une retenue sur la facture de C, mais correspondant à la part réelle de cette entreprise.

Malgré les démarches menées auprès de l’ONSS, cet organisme refusera de restituer le versement excédentaire fait par X, estimant que celui-ci était tenu par la clé de réparation communiquée spontanément par lui. Cette position s’appuie également sur le fait que C, l’entrepreneur défaillant, avait des dettes sociales supérieures au montant excédentaire versé par X.

Vu le blocage de la situation, B, qui a in fine supporté la retenue excédentaire sur sa propre facture, sans la répercuter auprès de C, assigna A devant le Tribunal de Commerce, en vue d’obtenir le paiement du solde de la facture. Ultérieurement, X introduisit une action contre l’ONSS en vue de la restitution du montant excédentaire.

Le Tribunal de Commerce ayant renvoyé le dossier aux juridictions du travail de Bruxelles, les différentes demandes sont alors traitées, en première instance, par le Tribunal du travail. Diverses demandes sont encore formées par les parties entre-elles dans le cadre de la procédure. Le jugement rendu débute les parties demanderesses.

Appel est dès lors interjeté.

La décision de la cour

Dans son arrêt, la Cour du travail tranche essentiellement la question du caractère indu du paiement fait à l’ONSS. Les différentes demandes formées par les parties entre elles font en effet l’objet d’une réouverture des débats aux fins d’explications complémentaires.

Sur la question de l’indu, la Cour commence par un examen de la disposition légale en application de laquelle X (entrepreneur principal) a effectué le versement litigieux, à savoir l’article 30ter de la loi du 27 juin 1969, tel qu’il était en vigueur au moment des faits (1992). Elle rappelle ainsi que l’entrepreneur principal était tenu de retenir, sur les factures émises par ses sous-traitants, 50% de la part des travaux confiés à un sous-traitant qui ne respecte pas ses obligations sociales, retenues à verser à l’ONSS.

Ainsi, le paiement fait par X (versement à l’ONSS de la retenue opérée sur la facture de A) a une cause, étant une obligation légale imposée dans son chef. Cependant, l’ONSS admettant que la somme qui fait l’objet de la demande de répétition n’était pas due en application de l’article 30ter, il y a paiement indu, le versement excédentaire étant dépourvu de cause. La Cour rappelle en effet que, en effectuant le versement, X n’a fait qu’exécuter une obligation légale, sans qu’il y ait de volonté d’apurer les dettes sociales de C. L’entreprise X a ainsi acquitté une dette propre, payant cependant plus que ce à quoi elle était légalement tenue.

L’erreur ou la négligence quant à la détermination de la part des travaux du sous-traitant défaillant (C) n’exclut pas l’action en répétition, n’étant pas une condition d’exercice de celle-ci mais jouant uniquement un rôle probatoire dans la détermination de l’absence de cause du paiement.

Enfin, la Cour rappelle que le fait que l’ONSS a affecté l’excédent versé à l’apurement des dettes sociales de C est indifférent, puisqu’il n’y a pas de solidarité entre les entrepreneurs au-delà de ce que prévoit la loi.

La Cour alloue également des intérêts, à dater de la mise en demeure, considérant que l’ONSS a fait preuve de mauvaise foi, dès lors qu’il savait avoir reçu un montant supérieur à ce qui était dû, montant sujet à répétition.

Intérêt de la décision

Il s’agit d’une application des principes de l’action en répétition de l’indu dans le cadre spécifique des obligations imposées aux entrepreneurs par la loi du 29 juin 1969, où la Cour rappelle que l’entrepreneur principal acquitte dans cette hypothèse, une dette propre et non une dette de son sous-traitant.


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