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Etudes pendant le chômage : conditions du droit aux allocations

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 21 avril 2016, R.G. 2014/AB/1.129

Mis en ligne le vendredi 28 octobre 2016


Cour du travail de Bruxelles, 21 avril 2016, R.G. 2014/AB/1.129

Terra Laboris

Dans un arrêt du 21 avril 2016, la Cour du travail de Bruxelles rappelle l’interprétation à donner à la réglementation, en ce qu’elle vise la possibilité de suivre des cours qui se donnent « principalement » après 17 heures ou le samedi.

Les faits

Une bénéficiaire d’allocations introduit une demande de dispense en novembre 2013 (pour l’année académique 2013-2014). Les études suivies sont de type universitaire et de plein exercice (agrégation de l’enseignement secondaire supérieur).

L’ONEm refuse la demande, au motif que l’intéressée ne remplit pas la condition relative aux 312 allocations de chômage exigées pendant les deux années précédant le cycle d’études. Suite à cette décision, l’intéressée abandonne son projet.

Il est néanmoins découvert qu’elle avait entamé ses études avant d’avoir obtenu cette autorisation et l’ONEm l’exclut pour la période correspondant à la date du début des études suivies à celle de la décision administrative.

Un recours est introduit devant le tribunal du travail, vu la demande de récupération.

La décision du tribunal

Par jugement du 19 novembre 2014, le tribunal accueille le recours, considérant que les cours se déroulaient « principalement » après 17 heures le soir et le samedi.

Position des parties devant la cour

L’ONEm considère que, s’agissant d’études de plein exercice, les cours ne répondaient pas à cette condition. Les documents produits font en effet état de cours et formations les mercredis et jeudis dans la journée.

Pour l’intéressée, la grande majorité des cours était dispensée après 17 heures et le samedi et les deux exceptions ci-dessus (mercredi et jeudi) ne concernaient que quelques cours avant 17 heures.

Elle fait également valoir d’autres circonstances de fait (dispense pour certains cours et vacances annuelles). Elle fait également grief à l’ONEm d’avoir tardé à prendre sa décision et enfin sollicite la limitation au remboursement des seuls jours où les cours étaient dispensés.

La décision de la cour

La cour rappelle les dispositions réglementaires en ce qui concerne l’obligation pour le chômeur d’être disponible sur le marché de l’emploi, ainsi que celle de rechercher activement un emploi.

Ceci exclut la poursuite d’études de plein exercice, sauf si les cours sont dispensés « principalement le samedi ou après 17 heures » ou s’il y a eu dispense en application de l’article 93 de l’arrêté royal. Le chômeur doit, dans ce second cas, prouver 312 allocations perçues pendant les deux années précédant le début des études.

La cour en vient ainsi à l’interprétation de la notion de « principalement » au sens de la disposition en cause.

Elle reprend un arrêt de la Cour du travail de Liège du 14 novembre 2011 (Chron. dr. soc., 2012, p. 14), selon lequel « principalement » signifie que, même si l’horaire ne se situe pas entièrement après 17 heures, il ne peut nuire à la condition de disponibilité sur le marché de l’emploi (la Cour du travail de Liège ayant en l’espèce considéré que deux après-midi de formation par semaine impliquaient l’indisponibilité).

La cour renvoie alors à un document « Riodoc » de l’ONEm, selon lequel la disposition doit s’interpréter comme signifiant qu’une minorité des cours et activités peut se dérouler en semaine et en journée.

Reconstituant l’horaire de l’intéressée, elle constate des exigences régulières de cours et stages toute la journée du mercredi, ainsi que celle du jeudi. Les lundis et mardis reprennent des cours à partir de 17 heures. La cour conclut à l’absence de disponibilité.

En ce qui concerne l’instruction de l’affaire, elle relève, contrairement à la partie appelante, une diligence certaine, dans la mesure où la CAPAC est intervenue à diverses reprises.

Enfin, elle considère qu’est sans fondement légal la demande de limiter l’exclusion à deux jours par semaine, étant les mercredis et jeudis. L’article 169, alinéa 3, de l’arrêté royal (applicable en cas d’infractions aux articles 44 ou 48 de l’arrêté) ne peut trouver application, le caractère d’ordre public de la réglementation s’opposant à une extension par assimilation.

La cour réforme dès lors le jugement.

Intérêt de la décision

La Cour du travail de Bruxelles fait ici application de l’article 93, § 1er, 2°, de l’arrêté royal du 25 novembre 1991, relatif à la demande qui peut être introduite par un bénéficiaire d’allocations pour une période pendant laquelle il suit des études de plein exercice, étant la dispense de l’application des articles 51, § 1er, alinéa 2, 3° à 6°, 56 et 58, relatifs au caractère involontaire du chômage ainsi qu’à l’obligation de rester disponible sur le marché du travail. Ces études doivent être organisées, subventionnées ou reconnues par une Communauté et la réglementation fixe les conditions de niveau (soit niveau équivalent ou supérieur aux études déjà suivies par l’intéressée, soit un niveau inférieur à celles-ci mais à la condition qu’elles relèvent de l’enseignement supérieur). Parmi les autres conditions, figure notamment celle relative à l’horaire.

L’assurée sociale avait fait état, dans son dossier, d’un document interne de l’ONEm (Riodoc), donnant l’interprétation de l’ONEm quant à la notion : « principalement » signifie que la grande majorité des cours et autres activités qui font partie des études (stages, séminaires) doit se dérouler dans les créneaux horaires autorisés. A contrario, une minorité des cours et activités peut cependant se dérouler en semaine et en journée.

La cour y a rappelé que, même si ce document n’a pas de base légale, il donne néanmoins des indications sur l’interprétation courante que fait l’administration de cette notion.

L’on peut encore souligner ici qu’en cas d’incompatibilité avérée entre des allocations de chômage perçues et des études suivies en dehors de l’autorisation requise, il ne peut être question d’appliquer par analogie l’article 169 de l’arrêté royal, qui vise une tout autre situation, et ce vu le caractère d’ordre public de la réglementation.


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