Terralaboris asbl

Garde téléphonique rémunérée pour un service de pompiers : droit aux allocations de chômage ?

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 18 mars 2015, R.G. 2013/AB/748

Mis en ligne le lundi 6 juillet 2015


Cour du travail de Bruxelles, 18 mars 2015, R.G. n° 2013/AB/748

TERRA LABORIS ASBL

Dans un arrêt du 18 mars 2015, la Cour du travail de Bruxelles examine la compatibilité de prestations rémunérées de garde téléphonique pour un service d’incendie avec la perception d’allocations de chômage à la lumière des dispositions réglementaires, étant essentiellement l’article 45, 6° de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 sur le chômage.

Les faits

Un pompier volontaire fait l’objet d’une enquête de l’ONEm, l’Office ayant été informé par la Banque Carrefour de la sécurité sociale de la perception de rémunérations pour certaines journées en 2010 et 2011. L’autorité communale confirme, par une attestation, que l’intéressé a perçu des indemnités pour des jours de garde. Il s’avère par ailleurs qu’il n’a pas noirci les cases de sa carte de contrôle.

Quant aux prestations, il s’est agi de gardes téléphoniques. Une décision est alors prise d’exclure l’intéressé pour les journées en cause et de récupérer les allocations perçues. Une exclusion d’une semaine est également décidée sur pied de l’article 154 de l’arrêté royal vu l’absence de biffures de la carte de contrôle.

L’indu correspond en tout et pour tout à 6,5 allocations journalières.

L’intéressé conteste cependant et suite à l’intervention de son organisation syndicale, l’ONEm confirme le fondement de sa décision, s’agissant de déterminer les conditions dans lesquelles les gardes rémunérées sont compatibles avec la perception d’allocations. Outre les obligations en matière de biffure de la carte de contrôle (étant qu’en cas de garde de nuit une seule biffure doit être apposée, correspondant au jour où la garde est entamée), l’ONEm précise que le droit à l’allocation peut être maintenu lorsque pendant la garde rémunérée le pompier participe à une mission avec danger de mort. Dans l’examen des prestations, il a, selon l’Office, été tenu compte de cette distinction : prestations avec ou sans danger de mort, les événements ayant justifié l’intervention des pompiers ayant été identifiés par l’administration communale.

Un recours est introduit devant le Tribunal du travail de Nivelles, section de Wavre. Par jugement du 28 juin 2013, il déboute l’intéressé de sa demande.

Appel est dès lors interjeté devant la cour du travail.

Décision de la cour

La cour examine le problème lui soumis eu égard à la disposition spécifique concernant les activités des pompiers volontaires. L’article 45, 6°, de l’arrêté royal du 25 novembre 1991 considère en effet que ne sont pas considérées comme du travail les activités exercées en tant que pompier volontaire ou membre volontaire de la protection civile s’il s’agit d’activités entraînant un danger de mort ou si aucun avantage n’est octroyé. La disposition renvoie à une liste fixée par le Ministre pour la définition de ces activités.

La cour relève également la jurisprudence sur la question, étant particulièrement un jugement du Tribunal du travail de Namur du 9 juin 2011 (Trib. Trav. Namur, 9 juin 2011, R.G. n° 10/893/A), selon laquelle l’activité rémunérée ou non n’est pas considérée comme un travail au sens de l’article 44 si elle entraîne un danger de mort et par ailleurs l’activité sans danger de mort n’est quant à elle pas considérée comme un travail si aucun avantage n’est perçu.

La cour relève que les gardes téléphoniques ne sont pas visées dans la liste des activités avec danger de mort et qu’il n’est pas davantage établi que l’intéressé serait resté de garde pour de telles interventions alors que d’autres pompiers volontaires étaient eux-mêmes sortis. Il faut dès lors écarter ce type d’hypothèse.

La cour conclut qu’ont été effectuées des prestations de garde téléphonique rémunérées, celles-ci étant à considérer comme un travail non cumulable avec les indemnités de chômage.

Enfin, l’intéressé invoque devant la cour qu’il y aurait possibilité de cumul sur pied de l’article 18, § 4 de l’arrêté ministériel du 26 novembre 1991, qui renvoie notamment aux activités exercées dans le cadre du bénévolat. La cour rejette également cette hypothèse, rappelant en outre qu’une demande doit dans ce cas être introduite préalablement auprès de l’ONEm.

Elle conclut à l’incompatibilité de la perception d’allocations pour les journées en cause, confirmant ainsi le jugement.

Intérêt de la décision

Cet arrêt reprend, sur la question des prestations effectuées par les pompiers volontaires, deux règles importantes, liées à la perception d’une indemnité :

  • Soit il y avait intervention avec danger de mort et l’indemnité est cumulable avec les allocations ;
  • Soit non, et elle ne l’est pas, s’agissant d’un avantage incompatible avec celles-ci.

Il n’est pas inutile à cet égard de rappeler également l’article 18 de l’arrêté ministériel du 26 novembre 1991, qui permet l’exercice d’une activité bénévole et gratuite si cette activité n’a pas lieu dans la sphère professionnelle. Elle doit cependant avoir fait l’objet d’une déclaration préalable au bureau du chômage et le chômeur doit avoir obtenu l’accord du directeur.

La disposition vise également l’hypothèse où une indemnité ou un avantage matériel sont octroyés au chômeur dans le cadre de ce bénévolat (ou encore d’activité sportive comme sportif amateur). Les conditions de cet avantage cumulable sont qu’il couvre des frais exposés dans le cadre de l’activité ou qu’il est considéré par la législation fiscale comme un avantage non imposable (article 18, § 4, 2°).


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be