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Inaptitude au sens de la réglementation chômage : évaluation et barème officiel belge des invalidités (BOBI)

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 8 septembre 2014, R.G. 2013/AB/758

Mis en ligne le mercredi 3 décembre 2014


Cour du travail de Bruxelles, 8 septembre 2014, R.G. n° 2013/AB/758

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 8 septembre 2014, la Cour du travail de Bruxelles rappelle que les critères du BOBI peuvent être utilisés dans l’appréciation d’une inaptitude au travail, mais qu’ils ne suffisent pas.

Les faits

Une assurée sociale, bénéficiaire d’allocations de chômage, introduit une demande en vue d’être dispensée de la procédure d’activation de recherche d’emploi. Elle introduit, pour ce, un certificat médical faisant état d’une inaptitude supérieure à 33%.

La position médecin-conseil de l’ONEm est de retenir une inaptitude, celle-ci étant cependant modérément réduite (20%) et étant limitée dans le temps (un an). Elle introduit un recours devant le tribunal du travail, qui désigne un expert judiciaire.

La position de l’expert est de conclure à l’absence d’inaptitude permanente au travail d’au moins 33%, avis que le tribunal entérine.

Appel est interjeté.

Position de l’appelante devant la cour

Celle-ci fait essentiellement deux griefs au jugement, étant d’abord qu’il s’est référé, avec l’expert désigné, aux critères de référence du BOBI. Elle considère que cette grille d’évaluation ne peut intervenir dans l’appréciation de l’inaptitude au sens de l’article 59bis de l’arrêté royal du 25 novembre 1991.

Ensuite, elle développe des objections plus circonstanciées eu égard aux éléments internes à l’expertise, considérant qu’il n’a pas été tenu compte à suffisance de droit des observations de son médecin de recours.

La décision de la cour

La cour statue, dans un premier temps, sur la question du recours à la grille d’évaluation du BOBI.

Elle rejette que cette grille soit écartée d’office, considérant par ailleurs que le jugement a à juste titre retenu que l’inaptitude en elle-même ne peut être évaluée eu égard à ce barème uniquement, mais qu’il a pu en tenir compte, renvoyant à des critères d’évaluation qu’il contient. Pour la cour, l’inaptitude au travail au sens des articles 59bis et suivants doit s’apprécier par rapport au marché du travail accessible au chômeur, et ce compte tenu des critères habituels (expérience professionnelle et formation). Le BOBI est, par ailleurs, un barème de base d’évaluation dans les expertises pratiquées par l’Office médico-légal, mais rien n’interdit à l’expert chargé d’évaluer l’aptitude au travail de s’y référer. La cour exige cependant que son application soit adaptée de manière telle à rendre compte de l’impact de l’incapacité sur les possibilités d’occupation sur le marché du travail.

La cour constate que, en l’espèce, l’expert judiciaire a enregistré une hypo-acousie, ainsi qu’une pathologie asthmatique. C’est la répercussion de celles-ci sur la capacité de travail qui a été prise en compte.

Quant à l’évaluation du taux d’inaptitude en elle-même, la cour constate que, mis en présence de deux thèses médicales opposées, l’expert judiciaire a débattu contradictoirement avec les deux médecins et que, si le médecin de recours de l’assuré social a maintenu sa position (étant que la combinaison des deux pathologies entraînait une inaptitude supérieure à 33%), il y a eu une réponse motivée à cette position.

La cour conclut que la mission a été correctement remplie et que l’expert s’est prononcé avec objectivité.

Elle confirme dès lors le jugement, rappelant que, actuellement, la réglementation applicable ne prévoit plus la suspension ou l’annulation de la procédure d’activation en cas d’inaptitude de 33% et que, dans ce contexte, il est douteux que le recours présente encore un intérêt, l’appelante ayant sollicité de nouvelles mesures d’expertise. La cour n’y fait dès lors pas droit.

Intérêt de la décision

Ce bref arrêt de la Cour du travail de Bruxelles examine la question fréquente de la place du BOBI dans l’évaluation d’une incapacité de travail (ou d’une inaptitude au travail au sens de la réglementation chômage). Rien n’interdit, comme la cour le relève, de se référer dans un premier temps aux articles du BOBI, dans la mesure où l’examen auquel il est procédé est l’évaluation de l’incidence de la pathologie constatée sur l’existence de la capacité de travail, étant l’accessibilité au marché du travail général propre à la victime (le marché général étant celui envisagé hors fluctuations économiques et le marché propre à la victime étant celui qui lui est accessible eu égard à son expérience professionnelle, ainsi que sa formation).

Relevons, sur la même problématique, un précédent arrêt de la Cour du travail de Bruxelles du 27 mars 2014 (C. trav. Brux., 27 mars 2014, R.G. 2012/AB/706), où la cour a fait le parallèle entre la réglementation chômage et la législation AMI, eu égard aux professions accessibles à l’assuré social. Elle a précisé qu’il faut tenir compte du marché du travail du chômeur eu égard à son expérience professionnelle et à sa formation dans le cadre de la définition de l’inaptitude temporaire et, de même, pour l’inaptitude permanente.


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