Terralaboris asbl

Chômage et exercice autorisé d’une activité accessoire

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 18 juin 2014, R.G. 2012/AB/1.131

Mis en ligne le jeudi 21 août 2014


Cour du travail de Bruxelles, 18 juin 2014, R.G. 2012/AB/1.131

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 18 juin 2014, la Cour du travail de Bruxelles est saisie d’une contestation de l’ONEm quant à une activité exercée par un chômeur, au motif qu’elle aurait perdu son caractère accessoire.

Les faits

Un assuré social déclare à l’ONEm la poursuite d’une activité accessoire, et ce lors de sa demande d’allocations. Il s’agit de travaux de comptabilité et d’administration.

Trois ans plus tard, il fait l’objet d’une mesure d’exclusion pour l’avenir, au motif que l’activité n’aurait plus un caractère accessoire, au sens de l’article 48, § 3 de l’arrêté royal. Le critère retenu par l’Office est l’importance des revenus et la sous-traitance à un tiers d’une partie des activités en cause.

L’intéressé introduit un recours devant le Tribunal du travail de Bruxelles, qui le déboute. Il forme dès lors appel.

Position des parties devant la cour

L’appelant considère que la référence à faire, pour l’appréciation des revenus perçus dans le cadre d’une activité accessoire autorisée doit se faire à partir des montants nets imposables. Il plaide également que le montant des ressources à prendre en compte dans le cadre de l’article 48 est celui fixé à l’article 130 du même arrêté royal. En conséquence, il estime qu’il a lieu de déduire des recettes brutes les frais professionnels déclarés, étant relatifs à son véhicule, aux locaux occupés, ainsi qu’à de la sous-traitance.

Il expose également que la consistance de sa clientèle est minime (quelques pharmacies ainsi que la société de management y reliée), dont celle de son épouse.

L’ONEm considère quant à lui que les revenus à prendre en compte sont les revenus bruts, étant que les charges ne peuvent être déduites. Le critère du caractère non accessoire de l’activité en cause est l’importance des revenus et l’ONEm s’oppose à l’assimilation des montants repris à l’article 48, § 3 d’une part et de l’article 130, § 2, alinéa 3 d’autre part (revenus nets imposables), qui n’a pour objet que de déterminer le montant à déduire des allocations de chômage en cas d’activité autorisée.

Il fait également valoir que le fait pour l’intéressé de faire appel à un sous-traitant, ce qui n’est pas contesté, démontre que l’activité en cause n’est pas accessoire. Il souligne également les liens étroits entre la société sous-traitante et l’intéressé (sous-location par la société de la surface commerciale, utilisation du véhicule, l’administrateur délégué n’étant autre que l’épouse de l’intéressé). Enfin, il plaide le caractère artificiel des charges vantées.

La décision de la cour

La cour reprend, en premier lieu, l’article 48 de l’arrêté royal, qui fixe les conditions pour qu’une activité soit autorisée et considérée comme accessoire.

Elle constate que l’intéressé remplit toutes les conditions requises pour l’exercice de l’activité en cause. La cour oriente son examen sur les critères du temps de travail et de l’importance des revenus générés. L’activité était exercée avant la mise en chômage, ce qui lui paraît de nature à confirmer son caractère limité, rien ne démontrant par ailleurs qu’elle n’ait pas été exercée dans le créneau horaire autorisé.

Relevant qu’il n’y a pas de référence à l’article 48 quant aux revenus à prendre en compte (bruts ou nets), la cour admet, tout en soulignant qu’il ne s’agit pas d’en faire une règle générale, que l’importance des revenus bruts peut constituer un indice de l’importance de l’activité, mais que l’appréciation de celle-ci doit se faire au cas par cas. Et la cour de souligner qu’il est contradictoire, dans le chef de l’administration, de faire grief à l’intéressé de sous-traiter une partie de l’activité (sous-traitance rémunérée) et de considérer que cette activité est importante. Constatant que l’activité est réduite en temps et en revenus, la cour conclut qu’elle conserve son caractère accessoire même si le chiffre d’affaires (dont sont déduits les frais de sous-traitance) peut paraître élevé.

Enfin, en ce qui concerne les charges invoquées, la cour conclut que, vu l’absence de contestation de la part de l’administration fiscale, les charges en cause doivent être admises et que l’ONEm ne peut remettre en cause des revenus définitivement.

La cour relève enfin que l’intéressé est un fin connaisseur de la réglementation et qu’il a mis sur pied un système lui permettant de respecter ses obligations fiscales et sociales. Ceci ne signifie cependant pas que la situation examinée ait un caractère frauduleux. Elle admet, en conséquence, que l’activité est autorisée et réforme le jugement du tribunal.

Intérêt de la décision

Au-delà de l’ingénierie déployée par l’intéressé en l’espèce (dont la cour relève la subtilité mais constate qu’elle n’a pas de caractère frauduleux), il est intéressant de retenir comme enseignement de l’arrêt que les revenus bruts générés par une activité autorisée peuvent être un indice de l’importance de celle-ci mais un indice uniquement. L’appréciation du caractère accessoire ou non doit se faire au cas par cas et, en l’espèce, un deuxième élément important dans l’application des principes est que la situation fiscale présentée au niveau des charges déductibles suite à l’exercice de l‘activité (en ce compris des frais de sous-traitance susceptibles de réduire de manière importante le chiffre d’affaires) s’impose à l’ONEm, qui ne peut remettre en cause la taxation par une contestation des charges admises par l’administration des contributions.


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