Terralaboris asbl

Cumul d’allocations de chômage et de revenus générés par une activité accessoire : conditions

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 31 janvier 2013, R.G. 2011/AB/974

Mis en ligne le lundi 24 juin 2013


Cour du travail de Bruxelles, 31 janvier 2013, R.G. n° 2011/AB/974

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 31 janvier 2013, la Cour du travail de Bruxelles rappelle les critères permettant le cumul d’allocations de chômage avec des revenus générés par une activité accessoire déclarée comme telle au moment de la demande d’allocations : il s’agit de prendre en compte soit le nombre d’heures soit le montant des revenus générés.

Les faits

Un employé est licencié en octobre 2007 avec un préavis à prester. Celui-ci est prolongé jusqu’au 25 août 2009. Il est alors dans les conditions pour bénéficier de la prépension dans le cadre de la CCT n° 17. Avant son licenciement, l’intéressé exerçait une profession accessoire, étant associé actif et actionnaire d’une société en commandite, société de consultance pour entreprises (spécialisée dans le domaine de la sécurité routière). A la fin de son préavis, l’intéressé demande le bénéfice des allocations de chômage et fait état de l’exercice d’une activité accessoire.

Trois mois plus tard, il est exclu du bénéfice des allocations, rétroactivement, avec effet à la date de la demande, au motif que l’activité exercée ne peut être considérée comme activité accessoire. Est particulièrement pointé l’exercice de la gestion journalière, dont l’ONEm considère qu’elle ne peut être limitée à quelques heures par jour. Le caractère accessoire de l’activité n’est dès lors pas acceptable.

La société en cause est dissoute le mois suivant et il s’avère que l’intéressé avait à ce moment là déjà présenté sa démission comme associé actif quelques semaines auparavant.

Il introduit une action devant le Tribunal du travail de Bruxelles. Celle-ci est rejetée par jugement du 19 septembre 2011.

Position de parties en appel

L’intéressé, appelant, fait grief au premier juge de ne pas avoir tenu compte des prestations effectives ainsi que des revenus générés par son activité. Il rappelle qu’il a fait sa déclaration préalable et que dans celle-ci il a précisé ne pas se consacrer à celle-ci entre 7 et 18hrs, cette activité ayant d’ailleurs par le passé pu se cumuler avec son contrat de travail. Il renvoie à l’article 48, § 2 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991, qui permet au directeur régional de contester le caractère accessoire de l’activité sur la base de présomptions sérieuses, précises et concordantes. Tel ne pourrait selon lui pas être le cas, vu le caractère limité du chiffre d’affaires mais également des profits générés.

Quant à l’ONEm, qui sollicite la confirmation du jugement, il fait valoir que le mandat d’administrateur d’une société commerciale doit être considéré comme activité au sens de l’article 45, §1er, 1° de l’arrêté royal et que la gestion journalière telle qu’exercée en l’espèce ne peut pas être considérée comme limitée à quelques heures par jour.

Décision de la cour du travail

La cour reprend dès lors les dispositions applicables, étant les articles 44, 45,1° et 48,§1 de l’arrêté royal. Cette dernière disposition vise les obligations du chômeur qui exerce une activité accessoire et qui souhaite le bénéfice des allocations de chômage. Les conditions fixées par la réglementation sont que (i) la déclaration doit être faite au moment de la demande d’allocations, (ii) cette activité doit avoir déjà été exercée pendant les trois mois précédant la mise au chômage, (iii) elle doit s’exercer principalement entre 18hrs et 7hrs et (iv) certaines activités ne sont pas autorisées (Horeca notamment).

La cour rappelle ensuite le §3 de l’article 48 selon lequel le droit aux allocations est refusé même pour les jours durant lesquels aucune activité n’a été exercée, si l’activité ne présente pas (ou plus) le caractère d’une profession accessoire, en raison du nombre d’heures de travail ou du montant des revenus. La cour rappelle qu’aucun critère n’a été fixé et qu’il appartient au juge d’apprécier si l’activité peut être considérée comme accessoire ou si elle ne peut pas l’être. La cour retient que ce n’est pas le profit généré par cette activité au bénéfice du chômeur qui est le critère mais bien l’ampleur de l’activité elle-même. Celle-ci peut ressortir du chiffre d’affaires généré et la cour relève que celui-ci a été en l’occurrence produit par l’activité du chômeur uniquement. Il s’agit, sur la base des déclarations TVA, de montants variant entre 9.000€ et 3.000€ annuels. Pour la cour, ceci donne une moyenne mensuelle d’environ 600€ par mois. Elle retient encore, à partir de l’examen de l’évolution du chiffre d’affaires que celui-ci avait baissé à l’époque de la fin du contrat de travail mais qu’il a augmenté pendant les deux derniers trimestres d’activité, correspondant au début de la période de chômage de l’intéressé.

Vu ces chiffres, la cour précise que, dans le cadre de l’article 48 de l’arrêté royal, le directeur régional du chômage doit tenir compte des revenus générés par l’activité eu égard à la période pendant laquelle l’intéressé a également bénéficié d’allocations de chômage. En l’occurrence il faut dès lors retenir cette dernière période, soit au total 5 mois. Le chiffre correspondant est de l’ordre de 10.000€, étant une moyenne de 2.000€ par mois.

La cour relève encore que celui-ci a été produit par une activité d’ordre intellectuel, pour laquelle peu de frais doivent être pris en compte. Dès lors celle-ci ne peut être considérée comme accessoire.

Intérêt de la décision

Cet arrêt de la Cour du travail de Bruxelles tranche un cas d’espèce dont l’intérêt est de préciser les critères d’appréciation de l’activité accessoire dans le cadre de la réglementation de chômage. Comme le relève la cour, aucune balise n’a été donnée au juge, aux fins d’apprécier les critères fixés à l’article 48, § 3 de l’arrêté royal du 25 novembre 1991, qui renvoie au nombre d’heures de travail ou au montant des revenus – critères donc non cumulatifs.

La cour étant, en l’occurrence, dans l’impossibilité de déterminer avec précision le nombre d’heures de travail prestées, elle s’appuie sur le second critère et dans son examen, elle relève très judicieusement qu’il y a lieu de comparer les revenus générés par l’activité pendant la période de cumul avec les allocations de chômage. Se livrant en l’occurrence au calcul d’une moyenne mensuelle correspondant au profit ainsi généré, la cour aboutit très logiquement à la conclusion que l’activité – même déclarée au moment de la demande d’allocations – ne peut être autorisée.


Accueil du site  |  Contact  |  © 2007-2010 Terra Laboris asbl  |  Webdesign : michelthome.com | isi.be