Terralaboris asbl

Pension de travailleur indépendant : conditions d’assimilation d’études et de la période de service militaire

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 12 octobre 2012, R.G. 2010/AB/1.141

Mis en ligne le mercredi 22 mai 2013


Cour du travail de Bruxelles, 12 octobre 2012, R.G. n° 2010/AB/1.141

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 12 octobre 2012, la Cour du travail de Bruxelles reprend les règles en matière d’assimilation d’études et de période de service militaire, eu égard à la possibilité d’exemption du service militaire figurant dans les lois coordonnées sur la milice et reprend en outre les règles guidant le statut d’objecteur de conscience.

Les faits

Après la fin de ses études de médecine, Monsieur A. travaille pendant deux ans (août 1974 - août 1976) pour l’Etat algérien et ensuite, pendant un an, comme médecin en Tunisie. Il s’agit d’activités de coopération au développement, ayant permis une dispense du service militaire. Une carrière d’indépendant (médecin) est ensuite entamée en Belgique à partir de 1977. Il sollicite, en mars 2009, l’assimilation de ses années d’études à une période d’activité, dans le cadre de la carrière à prendre en compte en vue de la pension d’indépendant. L’INASTI ne fait pas droit à sa demande au motif qu’il ne justifie pas d’une activité d’indépendant (ou d’aidant) dans les 180 jours après la fin des études.

Un recours est introduit devant le tribunal du travail.

Décision du tribunal du travail

Par jugement du 3 novembre 2010, le tribunal du travail fait droit à sa demande, assimilant la période d’études à une période d’activité, que motif que les objecteurs de conscience affectés à des tâches d’utilité publique doivent bénéficier d’avantages sociaux analogues à ceux des miliciens. Pour le tribunal, à la fois les prestations pour l’Etat algérien (Ministère de la santé publique) et en Tunisie (médecin) constituent de telles tâches d’utilité publique.

Décision de la cour du travail

Suite à l’appel de l’INASTI, la cour du travail examine les conditions d’assimilation, tenant compte également du statut d’objecteur de conscience.

Les lois sur la milice coordonnées par l’arrêté royal du 30 avril 1962 énoncent notamment que le titulaire d’un diplôme de docteur en médecine peut être excepté du service militaire s’il effectue certaines missions hors d’Europe (ou autre pays repris dans une liste).

Par ailleurs, en vertu du statut de l’objecteur de conscience (lois coordonnées par l’arrêté royal du 20 février 1980), un milicien peut demander en raison de ses objections de conscience à être exempté du service militaire armé ou de tout service militaire. Dans ce dernier cas, il sera affecté à la protection civile ou à des tâches d’utilité publique au sein d’organismes de droit public ou privé. C’est le Ministre de l’Intérieur qui prend la décision en ce sens.

Lorsqu’il s’agit de calculer la carrière d’un indépendant, certaines périodes sont assimilées et il en va ainsi des périodes de service militaire, mais la cour relève qu’en vertu de l’article 31 de l’arrêté royal du 22 décembre 1967, il s’agit des périodes accomplies au service de l’armée belge ou de celles couvertes par les dispositions de l’arrêté royal du 20 février 1980 (portant statut de l’objecteur de conscience). Vont ainsi être assimilées des périodes d’études, effectuées en Belgique ou à l’étranger dans certaines conditions.

Examinant, ensuite, la situation de l’intéressé, la cour du travail constate qu’il a bénéficié d’une exemption de service militaire en vue d’effectuer une mission de coopération au développement (cette exemption intervenant sur la base de l’article 16 des lois coordonnées sur la milice). Fait cependant défaut au dossier la preuve de la reconnaissance du statut d’objecteur de conscience et la cour relève qu’une mission à l’étranger exécutée en vertu de l’article 16 ne rejoint pas la condition de l’arrêté royal du 22 décembre 1967 en vertu duquel il n’y a assimilation que pour les périodes accomplies au service de l’armée belge ou comme objecteur de conscience.

En outre, la mission à l’étranger ne peut davantage faire l’objet d’une assimilation à une période de service militaire, la période de 180 jours exigée par la loi ne prenant cours qu’à la fin de ce service militaire.

La cour relève encore que le milicien ou l’objecteur de conscience n’ont droit qu’à une solde pendant la période de service militaire ou d’affectation à une tâche d’utilité publique, au contraire du bénéficiaire de l’exemption de l’article 16, qui exerce une activité professionnelle lui permettant par ailleurs d’être valorisée dans le cadre d’une pension.

La cour va dès lors conclure qu’il ne peut y avoir assimilation à une période d’activité indépendante et que le point de départ du délai de 180 jours dans lequel l’activité doit avoir été entamée ne peut être reporté du fait de l’exemption prévue par les lois coordonnées sur la milice.

La cour relève encore que la période d’exemption du service militaire a pris fin en novembre 1976 et que, même à supposer que l’on doive admettre l’assimilation, le délai de 180 jours était dépassé, la fin de la période en cause datant de novembre 1976 et le début de l’activité indépendante remontant à octobre 1977.

En conclusion, ni la période d’études ni la période d’exemption de l’article 16 ne sont assimilables à une période d’activité.

Intérêt de la décision

Dans ce bref arrêt la Cour du travail de Bruxelles est amenée à rappeler les conditions d’assimilation des périodes de service militaire ainsi que des périodes d’études dans le cadre de la carrière ouvrant le droit à une pension dans le cadre du statut social des travailleurs indépendants.

Ce petit rappel est particulièrement utile pour ceux qui ont entrepris leur carrière avec des missions à l’étranger dans le cadre de la coopération au développement.


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