Terralaboris asbl

Agence flamande pour les Personnes handicapées : handicap et affection psychiatrique

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 3 septembre 2012, R.G. 2011/AB/944

Mis en ligne le mardi 26 février 2013


Cour du travail de Bruxelles, 3 septembre 2012, R.G. n° 2011/AB/944

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 3 septembre 2012, la Cour du travail de Bruxelles, statuant dans le cadre du décret du Conseil flamand du 27 juin 1990, rappelle que la notion de handicap inclut également les affections psychiatriques.

Les faits

Un administrateur provisoire est désigné par le juge de paix de Louvain, pour une personne souffrant d’un handicap mental, qui présente de graves problèmes de comportement, d’impulsivité, d’agressivité, etc.

Il introduit une demande auprès de l’Agence flamande pour les Personnes handicapées aux fins d’obtenir un budget d’assistance personnelle. Cette demande fait l’objet d’un refus et un recours est introduit devant le Tribunal du travail de Louvain, demandant d’annuler la décision de la commission d’experts de l’Agence.

La décision du tribunal

Le tribunal fait droit à la demande en son principe et renvoie la question à l’Agence afin qu’elle reprenne une décision en ce qui concerne la demande. Celle-ci interjette appel devant la cour du travail de Bruxelles.

La position de la cour

La cour constate que la décision de l’Agence de ne pas allouer à l’intéressé une intervention est fondée « sur son handicap ». La cour constate qu’il ressort de l’acte d’appel que l’Agence fait valoir par là, sur pied de l’article 6 du décret du 27 juin 1990 portant création d’un Fonds flamand pour l’intégration sociale des personnes handicapées, que sont visées les personnes ayant une affection psychiatrique pour ce qui est de la mise à l’embauche, mais pas les soins de santé, pour lesquels elles doivent se reporter au secteur « soins de santé ». Pour l’Agence, celle-ci ne dispose, pour ce qui est des patients présentant une pathologie psychiatrique, que d’une compétence résiduaire.

La cour constate que l’intéressé tombe incontestablement dans le champ d’application du décret, son article 2 visant le handicap, qu’il définit comme une limitation importante et de longue durée des chances d’intégration sociale suite à l’atteinte des capacités mentales, psychiques, corporelles ou sensorielles. L’Agence renvoyant aux travaux parlementaires pour faire valoir que les patients présentant une pathologie psychiatrique doivent être exclus du champ d’application de celui-ci, la cour rappelle qu’en cas de présence d’un texte clair et sans ambiguïté, les travaux préparatoires ne peuvent lui être opposés. Or, en l’espèce, tel est le cas.

La cour examine le décret du 27 juin 1990 et notamment les missions de l’Agence (article 6). Si celui-ci entend renvoyer l’intéressé vers un autre secteur, la cour considère qu’il y a lieu d’identifier ce secteur. L’Agence ne peut, pour la cour, soutenir qu’il existe de nombreuses dispositions permettant d’aider l’intéressé, ou des « projets pilotes »,… La décision de ne pas prendre l’intéressé en charge n’a aucun fondement et la cour annule dès lors la décision.

Elle constate cependant que celle-ci relève de la compétence discrétionnaire de l’Agence et qu’en vertu de la jurisprudence de la Cour de cassation (la cour renvoyant notamment à Cass., 17 décembre 2001, J.T.T., 2002, p. 17 et conclusions du Premier Avocat général LECLERCQ), dans une telle hypothèse, le juge peut annuler la décision s’il en constate l’illégalité, mais il ne peut se substituer à l’administration et en prendre une nouvelle. La cour rappelle le caractère limité de la compétence des cours et tribunaux et renvoie encore à la doctrine de Madame DELANGE à cet égard (M. DELANGE, « Les pouvoirs du juge dans le droit de la sécurité sociale », C.U.P., Université de Liège 202, p. 83). Le contrôle judiciaire porte à la fois sur la légalité externe et la légalité interne de la décision. Il ne peut s’agir cependant d’un contrôle d’opportunité, le juge n’ayant qu’un pouvoir de contrôle marginal de la décision : c’est l’appréciation du manifestement déraisonnable. Sur ces questions, la cour renvoie encore à une importante doctrine.

Le concluant renvoie le dossier à l’administration, afin que, dans le cadre de ses compétences et tenant compte de la décision judiciaire, une nouvelle décision administrative soit prise.

Intérêt de la décision

Cette affaire porte sur le décret du 27 juin 1990, abrogé par celui du 7 mai 2004 (décret portant création de l’Agence autonomisée interne dotée de la personnalité juridique « Vlaams Agentschap voor Personen met een Handicap » (Agence flamande pour les Personnes handicapées) (M.B., 11 juin 2004). Celui-ci prévoit, comme le précédent, la possibilité pour les personnes handicapées ou pour leur représentant légal remplissant les conditions légales de recevoir un soutien. En ce qui concerne les allocations pouvant être perçues par la personne handicapée, celle-ci exigent que n’ait pas déjà été perçu en vertu d’autres lois, décrets (excepté le décret portant organisation de l’assurance « soins de santé »), ordonnances ou dispositions réglementaires, ou en vertu du droit commun, une indemnité pour le même dommage et sur la base du même dommage. En ce qui concerne le budget d’assistance personnelle, il s’agit du budget alloué soit à la personne handicapée, soit à son représentant légal pour les prises en charge globale ou partielle des frais d’assistance personnelle et de son organisation. Une allocation peut être allouée à cet égard (article 18 du décret).

Dans cet arrêt, la cour rappelle par ailleurs les limites du contrôle judiciaire en cas de compétence discrétionnaire de l’administration.


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