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Contrôle de la recherche active d’emploi : portée de l’Accord de coopération entre l’Etat, les Communautés et les Régions du 30 avril 2004

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 10 mai 2012, R.G. 2011/AB/539

Mis en ligne le jeudi 6 décembre 2012


Cour du travail de Bruxelles, 10 mai 2012, R.G. n° 2011/AB/539

Terra Laboris asbl

Dans un arrêt du 10 mai 2012, la Cour du travail de Bruxelles rappelle la portée de l’Accord de coopération du 30 avril 2004, entre l’Etat, les Communautés et les Régions relatif à l’accompagnement et au suivi actifs des chômeurs : cet Accord vise essentiellement des engagements des diverses autorités, en ce qui concerne les actions d’accompagnement des chômeurs, ainsi que l’échange de données entre institutions.

Les faits

Une dame C., née en 1974 et au chômage depuis l’année 2002 est invitée, dans le courant de l’année 2006, à suivre une procédure d’activation dans le cadre de ses recherches d’emploi. Une nouvelle procédure est entamée en 2009 et, lors du premier entretien d’évaluation, il est acquis qu’elle a fourni des efforts insuffisants, dans les douze mois précédant l’entretien, afin de s’intégrer sur le marché du travail.

Un contrat lui est proposé, contenant un ensemble d’engagements précis. Lors de la deuxième évaluation, il est constaté qu’elle a satisfait à ses engagements et la procédure est arrêtée. Entretemps, elle est appelée par le VDAB, qui propose une convention d’accompagnement, qu’elle refuse de signer au motif que les engagements y repris (inscription auprès de divers bureaux d’intérim) ne lui permettraient d’obtenir que des emplois de nature précaire. Elle précise qu’elle recherche un travail dans le secteur de la mode et qu’elle ne veut pas hypothéquer ses chances à cet égard, par un emploi dans un autre secteur.

L’ONEm est informé de ce refus et auditionne l’intéressée ? qui explique ses motifs (obligation de suivre un cours de néerlandais, qui imposerait des contraintes de trajet importantes, …). Elle fait alors l’objet d’une exclusion pour une durée indéterminée en application de l’article 52bis § 2, alinéa 1er, 3° de l’arrêté royal. La sanction précise qu’elle ne deviendrait effective qu’après une période de 13 semaines.

Un recours est introduit devant le Tribunal du travail de Bruxelles, qui déboute l’intéressée par jugement du 9 mai 2011.

Position de parties en appel

L’intéressée se fonde sur l’Accord de coopération entre l’Etat, les Communautés et les Régions, concernant le plan d’accompagnement des chômeurs. Elle vise celui daté du 3 mai 1999 et considère que la convention qui lui a été proposée ne respecte pas les objectifs fixés dans cet accord, étant qu’il n’est pas tenu compte de ses qualifications précises et que les exigences mises seraient stéréotypées, ne respectant nullement les conditions d’individualisation du programme d’action.

Elle demande à titre subsidiaire une diminution de la sanction ou l’octroi d’un sursis total ou partiel (article 53bis) ou encore le remplacement de la sanction par un avertissement. Elle fait valoir qu’elle a été induite en erreur par le temps passé entre les diverses étapes de la procédure d’activation et qu’il a été établi au cours de celle-ci qu’elle avait fourni suffisamment d’efforts.

L’ONEm demande la confirmation du jugement.

Décision de la cour du travail

La cour reprend les dispositions réglementaires applicables, étant les articles 44, 51 et 52bis de l’arrêté royal.

Elle précise que c’est à tort que l’intéressée se réfère à l’Accord de coopération du 3 mai 1999, d’autant que ce texte a été modifié à plusieurs reprises et que sa dernière mouture date du 30 avril 2004. La cour examine la portée des engagements contenus dans cet Accord, étant que les diverses entités se sont engagées à entreprendre des initiatives en vue de la formation des chômeurs et que celles-ci se situent essentiellement sur le plan financier ainsi qu’en matière d’échange de données. Cet Accord définit dès lors les obligations à charge des autorités mais ne renferme pas de droits individuels permettant au chômeur de refuser un plan d’accompagnement au motif qu’il ne correspondrait pas aux objectifs qui y sont contenus. Il faut dès lors se retourner essentiellement vers les dispositions de l’arrêté royal. Il est acquis que l’intéressée a refusé de signer le contrat proposé et peut dès lors faire l’objet d’une exclusion des allocations. La cour précise que l’exclusion vaut pour une durée indéterminée et non pour une période indéterminée, ce qui implique l’obligation d’effectuer un nouveau stage avec des prestations de travail effectives avant de pouvoir prétendre de nouveau aux allocations. Il s’agit certes, selon ses termes, d’une sanction sévère mais c’est un choix législatif qui lie aussi bien l’ONEm que les juridictions.

La cour précise qu’une exception à cette exclusion réside dans l’article 52bis, § 1er, 2e alinéa, 3° mais qu’elle ne vise pas la présente hypothèse, étant relative à la situation du chômeur qui ne se présente pas auprès des services de contrôle ou à une formation professionnelle. Le législateur a entendu réserver à cette situation un sort distinct.

En ce qui concerne l’avertissement, la cour considère ne pouvoir limiter la sanction de la sorte, au motif de la longue durée de chômage (6 ans) et précise que le choix de l’intéressée (orientation dans le secteur de la mode) ne peut avoir pour effet de limiter ses efforts à ce seul secteur ou, encore, de la dispenser de s’inscrire dans des bureaux d’intérim.

Enfin, en ce qui concerne la procédure d’activation, la cour considère qu’elle s’est déroulée normalement et conclut eu égard aux éléments de l’espèce que l’intéressée n’était pas disposée, effectivement, à s’intégrer, le travail intérimaire servant souvent de levier pour l’obtention d’un emploi stable.

Le jugement est dès lors confirmé.

Intérêt de la décision

Cet arrêt examine, à l’occasion d’une sanction infligée dans le cadre du contrôle de la recherche active d’emploi, l’Accord de coopération entre autorités fédérale, communautaires et régionales.

Il en définit la portée, étant qu’un chômeur ne peut y puiser de droit subjectif mais qu’il s’agit d’engagements liant les autorités, engagements pris en vue d’une meilleure coopération.

Quant à la sanction applicable à la situation tranchée, la cour rappelle qu’elle est sévère, étant l’exclusion pour une durée indéterminée, sanction qui implique l’obligation de refaire un stage.


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