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Chômage : qu’entend-on par chômeur complet ?

Commentaire de C. trav. Bruxelles, 7 septembre 2011, R.G. 2006/AB/48.372

Mis en ligne le mardi 14 février 2012


Cour du travail de Bruxelles, 7 septembre 2011, R.G. 2006/AB/48.372

Dans un arrêt du 7 septembre 2011, la Cour du travail de Bruxelles rappelle ce qu’il faut entendre par chômeur complet : c’est le chômeur qui n’est pas lié par un contrat de travail et bénéficie totalement ou partiellement d’allocations de chômage. Cette notion s’oppose à celle de chômeur temporaire.

Les faits

Un ouvrier bénéficie d’allocations de chômage. Il signe un contrat de travail à temps partiel (activité de chauffeur de taxi) pour 13 heures par semaine.

Il est ainsi occupé à raison de 2 jours par semaine, et ce pendant près de 4 mois.

L’ONEm prend une décision administrative d’exclusion pour la période correspondante, décision assortie de la récupération des allocations, ainsi que d’une sanction d’exclusion pour 12 semaines, au motif qu’il aurait omis, avant le début d’une activité incompatible avec le droit aux allocations, de biffer sa carte de pointage.

La décision du tribunal

Sous recours de l’intéressé, le tribunal du travail confirme, par jugement du 1er février 2006, l’exclusion pour la période concernée, mais limite la récupération à 2 jours d’allocations par semaine. Il assortit par ailleurs la sanction d’exclusion d’un sursis partiel pour 4 semaines.

Position des parties devant la cour

L’ONEm, appelant, demande la confirmation de la décision administrative en toutes ses dispositions.

Pour l’ONEm, dès lors que l’intéressé avait signé un contrat de travail à temps partiel, il ne pouvait plus être indemnisé comme chômeur complet, mais ne pouvait percevoir que des allocations de chômage comme chômeur à temps partiel avec maintien des droits, éventuellement avec octroi d’une allocation de garantie de revenus pour les heures habituelles d’inactivité. Pour l’ONEm, c’est dès lors l’ensemble des allocations de chômage qui doit être remboursée.

L’intimé sollicite la confirmation du jugement sur la limitation de la récupération. Il demande par ailleurs, sur la sanction, qu’elle soit ramenée au minimum légal et qu’elle soit assortie d’un sursis.

La décision de la cour

La cour du travail précise d’emblée ne pouvoir suivre la décision de l’ONEm, et ce eu égard au libellé de l’article 2, § 1er de l’arrêté royal du 25 novembre 1991.

Celui-ci considère en effet qu’il faut entendre par chômeur complet : (i) le chômeur qui n’est pas lié par un contrat de travail et (ii) le travailleur à temps partiel (visé à l’article 29) pour les heures pendant lesquelles il ne travaille pas habituellement. Par contre, la même disposition définit le chômeur temporaire comme étant : (i) le chômeur lié par un contrat de travail dont l’exécution est temporairement soit totalement soit partiellement suspendue, (ii)…

Est ainsi chômeur complet non seulement celui qui n’est pas lié par un contrat de travail, mais aussi le travailleur à temps partiel visé à l’article 29 de l’arrêté royal pour les heures pendant lesquelles il ne travaille pas habituellement.

La thèse de l’ONEm ne peut donc être suivie : l’article 29 ne vise pas que les travailleurs à temps partiel avec maintien des droits, mais également (§ 4) les travailleurs à temps partiel qui n’ont pas ce statut.

Pour la cour, la notion de chômeur complet doit s’analyser eu égard aux définitions données à l’article 27, la notion de chômeur complet s’opposant à celle de chômeur temporaire, à savoir le chômeur lié par un contrat de travail dont l’exécution est temporairement, soit totalement, soit partiellement, suspendue. En l’occurrence, l’intéressé n’a pas la qualité de chômeur temporaire, n’ayant jamais sollicité le bénéfice des allocations de chômage pour des heures de suspension du contrat de travail. Il pouvait dès lors continuer à être indemnisé en tant que chômeur complet.

La cour précise en outre qu’il paraît utile de constater, à la lecture des articles 44, 45 et 71 de l’arrêté royal qu’il n’y a pas de distinction à faire, parmi les chômeurs complets qui exécutent des prestations en les mentionnant sur leur carte de contrôle, entre ceux qui travaillent avec un contrat de travail écrit et sans contrat de travail. En l’occurrence, si le régime d’indemnisation des travailleurs à temps partiel avec maintien des droits tient compte d’une manière plus neutre de la répartition du temps de travail sur les différents jours de la semaine, ceci n’a pas pour effet de rendre ce régime d’indemnisation obligatoire, non plus que d’interdire à un chômeur complet occupé dans le cadre d’un contrat de travail à temps partiel écrit d’utiliser un formulaire C3A et de biffer sur sa carte de pointage les journées d’occupation.

Pour la cour, qui suit l’avis du Ministère public, l’ONEm ne peut, pour étayer sa position, faire état d’un système de travail à temps partiel « parallèle » risquant d’entraîner des avantages indus : ce faisant, il fait une distinction qui ne figure pas dans la réglementation.

En conséquence, l’intéressé pouvait continuer à être indemnisé comme chômeur complet. Dès lors qu’il n’est pas contesté que l’occupation n’a pas eu lieu en dehors des 2 jours par semaine prévus par le contrat de travail, la cour confirme le jugement du tribunal, qui a conclu que les 2 jours d’occupation étaient prouvés et a limité la récupération à ceux-ci.

La cour relève encore la légalité de l’occupation en cause, ayant fait l’objet d’une déclaration Dimona. Elle s’appuie sur cet élément pour faire droit à la demande de l’intimé de voir réduire la sanction au minimum légal, avec sursis.

Intérêt de la décision

La Cour du travail de Bruxelles rappelle ici que, contrairement à ce que soutient l’ONEm, la notion de chômeur complet ne s’oppose pas à celle de chômeur à temps partiel avec maintien des droits, mais à celle de chômeur temporaire.


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